Vu la requête enregistrée le 9 juin 2009 au greffe de la Cour, présentée pour M. David A demeurant ..., par Me Clément, avocat ; M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0600036 du 9 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à annuler la décision du 15 septembre 2005 par laquelle le préfet des Ardennes lui a indiqué que ses aides bovines seraient calculées sur la base d'un taux unitaire réduit de 100 % au titre de la campagne 2004 ;
2°) d'annuler ladite décision ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- la décision signée par le chef de service de l'économie agricole à la direction départementale de l'agriculture et de la forêt des Ardennes alors qu'elle relève du préfet a été prise par une autorité incompétente ; toute délégation ne pourrait qu'être entachée de nullité ; par ailleurs aucun texte de droit interne ne donne compétence au préfet pour prononcer les sanctions énoncées dans les règlements communautaires ;
- la décision ne comporte aucun élément de fait ou de droit permettant de justifier la suppression des aides et est ainsi insuffisamment motivée ;
- le contrôle opéré par l'administration à partir duquel l'administration a justifié sa décision dans sa défense devant le tribunal est illégal faute d'être contradictoire et de comporter sa signature ;
- la décision prise met en péril la pérennité de son exploitation ce qui porte atteinte au respect de son activité professionnelle au mépris de la convention européenne des droits de l'homme ;
- il existait des circonstances exceptionnelles au sens de l'article 48 du règlement européen n° 2419-2001 du fait de l'accident de travail de son père en 2004 lui permettant de s'exonérer des anomalies éventuellement constatées sur son exploitation ;
- la sanction la plus importante a été retenue sans justification ;
- la décision constitue un détournement de procédure ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire en défense enregistré le 31 mai 2010 présenté par le ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche qui conclut au rejet de la requête, les moyens étant infondés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la lettre du 3 juin 2010 informant les partie que la Cour est susceptible de fonder sa décision sur un moyen relevé d'office ;
Vu le mémoire enregistré le 14 juin 2010 présenté par M. A qui conclut aux mêmes fins que dans sa requête par les mêmes moyens ;
Vu l'ordonnance en date du 1er juin 2010 du président de la 4ème chambre reportant la clôture de l'instruction à la date du 11 juin 2010 à 16 heures ;
Vu le règlement (CEE) n° 3508/92 du Conseil du 27 novembre 1992 ;
Vu le règlement (CEE) n° 2419/2001 modifié de la Commission du 11 décembre 2001 ;
Vu le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 ;
Vu le code rural ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2010 :
- le rapport de M. Wiernasz, premier conseiller,
- les conclusions de M. Wallerich, rapporteur public,
- et les observations de Me Plénat, avocat de M. A ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne la légalité externe de la décision :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 9 du décret du 29 avril 2004 modifié : Le préfet de département met en oeuvre les politiques nationales et communautaires dans les conditions définies à l'article 2. ; qu'ainsi, le moyen tiré de ce que le préfet des Ardennes n'aurait pas eu compétence pour prendre la décision attaquée ne peut qu'être écarté ;
Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 43 du décret du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements : Le préfet de département peut donner délégation de signature :...2° pour les matières relevant de leurs attributions, aux chefs des services des administrations civiles de l'Etat dans le département ou à leurs subordonnés... ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet des Ardennes a pu déléguer sa signature par un arrêté du 19 juillet 2005 au directeur départemental de l'agriculture et de la forêt ainsi qu'à ses subordonnés, désignés nominativement, notamment pour les décisions concernant les aides européennes ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision manque en fait ;
Considérant qu'enfin M. A n'a, dans sa demande enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne le 9 janvier 2006, contesté la décision du préfet des Ardennes du 15 septembre 2005 en ne soulevant que des moyens de légalité interne ; que ce n'est que par un mémoire enregistré le 20 septembre 2006 après l'expiration du délai de recours contentieux de deux mois qu'il a présenté des moyens de légalité externe ; que ces moyens, auxquels le tribunal administratif a répondu sur le fond, reposaient en réalité sur une cause juridique distincte et constituaient ainsi une demande nouvelle qui était irrecevable ; qu'ainsi les moyens tirés du défaut de motivation et du vice de procédure doivent être écartés ;
En ce qui concerne la légalité interne :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 189 du traité de Rome, devenu article 249 du Traité de la communauté européenne : Le règlement a une portée générale. Il est obligatoire dans tous ses éléments et il est directement applicable dans tout Etat membre... ; qu'il en résulte que, contrairement à ce que soutient M. A, les règlements européens n'ont pas à faire l'objet de transposition en droit interne pour y être applicable ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'en se limitant à soutenir que la sanction la plus importante a été prononcée à son encontre alors qu'il ressort des pièces du dossier, que les anomalies constatées après contrôle sur place, concernaient vingt-trois animaux déclarés à la prime pour un total de cinquante et un animaux dits établis ce qui a eu pour effet de ramener la prime à zéro par application d'un taux de réduction de 100 % résultant des dispositions du règlement n° 2419/2001 du 11 décembre 2001, M. A n'établit pas que le préfet des Ardennes aurait fait une inexacte application desdits règlement de l'Union européenne ;
Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 48 du même règlement n° 2419/2001 du 11 décembre 2001 : 1. Les cas de force majeure ou de circonstances exceptionnelles ainsi que les preuves y relatives apportées à la satisfaction de l'autorité compétente sont notifiées à cette dernière par écrit dans un délai de dix jours ouvrables à partir du jour où l'exploitant est en mesure de le faire. 2. Les cas susceptibles d'être reconnus comme circonstances exceptionnelles par l'autorité compétente sont par exemple : a) le décès de l'exploitant ; b) l'incapacité professionnelle de longue durée de l'exploitant ; c) une catastrophe naturelle grave qui affecte de façon importante la surface agricole de l'exploitation ; d) la destruction accidentelle des bâtiments de l'exploitation destinés à l'élevage ; e) une épizootie affectant tout ou partie du cheptel de l'exploitant ;
Considérant que si M. A fait valoir qu'il a travaillé dans l'exploitation agricole de son père, gravement accidenté en 2004, ce qui lui a donné un surcroît important d'activité qu'il a dû assumer au détriment de sa propre exploitation, une telle situation, dont la cause ne concerne pas l'exploitation de l'intéressé, ne saurait être considérée comme une circonstance exceptionnelle au sens de l'article 48 susmentionné du règlement n° 2419/2001 du 11 décembre 2001 ;
Considérant, en quatrième lieu, que la circonstance que le refus de l'aide serait préjudiciable à l'économie de son exploitation et mettrait en péril son activité est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ; que si M. A ajoute que serait ainsi méconnue la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ne précise toutefois pas les stipulations qu'il entend viser ;
Considérant, en cinquième et dernier lieu, que, par ses seules affirmations, M. A n'établit pas que la décision du préfet des Ardennes serait entachée d'un détournement de procédure ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
Article 1er : La requête susvisée de M. A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. David A et au ministre de l'alimentation, de l'agriculture et de la pêche.
Copie sera adressée au préfet des Ardennes.
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