Vu la requête, enregistrée au greffe le 2 mars 2010, présentée pour Mme Vardoui A, ..., par Me Sultan ; Mme A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0905387 du 9 février 2010 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 20 octobre 2009 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du préfet du Bas-Rhin en date du 20 octobre 2009 ;
3°) d'enjoindre au préfet du Bas-Rhin, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais exposés en première instance ;
5°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative au titre des frais exposés en appel ;
Elle soutient que :
En ce qui concerne la décision de refus de renouvellement de titre de séjour :
- l'examen médical du médecin inspecteur de santé publique doit être concomitant de la décision du préfet ;
- l'avis du médecin inspecteur de santé publique est contraire à celui d'un autre médecin qui concluait qu'elle ne pourra pas voyager sans risque vers son pays d'origine où elle ne pourra pas bénéficier de soins nécessaires ;
- ni le médecin inspecteur de santé publique, ni le préfet ne déterminent le pays d'origine ;
- ne pouvant être accueillie ni en Azerbaïdjan, ni en Arménie, elle ne pourra bénéficier d'un traitement approprié ;
- la décision attaquée méconnaît le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que ses liens personnels et familiaux sont exclusivement en France ;
- elle est exposée en Azerbaïdjan, son pays d'origine, à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision l'obligation de quitter le territoire :
- l'illégalité de la décision de refus de renouvellement de titre de séjour prive de base légale la décision d'obligation de quitter le territoire ;
- cette décision est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle ne peut recevoir un traitement approprié dans son pays d'origine ;
- cette décision méconnaît aussi l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle a quitté depuis de nombreuses années l'Azerbaïdjan où elle n'a plus aucune attache ;
- elle ne pourrait se rendre dans ce pays en toute sécurité dès lors qu'elle est mariée à un Arménien ;
- elle a subi des traumatismes sévères dans ce pays ;
- les premiers juges ne semblent pas avoir examiné ce moyen ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense et le mémoire complémentaire, enregistrés les 14 avril et 14 mai 2010, présentés par le préfet du Bas-Rhin, qui conclut au rejet de la requête ; Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 janvier 2011 :
- le rapport de M. Trottier, président,
-et les conclusions de M. Collier, rapporteur public ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne la décision de refus de séjour :
S'agissant de l'état de santé de Mme A :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire... ; qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision litigieuse : Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur départemental de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé (...) L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé... ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11, de vérifier, au vu de l'avis émis par le médecin mentionné à l'article R. 313-22 précité, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire ; que lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine ; que si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine ;
Considérant que pour refuser à Mme A le renouvellement de son titre de séjour, le préfet du Bas-Rhin s'est fondé sur l'avis du médecin inspecteur départemental de santé publique, en date du 17 février 2009, indiquant que si l'état de santé de l'intéressée nécessitait une prise en charge médicale et que le défaut de soins serait susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, celle-ci pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose que l'avis du médecin inspecteur départemental de santé publique soit concomitant de la décision par laquelle l'autorité administrative refuse la délivrance d'un titre de séjour ; qu'au demeurant, si Mme A fait valoir que le préfet du Bas-Rhin aurait commis une erreur d'appréciation en s'appuyant sur un avis du médecin inspecteur rendu huit mois avant la date de la décision attaquée, elle n'établit pas, ni même n'allègue, que son état de santé se serait aggravé depuis lors ; qu'enfin, en se bornant à produire un certificat médical affirmant qu'elle ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, la requérante n'apporte aucun élément circonstancié quant à l'impossibilité alléguée de bénéficier de soins appropriés à son affection dans son pays d'origine qui, contrairement à ce qu'elle soutient, ressort tant de l'avis du médecin inspecteur que l'arrêté attaqué, qui font référence à la nationalité azerbaïdjanaise de Mme A ;
S'agissant du droit de Mme A au respect de sa vie privée et familiale :
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire vie privée et familiale est délivrée de plein droit à : (...) 7° l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, d'une part, l'époux de Mme A a également fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français et, d'autre part, certains de leurs enfants bénéficiaient de titres de séjour d'une durée très provisoire ; qu'en outre, la requérante n'établit pas être dépourvue d'attaches dans son pays d'origine alors qu'elle a vécu hors de France jusqu'à l'âge de 42 ans ; qu'ainsi, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision lui refusant le renouvellement de son titre de séjour aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'est, par suite, contraire ni à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni au 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision attaquée n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;
Considérant que si Mme A soutient qu'elle serait soumise à des traitements inhumains ou dégradants contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans le pays dont elle a la nationalité, un tel moyen est inopérant à l'encontre de la décision de refus de titre de séjour litigieuse, qui n'emporte pas, par elle-même, l'obligation pour la requérante de retourner dans son pays d'origine ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les moyens tirés de la méconnaissance les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'erreur manifeste d'appréciation qui aurait été commise par le préfet du Bas-Rhin, qui reprennent ceux qui ont été précédemment développés à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs que précédemment, ainsi que celui tiré de l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour pour les mêmes motifs ceux qui ont été précédemment développés ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales... ; que ce dernier texte énonce que : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;
Considérant que la requérante, dont l'époux a la même nationalité qu'elle, n'établit pas qu'elle encourrait personnellement des risques en cas de retour dans son pays d'origine, alors qu'au demeurant sa demande d'admission au statut de réfugié a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 18 mai 2005, confirmée par une décision de la Commission des recours des réfugiés en date du 19 octobre 2005 ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en fixant l'Azerbaïdjan comme pays à destination duquel l'intéressée pourra être reconduite ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui a répondu à tous les moyens qui étaient développés devant lui, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions de Mme A tendant à ce que la Cour ordonne au préfet du Bas-Rhin de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent ainsi qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mme A la somme que celle-ci demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Vardoui A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
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10NC00342