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17/10/2005 | FRANCE | N°03NC00670

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4eme chambre - formation a 3, 17 octobre 2005, 03NC00670


Vu le recours du MINISTRE DE LA SANTE, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPEES, enregistré au greffe de la Cour le 7 juillet 2003, complété par mémoire, enregistré le 9 juillet 2003 ;

Il demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du 9 avril 2003 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné l'Etat à verser à Mme Y la somme de 80 426,53 euros avec intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 1998, capitalisés, en réparation du préjudice qu'elle a subi dans l'exploitation de son officine de pharmacie du fait de l'autorisation i

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Vu le recours du MINISTRE DE LA SANTE, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPEES, enregistré au greffe de la Cour le 7 juillet 2003, complété par mémoire, enregistré le 9 juillet 2003 ;

Il demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du 9 avril 2003 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a condamné l'Etat à verser à Mme Y la somme de 80 426,53 euros avec intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 1998, capitalisés, en réparation du préjudice qu'elle a subi dans l'exploitation de son officine de pharmacie du fait de l'autorisation illégale de transfet d'officine délivrée par le préfet de la Haute-Marne à MM. Z et A ;

2°) de ramener à 17 200 euros le montant de l'indemnité accordée à Mme Y ;

Il soutient que :

- le bénéfice perdu doit être calculé à raison de 9,5 % du chiffre d'affaires ;

- la perte de chiffre d'affaires des années 1997, 1998 et 1999 doit être réduite au prorata des périodes où la pharmacie Z-A n'a pas été ouverte :

- la perte de bénéfice net doit être calculée sous déduction de l'impôt sur les bénéfices estimé à 40 % ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 14 et 17 mars 2005 présentés pour Mme Marie-Thérèse Y, ..., par la société d'avocats Bréand-Sammut ;

Elle conclut :

- au rejet du recours ; à cette fin, elle soutient qu'il est tardif et non fondé ;

- par la voie du recours incident, à la réformation du jugement attaqué et à la condamnation de l'Etat à lui verser à titre de dommages-intérêts une somme portée à 186 127,90 euros avec intérêts capitalisés ; à cette fin, elle soutient que l'expert a commis une erreur de calcul sur la marge perdue en 1999 ; qu'il n'y avait pas lieu de réduire les pertes de marge sur les chiffres d'affaires imputables au transfert illégal d'un coefficient de minoration de 10 % pour accroissement de frais généraux, comme l'a fait l'expert, ni de 20 % pour diminution des frais du personnel et évolution des résultats en 1999-2000, comme l'a fait d'office le tribunal administratif ; qu'elle a continué à subir en 1999-2000 les conséquences du transfert illégal ;

- à la condamnation de l'Etat à lui verser 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu l'ordonnance du 21 février 2005 portant clôture de l'instruction au 25 mars 2005 à 16 heures ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 septembre 2005 :

- le rapport de M. Sage, président,

- les observations de Me Sammut, avocat de Mme Y,

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;

Sur l'appel principal :

En ce qui concerne la fin de non-recevoir opposée par Mme Y :

Considérant qu'il ressort de l'avis de réception postal versé au dossier que le jugement attaqué a été notifié le 7 mai 2003 au ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité ; que le recours du MINISTRE DE LA SANTE, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPEES a été enregistré, sous forme de télécopie, le 7 juillet 2003, dans le délai d'appel de deux mois, et a été régularisé par production du recours original enregistré le 9 juillet 2003 ; qu'ainsi, la fin de non-recevoir pour tardiveté opposée par Mme Y doit être écartée ;

Au fond :

Considérant que le MINISTRE DE LA SANTE, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPEES est fondé à soutenir que le préjudice subi par Mme Y du fait de l'ouverture illégalement autorisée, à Chaumont à 900 mètres de son officine de pharmacie, de celle de MM. Z et A, du 9 mai 1997 au 21 octobre 1999 avec une interruption du 10 juillet au 4 octobre 1998, doit être calculé, non comme l'a fait le tribunal administratif à partir de la marge résultant de la seule différence entre les prix de vente et d'achat des produits pharmaceutiques, mais en pourcentage du chiffre d'affaires perdu, dès lors qu'il ressort des annexes au rapport d'expertise ordonnée par le tribunal administratif que la perte de bénéfice, seule indemnisable, ne peut valablement être estimée équivalente à la perte de marge, qui, de l'exercice 95/96, dernier exercice avant l'ouverture de l'autre pharmacie, à l'exercice 98/99 à la fin duquel a été fermé cette pharmacie, est en diminution de 17,8 %, pendant que l'ensemble des charges diminuait de 22,8 %, les chiffres d'affaires hors-taxes n'ayant diminué que de 14 %, étant précisé que la baisse des charges résulte notamment d'une diminution de l'effectif du personnel qui doit être regardée comme une conséquence de la diminution du chiffre d'affaires ;

Considérant que les pertes de chiffre d'affaires de l'officine de pharmacie de Mme Y, constatée en 1997, 1998 et 1999 par l'expert désigné par les premiers juges, imputée à l'ouverture illégale de la pharmacie Z-A et évaluée à 3 178 642 F, a nécessairement tenu compte des seules périodes d'ouverture effective de cette seconde officine ; qu'ainsi, le MINISTRE DE LA SANTE, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPEES n'est pas fondé à soutenir que les pertes ainsi constatées doivent être à nouveau réduites au prorata des périodes d'ouverture de la pharmacie Z-A ;

Considérant que les dommages-intérêts alloués à Mme Y en réparation d'une perte de bénéfices sont imposables au même titre ; que, dès lors, il n'y a pas lieu de déduire les impôts qu'aurait dû payer Mme Y sur les bénéfices qu'elle aurait réalisés en l'absence d'ouverture de la pharmacie Z-A pour calculer le montant de l'indemnité destinée à réparer cette perte de bénéfices ;

Considérant que Mme Y ne saurait utilement se prévaloir d'un taux de bénéfice par rapport au chiffre d'affaires supérieur au taux de 9,5 % retenu par le ministre, dès lors qu'elle ne justifie d'aucun taux supérieur enregistré dans son officine en dehors de la période litigieuse 1997-1999 et que les taux qui résultent de l'annexe 7 au rapport d'expertise susmentionné sont, avant et après, respectivement de 6,95 % en 1995/1996 et 6,31 % en 1999/2000 ; qu'ainsi, le taux de 9,50 % appliqué à un chiffre d'affaires perdu de 3 178 642 F conduit à un calcul du préjudice subi par Mme Y de 301 971 F, soit 46 035 euros, qui ne saurait être regardé comme une évaluation insuffisante ;

Sur l'appel incident de Mme Y :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'erreur matérielle commise par l'expert sur le montant de la marge perdue en 1999 est sans influence sur la solution du litige, de même que les abattements contestés opérés sur cette marge par le tribunal administratif ;

Considérant que si Mme Y conteste la diminution de ses charges de personnel, il résulte de l'instruction, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que l'ensemble de ses charges d'exploitation ont sensiblement diminué au cours de la période 1997-1999 ;

Considérant, enfin, que si Mme Y invoque la persistance des conséquences de l'ouverture de la pharmacie Z-A après le 21 octobre 1999, le préjudice qui en résulte est amplement compensé par le taux favorable de 9,5 % du chiffre d'affaires, retenu pour le calcul du bénéfice perdu ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le préjudice subi par Mme Y doit être évalué à 46 035 euros et, qu'après déduction de la provision de 4 573,47 euros accordée à l'intéressée, il y a lieu de condamner l'Etat à lui verser une indemnité ramenée à

41 461,53 euros ;

Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à Mme Y la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La somme de 80 426,53 euros que l'Etat a été condamné à verser à Mme Y par le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 9 avril 2003 est ramenée à 41 461,53 euros.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 9 avril 2003 est réformé en ce qu'il a de contraire à la présente décision.

Article 3 : Le surplus des conclusions du recours est rejeté ainsi que le recours incident de Mme Y et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE LA SANTE, DE LA FAMILLE ET DES PERSONNES HANDICAPEES et à Mme Marie-Thérèse Y.

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03NC00670


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 03NC00670
Date de la décision : 17/10/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. JOB
Rapporteur ?: M. Paul SAGE
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : SCP BREAUD-SAMMUT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-10-17;03nc00670 ?
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