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31/05/2010 | FRANCE | N°08NC00137

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 31 mai 2010, 08NC00137


Vu la requête, enregistrée le 29 janvier 2008, complétée par un mémoire enregistré le 26 avril 2010, présentée pour la COMMUNAUTE DE COMMUNES DU PAYS D'ANGLURE, représentée par son président, dont le siège social est sis Promenade de l'Aube à Anglure (51260), par la SCP Colomes, avocats ; la COMMUNAUTE DE COMMUNES DU PAYS D'ANGLURE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400030 en date du 4 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'a condamnée à payer à la société Allround Echafaudages la somme de 51 787,40 euros, avec

intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 2003, ainsi qu'une somme de 9...

Vu la requête, enregistrée le 29 janvier 2008, complétée par un mémoire enregistré le 26 avril 2010, présentée pour la COMMUNAUTE DE COMMUNES DU PAYS D'ANGLURE, représentée par son président, dont le siège social est sis Promenade de l'Aube à Anglure (51260), par la SCP Colomes, avocats ; la COMMUNAUTE DE COMMUNES DU PAYS D'ANGLURE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0400030 en date du 4 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne l'a condamnée à payer à la société Allround Echafaudages la somme de 51 787,40 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 2003, ainsi qu'une somme de 900 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter les demandes présentées par la société Allround Echafaudages devant le Tribunal administratif et ses conclusions incidentes devant la Cour ;

3°) subsidiairement, de limiter l'indemnisation due à la société Allround Echafaudages à la somme de 557 euros par semaine supplémentaire de mise à disposition des matériels ;

4°) de mettre à la charge de la société Allround Echafaudages une somme de 2 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- ayant accepté le 10 décembre 2002 le décompte général établi par le maître d'oeuvre, la société Allround Echafaudages n'était, en application de l'article 50-3 du CCAG, pas recevable à saisir le tribunal d'une réclamation ;

- son projet de décompte contenant une demande au titre de la période du 25 mars au 14 juillet 2002, la société Allround Echafaudages n'était pas recevable à saisir le tribunal d'une réclamation correspondant à une période postérieure ;

- aucune décision de poursuivre ni aucun avenant n'est intervenu justifiant une rémunération complémentaire ;

- les stipulations de l'article 15-3 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) ne peuvent s'appliquer dès lors que le marché ne stipulait aucun délai d'exécution ;

- les travaux supplémentaires ne peuvent être indemnisés, n'étant ni indispensables ni imprévisibles ;

- sa relation contractuelle avec la société Allround Echafaudages est circonscrite aux obligations résultant de l'acte d'engagement initial dès lors qu'aucun avenant régulier n'a été conclu ;

- le prix convenu dans l'acte d'engagement est forfaitaire et incorpore l'ensemble des sujétions d'exécution des travaux telles qu'elles sont normalement prévisibles au moment de la conclusion du contrat ;

- le moyen tiré de l'application des stipulations de l'article 15-3 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) ayant été soulevé dans un mémoire complémentaire est irrecevable ; les stipulations de l'article 15-3 du cahier des clauses administratives générales ne trouvent pas à s'appliquer au cas d'espèce dès lors que le CCTP exclut la rémunération de travaux supplémentaires non ordonnés ou autorisés; aucun ordre de service de poursuivre les travaux n'a été adressé à la société Allround Echafaudages conformément à l'article 15-4 du CCAG ;

- l'allongement de la durée du chantier est imputable aux fautes commises par la société Allround Echafaudages pendant le déroulement de celui-ci, notamment en ce qui concerne la mise en conformité complète des échafaudages ; la société Allround Echafaudages n'a pu faire réaliser les vérifications finales de stabilité des échafaudages par l'organisme agréé, après de multiples rappels, que le 5 juin 2002 ; cette carence a décalé l'intervention des autres entreprises ; la société Allround Echafaudages n'a pas contesté les pénalités de retard qui lui ont été notifiées, pour 92 jours ; il lui a été ordonné le retrait des échafaudages le 21 octobre 2002 ;

- le montant de l'indemnisation accordée à société Allround Echafaudages, si son principe était retenu, devrait, en tout état de cause, être minoré, ne pouvant inclure des frais d'aller-retour et de montage-démontage supplémentaires ; le bénéfice ne peut raisonnablement dépasser 30 %, soit un maximum de 557 euros par semaine ; la période retenue par le tribunal, de 15 semaines, doit être diminuée des congés d'été pour 4 semaines ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 octobre 2009, présenté pour la société Allround Echafaudages, représentée par son gérant, dont le siège social est sis rue Denis Papin à Créanges (57690), par Me Ivernel, avocat ;

La société Allround Echafaudages demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête de la COMMUNAUTE DE COMMUNES D'ANGLURE ;

2°) de réformer le jugement attaqué en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la COMMUNAUTE DE COMMUNES D'ANGLURE à l'indemniser de son préjudice d'immobilisation des matériels chiffré à 60 622,25 euros ;

3°) de mettre à la charge de la COMMUNAUTE DE COMMUNES D'ANGLURE une somme de 5 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le moyen tiré de l'application des stipulations de l'article 15-3 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) n'a pas à être soulevé dans le mémoire de réclamation pour être recevable devant le tribunal ; la contestation du décompte n'exige, en application de l'article 13-44 du CCAG, que l'indication des motifs et du montant de la réclamation ;

- le litige doit s'analyser comme la demande de rémunération de travaux supplémentaires indispensables à la bonne exécution de l'ouvrage ; le paiement de ces travaux supplémentaires n'est pas conditionné à la passation d'un avenant ou à l'existence d'un ordre de service ; le caractère forfaitaire du marché n'est aucunement incompatible avec cette rémunération ;

- l'économie du marché a été bouleversée en raison de l'exécution du double des prestations initialement prévues au contrat ;

- le marché s'analysant en un louage d'ouvrage, la notion de durée de location est liée au montant global et forfaitaire du marché ;

- elle a parfaitement respecté ses obligations contractuelles et le retard dans l'exécution du chantier ne lui est pas imputable ;

- le procès-verbal de stabilité des échafaudages, établi par le bureau Véritas, a été communiqué le 25 mars 2002 ;

- la COMMUNAUTE DE COMMUNES D'ANGLURE fait un amalgame entre la mission de contrôleur technique confiée au bureau Véritas et celle de coordination confiée à la société Norisko ; cette dernière a relevé que des garde-corps avaient été ôtés en avril par des artisans, circonstance qui ne saurait lui être imputée ; il n'y a eu aucun affaissement mais un simple faux niveau ;

- les différents corps de métiers avaient débuté leurs travaux bien avant le 13 juin 2002 ;

- elle a été contrainte, compte tenu de l'immobilisation des échafaudages sur le chantier, d'avoir recours à l'achat et à la location de matériels supplémentaires, afin d'honorer d'autres obligations contractuelles, dont le coût constitue un préjudice direct du fait du dépassement de délai des travaux commandés par la COMMUNAUTE DE COMMUNES D'ANGLURE ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mai 2010 :

- le rapport de M. Devillers, premier conseiller,

- les conclusions de M. Wallerich, rapporteur public,

- et les observations de Me Colomés, avocat de la COMMUNAUTE DE COMMUNES D'ANGLURE ainsi que celles de Me L'huillier, avocat de la société Allround Echafaudages ;

Considérant que, par acte d'engagement du 30 novembre 2001, la COMMUNAUTE DE COMMUNES D'ANGLURE a confié à la société Allround Echafaudages, pour un montant de 85 898,94 euros TTC, le lot n° 1 Echafaudages du marché de grosses réparations de l'église de Conflans sur Seine ; que la société Allround Echafaudages a saisi le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'une demande tendant à la condamnation de la COMMUNAUTE DE COMMUNES D'ANGLURE à lui verser une indemnisation au titre du préjudice résultant, d'une part, des frais d'immobilisation de ses matériels au delà du délai d'exécution contractuel, d'autre part, des frais de location et achat de matériels supportés afin d' honorer ses autres engagements ; que la COMMUNAUTE DE COMMUNES D'ANGLURE fait appel du jugement du 4 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif l'a condamnée à verser à la société requérante une somme de 51 787,40 euros au titre du premier chef de préjudice ; que la société Allround Echafaudages demande, par la voie de l'appel incident, la condamnation de la COMMUNAUTE DE COMMUNES D'ANGLURE à lui verser la somme de 60 622,25 euros au titre du second chef de préjudice invoqué;

Sur l'appel principal de la COMMUNAUTE DE COMMUNES D'ANGLURE :

Considérant qu'il résulte de l'article 3 de l'acte d'engagement du marché litigieux que le délai d'exécution est de quatre mois à partir de la date fixée par l'ordre de service prescrivant à l'entrepreneur titulaire du lot n° 1 de commencer l'exécution des travaux lui incombant ; qu' en vertu de l'article 15-3 du cahier des clauses administratives générales applicables au marché (CCAG-travaux), l'augmentation de la masse des travaux ne donne lieu à indemnité pour l'entrepreneur que si, dans un marché à prix forfaitaire, cette augmentation est supérieure au vingtième de la masse initiale ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que, par ordre de service du 18 février 2002, la société Allround Echafaudages a été invitée à commencer les travaux à compter du même jour ; que, par procès-verbal de réception avant mise en service en date du 25 mars 2002, le bureau Veritas, chargé du contrôle technique, a établi la conformité à leur utilisation des échafaudages installés ; que la durée des travaux a été prolongée au-delà du terme fixé par le marché, pour une durée totale de 4 mois et 3 jours s'étendant du 19 juin au 21 octobre 2002, à la suite de retards non imputables à la société Allround Echafaudages, afin de permettre l'achèvement des travaux de grosses réparations de l'église ; que nonobstant l'accord exprès donné par l'entreprise à une mise à disposition gracieuse de ses matériels jusqu'au 14 juillet 2002, l'augmentation de la masse des travaux résultant de cet allongement des délais d'exécution est supérieure au vingtième de la masse initiale des travaux ;

Considérant, en deuxième lieu, que la COMMUNAUTE DE COMMUNES D'ANGLURE allègue, sans l'établir que la société Allround Echafaudages, qui n'a au demeurant établi son projet de décompte définitif que le 9 décembre 2002, incluant la demande de rémunération complémentaire litigieuse, aurait accepté le 10 décembre 2002 un décompte général établi par le maître d'oeuvre ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte du projet de décompte définitif précité en date du 9 décembre 2002 établi par la société Allround Echafaudages qu'il comporte l'indication de la période du 25 mars au 14 juillet 2002 seulement pour la location des escaliers d'accès et parapluie et non pour le poste Dépassement du délai contractuel de 15 semaines ; que le moyen tiré d'une modification des termes de la réclamation initiale ne peut donc, en tout état de cause, qu'être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, que la circonstance qu'aucune décision de poursuivre ou avenant ne soit intervenu est sans incidence sur le droit de la société Allround Echafaudages à obtenir une indemnité sur le fondement de l'article 15-3 du cahier des clauses administratives générales applicables au marché ;

Considérant, en cinquième lieu, que la communauté de communes ne peut utilement exciper de l'absence d'invocation par l'entreprise de l'article 15-3 précité du CCAG-travaux au stade de la réclamation pour s'opposer à la recevabilité de la demande sur ce fondement ; que ces stipulations s'appliquent par ailleurs expressément, comme en l'espèce, aux marchés à prix forfaitaire;

Considérant, en dernier lieu, que si la communauté de communes fait état de réserves relevées par l'entreprise chargée de la mission de coordination et de sécurité de l'ensemble du chantier, concernant le bon fonctionnement des échafaudages, elle n'établit pas que le chantier aurait été interrompu pour cette raison ou que ces dysfonctionnements seraient à l'origine de l'allongement des délais d'exécution ; qu'également, la circonstance que des pénalités de retard aient été infligées à l'entreprise, en application des stipulations du contrat, est sans incidence sur son droit d'obtenir la rémunération des prestations complémentaires effectuées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Allround Echafaudages a droit au paiement de l'immobilisation de son matériel pour la période du 14 juillet au 21 octobre 2002 ; que la somme de 51 787,40 euros retenue par les premiers juges ne peut être regardée, compte tenu de la durée d'allongement du chantier, du prix initial et de sa décomposition, comme manifestement excessive ; que les conclusions d'appel principal de la COMMUNAUTE DE COMMUNES D'ANGLURE doivent, par suite, être rejetées ;

Sur l'appel incident de la société Allround Echafaudages :

Considérant que si la société Allround Echafaudages soutient qu'elle a subi un préjudice du fait de l'obligation dans laquelle elle se serait trouvée de louer et d'acheter du matériel afin d'honorer des marchés dont elle était titulaire pendant la période d'allongement des travaux litigieux, elle n'apporte, pas plus en appel qu'en première instance, d'éléments établissant, d'une part, que le matériel immobilisé sur le chantier de Conflans sur Seine lui était absolument indispensable pour l'exécution d'autres chantiers et que les matériels loués ou achetés correspondraient à ceux immobilisés, d'autre part, que l'indemnisation susmentionnée accordée au titre de la prolongation du chantier ne réparerait pas ce même préjudice ; que, dès lors, le lien de causalité entre le préjudice dont elle se prévaut et l'immobilisation de son matériel au-delà des délais prévus par le contrat n'est pas établi ; que, par suite les conclusions présentées par la voie de l'appel incident par la société Allround Echafaudages doivent, en tout état de cause, être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de faire application de ces dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la COMMUNAUTE DE COMMUNES D'ANGLURE est rejetée.

Article 2 : Les conclusions incidentes de la société Allround Echafaudages et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNAUTE DE COMMUNES D'ANGLURE et à la société Allround Echafaudages.

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08NC00137


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08NC00137
Date de la décision : 31/05/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: M. Pascal DEVILLERS
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : SCP COLOMES - MATHIEU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-05-31;08nc00137 ?
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