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04/08/2006 | FRANCE | N°04NC00725

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ere chambre - formation a 3, 04 août 2006, 04NC00725


Vu la requête, enregistrée le 4 août 2004, présentée pour la COMMUNE DE MANOM, représentée par son maire en exercice, élisant domicile en cette qualité à l'Hôtel de ville de Manom (57100), par Me Philippot, avocat ; la COMMUNE DE MANOM demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 28 mai 2004 en ce qu'il a, à la demande de M. X, annulé les points 7 et 8 de la délibération du conseil municipal du 28 octobre 2003 ;

2°) de rejeter la demande de M. X devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

3°) de

mettre à la charge de M. X une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'a...

Vu la requête, enregistrée le 4 août 2004, présentée pour la COMMUNE DE MANOM, représentée par son maire en exercice, élisant domicile en cette qualité à l'Hôtel de ville de Manom (57100), par Me Philippot, avocat ; la COMMUNE DE MANOM demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 28 mai 2004 en ce qu'il a, à la demande de M. X, annulé les points 7 et 8 de la délibération du conseil municipal du 28 octobre 2003 ;

2°) de rejeter la demande de M. X devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

3°) de mettre à la charge de M. X une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que c'est à tort que les premiers juges ont considéré que le conseil municipal n'avait pas été suffisamment informé, dès lors que ce n'est que dans les communes de plus de 3 500 habitants qu'une note de synthèse doit être adressée aux membres du conseil municipal et que l'information prévue par l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales a été donnée antérieurement à l'ensemble des conseillers municipaux ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 octobre 2004, présenté pour M. X, par Me Seyve ; M. X conclut :

- en premier lieu, au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise solidairement à la charge de l'Etat et de la COMMUNE DE MANOM au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

A ce titre, il soutient qu'aucun des moyens énoncés par la COMMUNE DE MANOM n'est fondé :

- en second lieu, par voie d'appel incident, à la réformation du jugement attaqué en ce qu'il a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 29 juillet 2003 par lequel le préfet de la Moselle a délimité le périmètre de la communauté d'agglomération «Portes de France-Thionville» en incluant le territoire de la COMMUNE DE MANOM ;

A cette fin, il soutient :

- que son appel incident est recevable compte tenu du lien indivisible entre la décision du préfet et la délibération du conseil municipal ;

- que l'argument tiré de ce que la communauté d'agglomération aurait pour objectif de faire la synthèse des différents syndicats intercommunaux manque en fait, dès lors que les syndicats préexistants ont un ressort territorial différent ;

- que c'est à tort que les premiers juges ont retenu l'argument de la continuité territoriale ;

- que, dès lors que le conseil municipal s'était prononcé contre l'adhésion à la communauté d'agglomération, il convenait à tout le moins de surseoir à l'intégration de la COMMUNE DE MANOM dans l'attente d'une étude comparative par rapport à la solution alternative d'un rattachement à la communauté de communes de Cattenom ;

- que l'arrêté attaqué va à l'encontre tant de la décision du conseil municipal du 23 juin 2003 que de la liberté des collectivités territoriales et des personnes de disposer de leur propre avenir ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 22 mai 2006, présenté pour la COMMUNE DE MANOM, qui conclut aux mêmes fins que la requête et au rejet de l'appel incident de M. X ;

Il soutient en outre que l'appel incident est irrecevable en tant qu'il soulève un litige distinct de celui soulevé par l'appel principal ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 6 juin 2006, présenté pour M. X, qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures ;

Vu l'ordonnance du président de la première chambre de la Cour, fixant la clôture de l'instruction au 7 juin 2006 à 16 heures ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 juin 2006, présenté pour la COMMUNE DE MANOM ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 17 juillet 2006, présentée pour M. X ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 juin 2006 :

- le rapport de M. Vincent, président,

- les observations de Me Vautrin, avocat de la COMMUNE DE MANOM, et de Me Seyve, avocat de M. X ;

- et les conclusions de M. Adrien, commissaire du gouvernement ;

Considérant que, consécutivement à l'initiative de plusieurs conseils municipaux en faveur de la création d'un établissement public de coopération intercommunale, le préfet de la Moselle a, par arrêté du 29 juillet 2003, fixé le périmètre de la communauté d'agglomération «Portes de France-Thionville» en y incluant le territoire de la COMMUNE DE MANOM alors même que, par délibération du 23 juin 2003, le conseil municipal de ladite commune s'était déclaré opposé à cette mesure ; que, toutefois, par une délibération ultérieure en date du 28 octobre 2003, le conseil municipal de Manom a approuvé l'inclusion de la commune dans cette communauté d'agglomération ; que, saisi par M. X, conseiller municipal de Manom, le Tribunal administratif de Strasbourg a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté susrappelé du préfet de la Moselle et fait droit en revanche à ses conclusions à fin d'annulation de cette dernière délibération en ses points 7 et 8 ; que la COMMUNE DE MANOM relève appel de ce jugement en ce qu'il lui est défavorable, cependant que M. X conclut, par voie d'appel incident, à la réformation dudit jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du préfet de la Moselle ;

Sur l'appel principal de la COMMUNE DE MANOM :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales : «Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération» ;

Considérant que, par les points 7 et 8 de sa délibération du 28 octobre 2003, le conseil municipal de Manom a approuvé respectivement la création de la communauté d'agglomération «Portes de France - Thionville» sur la base du périmètre défini par l'arrêté préfectoral du 29 juillet 2003 et le projet de statuts de cet établissement public de coopération intercommunale ;

Considérant qu'il est constant que le maire a adressé au conseil municipal des informations concernant l'intercommunalité, ainsi qu'une note datée du 19 juin 2003 en vue de la réunion susrappelée du conseil municipal du 23 juin 2003 ; qu'en vue de la réunion du 28 octobre 2003, les conseillers municipaux ont en outre reçu communication du projet de statuts de la communauté d'agglomération ; que la COMMUNE DE MANOM ayant moins de 3 500 habitants, le maire n'était en outre pas tenu, comme le prescrivent en pareil cas les dispositions de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, d'adresser préalablement aux conseillers municipaux une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération ; qu'il n'est pas établi ni même allégué que ces derniers auraient, comme il leur incombe afin de bénéficier du droit à information qui leur est reconnu par les dispositions précitées, expressément demandé au maire la production d'autres documents et qu'ils n'en auraient pas obtenu communication ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour annuler la délibération du 28 octobre 2003 du conseil municipal de Manom en ses points 7 et 8, le Tribunal administratif de Strasbourg s'est fondé sur le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

Considérant que la circonstance que le conseil municipal de Manom, dont la majorité des membres a pu librement changer d'opinion, se soit initialement déclaré opposé à la création envisagée de la communauté d'agglomération par une précédente délibération en date du 23 juin 2003, comme il a été dit ci-dessus, est sans incidence sur la légalité de la délibération litigieuse du 28 octobre 2003 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE MANOM est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé la délibération du 28 octobre 2003 du conseil municipal en ses points 7 et 8 ; qu'il s'ensuit que l'article 1er du jugement attaqué doit être annulé ;

Sur l'appel incident de M. X :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par la COMMUNE DE MANOM :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 5211-5 du code général des collectivités territoriales : I «… le périmètre de l'établissement public de coopération intercommunale peut être fixé par arrêté du représentant de l'Etat dans le département lorsque les communes font partie du même département… : 1° Soit, dans un délai de deux mois à compter de la première délibération transmise, à l'initiative d'un ou plusieurs conseils municipaux demandant la création d'un établissement public de coopération intercommunale ;… Cet arrêté dresse la liste des communes intéressées. A compter de la notification de cet arrêté, le conseil municipal de chaque commune concernée dispose d'un délai de trois mois pour se prononcer…» ; que, comme il a été dit ci-dessus, le préfet de la Moselle a, sur le fondement des dispositions précitées, établi la liste des communes intéressées à la création de la communauté d'agglomération «Portes de France-Thionville» par arrêté du 29 juillet 2003 ;

Considérant en premier lieu, qu'il résulte de ces dispositions que les communes intéressées figurant sur la liste dressée par le représentant de l'Etat ne sont pas seulement celles qui prennent l'initiative de demander la création d'un établissement public de coopération intercommunale ou qui sont favorables à cette démarche, mais toutes celles qui sont consultées sur le projet et qui sont susceptibles d'être regroupées au sein du groupement envisagé ; que, par suite, la seule circonstance que le conseil municipal de Manom ait manifesté son opposition au projet de communauté d'agglomération «Portes de France-Thionville» par délibération du 23 juin 2003 est sans incidence sur la légalité de la décision par laquelle le préfet de la Moselle a fait figurer la COMMUNE DE MANOM dans la liste de celles intéressées à ce projet ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions précitées, qui prévoient expressément que chaque conseil municipal se prononce sur son adhésion à l'établissement public de coopération intercommunale en voie de formation, que les communes intéressées sont libres d'adhérer à cette démarche ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision attaquée méconnaîtrait la libre volonté des communes dont procède la coopération intercommunale doit être écarté ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 5216-1 du code général des collectivités territoriales : «La communauté d'agglomération est un établissement public de coopération intercommunale regroupant plusieurs communes formant, à la date de sa création, un ensemble de plus de 50 000 habitants d'un seul tenant et sans enclave, autour d'une ou plusieurs communes centre de plus de 15 000 habitants… Ces communes s'associent au sein d'un espace de solidarité, en vue d'élaborer et conduire ensemble un projet commun de développement urbain et d'aménagement de leur territoire» ;

Considérant que la COMMUNE DE MANOM est contiguë à la commune de Thionville, commune centre de plus de 15 000 habitants, avec laquelle elle forme une seule aire urbaine ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la localisation des emplois des personnes actives résidant dans la commune, que celle-ci se trouve dans la zone d'attraction de Thionville ; que si certaines des structures intercommunales dont fait partie la COMMUNE DE MANOM excèdent le ressort territorial de la communauté d'agglomération envisagée, regroupant Thionville et six communes limitrophes, constituant un ensemble de plus de 50 000 habitants, et si ladite commune adhère également à des structures regroupant d'autres communes, d'une part, et si la continuité territoriale entre Thionville et les deux communes de Garche et Koenig fusionnées avec celle-ci pourrait également être assurée par la seule adhésion de la commune de Basse-Ham, d'autre part, ces seules circonstances ne sont pas, eu égard à ce qui précède, de nature à entacher d'erreur manifeste d'appréciation la décision litigieuse, dont le bien-fondé n'était par ailleurs pas subordonné à l'étude préalable de solutions alternatives à celle qu'elle a retenue ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement attaqué en ce qu'il a rejeté sa requête dirigée contre l'arrêté susrappelé du 29 juillet 2003 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. X la somme que demande la COMMUNE DE MANOM au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la COMMUNE DE MANOM, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. X au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que ces dispositions font de même obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. X au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 28 mai 2004 est annulé.

Article 2 : La demande de M. X devant le Tribunal administratif de Strasbourg tendant à l'annulation des points 7 et 8 de la délibération du 28 octobre 2003 du conseil municipal de la COMMUNE DE MANOM est rejetée, ainsi que son appel incident devant la cour et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la COMMUNE DE MANOM tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE MANOM, à M. X et au ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.

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N° 04NC0725


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 04NC00725
Date de la décision : 04/08/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: M. Pierre VINCENT
Rapporteur public ?: M. ADRIEN
Avocat(s) : SCP LAGRANGE PHILIPPOT CLEMENT ZILLIG VAUTRIN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2006-08-04;04nc00725 ?
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