La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/09/2011 | FRANCE | N°11NC00807

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, Président de la cour, 29 septembre 2011, 11NC00807


Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2011, présentée pour M. Murat A, demeurant ..., par Me Dollé ; M. A demande à la Cour ;

1°) d'annuler le jugement n° 1100825 en date du 21 février 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Moselle en date du 16 février 2011 ordonnant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 16 février 2011 par lequel le préfet de la Moselle a décidé sa reco

nduite à la frontière et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de...

Vu la requête, enregistrée le 18 mai 2011, présentée pour M. Murat A, demeurant ..., par Me Dollé ; M. A demande à la Cour ;

1°) d'annuler le jugement n° 1100825 en date du 21 février 2011 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Moselle en date du 16 février 2011 ordonnant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 16 février 2011 par lequel le préfet de la Moselle a décidé sa reconduite à la frontière et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour et subsidiairement, de réexaminer sa situation dans un délai déterminé, au besoin sous astreinte;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1200 euros à verser à son conseil, Me Dollé, au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

M. MURAT soutient que :

- les déclarations de l'intéressé ne peuvent être retenues compte tenu du caractère irrégulier de la garde à vue ;

- la décision de reconduite à la frontière méconnaît les dispositions de l'article L. 511-4-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que son état de santé nécessite une prise en charge médicale, dont il bénéficie depuis son arrivée en France et dont le défaut aurait pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité,

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision attaquée est contraire à l'article 7 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier dès lors qu'il ne prévoit pas de délai de départ volontaire ;

- la décision porte une atteinte grave et manifestement illégale à sa liberté d'aller et venir ;

- l'arrêté attaqué est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences qu'il emporte sur sa situation personnelle ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu, en date du 7 avril 2011, la décision du président du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Nancy, admettant M. A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables aux Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 septembre 2011:

- le rapport de M. Giltard, président de la Cour,

- et les conclusions de M. Féral, rapporteur public ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier : 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les États membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les États membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. / Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. / 2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux. / 3. Certaines obligations visant à éviter le risque de fuite, comme les obligations de se présenter régulièrement aux autorités, de déposer une garantie financière adéquate, de remettre des documents ou de demeurer en un lieu déterminé, peuvent être imposées pendant le délai de départ volontaire. / 4. S'il existe un risque de fuite, ou si une demande de séjour régulier a été rejetée comme étant manifestement non fondée ou frauduleuse, ou si la personne concernée constitue un danger pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sécurité nationale, les États membres peuvent s'abstenir d'accorder un délai de départ volontaire ou peuvent accorder un délai inférieur à sept jours ; que aux termes de l'article 8 de la même directive 1. Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour exécuter la décision de retour si aucun délai n'a été accordé pour un départ volontaire conformément à l'article 7, paragraphe 4, ou si l'obligation de retour n'a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l'article 7. / 2. Si un État membre a accordé un délai de départ volontaire conformément à l'article 7, la décision de retour ne peut être exécutée qu'après expiration de ce délai, à moins que, au cours de celui-ci, un risque visé à l'article 7, paragraphe 4, apparaisse. / 3. Les États membres peuvent adopter une décision ou un acte distinct de nature administrative ou judiciaire ordonnant l'éloignement (...) ;

Considérant que les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, en ce qu'elles n'imposent pas qu'une mesure de reconduite à la frontière soit assortie d'un délai approprié pour le départ volontaire d'un ressortissant de pays tiers dans des cas autres que ceux prévus à l'article 7, paragraphe 4, de la directive, sont incompatibles avec les objectifs de ses articles 7 et 8 ; que les dispositions de la directive ne font toutefois pas obstacle à ce qu'une mesure de reconduite à la frontière soit prise à l'encontre d'un ressortissant de pays tiers dans les cas prévus aux 1°, 2° et 4° du II de l'article L. 511-1, dès lors que cette mesure est assortie d'un délai de retour approprié à la situation de l'intéressé et supérieur à sept jours ;

Considérant que les articles 7 et 8 de la directive, qui n'a pas été transposée par la France dans le délai imparti, expiré le 24 décembre 2010, énoncent des obligations inconditionnelles et suffisamment précises pouvant être invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir contre un acte administratif non réglementaire ;

Considérant que l'arrêté en date du 16 février 2011 par lequel le préfet de la Moselle a ordonné la reconduite à la frontière de M. A sur le fondement du 1° du II de l'article L.511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne lui accorde aucun délai de départ volontaire ; que cette décision méconnaît les dispositions inconditionnelles et suffisamment précises des articles 7 et 8 de la directive du 16 décembre 2008 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est fondé à soutenir, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 16 février 2011 par lequel le préfet de la Moselle a décidé sa reconduite à la frontière et fixé le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent jugement, qui annule les décisions en date du 17 février 2011, implique qu'il soit enjoint au préfet de la Moselle de délivrer à Mlle M. A l'autorisation provisoire de séjour à laquelle il a droit en vertu de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de réexaminer sa situation au regard de son droit au titre de séjour au vu des circonstances de droit et de fait existant à la date de ce réexamen, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loin du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique:

Considérant que, par décision du 7 avril 2011, le président du bureau d'aide juridictionnelle a admis M. A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce , sous réserve que Me Dollé, avocat de M. A, renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et sous réserve de l'admission définitive de son client à l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1000 euros à Me Dollé au titre des frais non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 21 février 2011 est annulé, ensemble l'arrêté du 16 février 2011 par lequel le préfet de la Moselle décide la reconduite à la frontière de M. A et fixe le pays de destination.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Moselle de délivrer à M. A une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation au regard de son droit au titre de séjour au vu des circonstances de droit et de fait existant à la date de ce réexamen, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : L'Etat versera à Me Dollé la somme de 1 000 (mille euros) en application des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me Dollé renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle ;

Article 4 : Le présent jugement sera notifié à M. Murat A, au préfet de la Moselle et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriale et de l'immigration.

''

''

''

''

2

N°11NC00807


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : Président de la cour
Numéro d'arrêt : 11NC00807
Date de la décision : 29/09/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. le Prés Daniel GILTARD Rapporteur
Rapporteur public ?: M. FERAL
Avocat(s) : DOLLÉ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2011-09-29;11nc00807 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award