Vu la requête, enregistrée le 5 décembre 2007, complétée par des mémoires enregistrés le 29 août 2008 et le 7 janvier 2009, présentée pour M. Claude X, demeurant au ... par Me Lapique ;
M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0400353 du 29 août 2007 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquelles il a été assujetti au titre des années 1997 et 1998 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- les premiers juges ont procédé à une substitution de base légale dans des conditions irrégulières ;
- le jugement attaqué est également entaché d'irrégularité en ce qu'il est affecté d'une contradiction de motifs, dès lors qu'il justifie les impositions contestées sur le fondement des dispositions du a) de l'article 111 du code général des impôts, c'est-à-dire dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, alors qu'il considère par ailleurs comme régulière la procédure de taxation d'office des mêmes sommes, regardées comme des revenus d'origine indéterminée, lesquels sont imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;
- l'administration ne pouvait recourir à la procédure de taxation d'office prévue par l'article L. 66 du livre des procédures fiscales à défaut de l'avoir mis en demeure au préalable de régulariser sa situation dans un délai de trente jours, alors que n'étaient pas réunies en l'espèce les conditions requises par l'article L. 67 dudit livre pour la dispense de cette formalité ;
- il est fondé à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 du livre des procédures fiscales, des instructions du 4 août 1976 et du 17 janvier 1978 ainsi que de la note du 6 mai 1988, qui invitent les services à adresser au moins une mise en demeure au contribuable avant toute taxation d'office et il peut également se prévaloir de ces textes sur le fondement du décret du 28 novembre 1983 ;
- l'imposition de la contribution sociale généralisée selon la procédure de taxation d'office n'était pas prévue par les dispositions invoquées par l'administration applicables aux années en litige ;
- il aurait fallu que le vérificateur applique la procédure prévue par l'article 117 du code général des impôts pour connaître le bénéficiaire des revenus distribués ;
- la notification de redressement n'est pas suffisamment motivée, en ce qu'elle ne précise pas les modalités de détermination des bases de l'impôt et ne précise pas en particulier le montant des crédits inscrits au compte courant en cause ni les débits admis en déduction ;
- les impositions afférentes à l'année 1997 étaient prescrites lorsqu'il a reçu l'avis d'imposition ;
- il ne pouvait être regardé comme ayant son domicile fiscal en France, dès lors qu'il avait établi aux Etats-Unis le centre de ses intérêts familiaux et économiques ;
- dans la mesure où il était associé de la société anonyme Laser 3 D, l'administration aurait dû faire application du 2° de l'article 109-1 du code général des impôts, et non du 1° de cette disposition, qui n'était pas applicable, s'agissant notamment de l'exercice 1997, qui était déficitaire ;
- les sommes regardées par l'administration comme des revenus distribués par la société anonyme Laser 3 D proviennent en réalité de versement faits par son père sur le compte courant intitulé «X», afin de permettre le paiement de créanciers de cette société dans des délais très brefs ;
- l'administration fiscale ne pouvait, sans recherches complémentaires, lui attribuer le bénéfice de l'appréhension de l'ensemble des sommes créditées audit compte courant, alors que celui-ci concernait chacune des personnes physiques associées portant le nom de X et que plusieurs membres de sa famille étaient également actionnaires de la société Laser 3 D ;
- l'administration a calculé à tort les revenus regardés comme distribués en prenant en considération le profit sur le trésor de la société Laser 3 D résultant du rappel de taxe sur la valeur ajoutée ;
- la vérificatrice a calculé les revenus distribués en additionnant les sommes portées au crédit du compte courant d'associé, sans retrancher des débits qui correspondaient au paiement de dépenses sociales, alors que seul le solde créditeur de ce compte aurait pu, à défaut de justification, faire l'objet d'une imposition en tant que revenus distribués ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 mai 2008, complété par des mémoires enregistrés le
23 décembre 2008 et le 16 janvier 2009, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- l'administration pouvait choisir d'imposer les revenus distribués soit sur le fondement de l'article 109-1-1 du code général des impôts, soit sur le fondement de l'article 111 a) dudit code, mentionné par le jugement attaqué, de sorte qu'il n'y a pas eu, en l'espèce, de substitution d'office par les premiers juges d'une base légale appropriée à une base légale erronée retenue par l'administration ;
- M. X a indiqué le 12 juillet 2000 à l'interlocuteur départemental qu'il résidait en France plus de six mois par an et qu'il disposait à cet effet d'un hébergement dans les locaux de la société anonyme Laser 3 D, de sorte que c'est à juste titre que l'administration a considéré qu'il avait son domicile fiscal en France en 1997 et 1998 ;
- avant d'indiquer le lieu de sa résidence en France à l'interlocuteur départemental M. X avait toujours refusé de révéler à la vérificatrice son adresse en France, de sorte qu'en en application des dispositions du second alinéa de l'article L. 67 du livre des procédures fiscales, le service pouvait procéder à la taxation d'office sans mise en demeure préalable ;
- la prescription des cotisations d'impôt sur le revenu et des contributions sociales afférentes à l'année 1997 a été interrompue par la réception par M. X, le 23 août 2000, de la notification de redressement concernant ces impositions ;
- l'administration pouvait fonder le redressement concernant les revenus distribués sur les dispositions de l'article 109-1-1° du code général des impôts dès lors que, après les redressements résultant de la vérification de la comptabilité de la société Laser 3 D, les exercices 1997 et 1998 de cette société étaient bénéficiaires ;
- l'administration a la possibilité de ne pas user de la procédure de l'article 117 du code général des impôts si elle est en mesure de prouver, non seulement l'existence et le montant d'une distribution, mais aussi son appréhension par des bénéficiaires dont elle connaît l'identité, de sorte qu'elle n'a pas entaché d'irrégularité la procédure d'imposition en taxant d'office les revenus réputés distribués à M. X, en raison de leur inscription au crédit de son compte courant, sans mettre en oeuvre au préalable la procédure prévue par ledit article ;
- M. X n'a pas été en mesure de justifier de manière probante l'origine des sommes inscrites au crédit du compte courant d'associé qu'il détenait dans la société Laser 3 D ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 janvier 2009 :
- le rapport de M. Couvert-Castéra, président,
- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales : « Sont taxés
d'office : 1° A l'impôt sur le revenu, les contribuables qui n'ont pas déposé dans le délai légal la déclaration d'ensemble de leurs revenus ... sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l'article L 67 (...) » et qu'aux termes de l'article L. 67 dudit livre : «La procédure de taxation d'office prévue aux 1° et 4° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. (...) / Il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure si le contribuable change fréquemment de lieu de séjour ou séjourne dans des locaux d'emprunt ou des locaux meublés, ou a transféré son domicile fiscal à l'étranger sans déposer sa déclaration de revenus, ou si un contrôle fiscal n'a pu avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers.» ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des écritures de l'administration fiscale, que M. X a indiqué le 12 juillet 2000 à l'interlocuteur départemental qu'il résidait en France plus de six mois par an et qu'il disposait à cet effet d'un hébergement dans les locaux de la société anonyme Laser 3 D, au siège de laquelle l'administration lui a d'ailleurs adressé, le 22 août 2000, la notification de redressement concernant les impositions en litige, à laquelle il a répondu en faisant connaître ses observations ; que, dans ces conditions, la situation de l'intéressé ne pouvait, contrairement à ce que soutient l'administration, être regardée comme entrant dans les prévisions du second alinéa de l'article L. 67 du livre des procédures fiscales ; qu'il est constant que l'administration fiscale n'a pas notifié à M. X, à l'adresse que celui-ci lui avait désignée comme son lieu de séjour principal en France, la mise en demeure prévue par les dispositions précitées du premier alinéa dudit article ; qu'il s'ensuit qu'elle n'était pas en droit de taxer d'office, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, les revenus perçus par l'intéressé au cours des années 1997 et 1998 ; que ce dernier est, dès lors, fondé à demander la décharge des impositions qui en résultent ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative une somme de
1.500 euros au titre des frais exposés par M. X en appel et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 0400353 du Tribunal administratif de Nancy en date du 29 août 2007 est annulé.
Article 2 : M. X est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquelles il a été assujetti au titre des années 1997 et 1998.
Article 3 : L'Etat versera à M. X une somme de 1 500 € (mille cinq cents euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. Claude X et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.
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07NC01689