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22/03/2010 | FRANCE | N°08NC01727

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 22 mars 2010, 08NC01727


Vu, enregistrée le 1er décembre 2008, la requête présentée pour M. Alain A, demeurant ..., par Me Thabet, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0704942 en date du 18 novembre 2008 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur, en date du 12 octobre 2007, l'informant de la perte de quatre points du capital de son permis de conduire ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer

et des collectivités locales de lui restituer les points illégalement retirés dans...

Vu, enregistrée le 1er décembre 2008, la requête présentée pour M. Alain A, demeurant ..., par Me Thabet, avocat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0704942 en date du 18 novembre 2008 par laquelle le vice-président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur, en date du 12 octobre 2007, l'informant de la perte de quatre points du capital de son permis de conduire ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités locales de lui restituer les points illégalement retirés dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A soutient que :

- l'ordonnance est irrégulière dès lors que le ministre a acquiescé aux faits et que le tribunal s'est mépris sur le sens à donner à son moyen ; que le moyen opérant faisait obstacle à l'application de l'article R. 222-1-7° du code de justice administrative ;

- ce moyen tiré de ce que la consignation préalable avait été acquittée et qu'il contestait l'infraction faisait obstacle à tout retrait des points du permis de conduire ;

Vu l'ordonnance et la décision attaquées ;

Vu, enregistré le 27 janvier 2009, le mémoire en défense par lequel le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête qui est infondée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la route ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er mars 2010 :

- le rapport de M. Job, président de chambre,

- et les conclusions de M. Wallerich, rapporteur public ;

Sur la régularité de l'ordonnance :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux ... peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens (...) inopérants (...). ;

Considérant qu'en regardant le seul moyen de M. A comme tiré de la contestation des circonstances de faits de l'infraction au code de la route commise 24 mars 2007 à Souffelweyersheim et, par conséquent, inopérant devant le juge administratif, puis en rejetant pour ce motif la demande de l'intéressée par ordonnance en application de l'article R. 221-7° du code de justice administrative, alors que le moyen du demandeur était tiré de l'erreur commise par le ministre de l'intérieur consistant à regarder la somme versée comme le paiement de l'amende forfaitaire alors qu'il s'agissait d'une consignation opérée en application de l'article 529-10 du code de procédure pénale, moyen opérant, le magistrat délégué qui ne pouvait statuer par ordonnance a commis une erreur de droit dans l'application desdites dispositions qui justifie l'annulation de cette ordonnance ;

Considérant qu'il y a lieu de se prononcer immédiatement par voie d'évocation, sur les conclusions présentées par le requérant devant le tribunal administratif de Strasbourg ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 223-1 du code de la route dans sa version en vigueur à la date de constatation des infractions en cause : Le permis de conduire est affecté d'un nombre de points. Celui-ci est réduit de plein droit si le titulaire du permis a commis une infraction pour laquelle cette réduction est prévue. (...) La réalité d'une infraction entraînant retrait de points est établie par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, l'exécution d'une composition pénale ou par une condamnation définitive ;

Considérant que, s'agissant des infractions au code de la route, les dispositions des articles R. 49-1 et R. 49-10 du code de procédure pénale prévoient que, lorsque la constatation d'infraction n'est pas suivie de l'interpellation du contrevenant et qu'il est recouru à la procédure de l'amende forfaitaire, l'avis de contravention et les autres documents prévus à ces articles sont envoyés au titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule ; qu'aux termes de l'article 529 du code de procédure pénale : (...) l'action publique est éteinte par le paiement d'une amende forfaitaire (...) ; que toutefois, en vertu des articles 529-2 et 530 du même code, le destinataire d'un avis d'amende forfaitaire ou d'amende forfaitaire majorée peut présenter, dans le délai qui lui est imparti pour en acquitter le montant, une requête tendant à son exonération ou une réclamation, soumises aux règles de recevabilité prévues par ce code; qu'au vu de cette requête ou de cette réclamation et en application des dispositions de l'article 530-1 du même code, le ministère public, s'il n'oppose pas son irrecevabilité et ne renonce pas à l'exercice des poursuites, procède conformément aux articles 524 à 528-2 ou aux articles 531 et suivants du code de procédure pénale en saisissant, respectivement selon la procédure simplifiée ou la procédure normale, la juridiction de proximité, qui connaîtra alors de la contravention reprochée à l'intéressé ;

Considérant que l'article 529-10 du code de procédure pénale dispose que : Lorsque l'avis d'amende forfaitaire concernant une des contraventions mentionnées à l'article L. 121-3 du code de la route a été adressé au titulaire du certificat d'immatriculation ou aux personnes visées aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 121-2 de ce code, la requête en exonération prévue par l'article 529-2 ou la réclamation prévue par l'article 530 n'est recevable que si elle est adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et si elle est accompagnée : (...) 2° Soit d'un document démontrant qu'il a été acquitté une consignation préalable d'un montant égal à celui de l'amende forfaitaire dans le cas prévu par le premier alinéa de l'article 529-2 (...) ; cette consignation n'est pas assimilable au paiement de l'amende forfaitaire et ne donne pas lieu au retrait des points du permis de conduire prévu par le quatrième alinéa de l'article L. 223-1 du code de la route. L'officier du ministère public vérifie si les conditions de recevabilité de la requête ou de la réclamation prévues par le présent article sont remplies. ; qu'aux termes de l'article R. 49-18 du code de procédure pénale : Lorsqu'une consignation a été acquittée en application des dispositions de l'article 529-10, il est fait application des dispositions suivantes : Si la consignation n'est pas suivie d'une requête en exonération ou d'une réclamation formulée conformément aux dispositions des articles 529-2, 529-10 et 530, elle est considérée comme valant paiement de l'amende forfaitaire ou de l'amende forfaitaire majorée. (...) ; qu'aux termes de l'article 530 du code de procédure pénale : (...) Dans les trente jours de l'envoi de l'avis invitant le contrevenant à payer l'amende forfaitaire majorée, l'intéressé peut former auprès du ministère public une réclamation motivée qui a pour effet d'annuler le titre exécutoire en ce qui concerne l'amende contestée. (...). ;

Considérant que l'article L. 225-1 du code de la route fixe la liste des informations qui, sous l'autorité et le contrôle du ministre de l'intérieur, sont enregistrées au sein du système national des permis de conduire ; que sont notamment mentionnés au 5° de cet article les procès-verbaux des infractions entraînant retrait de points et ayant donné lieu au paiement d'une amende forfaitaire en vertu de l'article 529 du code de procédure pénale ou à l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée prévu à l'article 529-2 du code de procédure pénale ; qu'en vertu de l'arrêté du 29 juin 1992 fixant les supports techniques de la communication par le ministère public au ministère de l'intérieur des informations prévues à l'article L. 30 (4°, 5°, 6° et 7°) du code de la route, les informations mentionnées au 6° de l'article L. 30, devenu le 5° de l'article L. 225-1 du code de la route sont communiquées par l'officier du ministère public par support ou liaison informatique ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que le mode d'enregistrement et de contrôle des informations relatives aux infractions au code de la route conduit à considérer que la réalité de l'infraction est établie dans les conditions prévues à l'article L. 223-1 du code de la route dès lors qu'est inscrite, dans le système national des permis de conduire, la mention du paiement de l'amende forfaitaire ou de l'émission du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée, sauf si l'intéressé justifie avoir...formé, dans le délai prévu à l'article 530 du code de procédure pénale, une réclamation ayant entraîné l'annulation du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée ;

Considérant qu'à la suite de l'infraction au code de la route commise 24 mars 2007 à Souffelweyersheim, M. A s'est vu infliger une amende forfaitaire majorée en vertu d'un titre rendu exécutoire par l'officier du ministère public le 6 juin 2007, mise en recouvrement suivant un avis du Trésor public du 15 juin 2007 dont l'administration ne conteste pas la date de notification le 19 juin 2007 ; que M. A a formé, le 12 juillet 2007, une réclamation en faisant valoir qu'il contestait la matérialité de l'infraction ; que par décision du 16 juillet 2007, l'officier du ministère public a rejeté cette réclamation pour défaut de consignation; qu'il est constant que le requérant a acquitté la somme de 375 euros, puis, par courrier adressé en recommandé le 19 juillet 2007, a demandé à l'officier du ministère public de regarder le versement intervenu comme constituant la consignation jointe à sa réclamation, formulée conformément aux dispositions des articles 529-2, 529-10 et 530 du code de procédure pénale; qu'en application de dispositions de l'article 530 dudit code, le titre exécutoire se trouvait annulé et la réalité de l'infraction n'était plus établie ; que dans ces conditions, les dispositions de l'article 529-10 dudit code faisant obstacle au retrait des points du permis de conduire, M. A est fondé à soutenir qu'en y procédant, le ministre a commis une erreur de droit qui entache sa décision d'excès de pouvoir ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance n°0704942 en date du 18 novembre 2008 du vice-président du Tribunal administratif de Strasbourg et de la décision du 12 octobre 2007 portant retrait de quatre points du capital des points affectés à son permis de conduire consécutive à l'infraction commise le 24 mars 2007 à Souffelweyersheim ;

Sur l'application de l'article L.911-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, et au vu de ce qui précède, il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur de restituer quatre points au capital du permis de conduire de M. A et de supprimer la mention relative à l'infraction commise le 24 mars 2007 à Souffelweyersheim au fichier national ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 0704942 en date du 18 novembre 2008 du vice-président du Tribunal administratif de Strasbourg ensemble la décision du 12 octobre 2007 du ministre de l'intérieur portant retrait de quatre points affectés au capital du permis de conduire de M. A consécutif à l'infraction commise le 24 mars 2007 à Souffelweyersheim sont annulés.

Article 2 : Le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales fera procéder à la restitution de quatre points affectés au capital du permis de conduire de M. A et supprimer la mention relative à l'infraction et au retrait de points susmentionnés au fichier national des permis de conduire.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Alain A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

Copie sera adressée au préfet du Bas-Rhin et au Procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Strasbourg.

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08NC01727


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08NC01727
Date de la décision : 22/03/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: M. Pascal JOB
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : THABET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2010-03-22;08nc01727 ?
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