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03/12/2009 | FRANCE | N°08NC01264

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 03 décembre 2009, 08NC01264


Vu la requête, enregistrée le 18 août 2008, complétée par mémoire enregistré le 26 janvier 2009, présentée pour Mme Lilia A, née ..., demeurant ..., par Me Grosset ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800906 du 11 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 28 mars 2008 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a refusé le séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé l'Arménie comme pays de destination d'une éventuelle reconduite

d'office à la frontière, et à ce que ledit préfet soit enjoint de lui délivrer un tit...

Vu la requête, enregistrée le 18 août 2008, complétée par mémoire enregistré le 26 janvier 2009, présentée pour Mme Lilia A, née ..., demeurant ..., par Me Grosset ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0800906 du 11 juillet 2008 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 28 mars 2008 par lequel le préfet de Meurthe-et-Moselle lui a refusé le séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé l'Arménie comme pays de destination d'une éventuelle reconduite d'office à la frontière, et à ce que ledit préfet soit enjoint de lui délivrer un titre de séjour ou une autorisation provisoire de séjour ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) d'enjoindre le préfet de Meurthe-et-Moselle de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de condamner l'Etat à verser à son avocat une somme de 800 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relatives à l'aide juridique ;

Elle soutient que :

- l'arrêté litigieux a été signé par une autorité incompétente ;

- l'arrêté en litige est entaché d'une erreur d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- l'arrêté litigieux porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale, au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris, dès lors qu'elle s'est bien intégrée en France, où elle vit avec son mari et ses trois enfants, dont deux sont scolarisés, et que son troisième enfant est né en France ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire n'est pas motivée ;

- l'arrêté litigieux méconnaît les dispositions de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et l'arrêté attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 février 2009, présenté par le préfet de Meurthe-et-Moselle, qui conclut au rejet de la requête de Mme A, née ... ;

Il fait valoir que :

- la décision en cause a été signée en vertu d'un arrêté préfectoral de délégation de signature régulièrement publié ;

- il a examiné la situation personnelle de l'intéressée avant de prendre sa décision ;

- l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'a pas été méconnu ;

- l'obligation de quitter le territoire n'avait pas à être motivée ;

- les risques invoqués, dont l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la Cour nationale du droit d'asile n'ont pas reconnu l'existence, ne sont pas établis ;

- la requérante n'est pas contrainte de retourner en Arménie, puisque l'arrêté en litige précise qu'elle pourra être reconduit à la frontière de tout pays pour lequel elle établit être légalement admissible ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 24 octobre 2008, admettant Mme A, née ..., au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 novembre 2009 :

- le rapport de M. Favret, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Considérant que M. Jean-Michel B, secrétaire général de la préfecture de Meurthe-et-Moselle a, par arrêté en date du 6 septembre 2007 régulièrement publié au recueil des actes administratifs du 12 septembre suivant, reçu délégation du préfet de Meurthe-et-Moselle pour signer, notamment, les décisions portant refus de délivrance d'un titre de séjour assorties de l'obligation de quitter le territoire français et fixant le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé ; que, dès lors, Mme A, n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté litigieux serait entaché d'illégalité, faute pour son signataire d'avoir régulièrement reçu délégation à cet effet ;

En ce qui concerne le refus de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; que si Mme A fait valoir que le refus de séjour qui lui a été opposé méconnaîtrait les dispositions précitées, dès lors qu'elle serait bien intégrée en France, où elle réside avec son mari et ses trois enfants, dont deux sont scolarisés, ce moyen doit être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges, qui n'ont pas commis d'erreur en estimant qu'en refusant à l'intéressée le titre de séjour sollicité, le préfet n'avait pas méconnu les stipulations précitées ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que le refus de séjour opposé à la requérante serait entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue des articles 41 et 42 de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 : I. - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. (...) L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai d'un mois à compter de sa notification. Passé ce délai, cette obligation peut être exécutée d'office par l'administration. / Les dispositions du titre V du présent livre peuvent être appliquées à l'étranger faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français dès l'expiration du délai prévu à l'alinéa précédent. (...) ;

Considérant que l'obligation de quitter le territoire français n'a pas, en application des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à faire l'objet d'une motivation ; qu'ainsi le moyen doit être écarté ;

Sur la fixation du pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ; qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière est éloigné : 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ; 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ; 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il est légalement admissible. Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; que, par l'arrêté attaqué, le préfet a décidé que Mme MOVISSIAN pourrait être reconduite à destination de l'Arménie, dont elle a déclaré avoir la nationalité, ou de tout autre pays pour lequel elle établit être légalement admissible ; que si celle-ci soutient que les personnes originaires d'Arménie seraient soumises à de mauvais traitements dans la fédération de Russie, qu'elle précise avoir quittée en 2005 pour rejoindre la France, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle y serait personnellement exposée à des risques pour sa vie ou sa liberté ; que, dans ces conditions, Mme A, dont la demande de reconnaissance du statut de réfugié a d'ailleurs été rejetée par décision du 31 octobre 2005 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée le 21 février 2008 par la Cour nationale du droit d'asile, n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de destination a méconnu lesdites dispositions ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 mars 2008 par lequel le préfet de Meurthe et Moselle a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que le présent arrêt, qui rejette la requête de Mme A, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de celle-ci tendant à ce que le préfet de Meurthe-et-Moselle soit enjoint de lui délivrer un titre de séjour ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relatives à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée ;

Considérant que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, ne saurait être condamné à verser à l'avocat de Mme A une somme en application de ces dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A, née ..., est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Lilia A, née ..., et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

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08NC01264


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08NC01264
Date de la décision : 03/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Jean-Marc FAVRET
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SELARL GUITTON - ZION - GROSSET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2009-12-03;08nc01264 ?
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