La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/02/2007 | FRANCE | N°06NC00796

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre, 15 février 2007, 06NC00796


Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2006, présentée pour M. Wasim X, élisant domicile ..., par Me Nabil Kadri, avocat au barreau de Metz ;

M. X demande à la Cour :

1°) - d'annuler le jugement n°0602245 en date du 15 mai 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 11 mai 2006 du préfet de la Moselle ordonnant sa reconduite à la frontière et fixant l'Espagne, ou à défaut, le Pakistan, comme pays de destination ;

2°) - d'annuler pour excè

s de pouvoir ladite décision ;

3°) - d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivre...

Vu la requête, enregistrée le 7 juin 2006, présentée pour M. Wasim X, élisant domicile ..., par Me Nabil Kadri, avocat au barreau de Metz ;

M. X demande à la Cour :

1°) - d'annuler le jugement n°0602245 en date du 15 mai 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 11 mai 2006 du préfet de la Moselle ordonnant sa reconduite à la frontière et fixant l'Espagne, ou à défaut, le Pakistan, comme pays de destination ;

2°) - d'annuler pour excès de pouvoir ladite décision ;

3°) - d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) - de condamner l'Etat au remboursement des frais irrépétibles à hauteur de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. X soutient que

- la décision de reconduite à la frontière est entachée de détournement de procédure, dans la mesure où elle a été prise la veille de son mariage avec une ressortissante de nationalité française ;

- l'Espagne est le seul pays où il peut être reconduit et non le Pakistan, puisqu'il est entré en France via l'Espagne ;

- le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Strasbourg a mal apprécié la précipitation avec laquelle l'administration a agi pour ordonner sa reconduite à la frontière alors qu'elle venait d'être informée de l'imminence de son mariage ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er février 2007 :

- le rapport de Mme Stahlberger, présidente déléguée,

- les observations de Me Kadri, avocat de M. X,

- et les conclusions de Mme Steinmetz-Schies, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : «L'autorité administrative compétente (le représentant de l'Etat dans le département et, à Paris, le préfet de police) peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : 1°) Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement en France, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (…) » ;

Considérant que M. X, de nationalité pakistanaise, est entré irrégulièrement sur le territoire français en janvier 2006, en provenance de l'Espagne où il était entré en décembre 2003, sous couvert de son passeport muni d'un visa de court séjour ; qu'il se trouvait ainsi dans l'un des cas où, en application de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut décider sa reconduite à la frontière ;

Considérant que M. X, qui a été emmené le 10 mai 2006 à la gendarmerie de Sarreguemines, après que les gendarmes, informés le 28 avril 2006 du projet de mariage de l'intéressé avec une ressortissante de nationalité française, se soient présentés au domicile du couple, a été placé en garde à vue, puis en rétention administrative, après avoir reçu notification d'un arrêté de reconduite à la frontière pris par le Préfet de la Moselle en date du 11 mai 2006 ; que M. X devait contracter un mariage avec une ressortissante française le 13 mai 2006 à la mairie de Rohrbach-lès-Bitche où les bans avaient été publiés le 28 avril 2006 ; que la décision de reconduite à la frontière a été prise après que les services préfectoraux ont été informés du projet de mariage de M. X et ont pensé qu'il pourrait revêtir un caractère frauduleux ; qu'eu égard aux circonstances de l'espèce, notamment à la précipitation avec laquelle l'administration a agi, et alors que le report de la célébration du mariage n'est intervenu que postérieurement à l'arrêté de reconduite, l'arrêté attaqué doit être regardé comme ayant pour motif déterminant la prévention du mariage de M. X ; qu'il est, pour ce motif, entaché de détournement de pouvoir ; que, par suite, M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 mai 2006, ordonnant la reconduite à la frontière de M. X ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant que les dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile impliquent que l'autorité administrative délivre à l'étranger dont l'arrêté de reconduite à la frontière est annulé, une autorisation provisoire de séjour jusque ce qu'elle ait à nouveau statué sur son cas ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au Préfet de la Moselle de délivrer à M. X une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer la situation de l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision ; qu'en revanche, les conclusions de M. X, tendant à la délivrance d'un titre de séjour doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en application de ces dispositions, une somme de 1 000 euros sera versée par l'Etat à M. X ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 15 mai 2006 et l'arrêté du préfet de la Moselle en date du 11 mai 2006 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Moselle de réexaminer la situation de M. X dans un délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : L'Etat versera à M. X la somme de 1 000 € (mille euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Wasim X, au préfet de la Moselle et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

2

N° 06NC00796


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 06NC00796
Date de la décision : 15/02/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Evelyne STAHLBERGER
Rapporteur public ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Avocat(s) : RICHARD MERTZ POITIERS QUERE AUBRU et RENOUX - SCP

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-02-15;06nc00796 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award