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25/09/2006 | FRANCE | N°05NC00946

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4eme chambre - formation a 3, 25 septembre 2006, 05NC00946


Vu la requête et les mémoires complémentaires enregistrés les 18 juillet et 1er décembre 2005, et 30 août 2006 présentés pour la société HGP GAT FILATURES, dont le siège social est

3 Cour du Bas à Cornimont (88007), représentée par son mandataire liquidateur la S.C.P. Bihr et Le Carrer, par Me Z..., avocat ;

Elle demande à la Cour :

1°) - d'annuler le jugement n°0401229 du 3 mai 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du 2 décembre 2003 par laquelle l'inspecteur du travail l'a autorisée à licencier M. A... et celle du

26 mai 2004 par laquelle le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale ...

Vu la requête et les mémoires complémentaires enregistrés les 18 juillet et 1er décembre 2005, et 30 août 2006 présentés pour la société HGP GAT FILATURES, dont le siège social est

3 Cour du Bas à Cornimont (88007), représentée par son mandataire liquidateur la S.C.P. Bihr et Le Carrer, par Me Z..., avocat ;

Elle demande à la Cour :

1°) - d'annuler le jugement n°0401229 du 3 mai 2005 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a annulé la décision du 2 décembre 2003 par laquelle l'inspecteur du travail l'a autorisée à licencier M. A... et celle du 26 mai 2004 par laquelle le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale a rejeté le recours hiérarchique formé contre cette décision ;

2°) - de rejeter la demande présentée par M. A... devant le Tribunal ;

Elle soutient que :

- dans la mesure où par jugement du 7 septembre 2004, le Tribunal de commerce d'Epinal a transformé le redressement judiciaire de la société en liquidation judiciaire, la S.C.P. Bihr et Le Carrer avait seule qualité pour représenter la société aux lieu et place de l'administrateur judiciaire qui se trouvait dessaisi de tous mandats en application de l'article L.621-27 du code de commerce ; la procédure du recours hiérarchique et juridictionnelle ayant été suivies en l'absence de son représentant légal, elle est entachée d'une irrégularité substantielle ;

- le jugement est entaché d'insuffisance de motivation relative d'une part à l'appartenance de la société à un groupe dont rien ne permet de déterminer l'existence, d'autre part à la société au sein de laquelle l'activité ou l'organisation auraient permis le reclassement du salarié ;

- au fond, c'est à tort que le Tribunal a retenu qu'il y avait violation de l'obligation de reclassement au sein du groupe dès lors que l'existence d'un groupe ne permet pas de retenir ipso facto une telle violation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistrés les 12 octobre 2005 et 28 août 2006, les mémoires en défense présentés pour M. A... demeurant ..., par Me Harquet, avocat, tendant au rejet de la requête, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- dans la mesure où le recours ne vise pas à voir consacrer une responsabilité ou obtenir une indemnisation, la procédure menée avec Me B... est parfaitement valide et contradictoire à l'encontre de la société qui , à la date d'introduction de la demande était toujours en redressement judiciaire ; que si durant l'instance, les conditions juridiques ont été modifiées, il appartenait à l'administrateur judiciaire d'en transmettre les éléments au mandataire liquidateur ; en tout état de cause le moyen tiré de l'application de l'article L. 621-41 du code de commerce est inopérant ;

- dans la mesure où le sigle GAT signifie groupe Alain Z, la société aurait du mal

à soutenir qu'il ne s'agit pas d'un groupe dont elle fait partie , et dont les éléments ressortent du dossier ;

- en ce qui concerne les obligations de recherche de reclassement d'un salarié protégé, la preuve d'une telle recherche repose sur l'employeur et non sur l'employé ;

Vu les pièces du dossier ;

Vu l'ordonnance fixant la clôture de l'instruction le 30 mai 2006 à 16 heures ;

Vu l'ordonnance portant réouverture de l'instruction ;

Vu enregistré le 3 août 2006, le mémoire présenté par le ministre de l'emploi de la cohésion sociale et du logement tendant aux mêmes fins que la requête présentée par la société HGP GAT FILATURES à laquelle elle s'associe par les mêmes moyens, précisant que :

- le jugement est insuffisamment motivé en ce qui concerne l'appartenance de la société à un groupe ;

- le cadre de la recherche de reclassement se déclinant selon une hiérarchie, l'inspecteur du travail n'a pas commis d'erreur dans l'étude du dossier de l'intéressé ;

- le Tribunal a commis une erreur en regardant la société comme faisant partie d'un groupe et en sanctionnant alors l'absence de recherche de reclassement dans ce groupe ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 septembre 2006 :

- le rapport de M. Job, président,

- les observations de Me X..., de la SCP Languille-Knittel-Watbot-Fouray, avocat de la société HGP GAT FILATURES et de Me Harquet, avocat de M. C...,

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le 14 novembre 2003, le mandataire judiciaire de la société HGP GAT FILATURES a demandé à l'inspecteur du travail, l'autorisation de procéder au licenciement économique de M. A... , ouvrier étirageur dans l'entreprise, délégué du personnel et membre du comité d'établissement ; que, par une décision du 2 décembre 2003 confirmée le

26 mai 2004 par le ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale, l'inspecteur du travail a autorisé ce licenciement ; qu'il a retenu que l'employeur avait satisfait à son obligation de reclassement dès lors que les difficultés financières de l'entreprise avaient justifié la suppression de 12 des 16 postes d'étirageur dans l'établissement, que par application des critères d'ordre de licenciement, la candidature de M. n'avait pu être retenue dans le cadre de l'appréciation de l'aptitude professionnelle du salarié à occuper le poste, sans que cette décision ait relevé d'un procédé discriminatoire, que l'entreprise n'appartenant pas à un groupe de sociétés, il n'y avait pas lieu à recherche d'un reclassement dans celui ci, enfin que la mesure de licenciement était sans lien avec les mandats détenus par l'intéressé ; que, par le jugement du 3 mai 2005 attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a annulé les décisions administratives ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, par l'effet du jugement du 7 septembre 2004 du Tribunal de commerce d'Epinal qui a transformé le redressement judiciaire de la société HGP GAT FILATURES en liquidation judiciaire, l'administrateur judiciaire a, en application de l'article L. 621-27 du code de commerce alors en vigueur, achevé sa mission ; qu'en conséquence, il ne pouvait plus représenter la société ; qu'en revanche, à cette même date, le liquidateur désigné devait être regardé en l'absence de dispositions expresses contraires, comme ayant tous pouvoirs pour agir en son nom et pour poursuivre la présente instance même après que la société ait été radiée du registre du commerce ; que, dans la mesure où la procédure juridictionnelle a été poursuivie en l'absence du représentant légal de la société, ce dernier est fondé à soutenir que le caractère contradictoire de la procédure a été méconnu par le Tribunal, et, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens, à demander l'annulation du jugement du 3 mai 2005 du Tribunal administratif de Nancy ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. devant le Tribunal administratif de Nancy ;

Sur la légalité des décisions :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 321-1 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur : «Constitue un licenciement pour motif économique, le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification substantielle du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. / Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail résultant de l'une des causes énoncées à l'alinéa précédent. / Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu'il occupe ou sur un emploi équivalent ou, à défaut, et sous réserve de l'accord exprès du salarié, sur un emploi d'une catégorie inférieure ne peut être réalisé dans le cadre de l'entreprise ou, le cas échéant, dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient. Les offres de reclassement proposées au salarié doivent êtres écrites et précises.» ; qu'en vertu des dispositions des articles L. 425-1 ou L.436-1 du code du travail, le licenciement de salariés légalement investis de fonctions représentatives comme délégué du personnel ou membre du comité d'entreprise qui bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou , le cas échéant, dans les sociétés du groupe auquel appartient l'entreprise ;

Considérant qu'au soutien de sa demande, M. fait valoir que son entreprise, dont la dénomination sociale est «HGP GAT Y...» qui signifie «Héritiers Georges PERRIN Groupe Alain Y...», fait partie du groupe de sociétés Alain et, au delà de cette apparence, apporte à l'appui de ses allégations, d'une part, plusieurs documents datés des années 1991-1992 puis 2000 signés de M.Alain faisant état de l'entrée de la société dans son groupe, d'autre part, se prévaut des énonciations du plan social élaboré à la suite de l'incendie survenu le 11 novembre 1999 de l'établissement du ROCHESSON et divers contrats de travail conclus afin de permettre le reclassement de salariés de cet établissement avec les filatures de SAINT DIE GAT et Filatures GELIOT/LA GOSSE ; qu'eu égard à ces indices concordants, la société ne peut, ainsi qu' elle l'avait fait auprès de l'administration ou de la juridiction judiciaire se borner à dénier toute existence d'un groupe sans justifier son affirmation ; qu'ainsi, eu égard à l'existence dans le groupe en cause de sociétés oeuvrant dans le même secteur d'activités que HGP GAT Y..., l'administration a méconnu les dispositions sus-analysées du code du travail en autorisant le licenciement de M. sans porter un examen sur les possibilités de reclassement pouvant exister dans ces sociétés ; que, par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens , M. était fondé à demander l'annulation des décisions autorisant, puis, confirmant l'autorisation de licenciement accordée à son employeur ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société HGP GAT FILATURES n'est fondée qu'à demander l'annulation du jugement du 3 mai 2005 du Tribunal administratif de Nancy ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner l'Etat (ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale) à verser à société HGP GAT FILATURES la somme de 1 000 € au titre des frais exposés non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 3 mai 2005 du Tribunal administratif de Nancy ensemble les décisions des 2 décembre 2003 de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement de M. A... et 26 mai 2004 du ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale la confirmant sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à la société HGP GAT FILATURES la somme de 1 000 € (mille euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société HGP GAT FILATURES est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société HGP GAT FILATURES, en la personne de son mandataire liquidateur la S.C.P. Bihr et Le Carrer, à M. A... et au ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement.

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N° 05NC00946


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 05NC00946
Date de la décision : 25/09/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROTH
Rapporteur ?: M. Pascal JOB
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : LANGUILLE FOURAY GUIRANNA CAHEN MORTIN KNITTEL WATBOT LUISIN GERRIET

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-09-25;05nc00946 ?
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