La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/12/2006 | FRANCE | N°01NC00136

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 14 décembre 2006, 01NC00136


Vu l'arrêt en date du 22 décembre 2005 par lequel la Cour de céans a, sur la requête présentée pour la SOCIETE SOGEDEC, dont le siège est fixé 20 Traverse de Pomègues à Marseille Cedex 08 (13008), enregistrée sous le n° 01NC00136 et tendant à réformer les articles 2 et 8 du jugement no 9801605 en date du 28 novembre 2000 en tant que le Tribunal administratif de Nancy a limité à la somme de 139 999,97 Frs, abondée de la taxe sur la valeur ajoutée, le montant de la condamnation de la commune de Senones, ordonné une expertise en vue de procéder à la constatation et au relevé

précis et détaillé des désordres qui affectent la membrane d'étanché...

Vu l'arrêt en date du 22 décembre 2005 par lequel la Cour de céans a, sur la requête présentée pour la SOCIETE SOGEDEC, dont le siège est fixé 20 Traverse de Pomègues à Marseille Cedex 08 (13008), enregistrée sous le n° 01NC00136 et tendant à réformer les articles 2 et 8 du jugement no 9801605 en date du 28 novembre 2000 en tant que le Tribunal administratif de Nancy a limité à la somme de 139 999,97 Frs, abondée de la taxe sur la valeur ajoutée, le montant de la condamnation de la commune de Senones, ordonné une expertise en vue de procéder à la constatation et au relevé précis et détaillé des désordres qui affectent la membrane d'étanchéité du bâtiment des tissages de l'abbaye de Senones en indiquant leur date d'apparition, de décrire les malfaçons qui seraient constatées et donner tous les éléments permettant au tribunal de porter une appréciation sur les causes et origines des désordres et malfaçons dont s'agit et d'indiquer la nature et le coût des travaux nécessaires pour remédier à la situation actuelle, compte tenu de l'état d'entretien des lieux

Vu, enregistré au greffe le 23 mai 2006, le rapport de l'expert désigné par décision du président de la Cour en date du 9 janvier 2006 ;

Vu les mémoires, enregistrés les 15 septembre et 24 novembre 2006, présentés pour la SOCIETE SOGEDEC par Me Vianes, avocat, tendant :

1°) à la réformation des articles 2 et 8 du jugement précité du Tribunal administratif de Nancy en date du 28 novembre 2000 ;

et,

concernant le marché initial,

2°) à titre principal, à ce que la Cour dise que le montant des travaux restant dus par la commune de Senones s'élève, compte tenu des provisions déjà versées, à 89 630,25 € TTC, cette somme devant être assortie des intérêts de droit à compter de la première mise en demeure, et dise que la rupture des vis ne saurait avoir causé aucun dommage ;

3°) à titre subsidiaire, à ce que la Cour la mette hors de cause, et si sa responsabilité était retenue en ce qui concerne les vis de fixation de la membrane, fixe le coût de la remise en état à un montant évalué dans le dernier état de ses écritures à 30 000 € TTC, conformément aux conclusions du rapport d'expertise, et dise que sa responsabilité ne peut être que très faible au regard de la responsabilité de CEP et qu'un coefficient de vétusté doit être appliqué réduisant l'indemnisation du dommage à 2 700 € ;

concernant l'avenant,

4°) à titre principal, à ce que la Cour reconnaisse les sommes dues au titre de l'avenant du 12 novembre 1996 et condamne la commune de Senones à lui régler la somme de 76 224,51 €, ladite somme devant être assortie de la taxe sur la valeur ajoutée ;

5°) à titre subsidiaire, à ce que la Cour l'indemnise à hauteur des deux tiers dudit avenant soit la somme de 50 816,44 €, ladite somme devant être assortie de la taxe sur la valeur ajoutée ;

sur les conclusions indemnitaires,

6°) à la condamnation de la commune de Senones à lui verser une somme fixée dans le dernier état de ses écritures à 8 300 € au titre du préjudice subi par suite de son inertie ;

en tout état de cause,

7°) à la condamnation de la commune de Senones à prendre en charge les frais d'expertise ;

8°) à la condamnation de la commune de Senones à lui verser une somme de 4 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La SOCIETE SOGEDEC soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a réduit le montant qui lui était dû en raison d'un prétendu coût de remise en état de vis de fixation altérées lors des opérations de désamiantage ;

- la réception sans réserve est incontestable .

- la chambre régionale des comptes a conforté sa position ;

- la réoccupation des locaux rendus à leur usage s'est faite après une analyse de restitution dite analyse libératoire qui a validé l'ensemble des travaux effectués ;

- l'absence d'amiante est établie ;

- le tribunal a retenu le chiffrage proposé par la commune alors même que l'estimation n'a pas été contradictoire, ainsi que cela avait été soutenu et qu'elle avait contesté le montant ;

- il n'est pas possible de compenser des sommes liquides, certaines et exigibles comme le montant du marché avec un simple devis au demeurant récusé ;

- au cas où sa responsabilité devrait être retenue, le coût de remise en état serait significativement inférieur au devis présenté ;

- s'agissant de l'avenant, la commune a commandé et accepté les travaux par le document contractuel du 12 novembre 1996 et ceux-ci ayant été réalisés, il y a une obligation de paiement ;

- le service étant fait, même si une valeur contractuelle ne peut être reconnue audit document, le non règlement engendre un préjudice qui résulte d'une faute de la commune et s'élève à un montant de 500 000 Frs HT ;

- si la Cour devait considérer que l'entreprise aurait dû vérifier la validation de l'avenant, il y lieu de lui attribuer au moins les deux tiers des sommes dues ;

- sur le fond, l'avenant est justifié dès lors que la commune a reconnu que l'inspection du travail a imposé pour l'exécution du marché des sujétions imprévues pour l'entreprise qui ne peuvent rester à sa charge ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'indemnisation du préjudice résultant de l'inertie est distincte de celui qui peut être indemnisé par les intérêts moratoires, l'article 178 du code des marchés ne compensant que le retard au mandatement des sommes dues ;

- l'expertise démontre que la responsabilité de CEP est exclusive ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2006, présenté pour la commune de Senones par la Selarl Soler-Couteaux / Llorens, avocat ; la commune de Senones maintient ses conclusions précédentes et la condamnation de la SOCIETE SOGEDEC à prendre en charge les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 1 947,60 € ;

La commune de Senones soutient que :

- il ressort du rapport d'expertise que le sectionnement des vis de fixation de la membrane d'étanchéité, quoique non visibles de l'intérieur du bâtiment avant les travaux de désamiantage, aurait pu être évité si les précautions d'usage avaient été prises et notamment si l'entreprise avait pris la peine de reconnaître les lieux avant son intervention ;

- s'il est évident que l'entreprise n'avait aucune prestation à réaliser sur la membrane d'étanchéité, elle avait l'obligation de veiller à ce que son intervention ne provoque pas de dommages ;

- il ressort des conclusions d'expertise que l'entreprise ne pouvait ignorer la présence des vis ;

- elle a, lors de son intervention, eu accès à la toiture et aurait dû procéder à l'examen d'ensemble des travaux ;

- elle avait le choix de la méthode de retrait de l'amiante et n'a pas adopté la technique douce qu'elle avait annoncée dans son plan de retrait ;

- bien qu'aucun désordre actuel n'ait été constaté par l'expert, il existe, comme l'a souligné l'expert, un risque réel ;

- la responsabilité de la CEP ne saurait être mise en oeuvre dans la mesure où elle ne peut être appelée en garantie, n'ayant pas été partie en première instance ;

- la somme qui devra être mise à la charge de l'entreprise ne saurait être inférieure à 33 490 € ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2006, présenté pour l'Etablissement Public Foncier de Lorraine par Me Luisin, avocat, tendant au rejet de la requête et à ce qu'il soit fait droit aux conclusions d'appel incident présentées par la commune de Senones ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 novembre 2006 :

- le rapport de Mme Monchambert, président,

- les observations de Me Vianes, avocat de la SOCIETE SOGEDEC, de Me Brignatz pour la Selarl Soler-Couteaux / Llorens, avocat de la commune de Senones, et de Me Luisin, avocat de l'Etablissement Public Foncier de Lorraine,

- et les conclusions de M. Tréand, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, par un marché de travaux conclu le 18 octobre 1996, la commune de Senones a confié à la SOCIETE SOGEDEC le désamiantage des anciens tissages de l'abbaye de Senones pour un prix global et forfaitaire de 1 441 150,25 Frs ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a condamné sous astreinte la commune de Senones à payer à la SOCIETE SOGEDEC une somme de 512 235,19 Frs soit après déduction de la provision accordée par ordonnance du président du Tribunal administratif de Nancy le 21 octobre 1999, une somme de 139 999, 97 Frs (21 342,86 €), assortie des intérêts moratoires calculés en application de l'article 178 du code des marchés publics, au titre du paiement du solde du marché ; que la SOCIETE SOGEDEC fait appel de ce jugement en tant qu'il a limité le montant de la condamnation de la commune, tandis que cette dernière demande, par la voie de l'appel incident, l'annulation du jugement en tant qu'il a refusé de diminuer le montant du solde du marché de 140 000 Frs HT correspondant au coût des travaux complémentaires de désamiantage et en tant qu'il l'a condamnée à verser à l'entreprise appelante une somme de 5 000 Frs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur l'intervention de l'Etablissement Public Foncier de Lorraine :

Considérant que l'arrêt à rendre sur la requête de la SOCIETE SOGEDEC est susceptible de préjudicier aux droits de l'Etablissement Public Foncier de Lorraine ; que, dès lors, l'intervention de cet établissement public est recevable ;

Sur le règlement du marché :

Considérant qu'aucune des parties ne s'est prévalue devant le tribunal administratif, et ne se prévaut en appel, de l'intervention d'un décompte général et définitif, établi selon les règles fixées à l'article 13-4 du cahier des clauses administratives générales, qui aurait fixé irrévocablement les droits et obligations des parties au contrat ; qu'en l'absence d'un tel décompte, il appartient au juge du contrat de statuer sur les réclamations pécuniaires présentées par chacune des parties et, l'ouvrage qui faisait l'objet du marché étant achevé et mis en service, de déterminer le solde de leurs obligations contractuelles respectives ; que le solde du marché de désamiantage dont la SOCIETE SOGEDEC demande le règlement s'élève au montant non contesté de 931 330,89 F TTC (141 980,48 €) ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que lors de la réalisation de ses prestations, la SOCIETE SOGEDEC a détérioré des vis de fixation de la membrane d'étanchéité ; que la présence de ces vis était parfaitement décelable sur le complexe étanche ; qu'il ressort des conclusions de l'expert désigné par la Cour que, s'il n'y a certes pas de désordres affectant actuellement le complexe d'étanchéité, la tenue du complexe étanche n'est cependant plus assurée dès lors que c'est le poids de ce complexe qui le maintient en place ; que, par suite, la commune de Senones est fondée à prétendre, ainsi que l'ont d'ailleurs admis les premiers juges, à ce que la somme due à l'entreprise en règlement du solde du marché soit diminuée du montant correspondant au coût des travaux de remise en état de la membrane d'étanchéité ; qu'il résulte des dires mêmes de l'expert que le coût de ces travaux peut être évalué à 235 357,37 Frs TTC (35 880 €) ; que, par suite, la SOCIETE SOGEDEC est fondée à soutenir qu'en prenant en compte le devis produit par la commune de Senones le chiffrant à 419 095,95 Frs TTC (63 890,77 €), le tribunal a fait une évaluation excessive du coût de remise en état de la membrane et a demander, en conséquence, la réformation du jugement entrepris sur ce point ;

Considérant, en second lieu, que si la commune persiste à soutenir que des travaux complémentaires de désamiantage ont été nécessaires, pour un montant de 140 000 Frs HT (21 342,86 €), elle n'établit pas plus qu'en première instance que ces travaux ont été réalisés et qu'ils correspondraient à une prestation non exécutée par la SOCIETE SOGEDEC ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la somme dont la commune de Senones est redevable au titre du marché initial s'élève, après déduction de la provision de 284 738,83 Frs déjà versée et des frais de remise en état de la membrane d'étanchéité soit 235 357,37 Frs, à 411 234,69 Frs TTC (62 692,132€) ;

Sur l'avenant :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que si le maire de Senones a, par lettre du 12 novembre 1996, donné son accord à la passation d'un avenant proposé par la commune de Senones pour un montant de 500 000 Frs HT (76 224,51 €), cette acceptation était, ainsi que l'a relevé le tribunal, subordonnée à l'avis favorable de la commission d'appel d'offres qui devait se prononcer sur ledit avenant ; que la commission n'ayant jamais été saisie, la procédure de passation de l'avenant s'est trouvée interrompue ; qu'en se bornant à soutenir que les travaux objet de l'avenant ont été réalisés, la SOCIETE SOGEDEC ne critique pas utilement les motifs retenus par le tribunal pour rejeter sa demande de paiement ;

Considérant que si, subsidiairement, la SOCIETE SOGEDEC soutient que le non règlement dudit avenant engendre un préjudice correspondant aux frais supplémentaires qu'elle a engagés par suite de l'intervention de l'inspecteur du travail, il résulte de l'instruction que cette intervention, qui n'avait d'autre objet que de faire respecter par l'entreprise des prescriptions réglementaires préexistantes à la conclusion du marché litigieux et dont elle ne pouvait ignorer l'existence, ne saurait avoir eu, ainsi que l'a relevé le tribunal, pour effet de bouleverser l'économie du contrat et d'engager en conséquence la responsabilité du maître d'ouvrage ;

Sur l'indemnisation du retard de la commune de Senones à procéder au règlement du marché :

Considérant qu'en se bornant à soutenir sans autre précision qu'elle a subi, du fait de l'inertie de la commune, un préjudice distinct de celui qui est indemnisé de plein droit par les intérêts moratoires dans les conditions prévues au code des marché, la SOCIETE SOGEDEC ne critique pas utilement les motifs retenus par le tribunal pour rejeter ses conclusions indemnitaires ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu de mettre les frais de l'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 947,60 €, à la charge de la commune de Senones ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes présentées sur ce fondement tant par la SOCIETE SOGEDEC que par la commune de Senones ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'intervention de l'Etablissement Public Foncier de Lorraine est admise.

Article 2 : La somme de 139 999,97 Frs (21 342,86 €), abondée de la taxe sur la valeur ajoutée que la commune de Senones a été condamnée à verser à la SOCIETE SOGEDEC est portée à la somme de 62 692,82 € TTC (411 234,69 Frs).

Article 3 : L'article 2 du jugement en date du 28 novembre 2000 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Les frais d'expertise liquidés et taxés à la somme de 1 947,60 € sont mis à la charge de la commune de Senones.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la SOCIETE SOGEDEC et l'appel incident de la commune de Senones sont rejetés.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE SOGEDEC, à la commune de Senones et à l'Etablissement Public Foncier de Lorraine.

Délibéré après l'audience du 30 novembre 2006, à laquelle siégeaient :

M. Desramé, président de chambre,

Mme Monchambert, président,

M. Collier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 décembre 2006.

Le rapporteur,

Signé : S. MONCHAMBERT

Le président,

Signé : J.F. DESRAMÉ

Le greffier,

Signé : J. CHAPOTOT

La République mande et ordonne au préfet des Vosges, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Le greffier,

J. CHAPOTOT

2

N° 01NC00136


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 01NC00136
Date de la décision : 14/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEDUCQ
Rapporteur ?: Mme Sabine MONCHAMBERT
Rapporteur public ?: M. TREAND
Avocat(s) : VIANES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-12-14;01nc00136 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award