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30/10/2008 | FRANCE | N°07NC01267

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 30 octobre 2008, 07NC01267


Vu le recours, enregistré le 6 septembre 2007, présenté par le PREFET DU TERRITOIRE DE BELFORT ;

Le PREFET DU TERRITOIRE DE BELFORT demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601537 en date du 10 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Besançon d'une part, a annulé ses décisions des 25 avril et 8 septembre 2006 par lesquelles il a refusé à Mme la délivrance d'un titre de séjour et rejeté son recours gracieux, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » ;

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°) de rejeter la demande de Mme devant le Tribunal administratif de Besançon ;

Il sout...

Vu le recours, enregistré le 6 septembre 2007, présenté par le PREFET DU TERRITOIRE DE BELFORT ;

Le PREFET DU TERRITOIRE DE BELFORT demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601537 en date du 10 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Besançon d'une part, a annulé ses décisions des 25 avril et 8 septembre 2006 par lesquelles il a refusé à Mme la délivrance d'un titre de séjour et rejeté son recours gracieux, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée un titre de séjour portant la mention « vie privée et familiale » ;

2°) de rejeter la demande de Mme devant le Tribunal administratif de Besançon ;

Il soutient :

- que le secrétaire général de la préfecture était compétent à l'effet de signer les décisions attaquées ;

- que c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que le refus de séjour opposé à Mme méconnaissait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, au motif que son mari résidait à titre principal en France au titre d'un certificat de résidence de dix ans portant la mention « retraité », dès lors que la délivrance de ce certificat est réservée aux personnes ayant établi leur résidence habituelle hors de France ;

- que le fait que l'intéressée s'occupe quotidiennement de sa petite fille âgée de 3 ans ne saurait lui créer un droit de séjour ;

- que l'intéressée n'est pas isolée en Algérie, dès lors que toute sa famille y réside hormis sa fille ;

- que rien ne s'oppose à ce que la vie familiale du couple se fasse en Algérie, son mari ayant lui-même de la famille en Algérie, où il a contracté mariage avec une autre personne, un enfant étant d'ailleurs né de cette union ;

- que les autres moyens soulevés en première instance par la requérante, tirés de son état de santé et de l'insuffisance de ses revenus, ne sont pas fondés ;

- que l'intéressée, n'ayant pas résidé régulièrement en France avec son mari, ne peut bénéficier d'un certificat de résidence de dix ans portant la mention « retraité » et ne saurait non plus invoquer la procédure intentée par son mari pour obtenir sa réintégration dans la nationalité française, laquelle n'a pas abouti ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 novembre 2007, présenté pour Mme , par Me Dufay ;

Mme conclut au rejet du recours du préfet, subsidiairement à l'annulation des refus de séjour qui lui ont été opposés sur le fondement de l'article 6.7 de l'accord franco-algérien, et à ce qu'une somme de 1 000 € soit mise à la charge de l'Etat au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à son conseil en application de l'article 37 de la loi du

10 juillet 1991 ;

Elle soutient :

- que c'est à juste titre que le tribunal administratif a annulé les décisions litigieuses pour méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- que son mari n'a plus de liens familiaux en Algérie et réside régulièrement en France sous couvert d'un certificat de résidence de dix ans ;

- qu'elle est en tout état de cause fondée à obtenir un titre de séjour en application de l'article 6.7 de l'accord franco-algérien ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 19 février 2008, présenté par le PREFET DU TERRITOIRE DE BELFORT, qui conclut aux mêmes fins que son recours par les mêmes moyens ;

Vu, en date du 14 décembre 2007, la décision du bureau de l'aide juridictionnelle près du Tribunal de grande instance de Nancy (section administrative) accordant à Mme le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale et désignant Me Dufay pour la représenter ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2008 :

- le rapport de M. Couvert-Castéra, président,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;

Sur la légalité des décisions de refus de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : « Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : ...5. Au ressortissant algérien...dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus » ;

Considérant que Mme , de nationalité algérienne, est entrée en France le 8 avril 2004 en indiquant vouloir y rejoindre son mari, qui y est lui-même entré le 7 mai 2002 et s'est vu délivrer le 24 février 2003 un certificat de résidence d'une durée de dix ans portant la mention « retraité » ; que, toutefois, aux termes de l'article 7 ter de l'accord franco-algérien, ce certificat ne peut être accordé qu'aux ressortissants algériens ayant antérieurement résidé en France sous couvert d'un certificat de résidence valable dix ans qui ont établi ou établissent leur résidence habituelle hors de France et ne leur permet que d'effectuer en France des séjours n'excédant pas un an ; que s'il ressort des pièces du dossier que son mari, lequel a d'ailleurs vendu en 2005 la propriété qu'il possédait en Algérie, a désormais installé sa résidence habituelle en France, l'intéressée n'est pas fondée à se prévaloir d'une situation de fait, consacrant la méconnaissance par son mari de la condition de résidence habituelle hors de France à laquelle est subordonnée la délivrance du titre de séjour considéré ; que rien ne fait obstacle à ce que les deux époux poursuivent leur vie familiale en Algérie ; que, si la requérante fait également valoir que sa fille et son gendre demeurent en France et qu'elle s'occupe quotidiennement de sa petite fille âgée de 3 ans, elle n'est pas isolée en Algérie, où demeurent son fils, sa mère, ses deux frères et quatre soeurs ; qu'eu égard en outre à la durée et aux conditions de son séjour en France, les décisions du 25 avril 2006 et du 8 septembre 2006 par lesquelles le PREFET DU TERRITOIRE DE BELFORT a respectivement refusé de délivrer un titre de séjour à Mme et confirmé ce refus sur recours gracieux n'ont ainsi pas porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus et n'ont par suite méconnu ni les dispositions précitées de l'accord franco-algérien, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il s'ensuit que c'est à tort que, pour annuler lesdites décisions, le tribunal administratif a estimé que celles-ci avaient porté atteinte au droit de Mme au respect de sa vie privée et familiale ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner l'autre moyen énoncé par Mme devant le Tribunal administratif et devant la Cour ;

Considérant qu'aux termes du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé, le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est également délivré de plein droit « au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays... » ;

Considérant que si Mme fait valoir qu'elle est atteinte de diabète non insulino-dépendant et d'hypertension artérielle, il ressort des deux avis rendus le 28 février 2006 et le 22 août 2006 par le médecin inspecteur de santé publique que si son état de santé nécessite une prise en charge médicale et que le défaut d'une telle prise en charge peut entraîner des conséquences graves à long terme en l'absence de traitement, l'intéressée peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; que cette appréciation est corroborée par les pièces produites au dossier par le préfet et ne saurait être sérieusement contestée par le certificat médical invoqué par la requérante en vertu duquel la possibilité de traitement en Algérie « semble aléatoire » en raison notamment de l'exposition aux allergènes susceptibles de raviver l'asthme évolutif qu'elle présente également ; que l'intéressée n'établit pas que la modicité de ses ressources l'empêcherait de bénéficier effectivement en Algérie des soins qui lui sont nécessaires et dont elle n'allègue pas qu'ils soient particulièrement coûteux ; que le PREFET DU TERRITOIRE DE BELFORT n'a ainsi pas méconnu les stipulations précitées en refusant de délivrer à Mme le titre de séjour sollicité sur leur fondement ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la demande de Mme devant le tribunal administratif doit être rejetée ; qu'il s'ensuit que le PREFET DU TERRITOIRE DE BELFORT est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Besançon en date du 10 juillet 2007 est annulé.

Article 2 : La demande de Mme devant le Tribunal administratif de Besançon est rejetée ainsi que ses conclusions devant la Cour.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire et à Mme .

2

07NC01267


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07NC01267
Date de la décision : 30/10/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: M. Olivier COUVERT-CASTERA
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : SCP DUFAY SUISSA CORNELOUP

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2008-10-30;07nc01267 ?
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