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13/10/2011 | FRANCE | N°10NC01931

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 13 octobre 2011, 10NC01931


Vu la requête, enregistrée le 15 décembre 2010, présentée pour LA POSTE, par la SELARL d'avocats Pelletier Freyhuber et associés ;

LA POSTE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000670 du 9 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 22 mars 2010 prononçant le licenciement de Mme A et lui a enjoint de réintégrer l'intéressée ;

2°) de rejeter la requête de première instance de Mme A ;

3°) de mettre à la charge de Mme A la somme de 3 000 euros à lui verser au titre des dispositi

ons de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugem...

Vu la requête, enregistrée le 15 décembre 2010, présentée pour LA POSTE, par la SELARL d'avocats Pelletier Freyhuber et associés ;

LA POSTE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000670 du 9 novembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 22 mars 2010 prononçant le licenciement de Mme A et lui a enjoint de réintégrer l'intéressée ;

2°) de rejeter la requête de première instance de Mme A ;

3°) de mettre à la charge de Mme A la somme de 3 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier : les premiers juges ont annulé la décision litigieuse en accueillant un moyen qui n'avait pas été soulevé par la requérante, sans informer les parties de ce qu'ils étaient susceptibles de se fonder sur un moyen soulevé d'office ; en outre, le tribunal a sciemment ignoré les pièces démontrant qu'il n'y avait pas de poste vacant à Bar-sur-Seine ;

- les premiers juges ont donné une interprétation erronée de l'article 27 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986, en imposant à l'administration une obligation qui n'est pas posée par ce texte ;

- l'avis du comité médical est communiqué sur demande de l'intéressé, et Mme A n'établit pas avoir demandé la communication de l'avis du 17 juin 2009 ;

- Mme A était informée de la possibilité pour elle de fournir des certificats médicaux susceptibles de modifier sa situation ; elle a d'ailleurs fait usage de cette possibilité ;

- le code du travail n'étant pas applicable, l'entretien préalable n'était pas obligatoire ;

- en l'absence de mutation, LA POSTE n'était pas tenue de saisir préalablement la commission administrative paritaire pour proposer les 3 poste offerts à l'intéressée ; la CAP a donné son avis le 4 mars 2010 avant le licenciement, comme l'exige l'article 27 du décret de 1986 ;

- le licenciement est fondé sur l'article 27 du décret du 14 mars 1986 ;

- les trois postes proposés ne prévoient pas de conduite quotidienne durant le service et respectent ainsi les prescriptions du médecin de prévention, lesquelles n'interdisaient pas la conduite entre le domicile et le lieu de travail ;

- il n'incombe pas à LA POSTE de se justifier quant aux vacances d'emploi ; en tout état de cause, aucun poste n'était vacant à Bar-sur-Seine ;

- Mme A ne pouvait prétendre à aucune réintégration ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 23 mars et 15 septembre 2011, et les pièces complémentaires, enregistrées les 22 juin et 15 septembre 2011, présentés pour Mme Martine A, demeurant 24 ..., par la SCP d'avocats Colomes-Mathieu, qui conclut au rejet de la requête de LA POSTE et à ce que soit mise à la charge de LA POSTE une somme de 2 500 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés :

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

Vu le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 septembre 2011 :

- le rapport de M. Favret, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Dulmet, rapporteur public,

- et les observations de Me Colomés, avocat de Mme A ;

Considérant que Mme A, agent titulaire de LA POSTE exerçant des fonctions de chef d'équipe, a été placée en 2004 en congé de longue maladie pour le traitement d'un cancer ,puis a demandé sa réintégration à l'issue d'une période de congé de maladie ordinaire ayant débuté en octobre 2008 ; qu'elle a refusé au cours des mois d'octobre et de novembre 2009 un premier poste de chef d'équipe à Nogent-sur-Seine, commune distante de 87 km de son domicile, puis un deuxième poste à Aix-en-Othe, commune distante de 60 km de son domicile, et, enfin, un troisième poste à Vouziers, commune éloignée de 190 km de son domicile, au motif que son état de santé lui interdisait de conduire sur de longues distances et qu'il existait un poste vacant à Bar-sur-Seine, commune proche de son domicile ; que par décision en date du 22 mars 2010, le directeur de la direction opérationnelle territoriale courrier (DOTC) Meuse-Champagne-Ardenne a prononcé le licenciement de Mme A pour refus de postes sans motif justifié lié à son état de santé ; que par jugement en date du 9 novembre 2010, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 22 mars 2010 et a enjoint à LA POSTE de réintégrer l'intéressée ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, que, si LA POSTE soutient que les premiers juges ont annulé la décision en date du 22 mars 2010 prononçant le licenciement de Mme A, en accueillant un moyen qui n'avait pas été soulevé par la requérante, et ce sans informer les parties de ce qu'ils étaient susceptibles de se fonder sur un moyen soulevé d'office, il ressort de la lecture de la requête introductive d'instance que Mme A avait expressément soulevé devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne les moyens tirés de ce que les trois postes qui lui avaient été proposés à l'expiration de son congé de maladie ne tenaient pas compte de sa situation particulière, eu égard à la longueur du temps de conduite en automobile que nécessitaient ces affectations, et de ce que la décision litigieuse ne faisait état d'aucun motif tiré de l'intérêt du service ; que, dès lors, en annulant la décision attaquée au motif que LA POSTE ne s'était pas justifiée sur les circonstances précises qui, au regard de l'intérêt du service, mais également en considération de la situation particulière de l'agent concerné pouvaient expliquer le choix fait en l'espèce de fixer, avec prise de fonctions quasi-immédiate, la nouvelle affectation de Mme A en des sites aussi éloignés que Nogent-sur-Seine, Aix-en-Othe ou Vouziers... , le tribunal administratif n'a pas soulevé un moyen d'office, mais s'est borné à faire droit au moyen soulevé par l'intéressée;

Considérant, en second lieu, qu'il ne ressort pas de la lecture du jugement attaqué que les premiers juges auraient, ainsi que le soutient l'appelante, sciemment ignoré les pièces, démontrant qu'il n'y avait pas de poste vacant à Bar-sur-Aube ; qu'à cet égard, en soulignant que les allégations de LA POSTE selon lesquelles aucun poste de chef d'équipe n'était vacant à Bar-sur-Seine ne suffisent pas à attester de l'impossibilité de proposer à l'intéressée un poste vacant en un autre lieu situé à une distance raisonnable de son, domicile, les premiers juges n'ont pas entendu affirmer qu'elle n'apportait pas la preuve de l'absence de poste vacant à Bar-sur-Seine ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de l'irrégularité du jugement doivent être écartés ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article 27 du décret n° 86-442 du 14 mars 1986, modifié, relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires : Lorsqu'un fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical compétent. En cas d'avis défavorable, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit (...) admis à la retraite après avis de la commission de réforme (...) Le fonctionnaire qui, à l'expiration de son congé de maladie, refuse sans motif valable lié à son état de santé le ou les postes qui lui sont proposés peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire ;

Considérant que, pour demander l'annulation du jugement qu'elle attaque, LA POSTE soutient que le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a commis une erreur de droit et méconnu la portée de l'article 27 précité, en imposant à l'administration une obligation qui ne résulte pas de ce texte ; que, toutefois, c'est à bon droit que le tribunal a annulé la décision litigieuse en date du 22 mars 2010 au seul motif, rappelé ci-dessus, que LA POSTE ne s'était pas justifiée sur les circonstances précises qui, au regard de l'intérêt du service, mais également en considération de la situation particulière de l'agent concerné pouvaient expliquer le choix fait en l'espèce de fixer, avec prise de fonctions quasi-immédiate, la nouvelle affectation de Mme A en des sites aussi éloignés que Nogent-sur-Seine, Aix-en-Othe ou Vouziers , alors que les avis du médecin de prévention en date des 8 avril et du 22 mai 2008 précisaient qu'il convenait de réduire au maximum le trajet domicile-travail de Mme A, que le certificat du médecin traitant de l'intéressée en date du 21 juin 2007 précisait qu'elle ne pouvait pas conduire plus de quelques kilomètres en voiture, et que le certificat en date du 5 octobre 2009 du cancérologue de Mme A indiquait qu'elle était dans l'impossibilité de conduire souvent ;qu'en admettant même qu'il soit établi qu'aucun emploi de chef d'équipe n'était vacant à Bar-sur-Seine à la date à laquelle Mme A a fait part de son intention de reprendre son travail, LA POSTE ne prouve pas davantage en appel que tout autre poste correspondant à ses capacités physiques et à sa situation statutaire et se trouvant à une distance raisonnable de son domicile n'aurait pu lui être proposé, comme l'ont affirmé à juste titre les premiers juges ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que LA POSTE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 22 mars 2010 prononçant le licenciement de Mme A et a enjoint à La POSTE de réintégrer l'intéressée ;

Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que LA POSTE demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de LA POSTE une somme de 1 500 euros à verser à Mme A au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de LA POSTE est rejetée.

Article 2 : LA POSTE versera à Mme A une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à LA POSTE et à Mme Martine A.

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10NC01931


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10NC01931
Date de la décision : 13/10/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Affectation et mutation - Affectation.

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés - Congés de maladie.

Postes et communications électroniques - Postes - Personnel de la Poste.


Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Jean-Marc FAVRET
Rapporteur public ?: Mme DULMET
Avocat(s) : SCP COLOMES - MATHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2011-10-13;10nc01931 ?
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