Vu la requête, enregistrée le 13 mars 2006, présentée pour la SA MONTAGE INDUSTRIEL, dont le siège est 9 route de Metz à Charly Oradour (57640), par Me Kadri, avocat ; la SA MONTAGE INDUSTRIEL demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0301436 en date du 10 janvier 2006 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à obtenir la réduction des suppléments d'impôts sur les sociétés et des contributions additionnelles de 10 % alors en vigueur, mis à sa charge au titre des exercices 1995, 1996 et 1997 ;
2°) de lui accorder la réduction demandée de ces impositions ;
La SA MONTAGE INDUSTRIEL soutient que :
- le tribunal administratif refuse indûment d'admettre, en charges déductibles des résultats, des cadeaux sous forme de voyages, offerts à deux personnes ayant facilité les recherches de clients et de marchés ;
- la commission de 18 000 F versée à M. X a bien été justifiée, et correspond à des démarches du bénéficiaires auprès de clients potentiels ;
- c'est également à tort que le tribunal administratif refuse à la société le bénéfice de l'exonération d'impôt régie par l'article 44 sexies du code général des impôts ; les critères d'une reprise d'activités de la société C.L.P. ne sont pas réunis ;
- l'administration n'a pas démontré la mauvaise foi de la contribuable ayant motivé les pénalités ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 septembre 2006, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; il conclut au rejet de la requête ; il soutient que :
- la société requérante n'avait pas droit à l'exonération d'impôt prévue par l'article 44 sexies du code général des impôts, en raison de la détention indirecte de plus de 50 % de son capital par deux autres sociétés ;
- en outre, la SA MONTAGE INDUSTRIEL doit être regardée comme constituée pour l'extension des activités de la société C.L.P., ce qui l'exclut également du champ de cette exonération d'impôt ;
- les cadeaux offerts à la clientèle n'ont pas été justifiés par l'intérêt de l'exploitation ;
- la commission versée à M. X n'a pas non plus été justifiée, et n'a pas été déclarée par la société contribuable, dans les conditions régies par les articles 238 et 240 du code général des impôts ;
- les pénalités pour mauvaise foi sont justifiées en l'espèce par les déclarations contradictoires et fallacieuses des dirigeants de la société concernant sa structure ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 novembre 2007 :
- le rapport de M. Bathie, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Lion, commissaire du gouvernement ;
Sur l'exonération d'impôt sur les sociétés :
Considérant qu'en vertu de l'article 44 sexies du code général des impôts, les sociétés créées, comme en l'espèce, le 1er décembre 1994, pouvaient bénéficier d'une exonération totale, puis partielle, d'impôt sur les sociétés, selon les modalités prévues par ces dispositions, sous certaines conditions, précisées au II du même article, selon lequel : Le capital des sociétés nouvelles ne doit pas être détenu, directement ou indirectement, pour plus de 50 % par d'autres sociétés. / Pour l'application du premier alinéa, le capital d'une société nouvelle est détenu indirectement par une autre société lorsque l'une au moins des conditions suivantes est remplie : … un associé exerce … la fonction de président-directeur général … d'une autre société ; … un associé détient avec les membres de son foyer fiscal 25 % au moins des droits sociaux dans une autre entreprise … ;
Considérant que, selon une déclaration reçue par l'administration en février 1995, M. Domenico Y détenait avec les membres de son foyer fiscal 1 499 actions sur 2 500, soit plus de 50 % du capital, dans la SA MONTAGE INDUSTRIEL, créée le 1er décembre 1994 ; qu'il résulte de l'instruction que M. Y était simultanément associé à 30 % de la société Chouffert Y Probst et associé à 31,9 % ainsi que président-directeur général de la société Compagnie européenne de prestations ; que ces deux dernières sociétés devaient être regardées comme détenant indirectement plus de 50 % du capital de la SA MONTAGE INDUSTRIEL, conformément au II de l'article 44 sexies précité ; que si la société requérante persiste à soutenir que, lors de sa création, la structure de son capital était différente, et que M. Domenico Y détenait seulement, avec son épouse, 500 actions, elle ne produit aucun document probant en ce sens ; qu'ainsi, elle n'établit pas avoir droit, au moins partiellement, à l'exonération d'impôt dont elle se prévalait ; que, pour ce seul motif, tiré de l'application des dispositions de l'article 44 sexies II, les premiers juges ont pu, à bon droit, confirmer le refus de cette exonération opposée à la société par l'administration ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la nouvelle société n'aurait pas, comme le soutenait également le service, été constituée pour l'extension des activités préexistantes de la société C.L.P., est, en tout état de cause, inopérant ;
Sur les charges déductibles :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable aux sociétés en vertu de l'article 209 I du même code : 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant : … 1º Les frais généraux de toute nature … 5. Sont également déductibles les dépenses suivantes : e. Les cadeaux de toute nature … Les dépenses ci-dessus énumérées peuvent … être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure où elles sont excessives et où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise … ; que, sur le fondement de ces dernières dispositions, l'administration a réintégré dans les résultats de la SA MONTAGE INDUSTRIEL les dépenses de voyages offerts à des tiers, payées successivement le 1er juin 1995 à RL Voyages et le 30 septembre 1997 à Génial Tours, pour des montants respectifs de 12 000 F et 10 000 F, au motif que les frais en cause ne pouvaient être regardés comme exposés dans l'intérêt direct de l'entreprise ; que si la société affirme, sans au demeurant le justifier, que ces voyages étaient offerts à MM. X et Z, elle n'établit pas, en tout état de cause, son intérêt propre à prendre en charge ces cadeaux d'un montant élevé, en se bornant à alléguer, sans autres précisions, que ces deux personnes étaient alors d'importants partenaires commerciaux jouant un rôle d'intermédiaire dans la conclusion de marchés ;
Considérant, en second lieu, que le vérificateur a également refusé la déduction d'une note d'honoraires en date du 20 octobre 1995, payée à M. X pour … des démarches commerciales chez divers clients … pour d'éventuels travaux d'entretien sur matériel de carrière … ; que la société contribuable n'a jamais précisé ni justifié le détail des frais qui auraient été engagés par son créancier ; que cette justification ne peut résulter d'une attestation succincte et tardive de l'intéressé, évoquant ses démarches en termes généraux ; qu'en outre, le ministre rappelle, sans être contredit, que cette commission n'avait pas été déclarée comme exigé par l'article 240 du code général des impôts, ni régularisée selon les conditions prévues à l'article 238 du même code, ce qui permettait au service d'en refuser la déduction conformément à ces dispositions combinées ;
Sur les pénalités :
Considérant que le ministre indique, sans être utilement contredit, que la société a produit des documents fallacieux relatifs à la composition de son capital d'origine, d'ailleurs contredits peu après dans la déclaration reçue par le service en février 1995, et qui avaient pour but de tenter d'éluder l'impôt ; que le ministre établit ainsi la mauvaise foi de la contribuable, ayant motivé la pénalité de 40 % prévue en pareil cas par l'article 1729 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SA MONTAGE INDUSTRIEL n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions de la requérante tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la SA MONTAGE INDUSTRIEL la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SA MONTAGE INDUSTRIEL est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA MONTAGE INDUSTRIEL et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
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N° 06NC00380