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30/10/2008 | FRANCE | N°07NC01572

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 30 octobre 2008, 07NC01572


Vu la requête, enregistrée le 19 novembre 2007 au greffe de la cour, présentée pour la COMMUNE de GIVET, représentée par son maire en exercice, à ce dûment habilité par délibération du conseil municipal du 9 avril 2001 et domicilié en cette qualité à l'Hôtel de ville, place Carnot à GIVET (08600), par la SELAS Cabinet Devarenne Associés ;

La COMMUNE de GIVET demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500562-0601378 en date du 20 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses requêtes tendant à l'annulation d

es délibérations du 19 octobre 2004 et du 16 décembre 2005 du conseil général des A...

Vu la requête, enregistrée le 19 novembre 2007 au greffe de la cour, présentée pour la COMMUNE de GIVET, représentée par son maire en exercice, à ce dûment habilité par délibération du conseil municipal du 9 avril 2001 et domicilié en cette qualité à l'Hôtel de ville, place Carnot à GIVET (08600), par la SELAS Cabinet Devarenne Associés ;

La COMMUNE de GIVET demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0500562-0601378 en date du 20 septembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses requêtes tendant à l'annulation des délibérations du 19 octobre 2004 et du 16 décembre 2005 du conseil général des Ardennes fixant respectivement la répartition du produit 2004 et du produit 2005 du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle à lui attribuer, en tant uniquement qu'elles procèdent à la répartition du solde entre les communes concernées, afin d'exclure la commune de Haybes de la liste des bénéficiaires ;

2°) d'annuler lesdites délibérations ;

Elle soutient :

- que le tribunal administratif a fait une inexacte application des dispositions de l'article

1648 A du code général des impôts, dès lors que, le I bis renvoyant au III, lequel renvoie au II concernant les conditions de répartition des ressources du fonds, il y a lieu de retenir la notion d'unité de production pour les établissements produisant de l'énergie ou traitant des combustibles ;

- que, dès lors qu'il est constant que les unités de production « Chooz B1 » et « Chooz B2 » sont distinctes, il convient ainsi de retenir l'existence de deux établissements, eux-mêmes distincts, au sujet desquels il convient d'appliquer distinctement le critère des dix salariés ;

- qu'ainsi, en présence de 11 salariés sur la commune de Haybes, le Tribunal administratif aurait dû considérer que c'est à tort que le conseil général a réparti la totalité des fonds provenant de la taxe professionnelle des deux établissements, alors que seul l'un d'eux aurait dû être pris en compte pour les dix premiers salariés dans l'hypothèse la plus favorable pour la commune de Haybes ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 16 mai 2008, présenté pour le département des Ardennes, par Me Choffrut ;

Le département des Ardennes conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 € soit mise à la charge de la COMMUNE de GIVET au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que la requête est irrecevable en tant que le conseil municipal n'a pas entendu engager de procédure à l'encontre des décisions du conseil régional de répartir les dotations 2004 et 2005 du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle ;

- qu'en tout état de cause, la requête est tardive ;

- que, subsidiairement, la décision du tribunal est fondée par les motifs qu'il a retenus et, en tout état de cause, au motif qu'il n'existe qu'un seul établissement ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 août 2008, présenté pour la COMMUNE de GIVET, qui persiste dans ses conclusions et demande en outre la condamnation du département des Ardennes à lui verser la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; la commune soutient en outre que sa requête est recevable ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le décret n° 88-988 du 17 octobre 1988 relatif au fonds départemental de la taxe professionnelle ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2008 :

- le rapport de M. Couvert-Castéra, président,

- les observations de Me Devarenne, avocat de la COMMUNE de GIVET, et de Me Choffrut, avocat du département des Ardennes,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité des demandes de première instance :

En ce qui concerne la tardiveté alléguée :

Considérant, en premier lieu, que s'il ressort des termes d'une lettre du 6 janvier 2005 du maire de la COMMUNE de GIVET adressée au président du conseil général des Ardennes que la délibération du 19 octobre 2004 par laquelle ce dernier a fixé pour l'année 2004 la répartition du produit du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle entre les différentes communes concernées a fait l'objet d'une mention dans le recueil des actes administratifs du département des Ardennes publié au plus tard le 22 novembre 2004, cette publication ne portait pas sur l'intégralité de ladite délibération ; qu'il ressort des pièces du dossier que la COMMUNE de GIVET a sollicité dès le 29 novembre 2004 la production de cette délibération, laquelle lui a été adressée le 20 janvier 2005 par lettre du président du conseil général reçue le 22 janvier 2005 ; que, par suite, la requête de la COMMUNE de GIVET dirigée contre ladite délibération en tant qu'elle inclut la commune de Haybes parmi les bénéficiaires du produit du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle, enregistrée le 19 mars 2005 au greffe du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, n'était pas tardive, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que ladite requête ait été enregistrée après l'expiration du délai de deux mois suivant la réception de la lettre du préfet du 15 décembre 2004 notifiant à la COMMUNE de GIVET le montant de l'attribution à lui revenir au titre dudit fonds pour l'année 2004 et pourvue de l'indication des voies et délais de recours, dès lors qu'il ne s'agit pas de la décision attaquée par la COMMUNE de GIVET ;

Considérant, en second lieu, que, par demande du 5 janvier 2006, réitérée le 23 février 2006, puis le 15 mai 2006, la COMMUNE de GIVET a demandé au département des Ardennes la production de la délibération du 16 décembre 2005 par laquelle le conseil général de ce département a fixé pour l'année 2005 la répartition du produit du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle entre les différentes communes concernées ; que cette communication a été opérée par lettre du 17 mai 2006 reçue le 22 mai 2006 ; qu'il n'est pas allégué que ladite délibération aurait été d'ores et déjà publiée dans son intégralité au recueil des actes administratifs du département des Ardennes ; qu'il s'ensuit que la requête de la COMMUNE de GIVET dirigée contre ladite délibération en tant qu'elle inclut la commune de Haybes parmi les bénéficiaires du produit du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle, enregistrée le 21 juillet 2006 au greffe du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, n'était pas tardive, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que ladite requête ait été enregistrée après l'expiration du délai de deux mois suivant la réception de la lettre du préfet du 17 février 2006, notifiant à la COMMUNE de GIVET le montant de l'attribution à lui revenir au titre dudit fonds pour l'année 2005 et pourvue de l'indication des voies et délais de recours, dès lors qu'il ne s'agit pas de la décision attaquée par la COMMUNE de GIVET ;

En ce qui concerne l'habilitation à agir du maire de GIVET :

Considérant que si le département des Ardennes fait valoir que le maire de GIVET n'aurait pas été habilité à saisir le Tribunal administratif d'une requête dirigée contre les délibérations susrappelées, dès lors que, par délibérations respectives du 1er décembre 2004 et du 29 décembre 2005, le conseil municipal de GIVET s'est borné à refuser le projet de répartition des dotations du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle pour les années 2004 et 2005 et à demander au conseil général d'en réexaminer les critères d'attribution pour l'année suivante, il ressort des pièces du dossier que, par délibération du 9 avril 2001, le conseil municipal de GIVET a décidé d'accorder au maire pour la durée de son mandat délégation pour intenter au nom de la commune toute action en justice quelle que soit la catégorie de contentieux et dans tous les cas d'espèce ; qu'il s'ensuit que, sans qu'il y ait lieu pour lui de solliciter une délégation du conseil municipal spécifique aux délibérations litigieuses, le maire de GIVET a pu régulièrement introduire les requêtes susrappelées au nom de la commune ;

Sur la légalité des délibérations attaquées :

Considérant qu'aux termes de l'article 1648 A du code général des impôts : « I. Lorsque dans une commune les bases d'imposition d'un établissement, divisées par le nombre d'habitants, excèdent deux fois la moyenne des bases de taxe professionnelle par habitant constatée au niveau national, il est perçu directement, au profit d'un fonds départemental de la taxe professionnelle, un prélèvement égal au produit du montant des bases excédentaires par le taux en vigueur dans la commune (...) I bis. Pour les établissements produisant de l'énergie ou traitant des combustibles, toute unité de production ou de traitement est considérée comme un établissement pour l'application des I et III (...) II. Les ressources du fonds sont réparties par le conseil général si les collectivités concernées sont situées dans les limites d'un même département... La liste des communes concernées est arrêtée par le conseil général du département où est implanté l'établissement dont les bases sont écrêtées...Le conseil général prélève, par priorité, au profit des communes...les sommes qui leur sont nécessaires pour permettre le remboursement des annuités d'emprunt...Le solde est réparti : 1° D'une part entre les communes, les établissements publics de coopération intercommunale et les agglomérations nouvelles, défavorisés par la faiblesse de leur potentiel fiscal ou l'importance de leurs charges ; 2° D'autre part : a) entre les communes qui sont situées à proximité de l'établissement lorsqu'elles ou leurs établissements publics de coopération intercommunale subissent de ce fait un préjudice ou une charge quelconque et en particulier lorsqu'une partie des salariés de cet établissement y réside, le nombre de ceux-ci étant un élément déterminant de la répartition ; ...chacune des catégories définies au 1° et 2° recevra au minimum 40 pour 100 des ressources de ce fonds. III. Lorsque l'excédent provient d'un établissement au sens du I bis produisant de l'énergie ou traitant des combustibles, créé à partir du 1er janvier 1976, la répartition de la fraction de ressources mentionnée au 2° du II, établie par le ou les départements concernés dans les conditions prévues au II, est soumise à l'accord, à la majorité qualifiée, des communes d'implantation et des communes concernées, telles qu'elles sont définies au 2° du II » ; qu'aux termes de l'article 1er du décret susvisé du 17 octobre 1988 pris pour l'application des dispositions législatives précitées, l'établissement s'entend, « sous réserve des dispositions du III de

l'article 1648 A, ... de l'ensemble des installations utilisées par un assujetti dans une même commune, soit qu'elles soient établies en un même endroit, soit qu'elles soient affectées à la même activité ou à des activités connexes ou complémentaires » ; qu'aux termes de l'article 4 du même décret : « I. Le conseil général exerce les attributions suivantes : 1° Il détermine les prélèvements prioritaires à effectuer pour couvrir les annuités d'emprunts visées au troisième alinéa du II de

l'article 1648 A...2° Il répartit le solde disponible ...en deux parts destinées respectivement aux bénéficiaires définis aux 1° et 2° du II de l'article 1648 A...5° Il établit...la liste des communes visées au a) du 2° du II de l'article 1648 A précité et assure entre ces communes la répartition de la seconde part visée au 2° ci-dessus ...Figurent sur cette liste les communes où sont domiciliés, au 1er janvier de l'année de l'écrêtement, au moins dix salariés travaillant dans l'établissement et dans lesquelles ces salariés et leurs familles représentent au moins 1 pour 100 de la population totale de la commune. Pour l'appréciation de cette dernière condition, le nombre de salariés est multiplié par quatre... » ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 1er du décret du 17 octobre 1988 susvisé que, pour l'application des dispositions de l'article 1648 A du code général des impôts, l'établissement est défini comme l'ensemble des installations utilisées par un assujetti dans une même commune, sous réserve des dispositions du III de l'article 1648 A précité, qui renvoie au I bis de ce dernier article, lequel le définit, pour ceux produisant de l'énergie, comme toute unité de production ; que la seule référence du I bis précité aux I et III dudit article ne saurait être regardée comme réservant l'application de cette définition dérogatoire de l'établissement aux seules dispositions du I et du III de cet article, à l'exclusion du II, alors que le III évoque lui-même « la répartition de la fraction de ressources mentionnée au 2° du II » ; que la COMMUNE de GIVET est ainsi fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a estimé que la définition dérogatoire précitée n'était pas applicable aux règles de répartition des dotations disponibles édictées par le II de l'article 1648 A du code général des impôts, et par suite, qu'il y avait lieu de se référer à cet égard à la définition générale de l'établissement donnée à l'article 1er du décret du 17 octobre 1988, à savoir l'ensemble des installations d'un assujetti implantées sur la même commune ;

Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la lettre du 19 juillet 2005 d'EDF, exploitant la centrale nucléaire de Chooz, et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté, que les deux unités B1 et B2 doivent être regardées comme des unités de productions pouvant faire l'objet d'une exploitation autonome et comme constituant ainsi chacune un établissement distinct ; que la circonstance que le personnel de la centrale nucléaire soit pour l'essentiel non affecté à un établissement déterminé et qu'EDF n'ait établi qu'une seule liste de personnel pour l'ensemble de la centrale nucléaire est sans incidence sur ce qui précède ; qu'il s'ensuit que la COMMUNE de GIVET est fondée à faire valoir que, s'agissant notamment des communes concernées au sens du 2° du II de l'article 1648 A du code général des impôts, telles celle de Haybes, chaque unité de production, faisant d'ailleurs chacune l'objet d'une imposition distincte à la taxe professionnelle, doit donner lieu à une appréciation distincte du dépassement du seuil d'écrêtement et à une répartition distincte ; que la COMMUNE de GIVET est dès lors fondée à demander l'annulation des délibérations précitées du 19 octobre 2004 et du 16 décembre 2005 du conseil général des Ardennes, lesquelles ont inclus la commune de Haybes parmi les bénéficiaires du fonds départemental de péréquation de la taxe professionnelle au titre de l'écrêtement des bases de la centrale nucléaire de Chooz, considérée à tort comme ne constituant qu'un seul établissement, au motif que ladite commune comportait au moins dix salariés travaillant dans cet établissement, soit onze au 1er janvier 2004 et douze au 1er janvier 2005 ; qu'il s'ensuit que le jugement attaqué doit lui-même être annulé ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la COMMUNE de GIVET, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande le département des Ardennes au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de condamner le département des Ardennes à verser à la COMMUNE de GIVET la somme de 1 500 € sur le fondement des mêmes dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du

20 septembre 2007 est annulé ainsi que les délibérations du 19 octobre 2004 et du 16 décembre 2005 du conseil général des Ardennes en ce qu'elles incluent la commune de Haybes parmi les communes bénéficiaires de la répartition du solde du produit 2004 et du produit 2005 du fonds départemental de la taxe professionnelle en tant que ce solde résulte de l'écrêtement des bases de la centrale nucléaire de Chooz.

Article 2 : Le département des Ardennes versera à la COMMUNE de GIVET une somme de mille cinq cents euros (1 500 €) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions du département des Ardennes tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE de GIVET et au département des Ardennes.

Copie en sera adressée à la commune de Haybes, à la commune de Chooz, à la commune d'Aubrives, à la commune de Fromelennes, à la commune de Rancennes, à la commune de Vireux Molhain, à la commune de Vireux Wallerand et au ministère de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales.

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07NC01572


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07NC01572
Date de la décision : 30/10/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: M. Olivier COUVERT-CASTERA
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : SELAS CABINET DEVARENNE ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2008-10-30;07nc01572 ?
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