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08/04/2010 | FRANCE | N°09NC00647

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 08 avril 2010, 09NC00647


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 4 mai 2009, présentée pour Mme Nadjete A, demeurant ..., par Me Baumont ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900034 du 9 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 20 novembre 2008 par lequel le préfet du Territoire-de-Belfort lui a refusé un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays dont elle a la nationalité comme pays de destination, d'autre part, à ce

que le dit préfet soit enjoint de lui délivrer une carte de séjour temporaire ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 4 mai 2009, présentée pour Mme Nadjete A, demeurant ..., par Me Baumont ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900034 du 9 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a rejeté sa requête tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 20 novembre 2008 par lequel le préfet du Territoire-de-Belfort lui a refusé un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays dont elle a la nationalité comme pays de destination, d'autre part, à ce que le dit préfet soit enjoint de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de 15 jours à compter du jugement et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans le même délai et sous la même astreinte ;

2°) d'annuler l'arrêté du 20 novembre 2008 ;

3°) d'enjoindre le préfet du Territoire-de-Belfort de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le refus de séjour et la décision portant obligation de quitter le territoire, qui ne font pas mention de l'état de santé de son époux, sont insuffisamment motivés ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'elle ne pouvait pas se voir délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article 6 5° l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : elle vit avec son mari, qui est en situation régulière en France, et attend un enfant de lui ; l'arrêté attaqué la sépare de son mari, dont l'état de santé ne lui permet pas de quitter la France pour mettre en oeuvre la procédure de regroupement familial ; l'arrêté attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'arrêté litigieux est contraire à l'intérêt de son enfant à naître, qui serait privé de la possibilité de vivre avec son père ;

- elle a droit à un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'illégalité du refus de séjour emporte celle de l'obligation de quitter le territoire et celle de la décision fixant le pays de renvoi ;

- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 juin 2009, présenté par le préfet du Territoire-de-Belfort, qui conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir que les moyens de la requérante ne sont pas fondés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles et ses avenants ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Convention internationale des droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mars 2010 ;

- le rapport de M. Favret, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le refus de séjour :

Considérant, en premier lieu, que la décision en date du 20 novembre 2008 par laquelle le préfet du Territoire de Belfort a refusé un titre de séjour à Mme A comporte les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'elle est, dès lors, régulièrement motivée au regard des exigences posées par la loi du 11 juillet 1979 susvisée ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : Le certificat de résidence d'un portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : / (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus... ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A, ressortissante algérienne, est entrée en France le 12 septembre 2008 sous couvert d'un passeport muni d'un visa de court séjour ; qu'elle s'est mariée le 11 octobre 2008 avec un ressortissant algérien, M. Fayçal Missaoui, titulaire d'une carte de résident valable 10 ans ; que, par arrêté du 20 novembre 2008, le préfet du territoire de Belfort a rejeté sa demande au motif qu'elle était dépourvue de visa de long séjour et que son mari pouvait demander le regroupement familial en sa faveur ; que si elle soutient que l'état de santé de son époux ne lui permettrait pas de quitter la France pour mettre en oeuvre la procédure de regroupement familial, il ne ressort pas des pièces du dossier que la transplantation rénale subie par ce dernier, au demeurant antérieure au mariage et ne l'empêchant pas de travailler, rendrait ,nécessaire la présence constante de son épouse à ses côtés ; que, dans ces conditions, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que la requérante ne pouvait obtenir un titre de séjour sur les fondement des stipulations précitées ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 : Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions politiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'entrée en France de la requérante et son mariage sont très récents, et que ses parents ainsi que dix de ses onze frères et soeurs résident en Algérie ; que, comme il a été dit ci-dessus, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de M. Missaoui nécessiterait la présence constante de son épouse à ses côtés ; que si, à la date de la décision attaquée, l'intéressée était enceinte, cette situation n'a été portée à la connaissance de l'administration que le 10 décembre 2008, soit postérieurement à la décision attaquée ; que Mme A ne saurait utilement invoquer les dispositions de l'article 3-1 de la convention sur les droits de l'enfant, dès lors que l'enfant était encore à naître à la date de la décision litigieuse ; que, dans ces conditions, Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le préfet du Territoire-de-Belfort n'avait pas méconnu les stipulations précitées, ni commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de toute nature de sa décision sur la situation de la requérante ;

Considérant, en quatrième lieu, que la requérante, qui relève des dispositions particulières de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, ne saurait utilement faire valoir qu'elle serait en droit d'obtenir un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version alors applicable : I. - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation... ; qu'ainsi, le préfet du Territoire-de-Belfort n'était pas tenu de motiver l'obligation de quitter le territoire français notifiée à Mme A ;

Considérant, en deuxième lieu, que Mme A ne résidait en France que depuis trois mois à la date de la décision d'éloignement litigieuse ; qu'elle a vécu jusqu'à l'âge de 28 ans dans son pays d'origine où demeurent la plupart des membres de sa famille ; qu'ainsi qu'il a été dit plus haut, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé de M. Missaoui nécessiterait la présence constante de son épouse à ses côtés ; qu'il s'ensuit que les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire aurait méconnu les stipulations de l'article 6 5° de l'accord franco-algérien susvisé, de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'article 3-1 de la convention de New-York le 26 janvier 1990 doivent être écartés ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen, invoqué à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire, et tiré de l'illégalité du refus de titre de séjour opposé à Mme A, doit être écarté ;

En ce qui concerne la fixation du pays de destination :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen, invoqué à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, et tiré de l'illégalité du refus de titre de séjour opposé à Mme A, doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; que si la requérante soutient que la décision en litige fixant le pays de destination méconnaîtrait les dispositions précitées, elle n'assortit ce moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ; que le moyen doit ainsi être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa requête ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que les conclusions de Mme A tendant à ce que la Cour ordonne au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de 15 jours à compter de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande dans le même délai et sous la même astreinte, ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;

Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme A au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Nadjete A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

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N°09NC00647


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC00647
Date de la décision : 08/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Jean-Marc FAVRET
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : BAUMONT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-04-08;09nc00647 ?
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