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22/12/2005 | FRANCE | N°01NC00136

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3ème chambre - formation à 3, 22 décembre 2005, 01NC00136


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 8 février 2001, complétée par le mémoire enregistré le 15 avril 2002, présentée pour l'entreprise SOGEDEC, dont le siège est fixé 20 rue Traverse de Pomègues à Marseille (13000), par Me Vianes, avocat ;

L'entreprise SOGEDEC demande à la Cour :

1°) de réformer les articles 2 et 8 du jugement no 981605 en date du 28 novembre 2000 en tant que le Tribunal administratif de Nancy a limité à la somme de 139 999,97 Frs, abondée de la TVA, le montant de la condamnation de la commune de Senones et a rejeté le surplus de

ses demandes ;

2°) à titre principal, de dire que le montant des travaux rest...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 8 février 2001, complétée par le mémoire enregistré le 15 avril 2002, présentée pour l'entreprise SOGEDEC, dont le siège est fixé 20 rue Traverse de Pomègues à Marseille (13000), par Me Vianes, avocat ;

L'entreprise SOGEDEC demande à la Cour :

1°) de réformer les articles 2 et 8 du jugement no 981605 en date du 28 novembre 2000 en tant que le Tribunal administratif de Nancy a limité à la somme de 139 999,97 Frs, abondée de la TVA, le montant de la condamnation de la commune de Senones et a rejeté le surplus de ses demandes ;

2°) à titre principal, de dire que le montant des travaux restant dus par la commune de Senones s'élève, compte tenu des provisions déjà versées, à 587 935,87 Frs TTC, cette somme devant être assortie des intérêts de droit à compter de la première mise en demeure ;

3°) à titre subsidiaire, si sa responsabilité était retenue en ce qui concerne les vis de fixation de la membrane, de fixer le coût de la remise en état à la somme de 199 119 Frs HT ou à la somme qui aura été retenue ensuite de mesures d'instructions éventuelles ;

4°) à titre principal, de reconnaître les sommes dues au titre de l'avenant du 12 novembre 1996 et condamner la commune de Senones à lui régler la somme de 500 000 Frs, ladite somme devant être assortie de la TVA ;

5°) à titre subsidiaire, de l'indemniser à hauteur des deux tiers dudit avenant soit la somme de 333 334 Frs, ladite somme devant être assortie de la TVA ;

6°) de condamner la commune de Senones à lui verser une somme de 40 000 Frs au titre du préjudice subi par suite de son inertie ;

7°) de condamner la commune de Senones à lui verser une somme de 20 000 Frs au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

L'entreprise SOGEDEC soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a réduit la somme qui lui était due en déduisant du montant du marché initial le prétendu coût de remise en état des vis de fixation altérées lors des opérations de désamiantage ;

- s'agissant des vis altérées, elle n'en est pas responsable, puisque CEP, assistant technique,

a failli à sa mission ;

- le tribunal a retenu le chiffrage proposé par la commune alors même que l'estimation n'a pas été contradictoire, ainsi que cela avait été soutenu et dont elle avait contesté le montant ;

- il n'est pas possible de compenser des sommes liquides, certaines et exigibles comme le montant du marché avec un simple devis au demeurant récusé ;

- au cas où sa responsabilité devrait être retenue, le coût de remise en état ne saurait excéder la somme de 199 119 Frs HT ;

- s'agissant de l'avenant, la commune a commandé et accepté les travaux par le document contractuel du 12 novembre 1996 et ceux-ci ayant été réalisés, il y a une obligation de paiement ;

- le service étant fait, même si une valeur contractuelle ne peut être reconnue audit document, le non règlement engendre un préjudice qui résulte d'une faute de la commune et s'élève à un montant de 500 000 Frs HT ;

- si la Cour devait considérer que l'entreprise aurait dû vérifier la validation de l'avenant, il y lieu de lui attribuer au moins les deux tiers des sommes dues ;

- sur le fond, l'avenant est justifié dès lors que la commune a reconnu que l'inspection du travail a imposé pour l'exécution du marché des sujétions imprévues pour l'entreprise qui ne peuvent rester à sa charge ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'indemnisation du préjudice résultant de l'inertie est distinct de celui qui peut être indemnisé par les intérêts moratoires, l'article 178 du code des marchés ne compensant que le retard au mandatement des sommes dues ;

- la réception totale et sans réserve est incontestable ;

- l'analyse de restitution vaut réception de même que la prise de possession des locaux ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 6 et 8 mars 2002 et les 17 et 21 mars 2005, présentés pour la commune de Senones par la SELARL d'avocats Soler-Couteaux, Llorens ; la commune de Senones conclut :

- au rejet de la requête de l'entreprise SOGEDEC ;

- par voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement susmentionné en ce qu'il a considéré que les travaux avaient été réceptionnés le 7 mars 1997, refusé de diminuer le montant du solde du marché de 140 000 Frs HT correspondant au coût des travaux complémentaires de désamientage et en tant qu'il l'a condamnée à verser à l'entreprise appelante une somme de 5000 Frs au titre de l'article L761-1 du code de justice administrative ;

- à la condamnation de l'entreprise SOGEDEC à lui verser une somme de 20 000 Frs au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

La commune de Senones soutient que :

- la circonstance qu'une réception sans réserve soit prononcée ne faisant pas obstacle à ce que le maître d'ouvrage déduise du coût du montant du marché celui éventuel des désordres à l'ouvrage occasionnés par l'entrepreneur dans l'accomplissement de sa mission, les premiers juges n'ont commis aucune erreur de droit en défalquant du montant du marché initial le coût de la remise en état des vis de fixation ;

- la requérante ne saurait soutenir que la responsabilité ne lui incombe pas dès lors qu'elle a reconnu en première instance avoir altéré les vis en procédant au déflocage ;

- il est constant que l'entreprise n'a pas produit en première instance de devis chiffrant le coût de réparation des vis et s'est contentée de discuter celui présenté par l'exposante ;

- le devis produit en appel n'est pas probant dès lors que l'expert qui en est l'auteur ne s'est pas rendu sur place ;

- contrairement à ses affirmations, l'entreprise n'a jamais produit le mémoire technico-financier permettant la signature de l'avenant ;

- les dépenses dont l'appelante demande le paiement ne constituent pas des travaux supplémentaires mais des dépenses qui ont été exposées à raison des équipements de protection particuliers dont elle devait équiper son personnel ;

- le marché ayant été conclu pour un prix global et forfaitaire, les frais générés par ces équipements sont inclus dans ce prix ;

- ces frais ne sont pas imprévisibles ;

- en réclamant un supplément de prix, l'entreprise cherche à obtenir l'indemnisation de prestations déjà incluses dans son offre ;

- ni la gestion d'affaires, ni l'enrichissement sans cause ne sont susceptibles de fonder un quelconque droit à indemnisation au profit de la société ;

- l'appelante ne démontre pas plus qu'en première instance avoir subi un préjudice qui serait distinct de celui réparé par les intérêts moratoires ;

- la seule proposition de réception dont a été saisi le maître d'ouvrage date du 13 février 1997 et comportait une réserve majeure ;

- les comptes-rendus des 5 et 6 mars 1997 ne sauraient être considérés comme valant réception sans réserve, les notes en cause n'ayant pas été établies par le maître d'oeuvre ;

- aucune réception n'est intervenue ;

- la circonstance que le maître d'ouvrage ait repris possession du bâtiment ne permet pas d'établir qu'il y ait eu une réception tacite des travaux de désamiantage ;

- les sommes réclamées au titre de la réfection des malfaçons constituent le caractère de la réparation d'un préjudice de sorte que leur versement n'est pas subordonné à la réalisation des travaux, ce qui justifie la compensation demandée dès lors que la nécessité desdits travaux est démontrée ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 mars 2002, présenté pour l'établissement public foncier de Lorraine par Me Luisin, avocat ; l'établissement public foncier de Lorraine conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit fait droit aux conclusions de la commune de Senones ;

L'établissement public foncier de Lorraine soutient que :

- l'entreprise SOGEDEC ne s'est mépris ni sur la nature de mandataire de l'établissement, ni sur l'objet de son intervention ;

- ce comportement est de nature à rendre opposable à l'entreprise la convention de mandat liant la commune à l'exposante ;

- c'est à bon droit que le tribunal a tenu compte de la remise en état de la membrane d'étanchéité détériorée dès lors que l'entreprise ne conteste pas avoir sectionné les vis de fixation et n'a pas pris les précautions nécessaires pour réaliser dans les règles de l'art le travail confié;

- l'avenant était totalement injustifié puisque les prescriptions de l'inspection du travail étaient seulement destinées à faire respecter la réglementation en matière de protection respiratoire et n'avait pas pour objet de répondre aux sujétions imprévues ;

- le moyen tiré d'une prétendue responsabilité extra-contractuelle est nouveau en appel et, par suite, irrecevable ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er décembre 2005 :

- le rapport de Mme Monchambert, président,

- les observations de Me Bronner pour la SELARL Soler-Couteaux, Llorens, avocat de la commune de Senones, et de Me Luisin, avocat de l'établissement public foncier de Lorraine,

- et les conclusions de M. Tréand, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par un marché de travaux conclu le 18 octobre 1996, la commune de Senones a confié à l'entreprise SOGEDEC le désamiantage des anciens tissages de l'abbaye de Sénones pour un prix global et forfaitaire de 1 441 150,25 Frs ; que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a condamné sous astreinte la commune de Senones à payer à l'entreprise SOGEDEC une somme de 512 235, 19 Frs sous déduction de la provision accordée par ordonnance du jugement du Tribunal administratif de Nancy le 21 octobre 1999, soit une somme de 139 999, 97 Frs, assortie des intérêts moratoires calculés en application de l'article 178 du code des marchés publics, au titre du paiement du solde du marché ; que l'entreprise SOGEDEC fait appel de ce jugement en tant qu'il a limité le montant de la condamnation de la commune tandis que cette dernière demande, par la voie de l'appel incident, l'annulation du jugement en tant qu'il a refusé de diminuer le montant du solde du marché de 140 000 Frs HT correspondant au coût des travaux complémentaires de désamiantage et en tant qu'il l'a condamnée à verser à l'entreprise appelante une somme de 5000 Frs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur le règlement du marché :

Considérant qu'aucune des parties ne s'est prévalue devant le tribunal administratif, et ne se prévaut en appel, de l'intervention d'un décompte général et définitif, établi selon les règles fixées à l'article 13-4 du cahier des clauses administratives générales, qui aurait fixé irrévocablement les droits et obligations des parties au contrat ; qu'en l'absence d'un tel décompte, il appartient au juge du contrat de statuer sur les réclamations pécuniaires présentées par chacune des parties et, l'ouvrage qui faisait l'objet du marché étant achevé et mis en service, de déterminer le solde de leurs obligations contractuelles respectives ;

Considérant que pour évaluer le montant de la somme dont la commune de Senones reste redevable au titre du marché initial, le tribunal administratif a pris en compte le coût des travaux de remise en état de la membrane d'étanchéité sur la base d'un devis produit par la commune alors non contesté par l'entreprise ; qu'en appel, si l'entreprise SOGEDEC ne conteste pas avoir détérioré, lors de la réalisation de ses prestations, des vis de fixation de la membrane d'étanchéité, elle soutient que CEP maître d'oeuvre et assistant technique du maître d'ouvrage ne l'aurait pas informée de l'existence de ces vis et entend contester le montant des sommes laissées à sa charge par le tribunal en produisant une estimation des travaux de reprise émanant d'un expert de la société d'arbitrage; que les pièces du dossier ne permettent pas en l'état de l'instruction d'apprécier l'importance des désordres ni d'évaluer le coût des travaux nécessaires à leur réparation ; que, par suite, il y a lieu, avant de statuer sur la présente requête, d'ordonner une expertise aux fins précisées ci-après ;

D É C I D E :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur les conclusions de la requête de l'entreprise SOGEDEC, procédé à une expertise en vue de :

1) procéder à la constatation et au relevé précis et détaillé des désordres qui affectent la membrane d'étanchéité du bâtiment des tissages de l'abbaye de Senones en indiquant leur date d'apparition ;

2) décrire les malfaçons qui seraient constatées et donner tous les éléments permettant au tribunal de porter une appréciation sur les causes et origines des désordres et malfaçons dont s'agit ;

3) indiquer la nature et le coût des travaux nécessaires pour remédier à la situation actuelle, compte tenu de l'état d'entretien des lieux ;

4) et, s'il y a lieu, faire toutes autres constatations nécessaires, enregistrer les observations de tout intéressé et annexer à son rapport tous documents utiles.

Article 2 : L'expert sera désigné par le président de la Cour. Il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 de R. 621-14 du code de justice administrative.

Article 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'entreprise SOGEDEC, à la commune de Senones et à l'établissement public foncier de Lorraine.

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01NC00136


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 01NC00136
Date de la décision : 22/12/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LEDUCQ
Rapporteur ?: Mme Sabine MONCHAMBERT
Rapporteur public ?: M. TREAND
Avocat(s) : VIANES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-12-22;01nc00136 ?
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