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09/12/2010 | FRANCE | N°08NC01417

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 09 décembre 2010, 08NC01417


Vu la requête, enregistrée le 15 septembre 2008, complétée par des mémoires enregistrés les 20 novembre 2008 et 15 octobre 2009, présentée pour M. et Mme Christian A, ..., par Me Teboul ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n°0700327 du 21 juillet 2008 par laquelle le Tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1997, 1998 et 1999 ainsi que des droits de taxe sur la valeu

r ajoutée et des pénalités y afférentes mis à la charge de Mme A au titre de...

Vu la requête, enregistrée le 15 septembre 2008, complétée par des mémoires enregistrés les 20 novembre 2008 et 15 octobre 2009, présentée pour M. et Mme Christian A, ..., par Me Teboul ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n°0700327 du 21 juillet 2008 par laquelle le Tribunal administratif de Nancy a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1997, 1998 et 1999 ainsi que des droits de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes mis à la charge de Mme A au titre de la période du

1er janvier 1997 au 31 décembre 1999 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- le service n'était pas en droit de refuser la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires au seul motif d'une demande seulement tardive de trois jours, dont, au surplus, l'administration portait la responsabilité du fait d'un manque de loyauté ;

- les deux seules interventions sur place du vérificateur n'ont pas permis que se noue un débat oral et contradictoire ;

- l'ensemble des éléments de preuve étaient à la disposition du service qui n'a pas consacré à la vérification le temps nécessaire ;

- la TVA a été spontanément régularisée en février et septembre 2000 ;

- il y a lieu de prononcer la compensation entre la TVA déductible omise et les rappels opérés ;

- les rétrocessions d'honoraires sont justifiés et les frais de déplacements professionnels mis en compte ne doivent faire l'objet d'aucun abattement au titre de déplacements privés dont la quote-part de 15 % retenue par l'administration a été obtenue sous la pression ;

- l'intention délibérée d'éluder l'impôt n'est pas établie par le service ;

Vu l'ordonnance attaquée ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés le 4 juin 2009 et le 31 août 2010, présentés par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; le ministre conclut :

- au non lieu à statuer à concurrence des dégrèvements prononcés et au rejet du surplus de la requête ;

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est de nature à entraîner la décharge des impositions contestées ;

Vu la lettre en date du 9 octobre 2010 par laquelle le président de la deuxième chambre a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de fonder sa décision sur un moyen d'ordre public tiré de l'irrégularité du recours par le tribunal administratif aux dispositions de

l'article R. 222-1-7° du code de justice administrative, résultant du caractère suffisamment précis du moyen relatif à la contestation du refus de l'administration de faire droit à la demande de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 novembre 2010 :

- le rapport de Mme Fischer-Hirtz, président,

- les conclusions de M. Féral, rapporteur public,

- et les observations de Mme A ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que par décision en date du 30 novembre 2010 postérieure à l'introduction de la requête, le directeur départemental des finances publiques des Alpes Maritimes a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, d'une part, d'une somme de 1 032 euros au titre des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de Mme A au titre de l'année 1997 et, d'autre part, d'une somme de 1 364 euros au titre du complément d'impôt sur le revenu auquel M. et Mme A ont été assujettis pour l'année 1997 ; que les conclusions de la requête de Mme A relatives à ces impositions sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé (...) ; qu'il résulte de l'instruction que le président du Tribunal administratif de Nancy a rejeté comme irrecevable la demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu des années 1997, 1998 et 1999 présentée par M. et Mme A ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés à Mme A pour la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 1999 au motif que celle-ci ne comportait que des moyens qui n'étaient assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien alors que ladite demande comportait un moyen relatif à la contestation du refus de l'administration de faire droit à la demande de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, par suite, l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité ; qu'il y a lieu d'en prononcer l'annulation et, par la voie de l'évocation, de statuer immédiatement sur la demande de M. et Mme A A ;

Sur la régularité de la procédure :

En ce qui concerne la tardiveté de la demande de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : Lorsque le désaccord persiste sur les redressements notifiés, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'aux termes de l'article R. 59-1 du même livre : Le contribuable dispose d'un délai de trente jours à compter de la réception de la réponse de l'administration à ses observations pour présenter la demande prévue au premier alinéa de l'article L. 59 ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour ce qui est de l'année 1997, les redressements en matière de bénéfices non commerciaux et de taxe sur la valeur ajoutée ont été notifiés à Mme A le 14 décembre 2001, puis ont été confirmés par une réponse aux observations du contribuable reçue le 3 avril 2001 ; que le délai de trente jours imparti par les dispositions de l'article R. 59-1 du livre des procédures fiscales était en conséquence expiré à la date du 7 mai 2004 à laquelle a été présentée la demande tendant à la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, pour ce qui est des années 1998 et 1999, les requérants n'ont manifesté leur désaccord que le 7 mai 2004, soit postérieurement au délai de trente jours qui leur était ouvert à compter de la réception le 3 avril 2004 de la notification de redressements ; que, par suite, M. et Mme A, qui ne sauraient utilement se prévaloir d'un principe d'équité, ne sont pas fondés à soutenir qu'ils auraient été privés de la garantie attachée à la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;

En ce qui concerne le moyen tiré de la violation du débat oral et contradictoire :

Considérant que les opérations de vérification se sont déroulées dans les locaux professionnels de Mme A ; que si le vérificateur n'a effectué que deux interventions sur place, il ne résulte pas de l'instruction que la nature des opérations réalisées par l'intéressée appelait une présence plus longue pour que se noue de manière effective le débat oral et contradictoire sur les conditions d'exercice par Mme A de son activité d'expert comptable ; qu'il n'est pas contesté que Mme A, qui n'a pas honoré un dernier entretien fixé d'un commun accord le 15 janvier 2001, a décliné plusieurs propositions de rendez vous offertes par l'administration ; qu'il suit de là, que les requérants, qui n'établissent pas que le vérificateur se serait refusé à tout débat oral et contradictoire au cours des deux interventions réalisées sur place, ne sont pas fondés à soutenir que la procédure est entachée d'irrégularité ; que s'ils invoquent en des termes généraux la méconnaissance d'un principe de loyauté, ils n'assortissent pas un tel moyen de précisions suffisantes pour permettre à la cour d'en apprécier le bien-fondé ;

Sur le bien fondé des impositions :

En ce qui concerne les rappels de TVA :

Considérant, en premier lieu, que les opérations de vérification de comptabilité ont permis d'établir l'existence de discordances entre les sommes inscrites sur les comptes bancaires de Mme A au titre des encaissements professionnels et celles mentionnées sur la déclaration de résultat de la requérante au titre des opérations taxables ; que si Mme A conteste l'assujettissement à la taxe de la somme de 2 094,23 francs et de celle de 3 470,16 francs au motif que lesdites sommes correspondraient à des encaissements privés résultant de la clôture d'un compte bancaire et d'une indemnité d'assurance non soumis à TVA en produisant à cet effet la copie de deux chèques bancaires établis les 28 janvier 1997 et 6 février 1997 au nom de Mme A, l'administration fait valoir, sans être utilement contredite, que les sommes en cause n'apparaissent pas distinctement sur les relevés bancaires de l'intéressée et ne sauraient ainsi être regardées comme des opérations ne relevant pas de son activité économique d'expert comptable ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration les a assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Considérant, en second lieu, que Mme A ne conteste pas l'existence de discordances entre le chiffre d'affaires figurant sur ses déclarations de bénéfice (n° 2035) souscrites au titre des années 1997, 1998 et 1999 et le total porté sur les relevés CA3 mensuels de taxe sur la valeur ajoutée pour chacune de ces années ; que si la requérante soutient avoir spontanément régularisé les insuffisances constatées par la souscription de déclarations de TVA en février et septembre 2000, il ne résulte pas de l'instruction que les rappels de TVA n'étaient pas justifiés ;

Considérant, enfin, que si Mme A demande que les rappels de TVA mis à sa charge soient compensés, en application des dispositions de l'article L. 80 du livre des procédures fiscales, à concurrence d'un montant de 42 581 francs résultant de l'insuffisance de déduction de la TVA au titre des années 1997, 1998 et 1999, elle n'apporte aucune justification, à l'exception d'un tableau récapitulatif établi par ses soins et dépourvu de tout caractère probant, de l'excédent dont elle fait état dans l'assiette des impositions contestées ;

En ce qui concerne les bénéfices non commerciaux :

Considérant qu'aux termes des dispositions du 1 de l'article 93 du code général des impôts, relatif aux bénéfices des professions non commerciales : Le bénéfice à retenir dans les bases de l'impôt est constitué par l'excédent des recettes totales sur les dépenses nécessitées par l'exercice de la profession... ; qu'il résulte de ces dispositions qu'il appartient dans tous les cas au contribuable de justifier que les sommes qu'il a déduites de son bénéfice non commercial ont constitué des dépenses nécessitées par l'exercice de sa profession et d'en établir la réalité ;

Considérant, en premier lieu, que Mme A a déduit de son bénéfice de l'année 1997 une somme de 136 214 francs au titre des honoraires qu'elle aurait versés à Mme Violet et qui correspondraient à des travaux de secrétariat effectués en sous-traitance ; que pour justifier de la réalité de la dépense et de son lien avec son activité professionnelle, M. et Mme A ont produit, postérieurement aux opérations de contrôle, une note d'honoraires en date du 31 décembre 1997 faisant état de prestations réalisées au cours des années 1996 et 1997 et dont le montant (125 714 francs) diffère de celui porté en déduction dans leurs charges ; qu'en l'absence d'élément suffisamment probant de nature à permettre de regarder la dépense dont s'agit comme une charge déductible au sens des dispositions de l'article 93 du code général des impôts, M. et Mme A ne sont pas fondés à contester sa réintégration dans leurs revenus imposables de l'année 1997 ;

Considérant, en second lieu, que Mme A domiciliée jusqu'en 1999 à Sainte Maxime (Var) puis à Laxou (Meurthe-et-Moselle), fait état de frais de déplacements dans la région nancéienne et dans le sud-est de la France à raison de son activité professionnelle d'expert-comptable ; qu'il résulte de l'instruction qu'en 1997, 1998 et 1999, Mme A a déduit de ses bénéfices non commerciaux les frais de toute nature afférents à ses déplacements en voiture ; que si ces frais n'étaient pas individualisés en comptabilité, leurs montants ont pu être évalués respectivement à 49 545 francs pour 1998 et à 50 926 francs pour 1999, compte-tenu des pièces justificatives transmises au vérificateur ; que si Mme A sollicite la prise en compte de frais de déplacement supplémentaires au titre des deux années en cause, elle n'établit pas la réalité des dépenses engagées à concurrence de 13 078 francs en 1998 et de 45 889 francs en 1999 par la seule production d'une liste de clients ne comportant ni la date, ni les motifs des déplacements allégués ; que si Mme A conteste la quote-part d'utilisation privative évaluée à 15 % des kilomètres parcourus au cours de l'année 1997, elle ne démontre pas l'inexactitude de la répartition ainsi arrêtée entre utilisation professionnelle et utilisation privative alors que celle-ci avait été expressément admise par Mme A dans un courrier adressé par l'intéressée à l'administration, le 9 décembre 2000, et dont il n'est nullement établi qu'il ait été rédigé sous la contrainte ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que l'administration a limité la déduction des frais de transport aux seules dépenses engagées pour les besoins de la profession ;

Sur les pénalités :

Considérant que pour justifier de l'application de la majoration prévue à l'article 1729 du code général des impôts, l'administration fait état d'omissions déclaratives en matière de taxe sur la valeur ajoutée s'élevant respectivement à 60% et 67 % des recettes en 1997, 1998 et 1999 ainsi que de la déduction de dépenses étrangères à l'activité professionnelle ; que compte tenu de la profession d'expert comptable exercée par Mme A, de telles pratiques doivent être regardées comme traduisant une volonté délibérée d'éluder l'impôt ; que M. et Mme A ne sont donc pas fondés à demander la décharge de la majoration qui leur a été réclamée ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à demander la décharge des impositions litigieuses ; que les dispositions de l'article 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme que M. et Mme A demandent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : A concurrence de la somme de 1 032 euros en ce qui concerne le complément de taxe sur la valeur ajoutée auquel Mme A a été assujettie au titre de l'année 1997 et de la somme de 1 364 euros en ce qui concerne l'impôt sur le revenu mis à la charge de M. et Mme A au titre de l'année 1997 , il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête.

Article 2 : L'ordonnance du président du Tribunal administratif de Nancy en date du 21 juillet 2008 est annulée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par M. et Mme A devant le Tribunal administratif de Nancy est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Christiane A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement.

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N° 08NC01417


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08NC01417
Date de la décision : 09/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: Mme Michèle LE MONTAGNER
Rapporteur public ?: M. FERAL
Avocat(s) : TEBOUL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-12-09;08nc01417 ?
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