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24/03/2011 | FRANCE | N°10NC01406

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, Président de la cour, 24 mars 2011, 10NC01406


Vu la requête, enregistrée le 24 août 2010, présentée pour M. Nabil A, demeurant ..., par Me Baumont ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003132 du 2 juillet 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 30 juin 2010 prononçant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet du Territoire de Belfo

rt de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans les quinze jours à compter de la notificat...

Vu la requête, enregistrée le 24 août 2010, présentée pour M. Nabil A, demeurant ..., par Me Baumont ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1003132 du 2 juillet 2010 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 30 juin 2010 prononçant sa reconduite à la frontière et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet du Territoire de Belfort de lui délivrer un titre de séjour temporaire dans les quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard et, à titre subsidiaire, une autorisation provisoire dans les mêmes conditions, le temps de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

* s'agissant de la décision de reconduite à la frontière :

- étant donné que la décision contestée ne fait ni mention qu'il est père d'un enfant français ni qu'il contribue à l'entretien et à l'éducation de celui-ci, elle est insuffisamment motivée ;

- étant donné qu'il répondait aux conditions de l'article L. 313-11, 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il devait se voir délivrer de plein droit un titre de séjour en tant que parent d'enfant français ;

- il ne pouvait faire l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière en application de l'article L. 511-4, 6° de ce même code ;

- étant donné qu'il réside en France depuis 2008, mais aussi que sa fille et la mère de celle-ci, toutes deux de nationalité française, y résident également, la mesure de reconduite à la frontière porte une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée et familiale normale et il devait se voir délivrer de plein droit un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la mesure de reconduite à la frontière va le séparer de sa fille, si bien qu'elle viole les dispositions de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- la décision attaquée a des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle ;

* s'agissant de la décision fixant le pays de destination :

- cette décision doit être annulée comme dépourvue de base légale par voie de conséquence de l'annulation de la décision prononçant sa reconduite à la frontière ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2010, présenté par le préfet du Territoire de Belfort, qui conclut au rejet de la requête, au motif qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu, en date du 19 novembre 2010, la décision du président du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Nancy (section administrative), admettant M. A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale des droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du

- le rapport de M. Giltard, président de la Cour ;

- et les conclusions de M Féral, rapporteur public ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision de reconduite à la frontière :

Sur l'insuffisance de motivation :

Considérant que la décision contestée, qui comporte les circonstances de fait et de droit qui en constituent le fondement, est suffisamment motivée ;

Sur le moyen tiré de la violation de l'article L. 313-11, 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :

Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 6-4 de l'accord franco-algérien : Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit. (...) 4° Au ressortissant algérien ascendant direct d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il exerce même partiellement l'autorité parentale à l'égard de cet enfant ou qu'il subvienne effectivement à ses besoins. Lorsque la qualité d'ascendant direct d'un enfant français résulte d'une reconnaissance de l'enfant postérieure à la naissance, le certificat de résidence d'un an n'est délivré au ressortissant algérien que s'il subvient à ses besoins depuis sa naissance ou depuis au moins un an ; ;

Considérant que M. A, de nationalité algérienne, ne peut utilement se prévaloir des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés et leur durée de validité ; que, toutefois, M. A doit être regardé comme invoquant les stipulations de l'article 6-4 de l'accord franco-algérien précitées, qui ont une portée équivalente aux dispositions de l'article L. 313-11, 6° du code susvisé ; que s'il fait valoir qu'il contribue à l'entretien et à l'éducation de sa fille née le 24 avril 2009 et reconnue le 22 juin 2010, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier qu'il le fasse depuis la naissance de celle-ci ou depuis au moins un an ; que, dès lors, M. A, qui n'entrait pas dans la catégorie des ressortissants étrangers devant se voir délivrer de plein droit un certificat de résidence, pouvait faire l'objet d'une mesure d'éloignement ;

Sur les moyens tirés de l'atteinte à la vie privée et familiale et de la violation de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :

Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien : Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit. (...) 5° Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; ;

Considérant que, pour les motifs indiqués ci-dessus relatifs au 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M. A, en invoquant les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du même article, doit être regardé comme se prévalant des stipulations, de portée équivalente, de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ;

Considérant que M. A, entré en France en août 2008 à l'âge de 26 ans, fait valoir qu'il a une fille de nationalité française et que la mère de celle-ci, ressortissante nationale, y réside également, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il ne contribue pas effectivement à l'entretien et à l'éducation de sa fille, qu'il ne vit plus avec la mère de son enfant et que sa venue récente en France a été interrompue par un retour en Algérie durant une année, entre les mois de février 2009 et février 2010 ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, en particulier des conditions et de la durée du séjour de M. A en France, et eu égard aux effets d'une mesure de reconduite à la frontière, la décision prise à son encontre ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'en outre, il ne pouvait se voir délivrer un certificat de résident sur le fondement de l'article de l'accord franco-algérien précité ;

Sur la violation de l'article L. 511-4, 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile :

Considérant qu'aux termes du 6° de l'article L. 511-4 du code susvisé : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 6° L'étranger ne vivant pas en état de polygamie qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; ;

Considérant, ainsi qu'il a été dit, que M. A ne contribuait pas à l'entretien et à l'éducation de sa fille depuis la naissance de celle-ci ou depuis au moins un an ; que par voie de conséquence, il ne saurait bénéficier de la protection des dispositions du 6° de l'article L. 511-4 précitées qui prévoient notamment une condition d'entretien et d'éducation d'au moins deux années ; qu'ainsi, le préfet a pu, à bon droit, prendre à son encontre une décision de reconduite à la frontière ;

Sur la violation de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant :

Considérant qu'aux termes de cet article : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ;

Considérant, ainsi qu'il a été dit, que M. A ne contribuait pas à l'entretien et à l'éducation de sa fille au moment où la décision attaquée a été prise et ne disposait pas de l'autorité parentale ; que, dès lors, la mesure de reconduite à la frontière prise à son encontre n'a pas porté atteinte à l'intérêt supérieur de son enfant ;

Sur l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle :

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet ait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

Considérant que, dès lors que la demande de M. A tendant à l'annulation de la décision de reconduite à la frontière est rejetée, doit être également rejetée sa demande d'annulation par voie de conséquence de la décision fixant le pays à destination ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 juin 2010 par lequel le préfet du Territoire de Belfort l'a reconduit à la frontière et a fixé le pays de destination ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de M. A n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions du requérant tendant à ce que la Cour enjoigne au préfet du Territoire de Belfort de lui délivrer un titre de séjour ou, une autorisation provisoire de séjour le temps de réexaminer sa situation, ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié M. Nabil A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

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N°10NC01406


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : Président de la cour
Numéro d'arrêt : 10NC01406
Date de la décision : 24/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. le Prés Daniel GILTARD
Rapporteur public ?: M. FERAL
Avocat(s) : BAUMONT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2011-03-24;10nc01406 ?
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