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25/10/2007 | FRANCE | N°04NC00528

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 25 octobre 2007, 04NC00528


Vu la requête, enregistrée le 16 juin 2004, complétée par des mémoires enregistrés le 22 mars 2005 et le 11 juin 2007, présentée pour M. Jacky Y, demeurant ..., par Me More, du cabinet d'avocats Landwell et associés ; M. Y demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99-1230 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes mis à sa charge au titre de la période du 1er octobre 1992 au 30 septembre 1995 et à la condamnati

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Vu la requête, enregistrée le 16 juin 2004, complétée par des mémoires enregistrés le 22 mars 2005 et le 11 juin 2007, présentée pour M. Jacky Y, demeurant ..., par Me More, du cabinet d'avocats Landwell et associés ; M. Y demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 99-1230 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités y afférentes mis à sa charge au titre de la période du 1er octobre 1992 au 30 septembre 1995 et à la condamnation de l'Etat à lui rembourser les frais qu'il a engagés, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 20 000 €, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. Y soutient que :

- les sommes conservées par les établissements et coopératives scolaires sur le prix des photos qu'il a réalisées n'ont pas à être incluses dans la base de la taxe sur la valeur ajoutée qui lui est réclamée ;

- il n'est pas établi qu'il avait donné mandat aux établissements de vendre les photos pour son compte, moyennant un prix fixé par lui et une rémunération préfixée ;

- la position de l'administration est contraire à la jurisprudence de la cour de justice des communautés européennes ;

- en tout état de cause, il peut se prévaloir aussi, depuis le 1er janvier 1993, des dispositions de l'article 256-V du code général des impôts qui prévoient qu'un intermédiaire qui vend en son nom mais pour le compte d'un commettant est réputé réaliser lui-même la livraison et est imposable sur le prix total de vente ;

- le calcul de l'assiette est en outre erroné ;

- sa comptabilité était probante ;

- la méthode d'évaluation des commissions en cause, mise en oeuvre par l'administration, est sommaire, non représentative de son activité et n'est corroborée par aucune autre méthode, contrairement aux recommandations de la doctrine administrative ;

- elle comporte des incohérences et des erreurs ;

- la taxe sur la valeur ajoutée ne pouvait être appliquée sur un chiffre d'affaires reconstitué forfaitairement ;

- il peut se prévaloir d'une réponse des services fiscaux en date du 10 janvier 1997 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés le 15 novembre 2004 et le 23 juin 2005, présentés par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre demande le rejet de la requête, par le motif qu'aucun des moyens invoqués par M. Y n'est fondé ;

Vu, enregistré le 1er octobre 2007, le mémoire présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2007 :

- le rapport de M. Montsec, président,

- et les conclusions de M. Lion, commissaire du gouvernement ;

Sur le principe de l'imposition :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : « Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel » ; qu'aux termes du V de ce même article, issu de la loi n° 92-677 du 17 juillet 1992 et applicable à compter du 1er janvier 1993 : « L'assujetti, agissant en son nom propre mais pour le compte d'autrui, qui s'entremet dans une livraison de bien ou une prestation de services, est réputé avoir personnellement acquis et livré le bien, ou reçu et fourni les services considérés » ; qu'aux termes de l'article 266 du même code : « 1. La base d'imposition est constituée : / a) Pour les livraisons de biens, les prestations de services et les acquisitions intracommunautaires, par toutes les sommes, valeurs, biens ou services reçus ou à recevoir par le fournisseur ou le prestataire en contrepartie de ces opérations, de la part de l'acheteur, du preneur ou d'un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations ; / b) Pour les opérations ci-après, par le montant total de la transaction : Opérations réalisées par un intermédiaire mentionné au V de l'article 256 (…) » ; qu'aux termes de l'article 267 du même code : « I - Sont à comprendre dans la base d'imposition : / (…) 2° Les frais accessoires aux livraisons de biens ou prestations de services tels que commissions, intérêts, frais d'emballage, de transport et d'assurance demandés aux clients (…) » ;

Considérant qu'il résulte des dispositions susrappelées du code général des impôts que, pour les opérations soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, la base d'imposition est constituée, pour les ventes, par le montant de celles-ci et doit comprendre les frais accessoires tels que les commissions ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. Jacky Y, photographe, consacre une partie de son activité à la réalisation et à la vente de photographies de groupes d'élèves dans les établissements scolaires ; que, dans le cadre de cette activité, il livre aux établissements ou coopératives scolaires concernés le nombre de tirages préalablement commandés par les familles, lesdits établissements ou coopératives se chargeant de recueillir les sommes correspondant au prix des tirages, qu'ils reversent à M. Y à l'exclusion d'un pourcentage de ce prix conservé par eux ; qu'en produisant des attestations de différents établissements ou coopératives scolaires, établies longtemps après la période en cause et qui ne se réfèrent pas précisément à celle-ci, M. Y n'établit pas que le prix payé par les parents d'élèves aurait été fixé librement par les différents établissements et n'aurait pas été connu par lui, alors qu'il est constant qu'il a fait lui-même imprimer, pendant la période en cause, une grande quantité de fiches à distribuer aux parents d'élèves, comportant les tarifs-types de diverses compositions de pochettes de photos, et qu'il n'apporte pas la preuve, par la production d'une unique attestation en ce sens, que ce faisant, il a agi à la demande et pour le compte des établissements ; que, sans que le requérant puisse utilement faire valoir, dans ces circonstances, qu'une vente est en principe parfaite dès que les parties sont convenues de la chose et du prix, et alors même que les invendus, dont l'administration soutient sans être contredite qu'ils n'étaient pas facturés aux établissements, ne lui auraient pas été effectivement retournés, M. Y n'établit pas que les établissements dont s'agit auraient en l'espèce fait, tels des commerçants, leur affaire de la vente de ces photographies en assumant le risque commercial de mévente ; que la quote-part du prix de vente des photographies dont bénéficiaient par là même les établissements doit, dans ces conditions, être regardée comme la contrepartie de l'autorisation de prendre les photographies dans les locaux des établissements scolaires et du rôle d'intermédiaire joué par le chef d'établissement ou la coopérative vis-à-vis des parents d'élèves, évitant au requérant d'avoir à prendre lui-même contact individuellement avec ces derniers ;

Considérant, par ailleurs, que les établissements concernés, qui ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée pour ces activités, ne peuvent être regardés comme agissant en leur nom propre pour le compte d'autrui au sens des dispositions susmentionnées du V de l'article 256 du code général des impôts ;

Considérant que M. Y ne peut utilement invoquer une décision de la Cour de justice des communautés européennes, rendue le 12 juillet 1988, Direct Cosmetics Ltd et Laughtons Photographs Ltd, qui est relative à une autre hypothèse, dans laquelle la société concernée vend les photos aux écoles à un prix convenu, lesquelles les revendent aux parents à un autre prix fixé par elles et non connu par la société ;

Considérant que M. Y ne peut davantage invoquer, en tout état de cause, une lettre du service de la législation fiscale en date du 10 janvier 1997, dont il n'établit pas qu'elle concernait sa propre situation ;

Considérant que, dès lors, les sommes ainsi retenues par les établissements sur la vente des photographies constituent des frais accessoires aux livraisons au sens des dispositions susvisées de l'article 267-I-2° du code général des impôts, à inclure comme tels, quelles que soient les modalités de paiement des photographies, dans le chiffre d'affaires de M. Y soumis à la taxe sur la valeur ajoutée ;

Sur le montant de l'imposition :

Considérant que, dès lors que les commissions en litige n'ont pas été comptabilisées par M. Y et que leur montant, que ce dernier soutenait ne pas connaître, ne ressortait pas des pièces fournies par lui à l'administration, il ne peut utilement faire valoir le caractère probant de sa comptabilité et critiquer que l'administration ait procédé à une évaluation du taux moyen de ces commissions ;

Considérant que, pour procéder à cette évaluation, le vérificateur a interrogé les établissements clients de M. Y afin d'obtenir des informations sur le taux des commissions retenues par eux ; que, compte tenu du caractère très convergent des réponses obtenues, correspondant dans la grande majorité d'entre elles à des taux très proches de 30 %, et même si cette enquête n'a donné de résultat que pour 16 établissements pour l'exercice 1992-1993, 37 pour l'exercice 1993-1994 et 38 pour l'exercice 1994-1995, alors que le requérant revendique 350 établissements clients, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que la méthode statistique utilisée présenterait un caractère trop sommaire et que les taux retenus, soit 29 %, 30 % et 31 % respectivement pour chacun des exercices concernés, ne seraient pas représentatifs de la réalité de son entreprise ; que, contrairement à ce que soutient le requérant, cette méthode, qui pouvait fonder les redressements en litige en matière de taxe sur la valeur ajoutée, n'avait pas à être corroborée par une autre méthode, dont le requérant ne précise d'ailleurs pas en quoi elle aurait pu consister ; que M. Y ne peut, en tout état de cause, utilement invoquer à cet égard le contenu de l'instruction administrative reprise dans la documentation administrative de base sous la référence 4 G-3343, précisant que la reconstitution des bases imposables doit impérativement être opérée selon plusieurs méthodes de reconstitution, qui ne comporte aucune interprétation de la loi fiscale ; que s'il soutient que les calculs effectués par le vérificateur sont entachés d'erreurs et d'incohérences, il ne précise pas en quoi ces erreurs, à les supposer établies, auraient affecté significativement les résultats obtenus ; que, par suite, l'administration doit être regardée comme justifiant des taux des commissions accordées aux établissements qui ont été retenus pour chacun des trois exercices vérifiés ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Y n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE

Article 1er : La requête de M. Y est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jacky Y et au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique.

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N° 04NC00528


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 04NC00528
Date de la décision : 25/10/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: M. LION
Avocat(s) : HSKA AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-10-25;04nc00528 ?
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