Vu la décision en date du 26 mars 2010, enregistrée au greffe de la Cour le 6 avril 2010, par laquelle le Conseil d'Etat a renvoyé devant la Cour administrative d'appel de Nancy, après annulation de l'ordonnance du 27 août 2008, la requête présentée par M. Jack A, demeurant ... ;
Vu la requête, enregistrée le 25 juin 2008 sous le n° 08NC00941 et complétée par un mémoire enregistré le 3 février 2011, présentée pour M. Jack A par Me Thibaut, avocat qui demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0600948 du 24 avril 2008 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne rejetant sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du préfet de la Haute-Marne du 26 novembre 2005 ordonnant son hospitalisation d'office et du 22 décembre 2005 prolongeant son hospitalisation pour trois mois ;
2°) d'annuler lesdites décisions ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- il n'a pas été en mesure de contacter le 25 novembre 2005 son conseil afin de pouvoir contester les mesures prises à son encontre par le maire de Chalindrey ;
- le certificat médical établi par le Dr Molli fondant l'arrêté du maire ne met en évidence aucun trouble de nature à constituer un danger imminent pour la sûreté des personnes et ne permettait pas à l'autorité administrative de prendre une mesure d'hospitalisation d'office à son encontre ;
- il a été maintenu abusivement en hospitalisation d'office par l'arrêté préfectoral du 30 décembre 2005 ;
Vu le jugement et les décisions attaqués ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 mars 2011, présenté par le préfet de la Haute-Marne qui conclut au rejet de la requête aucun moyen n'étant fondé ;
Vu la production, enregistrée le 7 avril 2011, présentée par M. Jack A ;
Vu la décision en date du 17 septembre 2010 du président du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Nancy (section administrative) accordant à M. A le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 avril 2011 :
- le rapport de M. Wallerich, premier conseiller,
- les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public,
- et les observations de M. le Bâtonnier Thibaut, avocat de M. A ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A a fait l'objet d'une hospitalisation d'office, prononcée par le préfet de la Haute Marne le 26 novembre 2005 après intervention d'un arrêté du maire de Chalindrey en date du 25 novembre 2005, et au vu du certificat médical établi le 25 novembre 2005 par le Dr Molli ; que cette hospitalisation a été prolongée pour trois mois par l'arrêté préfectoral du 22 décembre 2005 ;
Sur la légalité de l'arrêté du préfet de la Haute-Marne du 26 novembre 2005 prononçant l'hospitalisation d'office de M. A :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 3211-3 du code de la santé publique : Lorsqu'une personne atteinte de troubles mentaux est hospitalisée sans son consentement en application des dispositions des chapitres II et III du présent titre, les restrictions à l'exercice de ses libertés individuelles doivent être limitées à celles nécessitées par son état de santé et la mise en oeuvre de son traitement.(...) Elle doit être informée dès l'admission et par la suite, à sa demande, de sa situation juridique et de ses droits. En tout état de cause, elle dispose du droit : (...) 3º de prendre conseil d'un médecin ou d'un avocat de son choix ; Considérant qu'aux termes de l'article L. 3213-1 du même code : A Paris, le préfet de police et, dans les départements, les représentants de l'Etat prononcent par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié, l'hospitalisation d'office dans un établissement mentionné à l'article L. 3222.-1 des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public. (...) Les arrêtés préfectoraux sont motivés et énoncent avec précision les circonstances qui ont rendu l'hospitalisation nécessaire.(...) ; que l'article L. 3213-2 de ce code dispose : En cas de danger imminent pour la sûreté des personnes, attesté par un avis médical ou, à défaut, par la notoriété publique, le maire et, à Paris, les commissaires de police, arrêtent, à l'égard des personnes dont le comportement révèle des troubles mentaux manifestes, toutes les mesures provisoires nécessaires, à charge d'en référer dans les vingt-quatre heures au représentant de l'Etat dans le département qui statue sans délai et prononce, s'il y a lieu, un arrêté d'hospitalisation d'office dans les formes prévues à l'article L. 3213-1. Faute de décision du représentant de l'Etat, ces mesures provisoires sont caduques au terme d'une durée de quarante-huit heures ; que l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 dispose : Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; (...) ; qu'aux termes de l'article 3 de cette loi : La motivation (...) doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ;
Considérant, en premier lieu, que la mesure d'hospitalisation d'office provisoire que peut prendre un maire, en cas de danger imminent, en application de l'article L. 3213-2 du code de la santé publique, ne constitue pas un préalable nécessaire à l'intervention de l'arrêté préfectoral prévu à l'article L. 3213-1 du même code ; qu'il suit de là que la circonstance que l'arrêté du maire de Chalindrey serait intervenu à la suite d'une procédure irrégulière est sans influence sur la légalité de l'arrêté du préfet de la Haute-Marne du 26 novembre 2005 ordonnant l'hospitalisation d'office de M. A ;
Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 3213-1 du code de la santé publique et de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 que l'autorité administrative, lorsqu'elle prononce ou maintient l'hospitalisation d'office d'une personne, doit indiquer dans sa décision les éléments de droit et de fait qui justifient cette mesure ; que si elle peut satisfaire à cette
exigence de motivation en se référant au certificat médical circonstancié qui doit être nécessairement établi avant la décision préfectorale, c'est à la condition de s'en approprier le contenu et de joindre ce certificat à la décision ; qu'il ressort des pièces du dossier que le certificat médical établi le 25 novembre 2005 par le Dr Molli précise avoir constaté, après examen de M. A, des troubles, dont des menaces envers des membres de sa famille, liés à une affection mentale dont les manifestations compromettent la sureté et la sécurité des personnes ; qu'ainsi le préfet de la Haute-Marne a pu légalement prendre une mesure d'hospitalisation d'office au vu d'un certificat médical qui doit être regardé comme suffisamment circonstancié ;
Sur la légalité de l'arrêté du préfet de la Haute-Marne du 22 décembre 2005 maintenant l'hospitalisation d'office de M. A :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 3213-4 du code de la santé publique : Dans les trois jours précédant l'expiration du premier mois d'hospitalisation, le représentant de l'Etat dans le département peut prononcer, après avis motivé d'un psychiatre, le maintien de l'hospitalisation d'office pour une nouvelle durée de trois mois. Au-delà de cette durée, l'hospitalisation peut être maintenue par le représentant de l'Etat dans le département pour des périodes de six mois maximum renouvelables selon les mêmes modalités. Faute de décision du représentant de l'Etat à l'issue de chacun des délais prévus à l'alinéa précédent, la mainlevée de l'hospitalisation est acquise. Sans préjudice des dispositions qui précèdent, le représentant de l'Etat dans le département peut à tout moment mettre fin à l'hospitalisation après avis d'un psychiatre ou sur proposition de la commission mentionnée à l'article L. 3222-5. ;
Considérant que l'autorité judiciaire est seule compétente pour apprécier la nécessité d'une mesure d'hospitalisation d'office en hôpital psychiatrique prise sur le fondement de l'article L. 3213-1 du code de la santé publique ou d'une décision qui en prononce le maintien, en application des dispositions de l'article L. 3213-4 du même code ; que le moyen tiré du caractère abusif du maintien en hospitalisation d'office de M. A ne peut, dès lors, qu'être écarté ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui en appel et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête présentée par M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jack A, au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration et au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
Copie sera adressée au préfet de la Haute-Marne.
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