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17/06/2010 | FRANCE | N°09NC00990

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 17 juin 2010, 09NC00990


Vu I°) la requête, enregistrée le 3 juillet 2009 sous le n° 09NC00990 et rectifiée par mémoire enregistré le 14 mai 2010, présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAÔNE-ET-LOIRE par Me Laffon ;

La caisse demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601095 du 7 mai 2009 du Tribunal administratif de Besançon en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation du CENTRE HOSPITALIER DE BESANCON à lui payer une somme de 44 553,19 euros en remboursement des dépenses exposées du fait de l'état de santé du jeune ;

2°) de condamner

le centre hospitalier universitaire de Besançon à lui verser la somme de 22 855,63 eur...

Vu I°) la requête, enregistrée le 3 juillet 2009 sous le n° 09NC00990 et rectifiée par mémoire enregistré le 14 mai 2010, présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAÔNE-ET-LOIRE par Me Laffon ;

La caisse demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601095 du 7 mai 2009 du Tribunal administratif de Besançon en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation du CENTRE HOSPITALIER DE BESANCON à lui payer une somme de 44 553,19 euros en remboursement des dépenses exposées du fait de l'état de santé du jeune ;

2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Besançon à lui verser la somme de 22 855,63 euros, augmentée des intérêts au taux légal à compter du jour de la demande, et de la capitalisation des intérêts, correspondant aux prestations versées ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Besançon la somme de 1 400 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

- le tribunal a commis une erreur de droit en estimant qu'elle n'avait pas distingué, au sein des débours engagés, ceux qui sont liés à l'état initial de l'enfant et ceux qui résultent du seul traitement des séquelles de l'infection nosocomiale imputable à l'établissement hospitalier ;

- sa créance se décompose comme suit : 22 164,46 euros au titre des hospitalisations et 691,17 euros au titre des frais médicaux et pharmaceutiques ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistrée le 30 novembre 2009, présenté pour le centre hospitalier universitaire de Besançon par Me Le Prado ;

Le centre hospitalier universitaire de Besançon demande à la Cour de rejeter la requête de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAÔNE-ET-LOIRE;

Il soutient que :

- la demande de la caisse est irrecevable comme nouvelle en appel, car elle a réclamé 44 553,19 euros en première instance, et seulement 25 109,63 euros à hauteur d'appel ;

- la caisse n'a pas démontré le lien entre les débours dont elle demande le remboursement et la faute du centre hospitalier ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 4 janvier 2010, et la pièce complémentaire, enregistrée le 5 février 2010, présentés pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAÔNE-ET-LOIRE, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 avril 2010, présenté pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), par Me Welsch ;

L'ONIAM demande à la Cour de statuer ce que de droit sur la requête de la caisse ;

Vu l'ordonnance du 30 avril 2010 du président de la troisième chambre de la Cour fixant la clôture d'instruction au 12 mai 2010 à 16 heures ;

Vu II°) la requête, enregistrée le 13 juillet 2009 sous le n° 09NC01060, complétée par mémoire enregistré le 21 septembre 2009, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON par Me Le Prado ;

Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601095 du 7 mai 2009 du Tribunal administratif de Besançon en tant qu'il l'a condamné à verser à M. et Mme Toma, en qualité de représentants légaux de leur fils une indemnité de 82 600 euros, en leur nom propre une indemnité d'un montant de 46 772 euros et en qualité de représentants légaux de leur fils Xavier Léger une indemnité d'un montant de 4 000 euros, ces sommes étant assorties des intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2006 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. et Mme Toma devant le Tribunal administratif de Besançon ;

Il soutient que :

- les conclusions dirigées contre lui auraient dû être déclarées irrecevables par les premiers juges, qui ont commis une erreur de droit ; il appartient en effet à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) de prendre en charge les conséquences de l'infection nosocomiale contractée par le jeune , dès lors que la charge de l'indemnisation des infections nosocomiales consécutives à des soins réalisés après le 1er janvier 2003 incombe à ce dernier au titre de la solidarité nationale, sur le fondement de l'article L. 1142-1-1 du code la santé publique, à la seule condition que le taux d'incapacité soit supérieur à 25% ; la commission régionale de conciliation et d'indemnisation s'est prononcée en ce sens ;

- sa responsabilité ne pouvait être mise en cause que sur le fondement d'une action récursoire de l'ONIAM, mais il convient de rejeter l'action récursoire formée par l'ONIAM contre lui, car il n'a pas commis de faute à l'origine du dommage ; le lien de causalité entre les dysfonctionnements qui lui sont imputés et l'infection nosocomiale contractée par l'enfant n'a pas été établi de façon certaine ; ce lien est seulement présumé ;

- le germe contracté par le jeune a été éradiqué par les traitements antibiotiques ; l'infection contractée par l'enfant est le résultat d'un malheureux concours de circonstances, la prématurité de l'enfant ayant joué un rôle essentiel ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 décembre 2009, présenté pour M. Eric et Mme Toma, agissant en leur nom personnel et en qualité de représentants légaux de leurs fils et Xavier Léger, par Me Le Goff ;

M. et Mme Toma concluent au rejet de la requête, à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON et, subsidiairement, de l'ONIAM au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et, subsidiairement, à la condamnation de l'ONIAM à leur payer les sommes que le centre hospitalier a été condamné à leur verser ;

Ils font valoir que :

- l'expert désigné par le tribunal a établi que l'enfant a été victime d'une infection nosocomiale lors de son hospitalisation, la survenue de la méningite et des abcès cérébraux étant la conséquence directe de la septicémie dont l'enfant est atteint ;

- le centre hospitalier a commis une faute, consistant en un défaut d'asepsie et d'hygiène, engageant sa responsabilité, sur le fondement de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 décembre 2009 et rectifié par mémoire enregistré le 14 mai 2010, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de Saône-et-Loire ;

La caisse conclut au rejet de la requête, à la condamnation du CENTRE HOSPITALIER UNVERSITAIRE DE BESANCON à lui verser la somme de 1 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et, par voie d'appel incident, à la condamnation dudit centre hospitalier à lui verser la somme de 22 855,63 euros correspondant aux prestations versées, augmentée des intérêts au taux légal à compter du jour de la demande et de la capitalisation des intérêts;

Elle fait valoir qu'elle entend former appel incident et obtenir la réformation du jugement attaqué en tant qu'il a écarté ses prétentions ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 23 décembre 2009, présenté pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens, et à ce que la Cour rejette les conclusions incidentes de la caisse primaire d'assurance maladie de Saône-et-Loire ;

Il soutient en outre que la caisse n'apporte pas la preuve que les frais dont elle demande le remboursement sont exclusivement liés à la faute imputée au centre hospitalier ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 5 février 2010, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de Saône-et-Loire, qui conclut dans le sens de ses précédentes écritures ;

Elle fait valoir en outre que sa créance se décompose comme suit : 22 164,46 euros au titre des hospitalisations et 691,17 euros au titre des frais médicaux et pharmaceutiques ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 avril 2010, présenté pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) par Me Welsch ;

L'ONIAM conclut au rejet de la requête et à la condamnation du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il fait valoir que :

- les dispositions de l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique ne sont en l'état et en l'absence de consolidation, pas applicables, les conditions d'une indemnisation au titre de la solidarité nationale ne sont pas réunies ; seules les dispositions de l'article L. 1142-1-1 alinéa 2 issues de la loi du 4 mars 2002 sont applicables ;

- la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON, qui ne rapporte pas la preuve d'une cause étrangère, est engagée ;

- dans le cas d'une application des dispositions de l'article L. 1142-1-1 du code de la santé publique, il ressort du rapport d'expertise un certain nombre de manquements constitutifs d'une faute établie du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON qui justifie alors l'action récursoire de l'ONIAM en application de l'article L. 1142-21 du code de la santé publique ;

Vu l'ordonnance du président de la troisième chambre de la Cour portant clôture d'instruction au 12 mai 2010 à 16 heures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mai 2010 :

- le rapport de M. Favret, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public ;

Considérant que les requêtes susvisées de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAÔNE-ET-LOIRE et du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON sont dirigées contre un même jugement et sont relatives aux conséquences dommageables de l'état de santé d'une même personne ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par

un seul arrêt ;

Considérant que Mme Toma a accouché le 6 juin 2003, par césarienne, au CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANÇON ; que l'enfant, dénommé , est né prématurément à 33 semaines d'aménorrhée, et a dû être hospitalisé pour ce motif en unité nénoatale de soins intensifs ; que le 12 juin suivant, il a présenté une fièvre et une altération de son état général, victime d'une méningite purulente diagnostiquée dès le lendemain, causée par un germe dénommé Serratia marcescens, identifié le 14 juin 2003 ; que l'enfant reste atteint de diverses séquelles motrices, cognitives et comportementales ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Besançon a condamné le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON à réparer le préjudice subi par et ses proches et rejeté les conclusions indemnitaires de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAÔNE-ET-LOIRE ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON soutient qu'en le condamnant, le tribunal aurait statué au-delà des conclusions et des moyens dont il était saisi, dès lors que les requérants n'auraient conclu qu'à la condamnation de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales en ne recherchant qu'à titre subsidiaire sa propre responsabilité et en n'invoquant aucune faute à son égard ; que, toutefois, M. et Mme Toma ont dirigé exclusivement leurs conclusions contre le centre hospitalier avant de conclure, dans le dernier état de leurs écritures, également contre l'ONIAM ; que, dans leur mémoire après expertise du 6 février 2009, les intéressés se sont par ailleurs prévalus d'une faute du centre hospitalier ; que, par suite, le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une irrégularité de nature à entraîner son annulation ;

Sur la détermination de la personne publique chargée de l'indemnisation du préjudice subi par et ses proches :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction alors en vigueur, issue de l'article 98 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé : I. Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé susmentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) / II. -Lorsque la responsabilité d'un professionnel, d'un établissement, service ou organisme mentionné au I ...n'est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient au titre de la solidarité nationale, lorsqu'ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu'ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d'incapacité permanente ou de la durée de l'incapacité temporaire de travail. / Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux

d'incapacité permanente supérieur à un pourcentage d'un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret ; qu'aux termes de l'article L. 1142-1-1 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur issue de l'article 1er de la loi du 30 décembre 2002 : Sans préjudice des dispositions du septième alinéa de l'article L. 1142-17, ouvrent droit à réparation au titre de la solidarité nationale : / 1º Les dommages résultant d'infections

nosocomiales dans les établissements, services ou organismes mentionnés au premier alinéa du I de l'article L. 1142-1 correspondant à un taux d'incapacité permanente supérieur à 25 % déterminé par référence au barème mentionné au II du même article, ainsi que les décès provoqués par ces infections nosocomiales (...) ; que ces dispositions, distinctes de celles qui résultaient de la loi du 4 mars 2002 précitée, ont créé un nouveau régime de prise en charge par la solidarité nationale des dommages résultant des infections nosocomiales, à la seule condition qu'elles aient entraîné un taux d'incapacité permanente supérieur à 25% ou le décès du patient ; que ces dispositions s'appliquent aux conséquences dommageables des infections nosocomiales consécutives à des activités de prévention, de diagnostic ou de soins réalisées à compter du 1er janvier 2003 ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 1142-22 du même code : L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (...) est chargé de l'indemnisation au titre de la solidarité nationale (...) ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal, d'une part que l'infection par le germe Serratia marcescens a été contractée en juin 2003 par le jeune lors de son hospitalisation dans le service de néonatologie du centre hospitalier, d'autre part que les séquelles dont reste atteint l'enfant sont imputables à l'infection nosocomiale et que le taux prévisible du déficit fonctionnel permanent ne sera pas inférieur à 50 % ; qu'il s'ensuit qu'il incombait à l'ONIAM, et à lui seul, en application des dispositions précitées, de prendre en charge, au titre de la solidarité nationale, l'indemnisation des conséquences dommageables de l'infection contractée par le jeune , et ce sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'état de santé de l'enfant n'est pas consolidé, l'expert ayant estimé que cette consolidation ne pourrait intervenir qu'après un nouvel examen à l'âge de 10 ans, dès lors qu'il est certain, comme il a été dit ci-dessus, que le taux d'incapacité permanente sera supérieur à 25 % ; que le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON est ainsi fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a écarté la responsabilité de l'ONIAM ;

Sur l'action récursoire de l'ONIAM à l'encontre du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-21 du même code : (...) Lorsqu'il résulte de la décision du juge que l'office indemnise la victime ou ses ayants droit au titre de l'article L. 1142-1-1, celui-ci ne peut exercer une action récursoire contre le professionnel, l'établissement de santé, le service ou l'organisme concerné ou son assureur, sauf en cas de faute établie à l'origine du dommage, notamment le manquement caractérisé aux obligations posées par la réglementation en matière de lutte contre les infections nosocomiales... ; que ces dispositions ouvrent à l'office une action récursoire contre l'établissement de santé en cas de faute établie à l'origine du dommage ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par le tribunal, qu'il existait un contexte épidémique lors de l'hospitalisation de l'enfant dans le service de néonatologie, onze autres cas d'infection ayant été recensés sur des nourrissons entre décembre 2002 et juin 2003, dont cinq mortels ; qu'un autre enfant a contracté une infection dû au même germe que

celui contracté par le jeune et en est d'ailleurs décédé ; qu'ainsi que l'ont constaté les premiers juges, le compte rendu d'un audit réalisé par le Clin Est-Strasbourg au moment des faits révèle une série de points critiques non maîtrisés au niveau du respect des règles d'hygiène, notamment le non-respect des règles de prévention des risques de transmission croisée par les personnels extérieurs au service ; qu'aucune infection maternelle n'a été établie ; que les prélèvements bactériologiques réalisés les 6 et 7 juin 2003 sur le nourrisson ont été négatifs ; que les

signes d'infection se sont manifestés le 12 juin 2003 alors qu' avait été admis dans le service six jours plus tôt ; que, bien que prématuré, n'a eu besoin ni de manoeuvre de réanimation à la naissance ou durant les six premiers jours de vie, ni d'oxygénothérapie ; qu'il s'ensuit que l'infection nosocomiale contractée par trouve son origine dans une défaillance du centre hospitalier en matière d'asepsie et d'hygiène ; que cette défaillance est constitutive d'une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service public hospitalier ; que l'ONIAM est ainsi fondé, en application des dispositions précitées, à demander que le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANÇON soit condamné à supporter la charge définitive de l'indemnisation du préjudice, d'un montant non contesté, subi par et ses proches ;

Sur les conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAÔNE-ET-LOIRE :

Considérant que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAÔNE-ET-LOIRE est recevable à apporter, pour la première fois en appel, des précisions utiles sur les débours dont elle réclame le remboursement ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANÇON et tirée de l'irrecevabilité de ses conclusions d'appel doit être écartée ;

Considérant que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAÔNE-ET-LOIRE demande la condamnation du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON à lui verser la somme de 22 855,63 euros, correspondant aux frais d'hospitalisation ainsi qu'aux frais médicaux et pharmaceutiques qu'elle a supportés, dont le lien avec l'infection nosocomiale contractée par le jeune est établi dès lors que les dates des hospitalisations concernées correspondent à celles précisées par l'expert comme se rapportant aux conséquences de l'infection nosocomiale ; que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAÔNE-ET-LOIRE est dès lors fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande et à demander la condamnation du centre hospitalier à lui verser cette somme ;

Sur les intérêts et leur capitalisation :

Considérant que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAÔNE-ET-LOIRE est fondée à demander que la somme de 22 855,63 euros porte intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2007, date d'introduction de sa devant le tribunal administratif ; que la capitalisation a été demandée le 3 juillet 2009 ; qu'à cette date, il était dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à cette demande à cette date ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de celle-ci ;

Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON la somme de 1 500 euros que demandent M. et Mme Toma au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON, qui obtient la réformation du jugement en tant qu'il l'a condamné directement à indemniser le préjudice subi mais demeure condamné à en supporter la charge définitive sur action récursoire de l'ONIAM, doit être regardé comme partie perdante vis-à-vis de celui-ci ; qu'il y a ainsi lieu de faire droit aux conclusions de ce dernier et de mettre à la charge du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 ; qu'enfin, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAÔNE-ET-LOIRE dirigées contre le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON et de mettre à la charge de ce dernier la somme de 1 400 euros qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales est condamné à verser à M. et à Mme Toma les sommes mises à la charge du CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON par les articles 1er, 2 et 3 du jugement attaqué.

Article 2 : Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON supportera la charge définitive des condamnations prononcées à l'article 1er ci-dessus.

Article 3 : Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON est condamné à verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAÔNE-ET-LOIRE une somme de 22 855,63 euros. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2007, lesdits intérêts étant capitalisés le 3 juillet 2009 ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de celle-ci.

Article 4 : Le jugement du 7 mai 2009 du Tribunal administratif de Besançon est annulé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON versera à M. et à Mme Toma la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON versera à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE BESANCON versera à LA CAISSE PRIMAIRE D'ASUURANCE MALADIE DE SAÔNE-ET-LOIRE la somme de 1 400 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 8 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 9 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE

BESANCON, à M. Eric et Mme Nadège Toma, à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SAÔNE-ET-LOIRE et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.

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09NC00990 / 09NC01060


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC00990
Date de la décision : 17/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Jean-Marc FAVRET
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : LE PRADO ; LE PRADO ; LE PRADO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-06-17;09nc00990 ?
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