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20/12/2007 | FRANCE | N°06NC00826

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 20 décembre 2007, 06NC00826


Vu la requête, enregistrée le 8 juin 2006, complétée par un mémoire enregistré le 30 novembre 2007, présentée pour les HOPITAUX CIVILS DE COLMAR, dont le siège est 39 avenue de la Liberté à Colmar (68000), par Me Monheit, avocat ; les HOPITAUX CIVILS DE COLMAR demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0303417 en date du 11 avril 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg les a condamnés, à la demande de M. X, à réparer les préjudices subis par ce dernier et causés par l'infection contractée suite à son hospitalisation en décembre 1

999 ;

2°) de réduire le montant des indemnités accordées à M. X et à...

Vu la requête, enregistrée le 8 juin 2006, complétée par un mémoire enregistré le 30 novembre 2007, présentée pour les HOPITAUX CIVILS DE COLMAR, dont le siège est 39 avenue de la Liberté à Colmar (68000), par Me Monheit, avocat ; les HOPITAUX CIVILS DE COLMAR demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0303417 en date du 11 avril 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg les a condamnés, à la demande de M. X, à réparer les préjudices subis par ce dernier et causés par l'infection contractée suite à son hospitalisation en décembre 1999 ;

2°) de réduire le montant des indemnités accordées à M. X et à la Caisse régime social des indépendants (RSI) d'Alsace qui vient aux droits de la Caisse maladie régionale d'Alsace ;

3°) de rejeter la demande présentée par la Caisse régime social des indépendants (RSI) d'Alsace qui vient aux droits de l'Assurance vieillesse des artisans Alsace-Moselle ;

4°) de mettre à la charge des intimés une somme de 1 000 € au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- les pertes de revenus qu'a subies M. X entre août 2000 et juillet 2003 ne sont pas imputables à l'infection dont il a été victime ; l'expert a considéré que l'incapacité temporaire totale liée aux suites de l'infection n'avait duré que du 11 juin au 28 octobre 2000 ;

- la mise en invalidité de l'intéressé à compter du 1er août 2000 jusqu'à sa retraite le 1er août 2003 n'est pas la conséquence de l'infection, qui n'a provoqué qu'une incapacité permanente partielle de 5 % ; ils n'ont donc pas à rembourser l'assurance vieillesse des artisans Alsace-Moselle de la pension d'invalidité qu'elle a versée à M. X ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, ils ne devaient être condamnés qu'à rembourser les frais médicaux liés à l'infection et non ceux inhérents à l'accident dont a été victime M. X le 2 décembre 1999 ;


Vu le jugement attaqué ;


Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 juillet 2007, présenté pour M. X par Me Lebon, avocat, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 € soit mise à la charge des HOPITAUX CIVILS DE COLMAR au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le préjudice esthétique, le pretium doloris et les troubles dans les conditions d'existence ont été correctement indemnisés par le tribunal ;

- les pertes de rémunérations indemnisées correspondent à la période d'ITT liée aux complications et à la période d'invalidité causée, au moins en partie, par l'infection contractée lors de l'hospitalisation du mois de décembre 1999 ;

- les frais médicaux et d'hospitalisation exposés par l'assurance maladie sont, au moins partiellement, en lien avec les fautes commises par l'hôpital appelant ;


Vu le mémoire, enregistré le 5 novembre 2007, présenté pour la Caisse régime social des indépendants (RSI) d'Alsace, qui vient aux droits de la Caisse maladie régionale d'Alsace et de l'Assurance vieillesse des artisans Alsace-Moselle, par Me Lebon, qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 € soit mise à la charge des HOPITAUX CIVILS DE COLMAR au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- les débours remboursés à la Caisse maladie régionale d'Alsace sont directement liés à l'infection nosocomiale contractée par M. X ;

- l'invalidité de M. X résulte de l'infection qu'il a contractée ; la pension qui lui a été versée par l'Assurance vieillesse des artisans Alsace-Moselle est donc directement en lien avec la faute commise par l'hôpital ;


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;


Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 décembre 2007 :

- le rapport de M.Tréand, premier conseiller,

- les observations de Me André, avocat des HOPITAUX CIVILS DE COLMAR, et de Me Larere, pour la SCP Lebon et Mennegand, avocat de M. Baschschmidt, de la Caisse régime social des indépendants (RSI) et de caisse d'assurance vieillesse des artisans Alsace-Moselle ,

- et les conclusions de M. Collier, commissaire du gouvernement ;



Considérant que, victime d'une fracture luxation de la cheville droite consécutive à une chute survenue le 2 décembre 1999, M. X a été opéré le lendemain au sein du service de traumatologie des HOPITAUX CIVILS DE COLMAR ; qu'à la suite de cette hospitalisation, il a été victime d'une infection nosocomiale par staphylocoques dorés nécessitant de nouvelles hospitalisations et aggravant les séquelles de son accident initial ; que, par jugement avant dire droit du 31 mai 2005, le Tribunal administratif de Strasbourg a reconnu la responsabilité des HOPITAUX CIVILS DE COLMAR à raison des fautes qui ont entraîné les complications liées à l'infection contractée et prescrit une expertise complémentaire ; que, par jugement du 11 avril 2006, il a procédé à la liquidation des différents chefs de préjudice ; que les HOPITAUX CIVILS DE COLMAR relèvent appel de ce dernier jugement et demandent que les indemnisations au paiement desquelles ils ont été condamnés soient réduites ;

Sur les préjudices :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte du rapport d'expertise du Dr Y daté du 23 août 2005, dont les conclusions ne sont pas sérieusement contestées, d'une part, que la période d'incapacité temporaire totale de M. X, imputable aux seules complications liées à l'infection nosocomiale contractée et à son traitement, s'est étendue du 1er juin au 28 octobre 2000 et, d'autre part, que l'inaptitude de l'intéressé à reprendre son activité professionnelle de tapissier décorateur jusqu'à sa mise à la retraite le 31 juillet 2003 est directement et principalement liée aux séquelles de l'infection, quand bien même cette dernière n'a généré qu'une incapacité permanente partielle supplémentaire fixée par l'expert au taux de 5 % ; qu'ainsi, contrairement, à ce qu'a jugé le tribunal, l'intimé n'a été privé de revenus professionnels du fait de l'infection que du 1er juin 2000 au 31 juillet 2003 ; que, dès lors qu'il n'est pas contesté qu'antérieurement à son accident, il percevait une rémunération mensuelle de 1 500 €, son préjudice économique s'élevait à 57 000 € ; que M. X ayant touché 31 815,14 € au titre de la pension d'invalidité qui lui a été servie à compter du 1er août 2000 et jusqu'au 31 juillet 2003 par l'Assurance vieillesse des artisans Alsace-Moselle, aux droits de laquelle vient la Caisse régime social des indépendants (RSI) d'Alsace, les HOPITAUX CIVILS DE COLMAR ne devaient être condamnés à lui payer qu'une somme de 25 184,86 € au titre de ses pertes de rémunérations professionnelles ; que le jugement attaqué sera réformé en ce sens ;
Considérant, en second lieu, que les HOPITAUX CIVILS DE COLMAR ne peuvent être condamnés qu'à réparer les dommages directement imputables à leur faute ; que, par suite, ils ne sont tenus de rembourser que les débours exposés par la Caisse maladie régionale d'Alsace, aux droits de laquelle vient la Caisse régime social des indépendants (RSI) d'Alsace, directement en lien avec l'infection nosocomiale dont a été victime M. X ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du récapitulatif des prestations prises en charge, que les frais d'hospitalisation mentionnés pour un montant de 11 947,30 € correspondent aux hospitalisations qu'a dû subir M. X en mars 2000 tant à Colmar qu'à Illkirch et qui sont directement liées au traitement des suites de son infection ; qu'en revanche, la caisse ne justifie pas qu'un tel lien existerait pour les frais médicaux passés (1 889,81 €) ou futurs (575,66 €) dont elle demande le remboursement ; que, par ailleurs, les indemnités journalières versées au titre de la période du 22 décembre 1999 au 29 février 2000 pour un montant de 2 196,03 € ne peuvent être prises en compte puisqu'elles ne correspondent pas à la période d'incapacité temporaire totale imputable à l'infection ; qu'ainsi, les HOPITAUX CIVILS DE COLMAR sont fondés à soutenir qu'ils ne devaient être condamnés à rembourser à la Caisse maladie régionale d'Alsace qu'une somme de 11 947,3 € ; que le jugement attaqué sera réformé en ce sens ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des HOPITAUX CIVILS DE COLMAR, qui ne sont pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demandent M. X et la Caisse régime social des indépendants (RSI) d'Alsace au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Considérant, d'autre part, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions susmentionnées des HOPITAUX CIVILS DE COLMAR ;


DECIDE


Article 1er : Les HOPITAUX CIVILS DE COLMAR sont condamnés à verser à M. X la somme de 25 184,86 € au titre de ses pertes de rémunérations professionnelles liées à l'infection nosocomiale qu'il a contractée suite à son hospitalisation en décembre 1999.
Article 2 : Les HOPITAUX CIVILS DE COLMAR sont condamnés à verser à la Caisse régime social des indépendants (RSI) d'Alsace, qui vient aux droits de la Caisse maladie régionale d'Alsace, la somme de 11 947,3 € en remboursement des frais exposés par cette dernière et directement liées à l'infection nosocomiale qu'a contractée M. X lors de son hospitalisation en décembre 1999.
Article 3 : L'article premier du jugement du Tribunal administratif de Strasbourg du 11 avril 2006 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions des HOPITAUX CIVILS DE COLMAR et les conclusions de M. X et de la Caisse régime social des indépendants (RSI) d'Alsace tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié aux HOPITAUX CIVILS DE COLMAR, à M. Jean-Pierre X et à la Caisse régime social des indépendants (RSI) d'Alsace.


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N° 06NC00826


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06NC00826
Date de la décision : 20/12/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. DESRAME
Rapporteur ?: M. Olivier TREAND
Rapporteur public ?: M. COLLIER
Avocat(s) : SCP MONHEIT LOOS ANDRE MAI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-12-20;06nc00826 ?
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