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05/07/2010 | FRANCE | N°09NC00563

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 05 juillet 2010, 09NC00563


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 17 avril 2009, présentée pour la SOCIETE DS SMITH KAYSERSBERG, représentée par son président, dont le siège est situé à Kunheim (68230 ), par Me Hunzinger avocat; la SOCIETE DS SMITH KAYSERSBERG demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501924 en date du 17 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 4 mars 2005 par laquelle l'inspecteur du travail de la quatrième section de Colmar a refusé d'autoriser le licenciement de M

. Mario A ;

2°) d'annuler cette décision ;

Elle soutient que :

- il e...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 17 avril 2009, présentée pour la SOCIETE DS SMITH KAYSERSBERG, représentée par son président, dont le siège est situé à Kunheim (68230 ), par Me Hunzinger avocat; la SOCIETE DS SMITH KAYSERSBERG demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501924 en date du 17 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 4 mars 2005 par laquelle l'inspecteur du travail de la quatrième section de Colmar a refusé d'autoriser le licenciement de M. Mario A ;

2°) d'annuler cette décision ;

Elle soutient que :

- il est démontré qu'en 2004 M. A a été frauduleusement absent de son travail en invoquant la participation à des réunions fictives ; 81 heures de travail ont ainsi été imputées indument ;

- comme l'ont justement apprécié les premiers juges, l'inspecteur du travail n'a pu considérer que les faits reprochés étaient prescrits alors que la fraude n'a été mise à jour que suite au contrôle approfondi effectué au mois de janvier 2005 ;

- aucune carence ne peut être reprochée à l'employeur par l'inspecteur du travail dans la surveillance des salariés protégés, censés exécuter fidèlement et en conscience leur mandat ;

- le procès-verbal du comité d'établissement du 26 janvier 2005 n'entérine aucun usage de gestion extra-légale des heures de délégation ; cette affirmation est le fait de certains élus mais est démentie par la direction ; au demeurant, M. A ne prétend pas que les heures convoquées se rapporteraient aux activités sociales, à la mutuelle ou au secrétariat et l'inspecteur du travail ne conteste pas leur caractère frauduleux ; il n'a jamais existé aucune tolérance en ce sens ni a fortiori été permis de déclarer des heures convoquées en l'absence de convocation ;

- l'ancienneté de l'intéressé ne saurait excuser son comportement délibéré ; la faute est d'autant plus grave qu'elle met en cause sa probité dans l'exécution de ses mandats ;

- l'inspecteur du travail a bien été saisi du grief relatif à une absence du 7 juillet 2004 pour un congé exceptionnel communion , qui constitue une fraude aux heures de travail ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2010, présenté par le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- le moyen tiré de l'existence d'anomalies n'est pas fondé ; la plupart des heures convoquées imputées par M. A sont justifiées par des activités en lien avec les mandats détenus ;

- l'ancienneté du salarié et son absence de passé disciplinaire ne sont pas contestées ;

- le procès-verbal du comité d'établissement du 26 janvier 2005 montre qu'il existait une tolérance dans l'entreprise s'agissant de l'imputation des heures convoquées et des heures de délégation ; cette tolérance a justifié que l'inspecteur du travail comme le tribunal relativisent la gravité de la faute commise ;

- si M. A avait imputé les 81 heures convoquées litigieuses en heures de délégation, l'employeur n'aurait rien trouvé à redire ;

Vu, enregistré le 7 juin 2010, le mémoire présentée pour M. BINDLER demeurant 16 rue des Moutons à Rorschwihr (68590), par Me Courtin-Rosenblieh, avocat, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- les faits reprochés étaient prescrits ;

- le projet de licenciement révèle une attitude discriminatoire, alors même qu'une tolérance existe dans l'entreprise quant à l'utilisation des heures de délégation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance par laquelle la clôture de l'instruction a été fixée à la date du 10 juin 2010 ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 juin 2010 :

- le rapport de M. Devillers, premier conseiller,

- les conclusions de M. Wallerich, rapporteur public,

- et les observations de Me Rugraff, représentant la SCP Hunzinger et Calvano, avocat de la SOCIETE DS SMITH KAYSERSBERG ;

Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle est subordonné à une autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'autorité compétente de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d' une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, durant l'année 2004, M. A, alors membre titulaire du comité d'établissement et délégué du personnel suppléant, a procédé à l'imputation sur ses relevés d'heures de travail de 81 heures convoquées par l'entreprise, correspondant en fait à des heures de réunion du comité d'entreprise fictives ou consacrées à ses mandats personnels auprès de la mutuelle et du tribunal des affaires de sécurité sociale ;

Considérant, en deuxième lieu, que si aux termes des dispositions alors applicables de l'article L. 122-44 du code du travail : Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales , il ne ressort pas des pièces du dossier que la SOCIETE DS SMITH KAYSERSBERG ait eu connaissance de la réalité de cette fraude avant la réalisation du contrôle effectué au mois de janvier 2005 ;

Considérant, en troisième lieu, que l'intéressé ne peut se prévaloir d'une pratique de tolérance au sein de l'entreprise s'agissant de l'imputation de ces heures convoquées , alors qu'il est seulement établi, notamment par le procès-verbal de la réunion du comité d'établissement du 26 janvier 2005 invoqué à ce titre, comme par la mise en place, postérieurement à cette réunion, d'une commission de travail intitulée heures de délégations , que s'était installé un usage, sur lequel l'entreprise a d'ailleurs souhaité revenir, concernant la pratique d'un pot commun d'heures de délégation, par syndicat ; que les déclarations de représentants du personnel relevées sur le procès-verbal précité selon lesquelles jusqu'à ce jour les réunions des activités sociales, secrétariat, MCA (mutuelle) ...étaient pointées comme des réunions convoquées , concernent, à supposer même ainsi établie cette tolérance qui est niée par la direction, l'utilisation de ces heures, sans autoriser leur détournement à des fins personnelles ; que M. A n'est, par ailleurs, pas fondé à reprocher à l'entreprise d'avoir favorisé cette fraude en ne procédant qu'annuellement au contrôle de l'utilisation des heures de délégation ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'aucun lien entre le licenciement envisagé et les mandats exercés par M. A n'est établi ni ne ressort des pièces du dossier ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède, nonobstant l'ancienneté de vingt-cinq ans de l'intéressé dans le groupe et la circonstance, à la supposer établie, qu'il n'aurait pas fait l'objet auparavant de remarques, avertissements ou sanctions de la part de son employeur, que les faits reprochés à M. A présentaient, dans les circonstances de l'espèce, le caractère d'une faute d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ; que la SOCIETE DS SMITH KAYSERSBERG est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 0501924 en date du 17 février 2009 du Tribunal administratif de Strasbourg et la décision en date du 4 mars 2005 de l'inspecteur du travail de la quatrième section de Colmar refusant d'autoriser le licenciement de M. Mario A sont annulés.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre du travail, de la solidarité et de la fonction publique, à la SOCIETE DS SMITH KAYSERSBERG et à M. Mario A.

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N° 09NC00563


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC00563
Date de la décision : 05/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: M. Pascal DEVILLERS
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : SCP HUNZINGER ET CALVANO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-07-05;09nc00563 ?
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