La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/12/2009 | FRANCE | N°07NC01759

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 03 décembre 2009, 07NC01759


Vu la requête, enregistrée le 17 décembre 2007 au greffe de la Cour, complétée par mémoire enregistré le 14 octobre 2008, présentée pour la SARL EUROVIA LORRAINE, dont le siège social est situé Voie romaine à Woippy (57140), par Me Guimet ; la SARL EUROVIA LORRAINE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501580 du 9 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du titre de perception n° 2/2005 d'un montant de 90 823,58 euros émis à son encontre le 11 mars 2005 par le directeur départemental de l

'équipement de Meurthe-et-Moselle et visant à obtenir le remboursement du ...

Vu la requête, enregistrée le 17 décembre 2007 au greffe de la Cour, complétée par mémoire enregistré le 14 octobre 2008, présentée pour la SARL EUROVIA LORRAINE, dont le siège social est situé Voie romaine à Woippy (57140), par Me Guimet ; la SARL EUROVIA LORRAINE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501580 du 9 octobre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du titre de perception n° 2/2005 d'un montant de 90 823,58 euros émis à son encontre le 11 mars 2005 par le directeur départemental de l'équipement de Meurthe-et-Moselle et visant à obtenir le remboursement du coût de réfection des désordres affectant la couche de surface de la RN 52 à la suite des travaux réalisés en octobre 2001 dans le cadre de l'exécution d'un marché conclu le 19 février 2001 en vue du renouvellement des couches de roulement des routes nationales du nord du département de Meurthe-et-Moselle ;

2°) d'annuler ledit titre de perception ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- sa requête d'appel est recevable puisqu'elle est dirigée contre le jugement rendu par le tribunal administratif dont il est demandé l'annulation ; de plus, même en première instance, sa requête était dirigée contre l'Etat et non contre le Trésorier payeur général de Meurthe-et-Moselle ;

- le jugement ne vise pas tous les mémoires produits par les parties alors même que ceux-ci n'étaient pas tardifs et comportaient des moyens nouveaux auxquels le jugement n'a pas répondu ; les dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 741-2 du code de justice administrative ont été méconnues ;

- le tribunal a omis de statuer sur certains moyens ;

- le jugement est insuffisamment motivé, contrairement à ce que prévoient les dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative ; les premiers juges n'ont pas expliqué la durée de la garantie contractuelle et l'imputation des désordres qu'ils ont retenus ;

- le titre de recette est entaché d'incompétence de son auteur ; il aurait dû être signé par le directeur départemental de l'équipement de la Meurthe-et-Moselle, qui est l'ordonnateur aux termes de l'acte d'engagement du marché conclu en 2001 ; en admettant que le directeur départemental de l'équipement puisse subdéléguer sa signature, il n'est pas démontré que la décision n° 2005-01 du 8 février 2005 ait été régulièrement publiée ;

- la créance n'est pas fondée ; d'une part, elle ne peut être fondée sur la garantie triennale de l'article 9-6 du cahier des clauses administratives particulières ; la garantie triennale n'a pas été régulièrement instituée puisqu'elle n'est pas mentionnée comme dérogeant aux dispositions du premier alinéa de l'article 44.1 du cahier des clauses administratives générales Travaux dans le dernier article du cahier des clauses administratives particulières comme l'imposent les dispositions de l'article 3.12 du cahier des clauses administratives générales Travaux ; la garantie de parfait achèvement était donc limitée à un an en application de l'article 44-1 du cahier des clauses administratives générales Travaux ; son délai expirait le 30 janvier 2003, soit avant que l'ordre de service constatant les désordres, daté du 21 juillet 2003, soit émis ; d'autre part, en tout état de cause, la direction départementale de l'équipement de Meurthe-et-Moselle a renoncé à lui imputer les désordres lors de l'établissement du décompte général et définitif le 7 mars 2005 ; ce dernier est devenu intangible, les désordres étant apparus antérieurement à son établissement ; enfin, à titre subsidiaire, les désordres ne lui sont pas imputables ; le tribunal a, à tort, retenu les seules conclusions du rapport réalisé par le laboratoire régional des ponts et chaussées de Nancy ;

- le montant des travaux de réfection, au paiement duquel elle a été invitée, n'est pas justifié ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 mars 2008, présenté par le trésorier payeur général de Meurthe-et-Moselle, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- la requête est irrecevable car mal dirigée ; le comptable public n'est chargé que de la prise en charge et du recouvrement des ordres de recettes qui lui sont remis par les ordonnateurs ; il n'est pas compétent pour répondre aux contestations relatives à la régularité en la forme du titre, à son bien-fondé ou au calcul de la créance ;

- à titre subsidiaire, la demande de la SARL EUROVIA LORRAINE tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer une somme de 20 000 euros au titre des frais irrépétibles doit être rejetée dès lors que la procédure conduite par le Trésor public est régulière et que ladite société ne démontre pas avoir subi un préjudice ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 16 juin et 30 octobre 2008, présentés par le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- le jugement est régulier ; d'une part, le tribunal a examiné l'ensemble des pièces du dossier, quand bien même il ne les aurait pas visées expressément dans le jugement ; d'autre part, il est suffisamment motivé ; les premiers juges ont répondu à l'ensemble des moyens soulevés ;

- par arrêté du 20 décembre 2004, le préfet de Meurthe-et-Moselle a délégué sa signature pour l'exercice de sa compétence d'ordonnateur secondaire au directeur département de l'équipement de Meurthe-et-Moselle ; ce dernier a lui-même subdélégué sa signature à M. par décision n° 2005-01 du 8 février 2005 ;

- la durée de la garantie de parfait achèvement a été contractuellement et régulièrement portée à 3 ans par l'article 9-6 du cahier des clauses administratives particulières ; d'une part, l'absence de mention dans le cahier des clauses administratives particulières de la dérogation à des dispositions du cahier des clauses administratives générales Travaux est sans incidence sur sa validité contractuelle ; d'autre part, la possibilité d'introduire une dérogation dans le marché étant prévue par l'article 44.1 du cahier des clauses administratives Travaux, il n'était pas nécessaire de la récapituler dans le dernier article du cahier des clauses administratives particulières conformément aux dispositions de l'article 3.12 du cahier des clauses administratives générales Travaux ;

- le maître d'ouvrage peut faire jouer la garantie de parfait achèvement postérieurement à la réception de l'ouvrage ; le décompte général ne peut être définitif qu'en ce qui concerne les éléments nés antérieurement à son approbation et son irrévocabilité ne peut faire obstacle au jeu de la garantie de parfait achèvement ;

- les désordres constatés sur la couche de roulement de la chaussée ne sont imputables qu'à la SARL EUROVIA LORRAINE ; les conclusions du rapport du laboratoire régional des ponts et chaussées de Nancy sont claires ;

Vu l'ordonnance du président de la troisième chambre de la Cour fixant la clôture de l'instruction au 9 octobre 2009 à 16 heures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le décret n° 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements ;

Vu l'arrêté interministériel du 21 décembre 1982 portant règlement de comptabilité pour la désignation des ordonnateurs secondaires et de leurs délégués au ministère de l'urbanisme et du logement, modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 novembre 2009 :

- le rapport de M. Tréand, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Collier, rapporteur public ;

Sur la fin de non-recevoir opposée par le trésorier payeur général de Meurthe-et-Moselle :

Considérant que la requête de la SARL EUROVIA LORRAINE tend à l'annulation du jugement susvisé du Tribunal administratif de Nancy du 9 octobre 2007 ; que le Trésorier payeur général de Meurthe-et-Moselle ne peut donc utilement prétendre qu'elle serait mal dirigée et, par suite, irrecevable, au motif que la procédure lui a été transmise ; qu'il s'ensuit que la fin de non recevoir opposée par le Trésorier payeur général de Meurthe-et-Moselle doit être écartée ;

Sur la légalité du titre de perception émis le 11 mars 2005 :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 20 du décret susvisé du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets, à l'organisation et à l'action des services de l'Etat dans les régions et départements : Le préfet est l'ordonnateur secondaire des services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat ; qu'aux termes de l'article 21 du même décret : A compter du 1er janvier 2006, les crédits ouverts par la loi de finances qui doivent être exécutés par les services déconcentrés des administrations civiles de l'Etat sont mis à la disposition du préfet, lorsqu'il n'a pas désigné d'ordonnateur secondaire délégué. La délégation de signature d'ordonnancement secondaire entraîne la mise à disposition directe des crédits aux ordonnateurs secondaires délégués (..) ;

Considérant que le préfet de Meurthe-et-Moselle a délégué sa signature en qualité d'ordonnateur secondaire et de personne responsable des marchés au directeur départemental de l'équipement de Meurthe-et-Moselle, M. , par arrêté du 20 décembre 2004 publié au recueil des actes administratifs de la préfecture de Meurthe-et-Moselle n° 35 daté du même jour ; qu'en application des dispositions de l'article 4 dudit arrêté et de l'article 3 de l'arrêté interministériel du 21 décembre 1982 portant règlement de comptabilité pour la désignation des ordonnateurs secondaires et de leurs délégués au ministère de l'urbanisme et du logement modifié, le directeur départemental de Meurthe-et-Moselle a adopté une décision n° 2005.01 en date du 8 février 2005 portant subdélégation de signature pour l'exercice des compétences d'ordonnateur secondaire délégué et de personne responsable des marchés ; qu'aux termes de l'article 6 de cette décision, subdélégation de signature a été donnée à M. , chef de la cellule finances et marchés, à l'effet de signer les ordres de paiement et les pièces comptables et documents relatifs à l'ordonnancement des dépenses et des recettes ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que cette subdélégation n'a pas été publiée au recueil des actes administratif de la préfecture de Meurthe-et-Moselle préalablement au 11 mars 2005 ; que, par suite, le titre de perception n° 2/2005, émis à l'encontre de la SARL EUROVIA LORRAINE, le 11 mars 2005, signé de M. , est entaché d'incompétence de son auteur ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL EUROVIA LORRAINE est fondée à soutenir, par le moyen précité soulevé pour la première fois en appel, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation du titre de perception n° 2/2005 émis à son encontre le 11 mars 2005 par le directeur départemental de l'équipement de Meurthe-et-Moselle ;

Sur l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SARL EUROVIA LORRAINE et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Nancy en date du 9 octobre 2007 est annulé.

Article 2 : Le titre de perception n° 2/2005 d'un montant de 90 823,58 euros émis le 11 mars 2005 par le directeur départemental de l'équipement de Meurthe-et-Moselle à l'encontre de la SARL EUROVIA LORRAINE est annulé.

Article 3 : L'Etat versera à la SARL EUROVIA LORRAINE une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL EUROVIA LORRAINE, au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat et au Trésorier-payeur général de Meurthe-et-Moselle.

''

''

''

''

2

N° 07NC01759


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07NC01759
Date de la décision : 03/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. VINCENT
Rapporteur ?: M. Olivier TREAND
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SARL GUIMET AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2009-12-03;07nc01759 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award