Vu la requête enregistrée le 21 mars 2006, complétée par un mémoire enregistré le 30 mars 2007, présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU TERRITOIRE DE BELFORT par la SCP d'avocats Michel - Frey-Michel - Bauer - Berna ; la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU TERRITOIRE DE BELFORT demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0200164 du 24 janvier 2006 par lequel le Tribunal administratif de Besançon a limité à 3 000 € le remboursement des débours qu'elle avait exposés suite à l'intervention chirurgicale subie par Mme X le 5 mai 1998 ;
2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Nancy à lui verser une somme de 76 585,07 € portant intérêts au jour de sa demande ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Nancy une somme de 1 500 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- le tribunal a fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale en limitant à 3 000 € le remboursement de ses débours ;
- les débours dont le remboursement est sollicité sont en lien avec les suites de l'opération subie par Mme X le 5 mai 1998 ; la mise en invalidité est imputable à la faute commise par l'hôpital et non à une pathologie hématologique ; la période d'incapacité temporaire totale se prolonge jusqu'en mars 2004 ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 12 janvier 2007, présenté pour Mme X par Me Bettinger, avocat, qui demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement du Tribunal administratif de Besançon du 24 janvier 2006 qui ne lui a attribué qu'une indemnité insuffisante ;
2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Besançon à lui payer une somme de 97 782,71 € en réparation des préjudices qu'elle a subis suite à l'intervention du 5 mai 1998 ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Besançon une somme de 1 500 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que ses préjudices ont été sous-évalués par le tribunal.
Vu les mémoires en défense, enregistrés les 15 janvier 2007 et 25 mars 2008, présentés pour le centre hospitalier universitaire de Besançon par Me Le Prado, avocat, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que :
- les droits de la caisse appelante sont limités ; en application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, l'organisme de sécurité sociale exerce son recours sur la part d'indemnité qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de la victime ; se trouve exclue de l'assiette de ce recours la part de l'indemnité de caractère personnel ;
- les droits de la caisse ne peuvent s'imputer poste par poste que sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elle a pris en charge ; il incombe à la caisse de démontrer l'objet et le montant de chaque prestation dont elle demande le remboursement ;
- certains frais d'hospitalisation dont le remboursement est demandé ne sont pas en lien avec les suites de la faute médicale commise mais à relier aux autres pathologies de l'intéressée ; il en va ainsi notamment des frais relatifs aux hospitalisations du 1er au 4 juillet 1998 et du 8 juin 2000 ; de même, le tribunal ayant constaté que Mme X n'a pas subi de pertes de rémunérations pendant son interruption temporaire de travail, les indemnités journalières versées par la caisse ne peuvent être prises en compte ; à tout le moins, l'expert ne fixe le début de la première période d'interruption temporaire de travail qu'au 8 mai 1998 alors que la caisse prétend obtenir le remboursement de celles versées à compter du 5 mai 1998 ; en tout état de cause, l'interruption temporaire de travail imputable à la faute n'a pas duré trois années ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2008 :
- le rapport de M. Tréand, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Collier, commissaire du gouvernement ;
Sur les conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU TERRITOIRE DE BELFORT :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant du III de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006 de financement de la sécurité sociale pour 2007 : « Lorsque, sans entrer dans les cas régis par les dispositions législatives applicables aux accidents du travail, la lésion dont l'assuré social ou son ayant-droit est atteint est imputable à un tiers, l'assuré ou ses ayants-droit conserve contre l'auteur de l'accident le droit de demander la réparation du préjudice causé, conformément aux règles du droit commun, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du présent livre./ Les caisses de sécurité sociale sont tenues de servir à l'assuré ou à ses ayants-droit les prestations prévues par le présent livre, sauf recours de leur part contre l'auteur responsable de l'accident dans les conditions ci-après./ Les recours subrogatoire des caisses contre les tiers s'exercent poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'elles ont pris en charge, à l'exclusion des préjudices à caractère personnel./ Conformément à l'article 1252 du code civil, la subrogation ne peut nuire à la victime subrogeante, créancière de l'indemnisation, lorsqu'elle n'a été prise en charge que partiellement par les prestations sociales ; en ce cas, l'assuré social peut exercer ses droits contre le responsable, par préférence à la caisse subrogée./ Cependant, si le tiers payeur établit qu'il a effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un poste de préjudice personnel, son recours peut s'exercer sur ce poste de préjudice (…) » ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions, applicables à des dommages survenus antérieurement à leur entrée en vigueur et n'ayant pas donné lieu à une décision passée en force de chose jugée, que, pour évaluer le montant du préjudice total subi par Mme X suite à l'opération qu'elle a subie le 5 mai 1998 au centre hospitalier universitaire de Besançon, le tribunal devait comptabiliser l'ensemble des dommages directement liés à l'atteinte corporelle résultant de l'intervention, qu'ils aient été pris en charge par un organisme de sécurité sociale ou soient demeurés à la charge de la victime ; que les frais médicaux et d'hospitalisation devaient être évalués à leur montant réel, avant toute compensation par des prestations ; que la circonstance que la victime ne demandait réparation que des pertes de revenus restées à sa charge ne dispensait pas le juge, dès lors que la caisse demandait le remboursement des prestations compensatoires, de tenir compte des pertes réelles de revenus pour fixer le montant de ce poste de préjudice ; que, dans les circonstances de l'espèce, alors que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU TERRITOIRE DE BELFORT avait produit divers états récapitulatifs des débours qu'elle avait supportés suite à l'accident qui s'est produit lors de l'opération du 5 mai 1998 et notamment un dernier joint au mémoire enregistré le 5 août 2005, le tribunal, qui avait admis l'existence de tels frais, ne les a pas intégrés dans le calcul du préjudice global subi par la victime avant même de déterminer les droits tant de la victime que de la caisse ; que cette dernière est, dès lors, fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal n'a pas tenu compte de ses débours pour fixer le préjudice global de Mme X ;
Considérant, toutefois, que si, à hauteur d'appel, la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU TERRITOIRE DE BELFORT revendique, dans le corps de sa requête introductive d'instance, le remboursement d'une somme de 79 672,52 € au titre des débours qu'elle aurait exposés suite à l'opération subie par Mme X le 5 mai 1998, dans les conclusions dudit mémoire, elle ramène sans explications ses prétentions à 76 585,07 € ; qu'alors même que, dans ses mémoires enregistrés devant le tribunal les 26 mars 2002, 4 décembre 2003, 3 juin 2004 et 5 août 2005, elle n'avait jamais cité ce montant, elle ne produit, tant en première instance qu'à hauteur d'appel, aucun justificatif permettant d'établir que ses débours, dont le détail n'est pas précisé, seraient directement en lien avec les suites de l'opération subie par Mme X le 5 mai 1998, ce qui est formellement contesté par le centre hospitalier ; que notamment, elle continue à prétendre, sans apporter aucun élément précis de nature à combattre les conclusions claires du rapport complémentaire de l'expert daté du 26 juillet 2005, que la mise en invalidité de Mme X en date du 20 mars 2001 serait en lien avec la faute commise par le service public hospitalier alors qu'elle résulte d'autres pathologies dont était atteinte l'intéressée ; qu'elle ne démontre pas que la période d'incapacité temporaire partielle de la victime imputable à la faute commise par l'hôpital serait continue et que son terme serait très supérieur à celui déterminé par l'expert, qui l'a fixé au 17 avril 2003 ; qu'alors que ce lien est expressément contesté par l'hôpital intimé, elle n'apporte pas la preuve que les frais médicaux et d'hospitalisation dont elle demande le remboursement seraient en lien avec l'intervention chirurgicale du 5 mai 1998 ; que, dans ces conditions, et quand bien même il n'est pas contesté que l'appelante ait exposé des frais de diverses natures, elle n'est pas fondée à demander à la Cour de réformer le jugement et de condamner le Centre hospitalier universitaire de Besançon à lui verser une somme de 76 585,07 € au titre des débours qu'elle aurait exposés suite à l'opération subie par Mme X le 5 mai 1998 dès lors qu'elle ne détaille pas leur nature poste par poste, ni ne démontre leur lien avec la faute commise par le centre hospitalier universitaire de Besançon ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Sur les conclusions de Mme X :
Considérant que les conclusions formées par Mme X dans un mémoire enregistré le 12 janvier 2007 au greffe de la Cour, soit plus de deux mois après que lui a été notifié le 25 janvier 2006 le jugement querellé par la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU TERRITOIRE DE BELFORT, ne peuvent être considérées comme un appel principal ; que, par ailleurs, sa situation ne se trouvant pas aggravée par l'effet du présent arrêt, Mme X n'est pas recevable à contester, par la voie de l'appel provoqué, le montant de son indemnisation ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : La requête susvisée de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU TERRITOIRE DE BELFORT est rejetée.
Article 2 : Les conclusions susvisées de Mme X sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DU TERRITOIRE DE BELFORT, à Mme Liliane X et au centre hospitalier universitaire de Besançon.
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N°06NC00432