Vu, 1, sous le n°09NC01004, la requête, enregistrée le 7 juillet 2009, complétée par des mémoires enregistrés les 13 juillet 2009, 24 août 2009, 1er octobre 2009, 12 juillet 2010 et 26 août 2010, présentée pour la MANUFACTURE FRANCAISE DE PNEUMATIQUES MICHELIN dont le siège est place des Carmes Dechaux à Clermont Ferrand (63000), représentée par son président, par la SCP Celice-Blancpain-Soltner, avocat ; la MANUFACTURE FRANCAISE DE PNEUMATIQUES MICHELIN demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0800751 en date du 2 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité en date du 28 janvier 2008 refusant d'inscrire l'établissement Michelin situé à Golbey sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante et enjoint au ministre d'inscrire cet établissement sur cette liste ;
2°) de rejeter la demande présentée par le Comité d'Hygiène et de sécurité et des conditions de travail de l'établissement Michelin de Golbey et le syndicat SUD Michelin devant le Tribunal administratif de Nancy ;
La société soutient que :
- le jugement méconnait le principe du caractère contradictoire de la procédure devant le tribunal administratif ;
- la qualification juridique des faits est erronée, les bouchons, les joints d'étanchéité et les isolants phoniques ne pouvant être regardés comme des éléments de calorifugeage au sens de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 ;
- le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, les activités accessoires de calorifugeage ne pouvant être prises en compte que lorsqu'elles présentent un caractère significatif en termes d'activité et en termes d'exposition à l'amiante, ce qui n'est pas le cas dans l'établissement ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu les mémoires enregistrés les 15 mars 2010 et 3 août 2010 présentés pour le Comité d'Hygiène et de sécurité et des conditions de travail de l'établissement Michelin dont le siège est 6 rue du Xay à Golbey (88192) représenté par son secrétaire et le syndicat Sud Michelin, dont le siège est 8 rue Gabriel Péri à Clermont-Ferrand ( 63000), représenté par son secrétaire par la SCP Borie et associés, avocats qui concluent au rejet de la requête et demandent qu'une somme de 3 000 € soit mise à la charge de la MANUFACTURE FRANCAISE DE PNEUMATIQUES MICHELIN au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative au motif que les moyens invoqués ne sont pas fondés ;
Vu, II, sous le n°09NC01048, le recours, enregistré le 29 juillet 2009, présenté par le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES, DE LA FAMILLE, DE LA SOLIDARITE ET DE LA VILLE ; le ministre demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0800751 en date du 2 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité en date du 28 janvier 2008 refusant d'inscrire l'établissement Michelin situé à Golbey sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante et enjoint au ministre d'inscrire cet établissement sur cette liste ;
2°) de rejeter la demande présentée par le Comité d'Hygiène et de sécurité et des conditions de travail de l'établissement Michelin de Golbey et le syndicat SUD Michelin devant le Tribunal administratif de Nancy ;
Le ministre soutient que :
- le jugement méconnait le principe du caractère contradictoire de la procédure devant le tribunal administratif ;
- la qualification juridique des faits est erronée, les bouchons, les joints d'étanchéité et les isolants phoniques ne pouvant être regardés comme des éléments de calorifugeage au sens de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998
- le jugement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, les activités accessoires de calorifugeage ne pouvant être prises en compte que lorsqu'elles présentent un caractère significatif en termes d'activité et en termes d'exposition à l'amiante, ce qui n'est pas le cas dans l'établissement ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n°1998-1194 du 23 décembre 1998, notamment son article 41 ;
Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 octobre 2010 :
- le rapport de Mme Richer, président,
- les conclusions de M. Wiernasz, rapporteur public,
- et les observations de Me Blancpain, avocat de la MANUFACTURE FRANCAISE DE PNEUMATIQUES MICHELIN, et de Me Borie, avocat du Comité d'Hygiène et de sécurité et des conditions de travail de l'établissement Michelin de Golbey et du syndicat SUD Michelin ;
Sur la jonction :
Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre un même jugement qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué :
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article 41 de la loi susvisée du 23 décembre 1998 dans sa rédaction issue de la loi n° 2006-1640 du 21 décembre 2006, : I. Une allocation de cessation anticipée d'activité est versée aux salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction navale sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent les conditions suivantes : 1° Travailler ou avoir travaillé dans un des établissements mentionnés ci-dessus et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, pendant la période où étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante. L'exercice des activités de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, de flocage et de calorifugeage à l'amiante de l'établissement doit présenter un caractère significatif (...) ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'établissement de la Manufacture française des pneumatiques Michelin situé à Golbey a pour activité principale la transformation de fils d'acier en câbles métalliques servant à renforcer la structure des pneumatiques ; que cette activité n'est pas, par elle-même, au nombre de celles qui ouvrent droit, sur le fondement de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998, à l'application du régime d'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ; que si les salariés de l'établissement chargés de la maintenance ont utilisé de l'amiante en vrac pour assurer l'étanchéité des sas d'entrée des 160 fours TT40 et des 26 fours 500 et éviter la fuite de gaz dans les tubes où le fil d'acier est soumis à un effet joule, ils ne se sont pas ainsi livrés à des opérations de calorifugeage ; que de même les petits éléments amiantés placés sous les capots des machines procédant à l'assemblage des fils électriques permettaient de limiter le bruit généré par la rotation très rapide de pièces mécaniques et non pas d'assurer l'isolation thermique ; que seule l'isolation thermique des parois réfractaires de neuf craqueurs d'ammoniaque avec des matériaux isolants susceptibles de renfermer des fibres d'amiante peut être regardée comme une opération de calorifugeage ; qu'à supposer que l'entretien et le remplacement des bandes de freinage, de patins et de disques de freins qui impliquaient également la manipulation de produits amiantés deux fois par semaine, puissent être assimilés à des opérations de calorifugeage, ces opérations de maintenance ne concernaient que 124 machines sur un total de 1451 ; qu'ainsi le calorifugeage ne pouvait être regardé comme représentant une part significative de l'activité de l'établissement ; que dès lors c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que l'établissement Michelin de Golbey avait eu recours de manière significative à des opérations de calorifugeage ;
Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen soulevé par le Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'établissement Michelin de Golbey et le syndicat Sud Michelin tant devant le tribunal administratif que devant la Cour ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 27 juillet 2005 : A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : /1° (...) les directeurs d'administration centrale (...) ; que M. Jean-Denis Combrexelle, qui a été nommé directeur général du travail par décret du 25 août 2006, disposait d'une délégation régulière pour signer la décision en litige en application des dispositions précitées ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée manque en fait ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que MANUFACTURE FRANCAISE DE PNEUMATIQUES MICHELIN et le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES, DE LA FAMILLE, DE LA SOLIDARITE ET DE LA VILLE sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité en date du 28 janvier 2008 refusant d'inscrire l'établissement Michelin situé à Golbey sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée des travailleurs de l'amiante et enjoint au ministre d'inscrire cet établissement sur cette liste ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, la somme que le Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'établissement Michelin de Golbey et le syndicat Sud Michelin réclament au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nancy du 2 juin 2009 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par le Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'établissement Michelin de Golbey et le syndicat Sud Michelin devant le Tribunal administratif de Nancy est rejetée.
Article 3 : Les conclusions du Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'établissement Michelin de Golbey et du syndicat Sud Michelin tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la MANUFACTURE FRANCAISE DE PNEUMATIQUES MICHELIN, au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, au Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de l'établissement Michelin de Golbey et au syndicat Sud Michelin.
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N° 09NC01004 - 09NC01148