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18/12/2008 | FRANCE | N°07NC01786

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 18 décembre 2008, 07NC01786


Vu la requête, enregistrée le 19 décembre 2007, complétée par un mémoire enregistré le 5 mai 2008, présentée pour M. Canan X, demeurant ..., par Me Thabet ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703764 du 20 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du

3 juillet 2007 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'ann

uler pour excès de pouvoir ledit arrêté, le cas échéant après avoir ordonné une expertise méd...

Vu la requête, enregistrée le 19 décembre 2007, complétée par un mémoire enregistré le 5 mai 2008, présentée pour M. Canan X, demeurant ..., par Me Thabet ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703764 du 20 novembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du

3 juillet 2007 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir ledit arrêté, le cas échéant après avoir ordonné une expertise médicale ;

3°) de mettre une somme de 2 000 euros à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le médecin inspecteur de santé publique devait motiver de manière circonstanciée l'avis défavorable qu'il a rendu dès lors que le médecin agréé avait donné pour sa part un avis favorable à la délivrance d'un titre de séjour et que le nouvel avis du médecin inspecteur était en contradiction avec les précédents avis ;

- il souffre d'une affection grave et chronique qui nécessite une surveillance et un traitement constants dont il ne peut effectivement bénéficier en Turquie, où les soins dont il a besoin ne sont pas envisageables pour des raisons socio-économiques ;

- le préfet, qui lui avait précédemment accordé un titre de séjour pour raison de santé, n'a pas établi que l'état sanitaire de son pays d'origine s'est amélioré ;

- alors que le médecin inspecteur de santé publique a estimé dans son avis du 7 juin 2007 que son état de santé ne lui permettait pas de voyager par voie aérienne, le préfet ne lui a pas fait connaître un autre moyen de transport compatible avec son état de santé et son absence de ressources ;

- l'arrêté attaqué porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et méconnaît ainsi l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 février 2008, présenté par le préfet du Bas-Rhin, qui conclut au rejet de la requête, au motif qu'aucun des moyens invoqués n'est fondé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 novembre 2008 :

- le rapport de M. Couvert-Castéra, président,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;

Sur les moyens relatifs à l'état de santé de M. X :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit : ... 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ... » et qu'aux termes de l'article R. 313-22 du même code : « Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin inspecteur départemental de santé publique compétent au regard du lieu de résidence de l'intéressé et, à Paris, par le médecin, chef du service médical de la préfecture de police. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de la population et des migrations, du ministre chargé de la santé et du ministre de l'intérieur, au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...) » ; que l'arrêté du 8 juillet 1999 pris pour l'application de ces dispositions impose au médecin-inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales d'émettre un avis, pris sur le fondement d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un praticien hospitalier et précisant si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale, si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement médical approprié dans son pays ; qu'il appartient ainsi au médecin inspecteur, tout en respectant le secret médical, de donner au préfet les éléments relatifs à la gravité de la pathologie présentée par l'étranger intéressé et à la nature des traitements qu'il doit suivre, nécessaires pour éclairer sa décision et, lorsque l'interruption des traitements suivis en France risque d'avoir des conséquences exceptionnelles sur la santé de l'intéressé, il appartient au préfet de démontrer qu'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans le pays de renvoi ;

Considérant, en premier lieu, que le médecin-inspecteur de santé publique a mentionné dans son avis du 7 juin 2007 que l'état de santé de M. X nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que l'intéressé peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que, ce faisant, le médecin-inspecteur de santé publique, qui n'était pas tenu d'examiner l'intéressé avant d'émettre son avis, a suffisamment motivé cet avis, nonobstant la circonstance qu'il avait précédemment émis des avis contraires et que le médecin agréé avait émis pour sa part un avis favorable à la délivrance à M. X d'un titre de séjour pour raisons de santé ;

Considérant, en deuxième lieu, que si M. X soutient qu'il souffre d'une affection grave et chronique qui nécessite une surveillance et un traitement constants, il ressort des pièces du dossier, notamment de l'avis émis le 7 juin 2007 par le médecin inspecteur de santé publique et des certificats médicaux produits par l'intéressé, que cette surveillance peut être assurée par son médecin traitant dans son pays d'origine et que le traitement que son état de santé nécessite consiste dans l'administration d'antibiotiques ; qu'ainsi, le préfet démontre qu'à la date de la décision attaquée il existait des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans le pays de renvoi ; que la circonstance, à la supposer établie, que M. X ne pourrait accéder aux soins qui lui sont nécessaires dans son pays d'origine pour des raisons socio-économique est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ; que la circonstance que le médecin inspecteur de santé publique a estimé dans son avis du 7 juin 2007 que l'état de santé de M. X ne lui permettait pas de voyager par voie aérienne ne faisait pas obligation au préfet d'indiquer à l'intéressé un autre moyen de transport ;

Sur les moyens tirés de l'atteinte à la vie privée et familiale de M. X :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. » et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : « Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : ... 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée » ;

Considérant que si M. X fait valoir qu'il vit en France depuis 2001, qu'il y travaille régulièrement depuis son admission au séjour en 2004 et y est bien intégré, il ressort des pièces du dossier qu'il est célibataire et sans enfant et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Turquie, pays où il a vécu jusqu'à l'âge de 22 ans et où vivent notamment ses parents ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, en particulier de la durée et des conditions de séjour de l'intéressé en France, l'arrêté du préfet du Bas-Rhin en date du 3 juillet 2007 n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; qu'il n'a donc méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 3 juillet 2007 par lequel le préfet du Bas-Rhin a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que M. X demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. X est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Canan X et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

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N° 07NC01786


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07NC01786
Date de la décision : 18/12/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Prés GILTARD
Rapporteur ?: M. Olivier COUVERT-CASTERA
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : THABET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2008-12-18;07nc01786 ?
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