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03/04/2008 | FRANCE | N°06NC01292

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 03 avril 2008, 06NC01292


Vu la requête, enregistrée le 14 septembre 2006 au greffe de la Cour, complétée par un mémoire enregistré le 22 janvier 2008, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE, dont le siège est 10 Côte de Saverne BP 105 à Saverne Cedex (67703), par Me Monheit, avocat ; le CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0301276 en date du 12 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg l'a condamné à indemniser M. X et la Société nationale des chemins de fer français (SNCF), en s

a qualité de gestionnaire de la caisse autonome de sécurité sociale et d...

Vu la requête, enregistrée le 14 septembre 2006 au greffe de la Cour, complétée par un mémoire enregistré le 22 janvier 2008, présentée pour le CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE, dont le siège est 10 Côte de Saverne BP 105 à Saverne Cedex (67703), par Me Monheit, avocat ; le CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0301276 en date du 12 juillet 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg l'a condamné à indemniser M. X et la Société nationale des chemins de fer français (SNCF), en sa qualité de gestionnaire de la caisse autonome de sécurité sociale et d'employeur de M. X, des préjudices qu'a subis ce dernier suite à son hospitalisation survenue le 25 février 2001 ;

2°) de mettre à la charge de M. X et de la SNCF une somme de 1 000 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient qu'il ne lui appartient de rembourser à la SNCF ni les frais médicaux et chirurgicaux ni les salaires et les charges, qui ne sont pas directement liés à la faute qu'il a commise mais qui auraient été de toute façon exposés suite à l'accident de cheval subi par M. X le 25 février 2001 ;

Vu le jugement attaqué ;
Vu les mémoires en défense, enregistrés les 5 février et 31 mai 2007, présentés pour la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) par Me Weber, avocat; la SNCF demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête d'appel du CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE ;

2°) par la voie de l'appel incident, de condamner le CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE à lui rembourser à hauteur de 160 833,70 €, la pension de réforme qu'elle a versée à M. X depuis le 1er mars 2006 et la capitalisation de cette pension jusqu'à l'âge normal de mise à la retraite de la victime, cette somme portant intérêts au taux légal à compter du 12 mai 2006 ;

3°) à titre subsidiaire, de confirmer le jugement en tant qu'il a condamné le CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE à lui verser une somme de 65 420,62 € correspondant aux :

- frais de soins supportés du 25 février au 24 septembre 2001 ;

- frais dédommageant l'interruption de travail sur une durée de 7 mois ;

- frais de renouvellement des chaussures orthopédiques De M. X ;

- dépenses non encore facturées mais prévues par l'expert sans limitation dans le temps, qui seront prises en charge au fur et à mesure de leur exposition et sur justificatifs ;

4°) de mettre à la charge du CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE une somme de 1 500 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le tribunal n'a pas commis d'erreur de droit en condamnant l'hôpital appelant à réparer l'intégralité des frais médicaux et chirurgicaux et l'intégralité des salaires et charges qu'elle a supportés suite à l'hospitalisation ;

- le mise à la réforme de M. X à compter du 1er mars 2006 est liée à la faute commise par l'hôpital ;

- les frais futurs liés à l'équipement médical qui sera fourni à la victime doivent être remboursés ;

- M. X ayant été mis à la réforme à compter du 1er mars 2006, la pension qui lui a été versée constitue un préjudice indemnisable ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 19 avril 2007 et 25 février 2008, présentés pour M. X par Me Breyer-Scheibling, avocat ; M. X demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête d'appel du CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE ;

2°) par la voie de l'appel incident, de réformer le jugement et de condamner le CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE à lui payer une somme de 194 237,40 € en réparation de son préjudice professionnel ;

3°) de mettre à la charge du CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE une somme de 1 500 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- l'hôpital devait rembourser à la SNCF l'intégralité des frais médicaux et chirurgicaux et l'intégralité des salaires et charges qu'a supportés cette dernière suite à son hospitalisation, conformément à une jurisprudence bien établie (CE 30 décembre 2002 AP-HP n° 206.043) ;

- le tribunal a, à tort, écarté le préjudice professionnel subi par M. X alors que sa mise à la retraite est due à la faute commise par l'hôpital ; il n'a plus pu occuper d'emploi de terrain ; il a dû être cantonné à des emplois de bureau ; il a perdu une chance de poursuivre une autre carrière et de ne pas être mis à la retraite ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mars 2008 :

- le rapport de M. Tréand, premier conseiller,

- les observations de Me Monheit, avocat du CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;


Sur l'appel principal :

Considérant que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE ne peut être condamné qu'à réparer les dommages que ses fautes ont directement causés ; que, par suite, sans méconnaître le principe de réparation intégrale du préjudice, il n'est tenu de rembourser que les débours et frais exposés par la Société nationale des chemins de fer français (SNCF), en sa qualité d'organisme gestionnaire de la caisse autonome de sécurité sociale et d'employeur de M. X, directement en lien avec les fautes retenues par le tribunal et non ceux que cette dernière aurait, en tout état de cause, supportés suite à l'accident de cheval dont a été victime M. X le 25 février 2001, qui lui a causé une fracture ouverte du pilon tibial de la jambe droite de grande gravité, aux dires de l'expert désigné en référé, le docteur Vogt ;


Considérant, d'une part, qu'en demandant le remboursement à hauteur de 6 692,84 € de l'ensemble des frais de soins, d'hospitalisation, pharmaceutiques et d'appareillage qu'elle a supportés du 25 février au 20 septembre 2001, ainsi qu'une somme de 24 377,72 €, la SNCF n'a rapporté, ni en première instance ni en appel, la preuve qui lui incombe que lesdits frais seraient en lien direct avec les fautes commises par le CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE qui n'ont qu'aggravé l'état de santé de M. X ; qu'au surplus, les frais futurs réclamés ne sont ni certains ni justifiés ; que le jugement attaqué doit être annulé en ce qu'il a mis à la charge du centre hospitalier l'ensemble de ces frais ;


Considérant, d'autre part, que la SNCF, en sa qualité d'organisme gestionnaire de la caisse autonome de sécurité sociale et d'employeur de M. X, avait demandé à être remboursée des salaires et des charges patronales obligatoires afférentes à ces salaires qu'elle a versés à ce dernier du 25 février 2001 au 30 septembre 2002 ; qu'il résulte du rapport de l'expert, dont les conclusions ne sont pas contestées, que les complications dues aux fautes médicales commises par le CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE ont seulement allongé la période d'incapacité temporaire totale de la victime de 7 mois, soit du 1er mars au 30 septembre 2002 ; qu'ainsi, du 25 février 2001 au 28 février 2002, l'arrêt de travail de M. X n'était imputable qu'aux conséquences de la fracture dont il avait été victime suite à sa chute de cheval survenue le 25 février 2001 ; que, par suite, la SNCF ne peut prétendre être indemnisée que des salaires et charges patronales qu'elles a versés pour la période allant du 1er mars au 30 septembre 2002, soit la somme non contestée de 33 992,32 €, avec intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 2005 ; que le jugement attaqué sera réformé en ce sens ;


Sur les appels incidents :

Considérant, d'une part, que comme il a été dit ci-dessus, l'incapacité temporaire totale de M. X du 1er mars 2001 au 1er mars 2002 n'est pas directement liée aux fautes commises par le CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE mais aux suites normales de sa fracture initiale ; que, par suite, M. X, qui a été indemnisé par le tribunal des pertes de rémunérations qu'il a subies au cours de la période d'incapacité temporaire totale du 1er mars au 1er septembre 2002, n'est pas fondé à demander que l'hôpital appelant soit condamné à lui payer une indemnité représentant les astreintes qu'il aurait pu percevoir au cours de la période courant du 1er mars 2001 au 1er mars 2002 ;


Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport de l'expert, que M. X a été victime, le 25 février 2001, d'une «fracture d'une grande gravité», qui génère «des suites très souvent défavorables» ; que, par ailleurs, l'expert ne relie pas de manière certaine les fautes commises par l'hôpital appelant, qui ne sont à l'origine que d'une incapacité permanente partielle supplémentaire de 8 %, et l'évolution de la carrière de M. X au sein de la SNCF postérieurement au 1er octobre 2002, date de sa reprise du travail ; qu'il n'estime même pas que lesdites fautes du service public hospitalier auraient fait perdre à l'intéressé une chance de poursuivre normalement son activité professionnelle jusqu'à 65 ans ; qu'il s'ensuit que tant le changement de poste qu'a subi la victime à compter du 1er octobre 2002 que sa «mise à la réforme pour raisons médicales» à compter du 1er mars 2006 ne peuvent être regardées comme étant la conséquence directe et immédiate des fautes médicales commises par le CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE ; que, par suite, la SNCF n'est pas fondée à demander le remboursement, à hauteur de 160 833,70 €, de la pension de réforme qu'elle a versée à M. X depuis le 1er mars 2006, ainsi que la capitalisation de cette pension jusqu'à l'âge normal de mise à la retraite de la victime ; que M. X n'est pas davantage fondé à demander la réparation de son préjudice professionnel ;


Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;


Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demandent les intimés au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;


Considérant, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. X et la SNCF à payer au CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE la somme qu'il sollicite au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



DÉCIDE :



Article 1er : Les articles 2 et 3 du jugement susvisé du 12 juillet 2006 du Tribunal administratif de Strasbourg sont annulés.

Article 2 : Le CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE est condamné à verser à la Société nationale des chemins de fer français (SNCF) la somme de 33 992,32 €, avec intérêts au taux légal à compter du 1er juillet 2005.

Article 3 : La demande de la SNCF présentée devant le tribunal administratif tendant à la condamnation du CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE à lui rembourser les frais médicaux et chirurgicaux, ainsi que les salaires et charges exposés entre le 25 février 2001 et le 28 février 2002, est rejetée.

Article 4 : Le surplus des conclusions du CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE et les conclusions d'appel incident de M. X et de la SNCF sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE HOSPITALIER SAINTE CATHERINE DE SAVERNE, à M. Jacques X et à la Société nationale des chemins de fer français.

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N° 06NC01292


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06NC01292
Date de la décision : 03/04/2008
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DESRAME
Rapporteur ?: M. Olivier TREAND
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : SCP MONHEIT LOOS ANDRE MAI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2008-04-03;06nc01292 ?
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