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07/12/2006 | FRANCE | N°05NC01525

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ère chambre - formation à 3, 07 décembre 2006, 05NC01525


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 8 décembre 2005, complétée par des mémoires enregistrés les 25 avril 24 juillet et 28 septembre 2006, présentée pour M. Jean-Georges Y élisant domicile ... et pour M. Paul Z élisant domicile ..., par Me Schaeffer avocat ;

MM. Y et Z demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0303103 en date du 4 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 23 mai 2003 par lequel le préfet du Bas-Rhin a déclaré d'utilité publique le

projet de réalisation d'un parc d'activités intercommunal à Erstein ;

2°) d'adm...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 8 décembre 2005, complétée par des mémoires enregistrés les 25 avril 24 juillet et 28 septembre 2006, présentée pour M. Jean-Georges Y élisant domicile ... et pour M. Paul Z élisant domicile ..., par Me Schaeffer avocat ;

MM. Y et Z demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0303103 en date du 4 octobre 2005 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 23 mai 2003 par lequel le préfet du Bas-Rhin a déclaré d'utilité publique le projet de réalisation d'un parc d'activités intercommunal à Erstein ;

2°) d'admettre leur demande devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le projet litigieux ne devait pas être précédé de l'enquête préalable prévue aux articles R. 11-14-1 et suivants du code de l'expropriation ;

- l'arrêté litigieux aurait dû être accompagné d'un document exposant les motifs et les considérations justifiant le caractère d'utilité publique de l'opération conformément à l'article L. 11-1-1 3° du nouveau code de l'expropriation ;

- l'arrêté litigieux méconnaît les obligations qui découlent en matière d'étude d'impact de l'article 5 de la directive n° 85/337/CEE du 27 juin 1985 ;

- l'impact des émissions lumineuses, des nuisances olfactives et des risques technologiques sur l'environnement n'a pas fait l'objet d'une étude spécifique ;

- l'aménagement projeté a pour effet de déplacer des colonies de grands hamsters ;

- le coût du projet a été sous-estimé ;

- l'utilité publique du projet n'est pas démontrée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 mai 2006, présenté pour l'Etat par le préfet du Bas-Rhin (67000) ;

Le préfet du Bas-Rhin conclut au rejet de la requête ;

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 septembre 2006, présenté pour la communauté de communes du pays d'Erstein, représentée par son président en exercice, par la SELARL Soler-Couteaux/Llorens ;

La communauté de communes du pays d'Erstein conclut au rejet de la requête et demande que soit mis à la charge de MM. Y et Z une somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

Vu l'ordonnance fixant la clôture d'instruction au 28 septembre 2006 à 16h00 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la directive n° 85/337/CEE du 27 juin 1985 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics ou privés sur l'environnement ;

Vu la directive n° 92/43/CEE du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages ;

Vu le décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977 ;

Vu la loi du 12 juillet 1983 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l'environnement ;

Vu l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs, ensemble le décret

n° 2001-373 du 27 avril 2001 ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 octobre 2006 :

- le rapport de Mme Steinmetz-Schies, premier conseiller,

- les observations de Me Sonnemoser, avocat de MM. Y et Z et de Me Brignatz, de la SELARL Soler-Couteaux, Llorens, avocat de la Communauté de communes du pays d'Erstein,

- et les conclusions de M. Adrien, commissaire du gouvernement ;

En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté du 23 mai 2003 :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 83-630 relative à la démocratisation des enquêtes publiques et à la protection de l'environnement, codifié à l'article L. 123-1 du code de l'environnement : « la réalisation d'aménagements, d'ouvrages ou de travaux exécutés par des personnes publiques ou privées est précédée d'une enquête publique (…) lorsqu'en raison de leur nature, de leur consistance ou du caractère des zones concernées, ces opérations sont susceptibles d'affecter l'environnement./ La liste des catégories d'opérations visées à l'alinéa précédent et les seuils et critères techniques qui servent à les définir sont fixés par décret en Conseil d'Etat » ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 23 avril 1985 pris pour son application codifié à l'article R. 121-1 du code de l'environnement : « la liste des catégories d'aménagements, d'ouvrages ou de travaux qui doivent être précédés d'une enquête publique en application des alinéas 1 et 2 de l'article 1er de la loi du 12 juillet 1983 est définie au tableau annexé au présent décret » ; que le 6°) de l'annexe à ce décret inclut dans cette liste la voirie routière lorsque sont engagés des travaux d'aménagement routier d'un montant supérieur à 1 829 388 euros conduisant à la création de nouveaux ouvrages ou à la modification d'assiette d'ouvrages existants ; qu'il ne ressort pas des annexes dudit décret que les projets d'aménagement de zones économiques y figurent ; que, même s'ils prévoient la création de voies de desserte interne, les travaux d'aménagement de telles zones n'ont pas le caractère de travaux d'aménagement routier conduisant à la création de nouveaux ouvrages ; que les aménagements ponctuels de la voirie d'accès à la future zone d'activités ne constituent pas en l'espèce une opération juridiquement distincte de l'opération d'aménagement projetée, mais doivent être regardés comme en constituant l'accessoire ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le montant des travaux de voirie interne au projet de réalisation d'un parc d'activités intercommunal à Erstein devait être pris en compte au titre du 6° de l'annexe au décret précité, que, par suite, les travaux autorisés étaient au nombre de ceux qui doivent, en application des dispositions des articles L. 123-1 et R. 121-1 du code de l'environnement, faire l'objet d'une enquête publique renforcée, et que, dès lors, la procédure suivie méconnaîtrait les articles L. 11-1-1, L. 11-1-1-3 et R. 11-14-14 du code de l'expropriation, doit être écarté ;

Considérant que si les requérants soutiennent que l'étude d'impact qui a été réalisée est insuffisante au regard de l'article 2 du décret n° 77-1141 du 12 octobre 1977, un tel moyen est inopérant, les parcs ou zones d'activités économiques ne faisant pas partie des opérations soumises à étude d'impact par ledit décret ; que les requérants ne peuvent utilement se prévaloir de ce que l'arrêté attaqué du 23 mai 2003 méconnaîtrait les obligations qui découlent en matière d'étude d'impact de l'article 5 de la directive du conseil des communautés européennes du 27 juin 1985 modifiée concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, cet arrêté n'ayant pas de caractère réglementaire ; que s'ils soutiennent en outre que l'article 4 de la directive, selon lequel les Etats membres déterminent si les projets énumérés à l'annexe II, parmi lesquels figurent les travaux d'aménagement de zones industrielles et les travaux d'aménagement urbain, doivent ou non être soumis à une évaluation environnementale, aurait été insuffisamment transposé en droit interne dès lors que celui-ci aurait dû soumettre les zones d'activités économiques à une telle évaluation environnementale, il résulte de ses termes mêmes que ladite directive n'impose aucune obligation aux Etats membres en la matière ;

En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté du 23 mai 2003 :

Considérant que Messieurs Y et Z soutiennent que les règles nationales, sur le fondement desquelles l'arrêté litigieux portant déclaration d'utilité publique a prescrit, le cas échéant , des mesures de relogement du grand hamster, ne prévoient pas de protection stricte du grand hamster in situ et ne sont pas compatibles avec l'article 12, interdisant la capture de ce mammifère, de la directive du conseil des communautés européennes du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que la faune et la flore sauvage, non transposée en droit interne ;

Considérant qu'il n'est pas contesté que, si un terrier a été répertorié lors d'un premier recensement du grand hamster dans la zone considérée, un recensement ultérieur a révélé l'absence totale de ces animaux ; que dès lors, en tout état de cause, le moyen tiré de l'exception d'incompatibilité des règles nationales relatives à la protection de certaines espèces animales avec les objectifs poursuivis par la directive susvisée est inopérant ;

Considérant, qu'une opération ne peut être déclarée d'utilité publique que si les atteintes à la propriété privée, le coût financier et éventuellement les inconvénients d'ordre social ou l'atteinte d'autres intérêts publics qu'elle comporte ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente ;

Considérant que si M. Y et Z soutiennent que le coût du projet est manifestement sous-évalué, le journal intercommunal de la communauté de communes indiquant que le projet est un « investissement lourd d'environ 15 millions d'euros », alors que l'estimation est de 10 814 894 €, cette allégation n'est assortie d'aucune autre précision ; que, par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté ;

Considérant que la création d'un parc d'activité intercommunal sur le territoire de la commune d'Erstein présente, en raison des avantages qu'elle peut apporter par le développement de l'activité économique et par des créations d'emplois, un caractère d'utilité publique ; que si les requérants soutiennent en appel que le projet serait situé dans un périmètre à risque, à raison du transport de matières dangereuses par voie ferrée et routière, et par oléoduc, la situation du projet par rapport aux sources de risques alléguées n'est pas de nature à retirer au projet son utilité publique ; qu'alors même que les demandes des entreprises intéressées n'auraient pas été répertoriées, le projet est de nature à favoriser l'implantation d'entreprises nouvelles et permettre l'extension d'entreprises existantes sur le territoire de la communauté de communes ; que les inconvénients résultant pour les requérants de l'atteinte à leur propriété privée et de la réduction de leurs terres agricoles ne sont pas non plus de nature à retirer au projet son caractère d'utilité publique ; que, par suite, le moyen tiré de l'absence d'utilité publique du projet ne peut qu'être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que MM. Y et Z ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par MM. Y et Z doivent dès lors être rejetées ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de M. Y et de M. Z des sommes demandées par l'Etat et la communauté de communes du pays d'Erstein au titre des frais exposés en appel et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de MM. Y et Z est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'Etat et de la communauté de communes du pays d'Erstein tendant au versement de sommes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Jean-Georges Y, à M. Paul Z, à la communauté de communes du pays d'Erstein, à M. Dominique X et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

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05NC01525


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 05NC01525
Date de la décision : 07/12/2006
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre STEINMETZ-SCHIES
Rapporteur public ?: M. ADRIEN
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS ASA

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-12-07;05nc01525 ?
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