Vu la requête, enregistrée le 9 juillet 2010, présentée pour la SAS LABORATOIRES LEHNING, dont le siège est 3 rue du Petit Marais à Sainte Barbe (57640), par la SCP Baum et Compagnie ;
La SAS LABORATOIRES LEHNING demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0802045 du 11 mai 2010 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 27 mars 2008 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, d'une part, annulant la décision du 25 septembre 2007 de l'inspecteur du travail de la 3ème section de Metz qui avait autorisé le licenciement de M. A et, d'autre part, refusant d'autoriser ledit licenciement ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision en date du 27 mars 2008 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité ;
3°) de mettre à la charge de M. A une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- il n'existe pas de texte législatif ou réglementaire, ni de jurisprudence claire et établie permettant de refuser un licenciement pour insuffisance professionnelle au seul motif de l'absence de recherche de reclassement ;
- l'obligation de reclassement dans le cadre d'un licenciement pour insuffisance professionnelle est irréalisable ;
- en l'espèce, l'insuffisance professionnelle de M. A a été reconnue par le ministre du travail et il n'existait aucun poste équivalent disponible au sein de l'entreprise ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 février 2011, présenté pour M. A par Me Gobert, qui conclut au rejet de la requête et à mettre à la charge de la requérante une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- son employeur a refusé de procéder à sa réintégration ;
- la mission qui lui était confiée après sa réintégration à la suite de l'échec de la première tentative de licenciement était destinée à le mettre en difficulté ;
- c'est à tort que le ministre et les premiers juges ont admis que son insuffisance professionnelle était avérée ;
- l'inspecteur du travail a empiété sur la compétence du juge judiciaire en portant une appréciation sur le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement ;
- c'est à bon droit que l'autorité administrative a relevé que l'employeur n'avait pas exécuté l'obligation de reclassement avant d'engager la procédure de licenciement ;
Vu le mémoire en réplique, enregistré le 7 avril 2011, présentée pour la SAS LABORATOIRES LEHNING, tendant aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mai 2011 :
- le rapport de M. Trottier, président,
- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,
- et les observations de Me Fenni, pour la SCP Baum et Compagnie, avocat de la SAS LABORATOIRES LEHNING ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'en vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'insuffisance professionnelle, il appartient à l'inspecteur du travail, et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si ladite insuffisance est telle qu'elle justifie le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé, des caractéristiques de l'emploi exercé à la date à laquelle elle est constatée, des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont le salarié est investi, et de la possibilité d'assurer son reclassement dans l'entreprise ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande de licenciement de M. AX, délégué du personnel titulaire et membre de la délégation unique du personnel, qui exerçait les fonctions de directeur informatique de la SAS LABORATOIRES LEHNING, présentée à l'autorité administrative le 3 août 2007, était fondée expressément sur l'insuffisance professionnelle du salarié ; que, dans ces conditions, il appartenait à l'autorité administrative, eu égard aux règles rappelées ci-dessus, de vérifier que la requérante avait satisfait à l'obligation de rechercher la possibilité d'assurer le reclassement du salarié ; qu'il est constant que, préalablement au dépôt de sa demande d'autorisation de licenciement pour inaptitude professionnelle de M. A X, la SAS LABORATOIRES LEHNING n'a pas recherché si l'intéressé pouvait être affecté à une autre tâche ; qu'ainsi, la société requérante n'a pas satisfait à l'obligation susrappelée ; que, dans ces conditions, le ministre du travail pouvait, légalement et pour ce seul motif, annuler la décision de l'inspecteur du travail et refuser d'autoriser ledit licenciement sans que la société requérante puisse utilement soutenir qu'aucun poste de reclassement n'était en définitive disponible ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SAS LABORATOIRES LEHNING n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 27 mars 2008 du ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité annulant la décision du 25 septembre 2007 de l'inspecteur du travail de la 3ème section de Metz qui avait autorisé le licenciement de M. A ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que la SAS LABORATOIRES LEHNING demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu de mettre à la charge de la SAS LABORATOIRES LEHNING une somme de 1 000 euros au titre de ces dispositions ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SAS LABORATOIRES LEHNING est rejetée.
Article 2 : La SAS LABORATOIRES LEHNING versera à M. A une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS LABORATOIRES LEHNING, à M. André A et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
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N° 10NC01088