La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/04/2011 | FRANCE | N°10NC01800

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, Président de la cour, 14 avril 2011, 10NC01800


Vu, I, la requête, enregistrée le 22 novembre 2010 sous le n°10NC01799, présentée par le PREFET DU HAUT-RHIN ; il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1004833 du 19 octobre 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 13 octobre 2010 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Ersan A ;

2°) de rejeter les requêtes en annulation de M. A ;

3°) de joindre la présente requête avec la requête référencée sous le n°10NC01800 ;

LE PREFET DU HAUT-RHIN soutient que :



- le premier juge a commis à la fois une erreur de fait concernant la prise en charge des époux...

Vu, I, la requête, enregistrée le 22 novembre 2010 sous le n°10NC01799, présentée par le PREFET DU HAUT-RHIN ; il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1004833 du 19 octobre 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 13 octobre 2010 ordonnant la reconduite à la frontière de M. Ersan A ;

2°) de rejeter les requêtes en annulation de M. A ;

3°) de joindre la présente requête avec la requête référencée sous le n°10NC01800 ;

LE PREFET DU HAUT-RHIN soutient que :

- le premier juge a commis à la fois une erreur de fait concernant la prise en charge des époux A et de leurs enfants par leur famille proche, une erreur d'appréciation quant à l'atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale et une erreur de droit quant à la charge de la preuve de l'absence d'attaches familiales dans le pays d'origine ;

- ses arrêtés ont été pris par l'autorité compétente sur la base d'une délégation de signature régulièrement publiée ;

- aucune disposition n'oblige la notification des arrêtés portant reconduite à la frontière ;

- ses arrêtés ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les décisions en date du 7 avril 2011 du président du bureau d'aide juridictionnelle accordant à M. et Mme A l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le jugement et les arrêtés attaqués ;

Vu, II, la requête, enregistrée le 22 novembre 2010 sous le n°10NC01800, présentée par le PREFET DU HAUT-RHIN ; sur le fondement des mêmes moyens que ceux précédemment susvisés, il demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1004832 du 19 octobre 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a annulé son arrêté du 13 octobre 2010 ordonnant la reconduite à la frontière de Mme Lirije Beciri épouse A ;

2°) de rejeter les requêtes en annulation de Mme A ;

3°) de joindre la présente requête avec la requête référencée sous le n°10NC01799 ;

Vu, les mémoires en défense, enregistrés le 6 janvier 2011, présentés dasn chacune des deux instances pour M. et Mme Ersan et Lirije A, ..., par Me Andreini ; ils concluent au rejet des requêtes présentées sous les numéros 10NC01799 et 10NC01800 par le PREFET DU HAUT-RHIN et à ce qu'il soit mis à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, à verser à leur conseil en application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

M. et Mme A Ersan et Lirije soutiennent que c'est à bon droit que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a considéré que les arrêtés préfectoraux de reconduite à la frontière pris à leur encontre portaient une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de la vie privée et familiale ;

Vu, dans les affaires susvisées, les mémoires en réplique, enregistrés le 2 février 2011, présentés par le PREFET DU HAUT-RHIN, qui concluent aux mêmes fins que ses requêtes, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et de l'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mars 2011 :

- le rapport de M. Giltard, président de la Cour,

- et les conclusions de M. Féral, rapporteur public ;

Considérant que les requêtes susvisées sont relatives au couple A et présentent à juger des mêmes questions ; qu'elles ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Considérant que M. et Mme A, de nationalité kosovare, sont entrés irrégulièrement en France avec leurs quatre enfants selon leurs dires le 18 janvier 2008 et ont chacun fait l'objet d'une obligation à quitter le territoire prise le 23 juillet 2008 à laquelle ils n'ont pas déféré ; que s'ils font valoir qu'ils entretiennent des liens familiaux forts avec les parents, l'oncle et les quatre frères de M. A, admis au statut de réfugié et résidant en France, il ressort des pièces du dossier que M. et Mme A n'établissent pas être dans l'impossibilité de reconstituer la cellule familiale avec leurs enfants dans leur pays d'origine où il ont vécu sans interruption depuis leur naissance jusqu'à l'âge de 34 et 24 ans ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, en particulier des conditions et de la durée du séjour des intéressés en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, les décisions ordonnant la reconduite à la frontière de M. et Mme A ne portent pas à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, elles n'ont pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, dans ces conditions, c'est à tort que le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur le motif tiré de l'atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale pour annuler les arrêtés du 13 octobre 2010 par lesquels le PREFET DU HAUT-RHIN ordonne la reconduite à la frontière des époux A ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme A devant le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg ;

Sur le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte :

Considérant que par arrêté du 6 novembre 2009, régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture du Haut-Rhin au numéro 11 de novembre 2009, le PREFET DU HAUT-RHIN a donné délégation à M. Stéphane Guyon, secrétaire général de la préfecture, en toute matière se rapportant à l'action administrative et pour signer tous arrêtés, décisions, circulaires relevant des attributions de l'Etat dans le département du Haut-Rhin, à l'exception des actes pour lesquels une délégation a été donnée à un chef de service de l'Etat dans le département, des mesures générales concernant la défense nationale et la défense interne du territoire ainsi que des réquisitions de la force armée, des arrêtés de conflit et des ordres de réquisition du comptable public ; que par suite, les arrêtés de reconduite ont été signés par l'autorité compétente ;

Sur le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation :

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les décisions par lesquelles le PREFET DU HAUT-RHIN ordonne la reconduite à la frontière de M. et Mme A seraient entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences qu'elles sont susceptibles d'entraîner sur la situation personnelle des intéressés ;

Sur le moyen tiré de la violation des stipulations combinées des articles 3 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :

Considérant que si M. et Mme A soutiennent que, en raison des risques de persécution qu'ils encourent en cas de retour en Serbie en raison de leur appartenance à la communauté rom, les décisions ordonnant leur reconduite à la frontière méconnaissent les stipulations combinées des articles 3 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ce moyen est inopérant, lesdites décisions n'impliquant pas, par elles-mêmes, le retour des intéressés dans leur pays d'origine ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le PREFET DU HAUT RHIN est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a annulé ses arrêtés du 13 octobre 2010 par lesquels il a ordonné la reconduite à la frontière des époux A ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. et Mme A demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 19 octobre 2010 est annulé.

Article 2 : Les demandes de M. et Mme A devant le Tribunal administratif de Strasbourg sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions de M. et Mme A tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DU HAUT-RHIN, à M. et Mme A ainsi qu'au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

''

''

''

''

2

N°10NC01799 - 10NC01800


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : Président de la cour
Numéro d'arrêt : 10NC01800
Date de la décision : 14/04/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. le Prés Daniel GILTARD
Rapporteur public ?: M. FERAL
Avocat(s) : ANDREINI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2011-04-14;10nc01800 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award