La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/10/2007 | FRANCE | N°04NC01128

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 25 octobre 2007, 04NC01128


Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2004, présentée pour la SA HOTEL DE TURENNE, dont le siège est 10 route de Bâle à Colmar (68000), représentée par le président de son conseil d'administration, par Me Meurant ; la SA HOTEL DE TURENNE demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0003254, 0003255, en date du 21 octobre 2004, par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg ne lui a accordé qu'une décharge partielle des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 juin 198

6, 1987 et 1988 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentair...

Vu la requête, enregistrée le 21 décembre 2004, présentée pour la SA HOTEL DE TURENNE, dont le siège est 10 route de Bâle à Colmar (68000), représentée par le président de son conseil d'administration, par Me Meurant ; la SA HOTEL DE TURENNE demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0003254, 0003255, en date du 21 octobre 2004, par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg ne lui a accordé qu'une décharge partielle des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 juin 1986, 1987 et 1988 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 10 000 €, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La SA HOTEL DE TURENNE soutient que :

- le service a entendu réprimer un abus de droit sans respecter la procédure prévue en pareil cas par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ;

- le redressement en litige était atteint de prescription en application des dispositions des articles L. 169 et L. 189 du livre des procédures fiscales ;

- la procédure contradictoire n'a pas été respectée, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, du fait de l'insuffisance de motivation de la notification de redressement qui lui a été adressée, en date du 14 décembre 1989, et de la lettre de confirmation du redressement, en date du 11 juin 1990 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2005, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre demande le rejet de la requête, par le motif qu'aucun des moyens invoqués par la SA HOTEL DE TURENNE n'est fondé ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 septembre 2007, présenté comme ci-dessus pour la SA HOTEL DE TURENNE ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2007 :

- le rapport de M. Montsec, président,

- les observations de Me Schneider, avocat de la SA HOTEL DE TURENNE,

- et les conclusions de M. Lion, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, suite à la vérification de comptabilité dont a fait l'objet la SA HOTEL DE TURENNE, portant sur les trois exercices clos les 30 juin 1986, 1987 et 1988, l'administration fiscale a notifié à cette société, notamment, un redressement en base de la somme de 1 424 405 F, au titre de l'exercice clos le 30 juin 1986, qu'elle a regardée comme correspondant à la cession occulte à M. et Mme X des éléments incorporels du fonds de commerce d'hôtel-restaurant que la société avait créé, constitutive d'un acte anormal de gestion ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable issue de l'article 14 de la loi n° 87-502 du 8 juillet 1987 : « Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : (…) qui déguisent (…) un transfert de bénéfice ou de revenus (…). / L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit (…) » ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SARL « Hôtel Au Relais du Ried », transformée en 1986 en SA « Hôtel de Turenne », a été créée le 12 janvier 1979 pour exploiter un fonds d'hôtel-restaurant à Bischwirth (Haut-Rhin) ; que, par acte passé le 22 novembre 1979 avec M. et Mme X, cette société avait pris à bail l'immeuble neuf correspondant ; que, par acte en date du 27 juin 1986, M. et Mme X ont cédé à un tiers, notamment, les éléments incorporels de ce fonds de commerce, pour un montant de 1 424 405 F ; que l'administration a considéré que le fonds de commerce dont s'agit n'avait pu être créé que par la SARL « Hôtel Au Relais du Ried », que sa cession en 1986 par M. et Mme X impliquait qu'il ait été préalablement cédé à ces derniers, de façon occulte, par la société, et que cette cession était constitutive d'un acte anormal de gestion, à défaut d'existence de toute contrepartie ; que, ce faisant, l'administration n'a pas remis en cause l'acte de cession intervenu le 27 juin 1986 mais a au contraire pris acte de son contenu, dont elle a entendu tirer les conséquences ; qu'elle ne saurait ainsi être regardée comme ayant mis en oeuvre, fût-ce implicitement, la procédure de répression d'un abus de droit, dans les conditions définies par les dispositions susmentionnées ; que le moyen tiré de ce que l'administration aurait implicitement recouru à cette procédure, sans offrir à la requérante les garanties de procédure qui s'y attachent, doit, par suite, être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : « L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. / (…) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée » ;

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction que la notification de redressement qui a été adressée à la SA HOTEL DE TURENNE, en date du 14 décembre 1989, s'agissant du redressement en litige, mentionne les éléments de fait susmentionnés sur lesquels l'administration s'est fondée pour en déduire que le fonds de commerce n'avait pu être créé que par la société exploitante et qu'une mutation occulte des éléments incorporels de celui-ci s'était nécessairement produite en 1986, au bénéfice de M. et Mme X, avant que ne soit passé l'acte de cession du 27 juin 1986 ; qu'elle précise les raisons pour lesquelles cette cession occulte doit être qualifiée d'acte anormal de gestion, en l'absence de toute contrepartie, à hauteur du montant de 1 424 405 F indiqué dans l'acte du 27 juin 1986, eu égard à la proximité dans le temps des deux mutations ; que, contrairement à ce que soutient la société requérante, l'administration n'avait pas à indiquer dans cette notification de redressement les raisons pour lesquelles le taux normal d'imposition était applicable au redressement en cause ; qu'ainsi, la société contribuable a été mise à même de présenter utilement ses observations sur cette notification de redressement ; que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette notification doit, dès lors, être écarté ;

Considérant, d'autre part, que la société s'est bornée à indiquer dans ses observations qu'elle contestait ce chef de redressement « pour les raisons évoquées lors du débat contradictoire » ; que, sans que la société puisse utilement se référer aux observations orales qu'elle aurait faites lors de plusieurs entrevues avec des représentants des services fiscaux les 23 février, 20 mars et 3 avril 1990, ou à une lettre adressée à ces derniers le 11 juin 1990, qui ne contient en tout état de cause pas davantage de précisions sur les arguments invoqués par elle pour contester ce redressement, l'administration a pu se borner elle-même à lui répondre que « à défaut de présentation d'arguments nouveaux permettant de contester valablement l'interprétation des faits constatés », les conclusions présentées dans la notification de redressement étaient maintenues ; que le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la réponse de l'administration aux observations de la société contribuable doit, dès lors, être également écarté ;

Sur la prescription des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : « Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due (…) » ; qu'aux termes de l'article L. 189 du même livre, dans sa rédaction alors applicable : « La prescription est interrompue par la notification de redressement (…) » ;

Considérant que le rapport du commissaire aux comptes intervenu lors de la procédure de transformation de la SARL en SA, daté du 15 mai 1986 et approuvé lors de l'assemblée générale de la société tenue le 2 juin 1986, constatait que le fonds de commerce en litige avait été créé par la société et ne mentionnait aucune cession de ce fonds aux époux X ; que la mutation occulte relevée par l'administration et qui constitue le fait générateur de l'imposition contestée n'a pu donc en principe intervenir qu'entre cette date du 2 juin 1986 et celle du 27 juin 1986 à laquelle à été signé l'acte de vente mentionnant M. et Mme X en qualité de propriétaires du fonds de commerce ; que la société requérante n'apporte pas la preuve contraire en se bornant à soutenir que, depuis 1980, les déclarations souscrites par la SARL et M. X auraient fait apparaître, respectivement, la location-gérance et une activité de location de fonds, alors que M. X ne remplissait pas les conditions pour consentir une telle location, n'ayant pas exploité le fonds pendant deux ans ; que les impositions en cause n'étaient donc pas prescrites, en application des dispositions susmentionnées, lorsque l'administration a notifié à la société requérante les redressements correspondants, en décembre 1989 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA HOTEL DE TURENNE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté le surplus de sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE

Article 1er : La requête de la SA HOTEL DE TURENNE est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA HOTEL DE TURENNE et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

2

N° 04NC01128


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 04NC01128
Date de la décision : 25/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: M. LION
Avocat(s) : MEURANT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-10-25;04nc01128 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award