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08/02/2007 | FRANCE | N°04NC00462

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2ème chambre - formation à 3, 08 février 2007, 04NC00462


Vu la requête, enregistrée le 24 mai 2004 au greffe du Tribunal administratif de Nancy, puis le 27 mai 2004 au greffe de la Cour, présentée pour M. Ephraym X, élisant domicile ..., par la S.C.P. Le Sergent - Roumier, Faure, avocats au barreau de Paris ; M. X demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 9901745 en date du 16 mars 2004 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, en tant que, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence des dégrèvements intervenus en cours d'instance, il a rejeté le surplus de sa demande tendant à obtenir la déch

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Vu la requête, enregistrée le 24 mai 2004 au greffe du Tribunal administratif de Nancy, puis le 27 mai 2004 au greffe de la Cour, présentée pour M. Ephraym X, élisant domicile ..., par la S.C.P. Le Sergent - Roumier, Faure, avocats au barreau de Paris ; M. X demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 9901745 en date du 16 mars 2004 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, en tant que, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence des dégrèvements intervenus en cours d'instance, il a rejeté le surplus de sa demande tendant à obtenir la décharge de suppléments d'impôt sur le revenu mis à sa charge au titre des années 1992, 1993 et 1994 ;

2°) de lui accorder la décharge des impositions demeurées en litige, en droits et pénalités ;

3°) de lui faire verser, par l'Etat, une somme de 6 600 euros pour le remboursement des frais exposés en première instance et en appel ;

Il soutient que :

- dans les recettes des bénéfices non commerciaux de l'année 1992, le service inclut deux fois la somme de 23 595 F, correspondant à des remboursements de soins à des bénéficiaires de l'aide médicale ;

- les recettes de l'année 1993 provenant d'un loyer ont été indûment majorées de 16 693 F, par comparaison des déclarations concernant les bénéfices non commerciaux et la taxe sur la valeur ajoutée alors que cette dernière s'avère erronée ;

- la déduction de frais de véhicules, sur les années 1992 et 1994, selon le barème forfaitaire, a été indûment remise en cause en raison de doubles emplois allégués avec d'autres frais réels, ce qui rehausse artificiellement les bases de l'impôt ;

- le tribunal administratif refuse, a tort, de lui reconnaître le droit à une déduction complémentaire de 5 595 F sur les salaires versés au personnel pris en charge à compter de juillet 1994, et auparavant employé par une société civile professionnelle ;

- les intérêts provenant de la Sarl Samkes, inscrite sur son compte d'associé durant les années 1993 et 1994, n'étaient pas disponibles, compte tenu de la situation de trésorerie très difficile de cette société, d'ailleurs mise en liquidation à l'époque des redressements ;

- les sommes taxées d'office, par application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales, correspondent à des crédits dont le service n'établit pas clairement l'existence, et à des mouvements de fonds que le contribuable n'a pu reconstituer malgré ses recherches ; les apports en espèces correspondent à une partie des recettes professionnelles déclarées ;

- les pénalités pour mauvaise foi ne sont pas justifiées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 22 octobre 2004, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Il conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- le requérant n'établit pas la double imposition de la somme de 23 595 F qu'il invoque au titre des bénéfices non commerciaux de l'année 1992 ;

- il n 'établit pas davantage l'erreur de calcul alléguée concernant le loyer perçu en 1993 ;

- le contribuable ne pouvait opérer des déductions de frais de véhicule en mélangeant le système forfaitaire et les dépenses réelles ;

- les dépenses de personnel alléguées au titre de l'année 1994 ne sont pas justifiées dans leur montant ;

- le service a réintégré, à bon droit, dans les revenus de capitaux mobiliers des années 1993 et 1994 du foyer fiscal, des intérêts non déclarés, inscrits au compte d'associée de Mme X, dans la Sarl Samkes, même si ces sommes ont été laissées à la disposition de cette dernière ;

- le contribuable a été, à bon droit, taxé d'office sur les revenus dont il n'a pas précisé l'origine, par application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales ; le jugement attaqué est suffisamment motivé à ce sujet ;

- les pénalités pour mauvaise foi, qui ne concernent plus les bénéfices non commerciaux de 1992, sont justifiées pour le surplus des redressements ;

Vu, enregistré au greffe le 11 janvier 2007, le nouveau mémoire par lequel M. X confirme ses conclusions et moyens ;

Vu la note en délibéré produite pour M. X le 19 janvier 2007 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 janvier 2007 :

- le rapport de M. Bathie, premier conseiller.

- les observations de Me Roumier, avocat de M. X,

- et les conclusions de M. Lion, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, qui exerce la profession de médecin généraliste à Troyes, a fait l'objet, d'une part, d'une vérification de comptabilité portant sur les bénéfices non commerciaux générés par cette activité, d'autre part, d'un examen contradictoire d'ensemble de sa situation fiscale personnelle ; que ces contrôles ont abouti à quatre notifications de redressement, concernant les bases des bénéfices non commerciaux sus-évoqués et du revenu global du foyer fiscal formé par M. et Mme X, au titre des années 1992 à 1994 ; que l'administration a, toutefois, prononcé deux dégrèvements partiels de ces impositions sur la réclamation du contribuable ; que M. X fait appel du jugement du 16 mars 2004 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en tant que, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d'un troisième dégrèvement intervenu en cours d'instance, il a rejeté le surplus de sa demande tendant à obtenir la décharge des suppléments d'impôt sur le revenu demeurés à sa charge ;

Sur les bénéfices non commerciaux :

En ce qui concerne les recettes de l'année 1992 :

Considérant que, sur le fondement des articles L. 203 et L. 205 du livre des procédures fiscales, le requérant sollicite une compensation entre les rehaussements des bases de ses bénéfices non commerciaux opérés par le service et une erreur de comptabilisation des recettes qui aurait abouti à inscrire deux fois, au titre de l'année 1992, la somme de 23 595 F, correspondant à des soins remboursés à des bénéficiaires de l'aide médicale, respectivement par le département de l'Aube, le service des anciens combattants et la Caisse nationale militaire ; que, toutefois, les données issues d'un système informatique et produites devant la Cour ne permettent pas de corroborer les explications du contribuable selon lesquelles les sommes totalisant 23 595 F, remboursées aux patients dans le cadre de l'aide médicale, auraient auparavant été entièrement intégrées parmi les recettes différées de l'année 1992 ; qu'ainsi, le requérant ne justifie pas la demande de compensation qu'il sollicite ;

En ce qui concerne les loyers perçus en 1993 :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les bénéfices non commerciaux déclarés au titre de l'année 1993 comportaient, à hauteur de 16 307 F, les loyers perçus d'un confrère ; que le vérificateur a rehaussé cette recette à 33 000 F, à partir d'une déclaration relative à la taxe sur la valeur ajoutée et concernant les mêmes loyers, tandis que le contribuable allègue une erreur matérielle commise à son détriment, entachant ce dernier montant ; que le requérant n'apporte pas d'éléments de nature à établir l'erreur qu'il invoque au sujet du montant déclaré de 33 000 F de loyers perçus en 1993 ;

En ce qui concerne les frais de trajet au titre des années 1992 et 1994 :

Considérant que, pour soutenir à nouveau devant la Cour que le service ne pouvait refuser tous les frais de déplacement, déduits des bénéfices non commerciaux selon un barème forfaitaire au titre des années 1992 et 1994, le requérant reprend l'argumentation développée devant le tribunal administratif sans apporter d'élément nouveau ; qu'ainsi, il n'établit pas que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenus et qu'il y a lieu d'adopter, commis une erreur en écartant ce moyen ;

En ce qui concerne les salaires versés en 1994 :

Considérant que le contribuable allègue une erreur matérielle affectant les salaires versés, de juillet à décembre 1994, à une secrétaire médicale, à la suppléante de celle-ci, et à une femme de ménage ;

Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, le requérant doit être regardé comme ayant établi, d'après les tâches confiées aux salariées sus-mentionnées, la nécessité de prendre en charge leur rémunération, aux lieu et place de la société civile de moyens qui avait cessé d'assumer la gestion de ce personnel en juin 1994 ;

Considérant, en second lieu, que le requérant n'établit pas que le montant déclaré pour ces salaires déduits des bénéfices non commerciaux, à hauteur de 24 983 F, devait être porté au montant allégué de 30 578 F, en l'absence de tout élément probant pouvant corroborer le paiement effectif de cette dernière somme durant l'année 1994 ; que, cependant, par les documents produits devant la Cour, le contribuable justifie la prise en charge de ces salaires, à concurrence de 26 270 F ; qu'il résulte de ces éléments qu'il est fondé, sur ce chef de redressement, à obtenir la décharge, en bases, au titre de l'année 1994, pour un montant de 1 287 F ;

Sur les revenus de capitaux mobiliers :

Considérant que, pour soutenir devant la Cour que l'administration ne pouvait réintégrer dans ses revenus de capitaux mobiliers des intérêts en provenance de la société Samkes, pour des montants respectifs de 34 992 F en 1993 et de 57 871 F en 1994, et qu'il avait laissés sur son compte courant à la disposition de la débitrice, le requérant reprend l'argumentation développée devant le tribunal administratif, sans apporter d'élément nouveau ; qu'ainsi, il n'établit pas que les premiers juges auraient, par les motifs qu'ils ont retenu et qu'il y a lieu d'adopter, commis une erreur en écartant ce moyen ;

Sur les revenus d'origine indéterminée :

Considérant que le contribuable, qui a été taxé d'office par application de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales pour n'avoir pas fourni au service des explications sur des revenus d'origine indéterminée, a la charge de la preuve de leur éventuel caractère non imposable ;

Considérant, en premier lieu, que le service a taxé des crédits réputés mis à disposition du contribuable par inscription sur des comptes courants dans les sociétésNumber One et Samkes pour des montants totaux respectifs de 31 500 F en 1993 et 112 100 F en 1994 ; que l'intéressé conteste formellement avoir eu connaissance de ces sommes et soutient, sans être contredit, avoir sollicité, en vain, la production de pièces établissant l'existence même de ces crédits ; que l'administration, qui ne pouvait se borner à invoquer les constatations du vérificateur dans les écritures des sociétés concernées, n'a transmis aucun élément de nature à permettre une quelconque vérification de ses assertions par le contribuable ni par le juge et, dès lors, n'établit pas la perception, par le requérant, des sommes en cause ; que, dans ces conditions, les montants sus-mentionnés doivent être exclus des revenus d'origine indéterminés taxés d'office ;

Considérant, en second lieu, qu'en revanche, les autres crédits bancaires ont été détaillés par établissement et par dates, permettant un débat utile sur leur origine ; que le requérant n'apporte pas d'éléments de nature à établir, notamment en l'absence de recoupements adéquats entre crédits et débits, les mouvements de fonds qu'il allègue ; qu'il n'établit pas davantage les dates et montants des versements, auprès des banques, des espèces reçues des patients ; qu'ainsi, le requérant ne justifie pas avoir droit à des décharges d'impôt supérieures à celles déjà admises sur ce chef de redressement ;

Sur les pénalités :

Considérant que l'administration a appliqué, aux suppléments d'impôt sur le revenu en litige, la majoration de 40 % prévue, en cas de mauvaise foi du contribuable, par l'article 1729 du code général des impôts, laquelle concerne, au jour où la Cour statue, les seules années 1993 et 1994 ;

Considérant, en premier lieu, que le tribunal administratif a relevé, pour confirmer cette pénalité, la circonstance que M. X n'avait pas retiré le courrier sollicitant des explications sur des revenus d'origine indéterminée ; que le fait, pour un contribuable, de ne pas prendre connaissance des courriers émanant de l'administration fiscale, qui peut être du à des motifs divers et n'impliquant pas nécessairement une abstention volontaire du destinataire, ne permet pas, en tout état de cause, d'établir par lui-même l'intention de ce dernier d'éluder l'impôt ; qu'en outre, M. X soutient, sans être démenti, avoir, peu avant l'envoi litigieux, avisé le service compétent qu'il ne résidait plus à l'adresse où le pli n'a finalement pas été retiré par ses soins ; que, dès lors, l'administration ne pouvait être regardée comme établissant ainsi la mauvaise foi du contribuable ;

Considérant, en second lieu, que les impositions demeurées en litige, après que l'administration ait prononcé trois dégrèvement successifs, qui en ont réduit le montant initial de l'ordre de 40 %, sont consécutives à des corrections de bases maintenues essentiellement en raison des difficultés de justifications des recettes et dépenses en cause ;

Considérant qu'il résulte des éléments sus-analysés que l'administration ne peut être regardée comme ayant apporté la preuve de l'intention délibérée du contribuable d'éluder l'impôt et, par suite, de sa mauvaise foi, au sens des dispositions de l'article 1729 précité ; que le requérant est, par suite, fondé à obtenir la décharge des pénalités demeurées en litige ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est, par ailleurs, suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a refusé de lui accorder une réduction de ses bénéfices non commerciaux et des revenus d'origine indéterminée au titre des années 1993 et 1994 dans les conditions sus-analysées, ainsi que la décharge des pénalités pour mauvaise foi, maintenues au titre des mêmes années, et à obtenir les décharges correspondantes ;

Sur les conclusions du requérant tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de faire verser, par l'Etat, à M. X une somme de 1 500 euros au titre des frais qu'il a exposés en première instance et en appel, pour la défense de ses intérêts ;

DÉCIDE :

Article 1er : Pour le calcul de l'impôt sur le revenu assigné à M. X au titre des années 1993 et 1994, la base des bénéfices non commerciaux est réduite de 196,20 € (1 287 F) au titre de l'année 1994. Les revenus d'origine indéterminée sont réduits de 4 802,14 € (31 500 F) au titre de l'année 1993 et de 17 089,50 € (112 100 F) au titre de l'année 1994.

Article 2 : M. X est déchargé, en droits et pénalités, des suppléments d'impôt sur le revenu résultant des corrections de bases définies à l'article 1 ci-dessus.

Article 3 : Il est, en outre, accordé décharge à M. X des pénalités de 40 % pour mauvaise foi, demeurant à sa charge au titre des années 1993 et 1994.

Article 4 : En application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'Etat versera une somme de 1 500 euros à M. X.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 6 : Le jugement du 16 mars 2004 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. Ephraym X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie

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N° 04NC00462


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 04NC00462
Date de la décision : 08/02/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: M. Henri BATHIE
Rapporteur public ?: M. LION
Avocat(s) : LE SERGENT - ROUMIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2007-02-08;04nc00462 ?
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