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04/07/2011 | FRANCE | N°10NC00758

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 04 juillet 2011, 10NC00758


Vu la requête, enregistrée le 21 mai 2010, présentée pour Mme Saliha A, demeurant ..., par Me Berry; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000159 du 22 avril 2010 par lequel le Tribunal Administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 1er décembre 2009 par laquelle le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son certificat de résident en qualité de conjoint de français et lui faisant obligation de quitter le territoire en fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir l'arr

té du 1er décembre 2009 ;

3°) d'enjoindre au Préfet du Bas Rhin de lui déliv...

Vu la requête, enregistrée le 21 mai 2010, présentée pour Mme Saliha A, demeurant ..., par Me Berry; Mme A demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000159 du 22 avril 2010 par lequel le Tribunal Administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 1er décembre 2009 par laquelle le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son certificat de résident en qualité de conjoint de français et lui faisant obligation de quitter le territoire en fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir l'arrêté du 1er décembre 2009 ;

3°) d'enjoindre au Préfet du Bas Rhin de lui délivrer un titre de séjour, ou une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de quinze jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir, ou subsidiairement de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Elle soutient que :

* s'agissant de la décision portant refus de lui délivrer un certificat de résidence :

- le signataire de la décision attaquée était incompétent, faute de disposer d'une délégation de signature régulièrement publiée ;

- la commission du titre de séjour aurait dû être saisie;

- ladite décision méconnaît les articles 6-2 et 7 bis a) de l'accord franco-algérien ;

- elle aurait du se voir délivrer un certificat de résidence valable dix ans dès l'année 2006 ;

- ladite décision méconnaît également les articles 6-5 de l'accord franco-algérien et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle aurait du bénéficier des dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui doivent s'appliquer également aux ressortissants algériens sous peine de méconnaitre les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

* S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire national, que :

- le signataire de la décision attaquée était incompétent, faute de disposer d'une délégation de signature régulièrement publiée ;

- l'illégalité de la décision refusant de lui délivrer un titre de séjour prive de base légale la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

- ladite décision méconnaît les articles 6-2 et 7 bis a) de l'accord franco-algérien ;

- ladite décision méconnaît également les articles 6-5 de l'accord franco-algérien et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

* S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi, que :

- le signataire de la décision attaquée était incompétent, faute de disposer d'une délégation de signature régulièrement publiée ;

- ladite décision méconnait les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 décembre 2010, présenté par le préfet du Bas-Rhin qui conclut au rejet de la requête au motif que les moyens invoqués ne sont pas fondés ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 17 septembre 2010, admettant Mme A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 juin 2011 :

- le rapport de M. Féral, conseiller,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, rapporteur public ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de délivrance d'un titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter les moyens, qui ne comportent aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée par Mme A devant le Tribunal administratif de Strasbourg, tirés de l'incompétence du signataire de la décision attaquée, du défaut de saisine de la commission du titre de séjour, de la méconnaissance des stipulations des articles 6-5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet du Bas-Rhin sur les conséquences de sa décision sur la situation personnelle de Mme A ;

Considérant, en deuxième lieu, que Mme A invoque, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision du préfet du Bas-Rhin refusant de lui délivrer, en 2006, un certificat de résidence algérien valable dix ans en application des stipulations de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien ; que, cependant, la décision, aujourd'hui attaquée, en date du 1er décembre 2009 rejetant la demande de Mme A de renouvellement de son certificat de résidence valable un an en qualité de conjoint de français n'a pas été prise en application de cette décision préfectorale de 2006 ; que, par suite, l'illégalité alléguée de la décision préfectorale de 2006 est sans influence sur la décision en date du 1er décembre 2009 ;

Considérant, en troisième lieu, que sous réserve de leur régularité internationale, notamment de leur conformité à la conception française de l'ordre public international et de l'absence de fraude, les jugements rendus par un tribunal étranger relativement à l'état et à la capacité des personnes produisent leurs effets en France indépendamment de toute déclaration d'exequatur, sauf dans la mesure où ils impliquent des actes d'exécution matérielle sur des biens ou de coercition sur des personnes ; que si Mme A conteste la régularité internationale du jugement de divorce qui a été prononcé en Algérie le 25 décembre 2007, elle se borne à soutenir que ce dernier aurait été prononcé à l'étranger à l'initiative de son époux ; que cette circonstance ne saurait en elle-même être regardée comme contraire à l'ordre public international alors que la requérante n'établit ni même n'allègue qu'elle n'aurait pas été invitée à comparaitre devant le tribunal algérien qui a prononcé le jugement de divorce ; que, par suite, le préfet du Bas-Rhin n'a pas commis d'erreur de droit en estimant qu'à la date de la décision attaquée Mme A n'était plus mariée à un ressortissant français ; qu'en tout état de cause Mme A n'établit pas que la vie commune avec son époux n'avait pas cessé à la date de la décision attaquée ; qu'ainsi, elle ne pouvait bénéficier d'un certificat de résidence valable dix ans sur le fondement des articles 6-2 et 7 bis de l'accord franco-algérien ;

Considérant, enfin, que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité ; qu'il suit de là que les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui sont relatives aux différents titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers en général et aux conditions de leur délivrance, ne sont, à l'exception de certaines dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers qui n'ont pas été écartées par une disposition contraire expresse contenue dans ledit accord, pas applicables aux ressortissants algériens, lesquels relèvent des règles fixées par ledit accord ; que, dans ces conditions Mme A n'est pas fondée à soutenir que le préfet du Bas-Rhin a commis une erreur de droit en ne se fondant pas sur les dispositions de l'article L. 313-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour lui délivrer un certificat de résidence ;

Considérant que Mme A soutient que l'application à sa situation des stipulations de l'accord franco-algérien est contraire aux stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que ledit accord ne reconnait pas un droit au séjour des conjoints victimes de violences conjugales ; que, toutefois, le principe de non discrimination édicté à l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne concerne que la jouissance des droits et libertés reconnus par cette convention et ses protocoles additionnels ; que, dès lors, il appartient au requérant qui entend se prévaloir de la violation de ce principe d'indiquer le droit ou la liberté dont la jouissance serait affectée par la discrimination alléguée ; que Mme A, qui ne précise pas le droit ou la liberté, reconnu par la convention, qui serait méconnu par la discrimination qu'elle invoque, ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 14 de cette convention ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter le moyen, qui ne comporte aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée par Mme A devant le Tribunal administratif de Strasbourg, tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations des articles 6-2, 7 bis et 6-5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commise le préfet du Bas-Rhin sur la situation personnelle de l'intéressée, qui reprennent ce qui a été précédemment développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que précédemment ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

Considérant, en premier lieu, qu'il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter le moyen, qui ne comporte aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée par Mme A devant le Tribunal administratif de Strasbourg, tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui reprend ce qui a été précédemment développé à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doit être écarté pour les mêmes motifs que précédemment ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 1er décembre 2009 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. et qu'aux termes de l'article L. 911-2 dudit code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ;

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de Mme A, n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions de la requérante tendant à ce que la Cour enjoigne au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour ou de réexaminer sa situation ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme de 1 500 euros que Me Berry, avocat de Mme A demande sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 au titre des frais qu'elle aurait exposés si elle n'avait pas bénéficié de l'aide juridictionnelle ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A et au ministre de l'intérieur, de l'outre mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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N° 10NC01425


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10NC00758
Date de la décision : 04/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: M. Rodolphe FERAL
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : BERRY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2011-07-04;10nc00758 ?
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