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10/12/2009 | FRANCE | N°09NC00090

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 10 décembre 2009, 09NC00090


Vu, la requête, enregistrée le 26 janvier 2009, complétée par mémoire enregistré le 5 novembre 2009, présentée pour M. Philippe A, demeurant ... par Me Planchat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500533 du 13 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'il a acquittée au titre de la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004 ;

2°) de prononcer la restitution demandée ;

3°) d'ordonner une expertise aux fins de déterminer si,

au moment où les soins ont été délivrés, sa qualification était équivalente à celle d'...

Vu, la requête, enregistrée le 26 janvier 2009, complétée par mémoire enregistré le 5 novembre 2009, présentée pour M. Philippe A, demeurant ... par Me Planchat ; M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500533 du 13 novembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur la valeur ajoutée qu'il a acquittée au titre de la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004 ;

2°) de prononcer la restitution demandée ;

3°) d'ordonner une expertise aux fins de déterminer si, au moment où les soins ont été délivrés, sa qualification était équivalente à celle d'un professionnel de santé, médecin ou masseur kinésithérapeute ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- les praticiens exerçant à titre exclusif la profession d'ostéopathe et ayant obtenu le droit d'user de ce titre doivent être considérés comme présentant un niveau de compétence identique en ostéopathie à celui des médecins ou masseurs kinésithérapeutes titulaires de ce titre ; qu'ils doivent en conséquence, en application du principe de neutralité fiscale consacré par la Cour de justice des communautés européennes pour l'interprétation de l'article 13 A, paragraphe1, sous c) de la sixième directive, être admis au bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée instituée en faveur des soins à la personne ;

- l'autorisation définitive d'user du titre d'ostéopathe qui lui a été délivrée par le préfet de la région Alsace valide sa formation en ostéopathie ;

- il bénéficiait au titre des années en litige d'une formation équivalente à celle prévue par le décret du 27 mars 2007 qui lui a permis d'obtenir l'usage du titre d'ostéopathe en 2008 ;

- il n'existe aucune justification objective et raisonnable à la différence de traitement en matière de charge de la preuve réservée aux masseurs kinésithérapeutes ayant spontanément, en application de la doctrine administrative, soumis leurs actes à la taxe sur la valeur ajoutée alors qu'un régime de preuve plus favorable est appliqué aux redevables ayant refusé de s'y conformer ; que les dispositions combinées des articles 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et 1er du premier protocole additionnel à cette convention imposent que soit retenu un régime de preuve objective ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 juin 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; le ministre conclut :

- au rejet de la requête ;

Il soutient qu'aucun des moyens invoqués n'est de nature à entraîner la décharge des impositions contestées ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 novembre 2009 :

- le rapport de Mme Le Montagner, président,

- et les conclusions de Mme Fischer Hirtz, rapporteur public ;

Sur la charge de la preuve :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 261 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable en l'espèce : Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : (...) 4. (Professions libérales et activités diverses) : (...) 1° Les soins dispensés aux personnes par les membres des professions médicales et paramédicales (...) ; que le législateur a ainsi entendu exonérer les actes régulièrement dispensés par les membres des professions médicales et paramédicales réglementées par une disposition législative ou par un texte pris en application d'une telle disposition ; qu'aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. Il en est de même lorsqu'une imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration souscrite par un contribuable ou d'après le contenu d'un acte présenté par lui à la formalité de l'enregistrement. ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ; qu'en vertu des stipulations de l'article premier du premier protocole additionnel à cette convention : Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens (...) ; qu'une distinction entre des personnes placées dans une situation analogue est discriminatoire, au sens des stipulations précitées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, si elle n'est pas assortie de justifications objectives et raisonnables, c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un objectif d'utilité publique, ou si elle n'est pas fondée sur des critères rationnels en rapport avec les buts des dispositions établissant cette distinction ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 261 du code général des impôts qu'un masseur-kinésithérapeute ayant été assujetti à des compléments de taxe sur la valeur ajoutée est fondé à soutenir qu'il doit en être déchargé dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'il aurait accompli des actes qui n'étaient pas au nombre de ceux qu'il était réglementairement habilité à dispenser ; qu'à l'inverse, il résulte des dispositions précitées du second alinéa de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, combinées avec celles de l'article 261 du code général des impôts, qu'un masseur kinésithérapeute ayant déclaré et spontanément acquitté des droits de taxe sur la valeur ajoutée n'est fondé à soutenir que ces droits doivent lui être restitués qu'à la condition de démontrer qu'ils correspondent à des actes qu'il était réglementairement habilité à dispenser ;

Considérant que M. A soutient que la différence de traitement ainsi instituée par les dispositions de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales entre les masseurs-kinésithérapeutes ayant spontanément déclaré être redevables de la taxe sur la valeur ajoutée et ceux ne l'ayant pas fait, serait discriminatoire et méconnaîtrait les stipulations de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention ;

Considérant, toutefois, que les dispositions du second alinéa de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales ont pour objet d'assurer la sincérité et l'exactitude des déclarations des contribuables ; que la différence de situation existant entre les contribuables ayant spontanément déclaré être redevables de la taxe sur la valeur ajoutée et ceux ne l'ayant pas fait, justifie, eu égard à cet objet, la différence de traitement susmentionnée ; qu'il suit de là que M. A n'est pas fondé à soutenir que les dispositions du second alinéa de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, qui lui ont été opposées pour justifier le refus de lui restituer les droits de taxe sur la valeur ajoutée qu'il a déclarés et spontanément acquittés au titre de la période courant du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2005, seraient incompatibles avec les stipulations précitées de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant, en premier lieu, que M. A ne peut être regardé comme apportant la preuve qui lui incombe que les actes d'ostéopathie qu'il a accomplis durant la période litigieuse auraient été dispensés dans le cadre des dispositions réglementaires habilitant les masseurs-kinésithérapeutes à pratiquer, sur prescription médicale, des actes de mobilisation manuelle de toutes les articulations, à l'exclusion des manoeuvres de force ; qu'en particulier, le requérant ne produit aucun élément relatif à sa pratique qui permettrait d'appréhender la nature des actes qu'il a accomplis sous la dénomination d'actes d'ostéopathie ou les conditions dans lesquelles lesdits actes ont été effectués ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 13 de la directive du Conseil du 17 mai 1977 : (...) 1. Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les États membres exonèrent, dans les conditions qu'ils fixent en vue d'assurer l'application correcte et simple des exonérations prévues ci-dessous et de prévenir toute fraude, évasion et abus éventuels : (...) c) les prestations de soins à la personne effectuées dans le cadre de l'exercice des professions médicales et paramédicales telles qu'elles sont définies par l'État membre concerné ; que si M. A soutient que son exclusion du bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue par les dispositions précitées de l'article 261 du code général des impôts, méconnait le principe de neutralité fiscale qui encadre le pouvoir d'appréciation détenu par les Etats membres pour définir les professions paramédicales, il n'établit pas que les soins qu'il a prodigués au cours de la période du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2004 pouvaient être regardés comme étant d'une qualité équivalente, compte tenu de sa qualification professionnelle, à celle des actes similaires effectués par des docteurs en médecine ; que, par suite, les impositions litigieuses ne sont pas incompatibles avec le principe de neutralité fiscale ; qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède, et sans qu'il y ait lieu d'ordonner une expertise, que M. A n'est pas fondé à se plaindre de ce que le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à la restitution d'imposition litigieuse ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante la somme que M. A demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Philippe A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

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N° 09NC00090


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09NC00090
Date de la décision : 10/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. COMMENVILLE
Rapporteur ?: Mme Michèle LE MONTAGNER
Rapporteur public ?: Mme FISCHER-HIRTZ
Avocat(s) : SOCIETE NATAF PLANCHAT

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2009-12-10;09nc00090 ?
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