La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/10/2005 | FRANCE | N°02NC00399

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 06 octobre 2005, 02NC00399


Vu , le recours enregistré le 5 avril 2002, complété par un mémoire enregistré le 27 décembre 2002, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 972162 du 4 décembre 2001 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a accordé à M. et Mme X la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1987 et 1988 et des pénalités y afférentes ;

2°)

de remettre à la charge de M. et Mme X les rappels d'impôt sur le revenu résultant de l'éva...

Vu , le recours enregistré le 5 avril 2002, complété par un mémoire enregistré le 27 décembre 2002, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 972162 du 4 décembre 2001 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a accordé à M. et Mme X la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 1987 et 1988 et des pénalités y afférentes ;

2°) de remettre à la charge de M. et Mme X les rappels d'impôt sur le revenu résultant de l'évaluation d'office des bénéfices non commerciaux de Mme X au titre des années 1986 et 1987 pour des montants respectifs en base de 630 758 F ( 96 158 euros) et

102 873 F ( 15 683 euros), dont le jugement a prononcé la décharge ;

Il soutient :

- que le vérificateur ayant adressé à Mme X une mise en demeure de souscrire les déclarations de résultats relatives aux sommes détournées au cours des années 1986 et 1987 dans un délai de trente jours à compter de sa réception, le moyen tiré de l'absence d'indication du délai sur la mise en demeure retenu par le tribunal administratif pour accorder la décharge des impositions litigieuses manque en fait ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 5 juin 2002 présenté pour M et Mme X par la SCP Richard, Mertz, Poitiers, Quere et Aubry, société d'avocats qui concluent au rejet du recours en faisant valoir que le moyen n'est pas fondé ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 septembre 2005 :

- le rapport de Mme Richer, président,

- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'à la suite d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle au titre des années 1986, 1987 et 1988, M et Mme X se sont vus notifier divers redressements, notamment dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, selon la procédure d'évaluation d'office, Mme X, comptable au sein des établissements CERF ayant procédé à des détournements de fonds ; que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie fait appel du jugement du 4 décembre 2001 du tribunal administratif de Strasbourg en tant qu'il a prononcé la décharge des rappels d'impot sur le revenu résultant de l'évaluation d'office des bénéfices non commerciaux de Mme X au titre des années 1986 et 1987 pour des montants respectifs en base de 630 758 F ( 96 158 euros) et 102 873 F ( 15 683 euros) ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors applicable : Peuvent être évalués d'office : 2° le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus non commerciaux ou des revenus assimilés..., lorsque la déclaration annuelle des résultats n'a pas été déposée dans le délai légal...Les dispositions de l'article L 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2° . ; qu'aux termes de l'article L 68 du même livre : La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure... ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration a adressé deux courriers à M et Mme X le 24 novembre 1989 ; que le premier, qui n'était qu'un imprimé n° 751 indiquant que les sommes détournées constituaient une source de profits imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux en vertu de l'article 92 du code général des impôts, que compte tenu de l'importance de ces sommes la contribuable était placée de plein droit sous le régime de la déclaration contrôlée et qu'elle trouverait ci joint les formulaires 2035 à retourner au service dans les meilleurs délais ne comportait pas les indications permettant de le regarder comme une mise en demeure ; que, toutefois, le second courrier, dont il a également été accusé réception par la contribuable, était une demande de documents n° 2116 indiquant que la déclaration n° 2035 devait être adressée dans le délai de trente jours à compter de la réception et appelant l'attention sur les sanctions prévues dans le cas où le contribuable ne régulariserait pas sa situation ; que, par suite, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que M et Mme X avaient été privés d'une garantie et ont retenu le motif tiré de l'irrégularité de la procédure d'évaluation d'office pour prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour administrative d'appel saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme X devant le tribunal administratif ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 50 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : Lorsqu'elle a procédé à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'un contribuable au regard de l'impôt sur le revenu, l'administration des impôts ne peut plus procéder à des redressements pour la même période et le même impôt, à moins que le contribuable ne lui ait fourni des éléments incomplets ou inexacts ; que si l'administration a adressé deux notifications de redressements à M. et Mme X les 28 février et 22 mars 1990, la seconde notification était identique à la première, seule la mention de la possibilité de demander une transaction ayant été supprimée ; que, par suite, l'administration n'a pas procédé à de nouveaux redressements portant sur la même période et le même impôt ; qu'ainsi, le moyen tiré de la violation de l'article L 50 précité du livre des procédures fiscales manque en fait ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes du I de l'article 86 de la loi n° 97-1269 du 30 décembre 1997, repris à l'article L.47 C du livre des procédures fiscales : Lorsque, au cours d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, sont découvertes des activités occultes ou mises en évidence des conditions d'exercice non déclarées de l'activité d'un contribuable, l'administration n'est pas tenue d'engager une vérification de comptabilité pour régulariser la situation fiscale du contribuable au regard de cette activité ; qu' aux termes du II du même article : Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les rappels notifiés selon les règles prévues au I, avant le 1er janvier 1998, sont réputés réguliers en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré du défaut d'engagement d'une vérification de comptabilité ; que ces dispositions font désormais obstacle à ce que M. et Mme X fassent utilement valoir qu'en l'espèce, la procédure aurait dû comporter l'engagement d'une vérification de comptabilité précédée d'un avis de vérification, en vue de l'imposition des bénéfices issus de l'activité de détournement de fonds ;

Considérant, en troisième lieu, que si les contribuables font valoir que des relevés de compte ne leur auraient pas été restitués avant l'envoi d'une demande de justifications, il résulte de l'instruction que les redressements relatifs aux bénéfices non commerciaux résultant de l'activité de détournement de fonds ont été notifiés dans le cadre de la procédure d'évaluation d'office pour défaut de déclaration ; que, par suite, le moyen tiré de ce qu'ils n'auraient pas été en mesure de répondre aux demandes de justifications, les relevés bancaires ne leur ayant pas été restitués, est inopérant ;

Sur le bien fondé de l'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article 12 du code général des impôts : L'impôt est dû chaque année à raison des bénéfices ou revenus que le contribuable réalise ou dont il dispose au cours de la même année ; qu'aux termes de l'article 92 du même code : 1. Sont considérés comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices...de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus ;

Considérant que M. et Mme X qui ont été assujettis sur le fondement des dispositions de l'article 92 précité du code général des impôts à des impositions supplémentaires à l'impôt sur le revenu à raison de sommes détournées ne peuvent utilement se prévaloir de ce que ces sommes ne leur seraient pas définitivement acquises, ne seraient pas la contrepartie d'un travail, ne seraient pas déductibles de son chiffre d'affaires par la victime de ses agissements pour soutenir qu'elles ne seraient pas imposables ;

Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 80 E du livre des procédures fiscales : La décision d'appliquer les majorations prévues à l'article 1729 du code général des impôts, lorsque la mauvaise foi est établie... est prise par un agent ayant au moins le grade d'inspecteur principal qui vise à cet effet le document comportant la motivation des pénalités

Considérant qu'il résulte de l'instruction que s'agissant des pénalités pour absence de bonne foi appliquées au titre de l'année 1986, le visa d'un inspecteur principal a été régulièrement apposé sur la lettre en date du 22 mars 1990 décidant d'appliquer ces pénalités ; que pour l'année 1987, la notification de redressements adressée le 22 mars 1990 à M. et Mme X a été visée par un inspecteur principal avec la mention sanctions fiscales exclusives de bonne foi ; que les dispositions précitées de l'article L 80 E du livre des procédures fiscales ne précisent pas que le nom de l'inspecteur principal qui appose son visa doit être mentionné ; que si les contribuables entendent invoquer la doctrine contenue dans l'instruction 13 L 7 88 , cette instruction qui impose une formalité supplémentaire non prévue par les dispositions de l'article L 80 E précité ne donne pas une interprétation de la loi fiscale dont les contribuables peuvent se prévaloir sur le fondement de l'article L 80 A du livre des procédures fiscales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a prononcé la décharge des rappels d'impôt sur le revenu résultant de l'évaluation d'office des bénéfices non commerciaux de Mme X au titre des années 1986 et 1987 ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n°9702162 du Tribunal administratif de Strasbourg est annulé en tant qu'il prononce la décharge des rappels d'impôt sur le revenu résultant de l'évaluation d'office des bénéfices non commerciaux de Mme X au titre des années 1986 et 1987.

Article 2 : Les rappels d'impôt sur le revenu résultant de l'évaluation d'office des bénéfices non commerciaux de Mme X au titre des années 1986 et 1987 et les pénalités y afférents sont remis intégralement à leur charge.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et à M. et Mme X.

2

02NC00399


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02NC00399
Date de la décision : 06/10/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: Mme Michèle RICHER
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE
Avocat(s) : SCP RICHARD MERTZ POITIERS QUERE AUBRY

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-10-06;02nc00399 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award