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17/10/2005 | FRANCE | N°03NC01081

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4eme chambre - formation a 3, 17 octobre 2005, 03NC01081


Vu le recours du MINISTRE DE LA SANTE, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPEES, enregistré le 31 octobre 2003 ; il demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du 8 juillet 2003 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné l'Etat à verser à Mme X la somme de 509 837 euros, à M. A la somme de 306 449 euros et à M. Z la somme de 241 390 euros, avec intérêts capitalisés, en réparation du préjudice subi dans l'exploitation de leurs pharmacies du fait de l'autorisation illégale d'ouverture d'une officine délivrée à M. B ;

2°) de rej

eter la demande présentée par M. Z devant le Tribunal administratif de Châlons-...

Vu le recours du MINISTRE DE LA SANTE, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPEES, enregistré le 31 octobre 2003 ; il demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du 8 juillet 2003 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné l'Etat à verser à Mme X la somme de 509 837 euros, à M. A la somme de 306 449 euros et à M. Z la somme de 241 390 euros, avec intérêts capitalisés, en réparation du préjudice subi dans l'exploitation de leurs pharmacies du fait de l'autorisation illégale d'ouverture d'une officine délivrée à M. B ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. Z devant le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et de ramener les condamnations de l'Etat à 132 555 euros pour Mme X et à 124 850 euros pour M. A ;

Il soutient que :

- M. Z n'a pas subi de préjudice, son officine n'ayant pas accusé de baisse d'activité significative ;

- il doit être tenu compte de la concurrence qui s'est exercée entre les victimes et notamment entre les officines de Mme X et de M. Z, en ramenant à 70 % du chiffre d'affaires de la pharmacie B la perte d'activité des intéressés ;

- le préjudice subi doit être calculé non à partir de la perte de marge mais de la perte de bénéfices, évaluable à 11 % des pertes de chiffre d'affaires ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 22 septembre 2005 présenté pour Mme Nicole X, élisant domicile ..., M. Claude A, élisant domicile ... et à M. Guy Z, élisant domicile ..., par Me Sammut, avocat ; ils concluent au rejet du recours et à la condamnation de l'Etat à leur verser à chacun 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ils soutiennent qu'aucun moyen n'est fondé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 septembre 2005 :

- le rapport de M. Sage, président ;

- les observations de Me Sammut, avocat de Mme X et de MM. A et Z ;

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;

Considérant que le MINISTRE DE LA SANTE, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPEES, qui ne conteste pas le principe de la responsabilité de l'Etat à l'égard de Mme X, de M. A et de M. Z, pharmaciens, du fait des fautes commises par le préfet de la Marne en autorisant illégalement M. B à ouvrir une officine à Epernay, à proximité de celles des intéressés, du 12 mars 1990 au 12 mars 1998, soutient que M. Z n'a subi aucun préjudice indemnisable et que les indemnités allouées par le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne à Mme X et à M. A sont excessives ;

Considérant que s'il y a lieu, pour évaluer le préjudice subi par chacun des intéressés du fait de l'ouverture illégale de l'officine de M. B, de tenir compte de la concurrence qui s'est exercée entre eux, notamment entre Mme X et M. Z dont les officines sont situées sur la même place ..., cette circonstance n'est pas de nature à remettre en cause l'appréciation de l'expert désigné par le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne selon laquelle le chiffre d'affaires globalement perdu par les trois officines des intéressés du fait de l'ouverture illégale pendant la période susindiquée représente 80 % du chiffre d'affaires de la pharmacie B et s'élève à 2 935 902 F ;

Considérant que M. A a perdu ainsi un chiffre d'affaires de 7 445 076 F ; que si Mme X a perdu un chiffre d'affaires de 16 086 339 F et M. Z de 5 864 487 F seulement, l'expert a relevé que Mme X n'a modifié les conditions d'exploitation de son officine et notamment les heures d'ouverture qu'en septembre 1995, alors que M. Z a procédé à des adaptations dès avril 1990 ; que, dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation en imputant les pertes de chiffre d'affaires de Mme X pour moitié à la concurrence de la pharmacie B et pour moitié à celle de M. Z ; que M. Z a lui-même été privé de la possibilité de réaliser un chiffre d'affaires supplémentaire du même montant de 8 043 170 F en sus de la perte chiffrée par l'expert à 5 864 487 F, soit une perte totale de 13 907 657 F ; qu'il résulte de ce qui précède que le ministre n'est pas fondé à soutenir que M. Z n'a subi aucun préjudice indemnisable ;

Considérant que si l'expert a calculé les pertes de bénéfices subies à partir de la marge brute minorée pour tenir compte d'une augmentation inévitable des frais de fonctionnement et évaluée à 27 % du chiffre d'affaires perdu, cette évaluation aboutit à un résultat sensiblement supérieur au taux moyen de bénéfice calculé par rapport au chiffre d'affaires, tel qu'il a été constaté pour chaque officine avant l'ouverture de la pharmacie B, de 1985 a 1989 et qui était de l'ordre de 10 % pour M. A, de 12 % pour M. Z et, pour Mme X, inférieur à 5 % avec de fortes variations d'une année à l'autre, de 2,3 % à 7,5 % ; que compte tenu de l'importance variable selon chaque cas des frais qui auraient été induits par un chiffre d'affaires supplémentaire et auraient grevé la marge brute perdue, dans une moindre mesure pour Mme X et le plus fortement pour M. Z, le ministre est fondé à soutenir qu'il doit être fait une juste appréciation des bénéfices perdus en les évaluant pour chaque cas de l'espèce à 11 % du chiffre d'affaires perdu ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède qu'il y a lieu de ramener les condamnations prononcées par le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne à :

- 124 850 euros pour M. A,

- 134 879 euros pour Mme X,

- 233 168 euros pour M. Z

et de rejeter le surplus des conclusions du recours ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à Mme X, à M. A et à M. Z la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Les sommes que l'Etat a été condamné à verser par le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 8 juillet 2003 sont ramenées, pour M. A de 306 449 euros à 124 850 euros, pour Mme X de 509 837 euros à 134 879 euros et pour M. Z de 241 390 euros à 233 168 euros.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 8 juillet 2003 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 3 : Le surplus des conclusions du recours du MINISTRE DE LA SANTE, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPEES est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de Mme X, de M. A et de M. Z tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE LA SANTE ET DES SOLIDAIRTES, à M. Claude A, à Mme Nicole X, à M. Guy Z.

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N° 03NC01081


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 03NC01081
Date de la décision : 17/10/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: M. Paul SAGE
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : SCP BREAUD-SAMMUT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-10-17;03nc01081 ?
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