Vu la requête et le mémoire complémentaire, enregistrés les 20 mars 2007 et 8 septembre 2008, présentés pour la SA MARC LEON INTERNATIONAL SERVICES, dont le siège est 18 rue Edouard Branly, BP 1435, à Colmar Cedex (68014), représentée par son liquidateur judiciaire Me Harquet, 4 rue du Conseil Souverain à Colmar Cedex (68003), par Me Rieutord ; la SA MARC LEON INTERNATIONAL SERVICES demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0401919 en date du 20 décembre 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a, d'une part, rejeté sa demande tendant à la décharge du rappel de taxe sur la valeur ajoutée réclamée au titre de la période du 1er avril 1995 au 28 février 1998 et, d'autre part, rétabli au taux de 40 % le montant de la majoration de mauvaise foi mise à sa charge au titre de la même période ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de cinq mille euros (5 000 €) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- que le tribunal aurait du, dans la motivation de son jugement, examiner distinctement le cas de ses 9 fournisseurs de véhicules ;
- qu'il ne lui appartient pas de vérifier l'application de la taxe sur la valeur ajoutée d'amont par ses fournisseurs ;
- que l'administration n'a pas établi sa collusion frauduleuse ;
- que l'administration a pris formellement position sur le régime de taxe sur la valeur ajoutée applicable en délivrant le certificat prévu par l'article 242 terdecies de l'annexe II ;
- qu'elle invoque la documentation administrative de base 3 L. 741, l'instruction
3 L. 1-97, la réponse du secrétaire d'Etat au budget du 13 mai 1998 et des décisions concernant d'autres contribuables placés dans la même situation ;
- que les pénalités pour mauvaise foi sont dénuées de tout fondement ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les mémoires, enregistrés les 28 novembre 2007 et 5 janvier 2009, présentés par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ; le ministre conclut au rejet de la requête en faisant valoir qu'aucun de ses moyens n'est fondé ;
Vu l'ordonnance en date du 9 juillet 2008 par laquelle le président de la 2ème chambre fixe la clôture de l'instruction au 5 septembre 2008 à seize heures ;
Vu l'ordonnance en date du 9 septembre 2008 par laquelle le président de la 2ème chambre de la Cour rouvre l'instruction et fixe une nouvelle clôture de l'instruction au 3 octobre 2008 à seize heures ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 janvier 2009 :
- le rapport de M. Lion, premier conseiller,
- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que le jugement contesté indique les motifs pour lesquels il a refusé de faire droit à la demande de la SA MARC LEON INTERNATIONAL SERVICES ; qu'il satisfait ainsi aux prescriptions de l'article L. 9 du code de justice administrative aux termes duquel : « les jugements sont motivés » ; que, par suite, doit être rejeté le moyen tiré de la motivation insuffisante du jugement attaqué ;
Sur la remise en cause du régime de taxation sur la marge :
En ce qui concerne l'application de la loi :
Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 bis du code général des impôts :
« 1° Sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les acquisitions intracommunautaires de biens meubles corporels effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ou par une personne morale non assujettie lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel et qui ne bénéficie pas dans son Etat du régime particulier de franchise des petites entreprises (...) 2° bis. Les acquisitions intracommunautaires de biens d'occasion (...) effectuées à titre onéreux par un assujetti (...) ne sont pas soumises à la taxe sur la valeur ajoutée lorsque le vendeur ou l'assujetti est un assujetti revendeur qui a appliqué dans l'Etat membre de départ de l'expédition ou du transport du bien les dispositions de la législation de cet Etat prises pour la mise en oeuvre des B ou C de l'article 26 bis de la directive n° 77/388/CEE du Conseil des Communautés européennes du 17 mai 1977 (...) » ; qu'aux termes du I de l'article 297 A du même code : « 1° La base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion (...) qui lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison est constituée de la différence entre le prix de vente et le prix d'achat (...) » ; qu'aux termes de l'article 297 E du même code, dans sa rédaction applicable en l'espèce : « Les assujettis qui appliquent les dispositions de l'article 297 A ne peuvent pas faire apparaître la taxe sur la valeur ajoutée sur leurs factures ou tous autres documents en tenant lieu » ; que ces dispositions, issues de la loi de finances rectificative pour 1994 du 29 décembre 1994, ont pour objet de transposer l'article 26 bis de la sixième directive du 17 mai 1977, issu de l'article 1er de la septième directive du 14 février 1994 ; qu'il résulte desdites dispositions qu'une entreprise française assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée a la qualité d'assujetti revendeur et peut appliquer le régime de taxation sur marge prévu par l'article 297 A du code général des impôts lorsqu'elle revend un bien d'occasion acquis auprès d'un fournisseur, situé dans un autre Etat membre, qui, en sa qualité d'assujetti revendeur, lui a délivré une facture conforme aux dispositions précitées de l'article 297 E du code général des impôts, et dont le fournisseur a aussi cette qualité ou n'est pas assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée ; que l'administration peut toutefois remettre en cause l'application de ce régime lorsque l'entreprise française ne pouvait ignorer la circonstance que son fournisseur n'avait pas la qualité d'assujetti revendeur et n'était pas autorisé à appliquer lui-même le régime de taxation sur marge prévu par l'article 26 bis de la directive du 17 mai 1977 ;
Considérant que la SA MARC LEON INTERNATIONAL SERVICES, qui exerce une activité de négoce international de véhicules automobiles, a fait l'objet d'une vérification de sa comptabilité de la période du 1er avril 1995 au 28 février 1998 à la suite de laquelle le service, par deux notifications de redressements en date des 23 décembre 1999 et 4 avril 2000, a remis en cause l'application du régime de taxation sur la marge ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, d'une part, que la SA MARC LEON INTERNATIONAL SERVICES a été créée sous la forme d'une SARL dont la moitié des parts appartenait alors à M. Marc X et a été transformée en 1992 en une société anonyme dont M. X est devenu le président-directeur général ; que, d'autre part, après la création en 1994 de la holding SA Figeal, dont la totalité du capital appartient à M. X, ainsi que de la société de droit luxembourgeois Eg Wagen, dont il est également le directeur commercial chargé des achats et de la revente des véhicules, ces deux dernières sociétés ont passé un contrat d'agence commerciale avec une autre société du même groupe, dénommée MLI distribution, également dirigée par M. X, qui utilisait, comme l'ensemble des sociétés en cause, un même logiciel permettant le suivi individuel du régime de taxe sur la valeur ajoutée appliqué à chaque véhicule ;
Considérant que si la SA MARC LEON INTERNATIONAL SERVICES fait valoir que sa collusion, notamment avec la société Sofrac, qui est considérée comme une société fictive en Allemagne, n'est pas démontrée l'administration établit cependant que 341 véhicules, ont été acquis par la société Eg Wagen qui les a revendus sous le régime des livraisons intracommunautaires à la société Sofrac, laquelle les a ensuite cédés à la requérante ; que, la SA MARC LEON INTERNATIONAL SERVICES, qui ne verse au dossier aucun document de nature à combattre utilement les éléments produits par l'administration, ne pouvait pas, en outre, normalement ignorer que les opérations litigieuses présentaient le caractère d'acquisitions intracommunautaires taxables sur l'intégralité du prix de vente, ce qui interdisait l'application du régime de la marge lors de la revente, d'autant plus que son président-directeur général assumait également des fonctions de direction dans les sociétés Eg Wagen et MLI distribution ; que, par suite, doivent être rejetés les moyens par lesquels elle soutient qu'il ne lui appartenait pas de vérifier les mentions apposées sur les factures de ses fournisseurs, qu'elle ne savait pas non plus qu'une partie de celles-ci n'était pas conforme aux dispositions légales et que la soumission au régime de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge d'un véhicule d'occasion importé des Iles Canaries procédait d'une simple erreur ;
En ce qui concerne le bénéfice de l'interprétation de la loi fiscale donnée par l'administration :
Considérant, d'une part, que la SA MARC LEON INTERNATIONAL SERVICES ne saurait utilement se prévaloir, sur le fondement des articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, du contenu de l'instruction 3 L. 1-94 et de la documentation administrative de base 3 L. 741, portant sur les conditions de délivrance des certificats prévus par les dispositions des articles alors applicables 242 terdecies et 242 quaterdecies de l'annexe II au code général des impôts, dès lors que la délivrance de ces certificats, qui ne comportent aucune mention expresse en ce sens, ne peut être regardée comme ayant le caractère d'une prise de position formelle de l'administration sur le régime de taxe sur la valeur ajoutée applicable à la transaction ; que, d'autre part, la requérante ne peut utilement invoquer la lettre du secrétaire d'Etat au budget du 13 mai 1998 qui, si elle envisage un examen cas par cas des entreprises ayant fait l'objet d'un redressement et qui distingue celles qui ont commis des erreurs d'appréciation de bonne foi et celles qui ont cherché à égarer délibérément les services chargés de délivrer les certificats fiscaux requis en cas de revente de véhicules d'occasion, est postérieure à la période vérifiée ; qu'enfin, la SA MARC LEON INTERNATIONAL SERVICES ne peut utilement se prévaloir de la situation, réputée meilleure, d'autres contribuables placés dans la même situation qui ne constitue pas une appréciation de sa propre situation de fait au regard de la loi fiscale ;
Sur les pénalités pour mauvaise foi :
Considérant que, pour contester le bien-fondé des pénalités pour mauvaise foi mises à sa charge la SA MARC LEON INTERNATIONAL SERVICES se borne à reprendre son argumentation de première instance sans y ajouter d'élément nouveau ; que, par suite, elle ne met pas la Cour en mesure d'apprécier l'erreur que les premiers juges auraient commise en écartant ce moyen par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d'adopter ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA MARC LEON INTERNATIONAL SERVICES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué qui n'a pas dénaturé les faits, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande et que, pas voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SA MARC LEON INTERNATIONAL SERVICES est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA MARC LEON INTERNATIONAL SERVICES et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
3
N°07NC00401