Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 12 janvier 2009, présentée pour M. Romuald A, demeurant ..., par Me Cotillot-Jacquemot ; M. A demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0401884 en date du 23 octobre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne n'a que partiellement fait droit à sa demande en condamnant Electricité de France à lui verser la somme de 8 166 euros en réparation du préjudice subi du fait de son électrocution par une ligne à haute tension ;
2°) de condamner Electricité Réseau Distribution France (ERDF) à lui verser une somme de 45 828,33 euros en réparation du préjudice subi ;
Il soutient que :
- il avait demandé aux premiers juges la condamnation d'EDF à lui verser les sommes suivantes : 492,33 euros au titre de frais de transport, 3 736 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels, 30 000 euros au titre du préjudice économique lié à la perte de gains professionnels futurs, 6 000 euros au titre de l'incapacité permanente partielle, 5 000 euros au titre des souffrances endurées et, enfin, 600 euros au titre du préjudice esthétique, soit un total de 45 828,33 euros ;
- les premiers juges ont sous-évalué les divers postes de préjudice : ils ont estimé à tort que les indemnités journalières ne se justifiaient pas, alors qu'il a été en arrêt de travail ; ils n'ont pas pris en compte la réalité des frais de trajet entre son domicile et le Centre hospitalier universitaire de Metz ; il est en droit d'obtenir l'indemnisation de ses pertes de gains professionnels, actuels et futurs ; son préjudice personnel a été également sous-estimé par le tribunal ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 février 2009, présenté pour Electricité Réseau Distribution France (ERDF) par Me Bourgaux ;
ERDF conclut au rejet de la requête et, par voie d'appel incident, à ce que la somme allouée à M. A soit réduite à 8 000 euros et celle allouée à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne fixée à 12 394,97 euros ;
Au premier titre, elle soutient que les moyens énoncés par M. A ne sont pas fondés ;
Au second titre, elle soutient que l'indemnité à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne ne saurait excéder 10 659,76 euros au titre des dépenses de santé actuelles, 507,68 euros au titre des frais de transport, 695,18 euros au titre des indemnités journalières versées à M. A et 532,35 euros au titre des dépenses de santé futures, et que l'indemnité à verser à M. A ne saurait excéder 2 000 euros au titre des souffrances endurées, 5 600 euros au titre du déficit fonctionnel permanent et 400 euros au titre du préjudice esthétique ;
Vu les pièces du dossier desquelles il résulte que la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne, mise en demeure à cet effet, n'a pas produit d'observations en défense ;
Vu l'ordonnance du président de la troisième chambre de la Cour, fixant la clôture de l'instruction au 21 décembre 2009 à 16 heures ;
Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 18 septembre 2009, admettant M. A au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 janvier 2010 :
- le rapport de M. Favret, premier conseiller,
- les conclusions de M. Collier, rapporteur public,
- et les observations de Me Bourgaux, avocat d'Electricité Réseau Distribution de France ;
Considérant que, par jugement du 8 novembre 2007 devenu définitif, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a déclaré EDF responsable pour un tiers des conséquences dommageables de l'accident dont M. A a été victime le 19 août 2000 ; que le tribunal a fixé son préjudice, en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses conclusions indemnitaires, cependant que, par voie d'appel incident, Electricité Réseau Distribution France, venant aux droits d'EDF, conclut à la réduction de l'indemnité accordée à M. A et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne en réparation de leur préjudice ;
Sur l'évaluation du préjudice total :
En ce qui concerne le préjudice patrimonial :
S'agissant des dépenses de santé :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'accident de M. A a entraîné des dépenses de santé consistant en des frais médicaux et pharmaceutiques, évalués à la somme de 31 979,29 euros, et des frais de transport évalués à la somme de 1 523,03 euros à partir des débours de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne ; qu'il y a lieu d'évaluer les frais futurs en lien avec l'accident, justifiés par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne, à la somme de 1 597,04 euros ; que ces sommes ne sont pas contestées ; qu'il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le préjudice total résultant des frais médicaux, des frais pharmaceutiques et des frais de transport en relation avec l'accident de M. A s'établissait à la somme de 35 099,36 euros ;
S'agissant des pertes de revenus et de l'incidence professionnelle du handicap :
Considérant, en premier lieu, que si la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne réclame une somme de 1 600 euros au titre d'indemnités journalières versées durant 184 jours, en lien avec l'accident, elle n'établit pas, ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges, la réalité de ces débours au-delà d'un montant de 792,25 euros ; qu'il y a ainsi lieu de limiter à ce montant le préjudice indemnisable subi par la caisse à ce titre ;
Considérant, en deuxième lieu, que M. A a été victime d'une incapacité temporaire totale du 19 août 2000 au 18 février 2001 ; qu'il soutient que cette incapacité l'a privé de revenus à hauteur de 15 960,10 euros ; qu'il résulte toutefois de l'instruction, d'une part, qu'il ne travaillait plus lorsqu'il a été victime de son accident, d'autre part, que la somme qu'il réclame à ce titre ne correspond pas aux derniers salaires perçus ; que, dans ces conditions, et alors que l'intéressé ne justifie pas qu'il était à la recherche d'un emploi, ni même qu'il était en attente d'un nouveau contrat avec la société qui l'avait employé en qualité d'intérimaire jusqu'en juillet 2000, c'est à bon droit que le tribunal a estimé que la perte de revenus subie par M. A n'était pas établie au-delà des sommes versées à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne ;
Considérant, en troisième lieu qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que si l'intéressé n'est pas dans l'impossibilité de reprendre ses activités antérieures et a travaillé dans les espaces verts au lycée Bouchardon, sous contrat emploi-solidarité, de décembre 2003 à décembre 2004, il reste affecté d'une légère boiterie, ne peut conduire longuement un véhicule en raison de douleurs au pied droit et éprouve de sérieuses difficultés à s'accroupir, s'agenouiller ou rester longtemps debout ; que, dès lors, il y a lieu d'indemniser le préjudice afférent à l'incidence professionnelle du handicap de M. A en évaluant à 15 000 euros le préjudice subi à ce titre ;
S'agissant des autres dépenses liées au dommage corporel :
Considérant que si M. A réclame le remboursement des repas pris sur place lors de ses déplacements au Centre hospitalier universitaire de Metz entre octobre 2000 et août 2001, il ne justifie pas de la somme réclamée à cet égard ; que, dès lors, c'est à bon droit que le tribunal a rejeté les conclusions de M. A présentées à ce titre ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les préjudices patrimoniaux totaux résultant de l'accident de M. A s'élèvent à la somme de 50 891,61 euros ;
En ce qui concerne le préjudice personnel :
Considérant que l'état de santé de M. A a été consolidé le 7 août 2001 ; que le tribunal a fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence subis par l'intéressé résultant du déficit fonctionnel permanent chiffré par l'expert à 12 % en les évaluant à 17 000 euros ; que le tribunal a fait une juste appréciation du préjudice esthétique de M. A, évalué à 2 sur 7, en le fixant à 1 500 euros ; que le tribunal a fait également une juste appréciation des souffrances endurées par l'intéressé, évaluées à 4,5 sur 7, en les évaluant à la somme de 6 000 euros ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les préjudices personnels totaux résultant de l'accident de M. A s'établissent à la somme de 24 500 euros ;
Sur la part du préjudice demeurant à la charge de la victime :
En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que les frais médicaux et pharmaceutiques, actuels et futurs, ainsi que les frais de transport et les indemnités journalières occasionnés par l'accident de M. A ont été intégralement pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne ; qu'en revanche, le préjudice afférent à l'incidence professionnelle du handicap de M. A, fixé à la somme de 15 000 euros, demeure à la charge de l'intéressé ;
En ce qui concerne les préjudices personnels :
Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que ces divers préjudices, dont les montants respectifs s'élèvent, ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, à 17 000, 1 500 et 6 000 euros, soit à un total de 24 500 euros, aient donné lieu à indemnisation par un tiers payeur ; qu'ils ont donc été intégralement supportés par M. A ;
Sur l'indemnité mise à la charge du tiers responsable :
En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :
Considérant que, comme il a été dit ci-dessus, Electricité de France a été reconnue responsable dans la proportion d'un tiers des conséquences dommageables de l'électrocution de M. A ; que, par suite, l'indemnité mise à sa charge au titre des préjudices patrimoniaux s'élève à la somme de 16 963,87 euros ;
En ce qui concerne les préjudices personnels :
Considérant que l'indemnité mise à la charge d'Electricité Réseau Distribution France au titre des préjudices personnels, compte tenu de sa part de responsabilité, s'élève à la somme de 8 167 euros ;
Sur les sommes dues à la victime :
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'indemnité due par Electricité Réseau Distribution France à M. A s'élève à la somme totale de 13 167 euros, dont 5 000 euros au titre du préjudice patrimonial et 8 167 euros au titre du préjudice personnel ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est fondé, à concurrence des sommes qui précèdent, à demander la réformation du jugement par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne n'a que partiellement fait droit à sa demande ; que l'appel incident d'Electricité Réseau Distribution France doit par voie de conséquence être rejeté ;
D E C I D E :
Article 1er : La somme de 8 166 euros qu'EDF à été condamnée à verser à M. A par jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 23 octobre 2008 est portée à 13 167 euros.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 23 octobre 2008 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A et l'appel incident d'ERDF sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Romuald A, à Electricité Réseau Distribution France (ERDF) et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Marne.
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N° 09NC00017