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04/08/2005 | FRANCE | N°01NC01290

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 04 août 2005, 01NC01290


Vu la requête, enregistrée le 27 décembre 2001, complétée par des mémoires enregistrés le 4 février 2002, le 22 octobre 2002 et le 21 septembre 2004, présentée pour M. André X, élisant domicile ..., par Me Moussa Marah, avocat ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 95-1530, 96-119 et 96-533, en date du 25 septembre 2001, par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre

des années 1990 et 1991, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et ...

Vu la requête, enregistrée le 27 décembre 2001, complétée par des mémoires enregistrés le 4 février 2002, le 22 octobre 2002 et le 21 septembre 2004, présentée pour M. André X, élisant domicile ..., par Me Moussa Marah, avocat ; M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 95-1530, 96-119 et 96-533, en date du 25 septembre 2001, par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et pénalités y afférentes auxquelles il a été assujetti au titre des années 1990 et 1991, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et pénalités y afférentes mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991 ;

2°) de prononcer le sursis à l'exécution du jugement attaqué ;

3°) de prononcer les décharges demandées ;

4°) de condamner l'Etat à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que la procédure d'imposition est entachée d'irrégularité pour absence de débat oral et contradictoire, une partie de la vérification s'étant déroulée dans le bureau du juge d'instruction, l'entretien oral avec le vérificateur n'ayant eu lieu que bien après l'achèvement de la vérification et une deuxième notification de redressements étant intervenue pour les mêmes années ;

- que la comptabilité était régulière et probante ;

- qu'aucune des deux méthodes de reconstitution du chiffre d'affaires qui ont été mises en oeuvre n'est fiable ;

- que les conditions d'octroi du sursis à l'exécution du jugement sont en l'espèce réunies ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés le 16 avril 2002, le 10 juin 2002 et le 16 janvier 2003, présentés pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, tendant au rejet de la requête, par les motifs qu'aucun des moyens présentés par M. X n'est fondé et que le jugement attaqué ne risque pas d'entraîner des conséquences difficilement réparables pour l'intéressé ;

Vu le mémoire du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, enregistré le 21 octobre 2004 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 juin 2005 :

- le rapport de M. Montsec, rapporteur ;

- les observations de Me Marah, avocat de M.X ;

- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission. Toutefois, la charge de la preuve incombe au contribuable lorsque la comptabilité comporte de graves irrégularités et que l'imposition a été établie conformément à l'avis de la commission (...) ;

Considérant que l'avis émis le 6 juin 1994 par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, qui a estimé que les deux méthodes de reconstitution du chiffre d'affaires mises en oeuvre n'étaient pas en l'espèce suffisamment fiables, n'ayant pas été suivi par l'administration, celle-ci supporte la charge de la preuve du bien-fondé de ses redressements, en application des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales précité ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

Considérant que, suite à la vérification de comptabilité dont a fait l'objet M. André X, qui exploite à titre individuel un pressing à l'enseigne Net Eclair , à Saint-Dizier, dans la Haute-Marne, l'administration a écarté sa comptabilité comme non probante et a procédé à la reconstitution de son chiffre d'affaires pour les années 1990 et 1991, qui seules restent en litige ; que, pour ce faire, le vérificateur a utilisé deux méthodes ;

Considérant que la première méthode, qui a consisté à reconstituer les tickets de caisses enregistreuses considérés comme manquants à partir de la moyenne des recettes déclarées d'après les bandes de caisses présentées, est en elle-même entachée d'incertitude dans la mesure où le contribuable fait valoir sans être contredit que les tickets dits zz considérés comme manquants correspondent à des totalisations partielles effectuées en cours de journée et où la relation entre l'absence de certains de ces tickets et des minorations de recettes n'est pas formellement établie par l'administration ;

Considérant que le vérificateur a mis en oeuvre une seconde méthode à partir de la consommation de perchloréthylène dans l'entreprise ; que cette méthode a consisté à affecter la quantité de ce solvant consommée chaque année d'un coefficient correspondant au rapport entre le poids du solvant utilisé et le poids de vêtements traités, puis à multiplier le résultat par le prix moyen d'un kilogramme de vêtements tel qu'il résulte des bandes de caisses produites, soit en l'espèce 37,76 F pour 1990 et 39,27 F pour 1991 ; que l'administration ne conteste pas que le coefficient susmentionné peut varier dans de fortes proportions en fonction du caractère plus ou moins récent des matériels utilisés, de 3 à 10 % pour des matériels modernes et performants, de 10 à 25 % pour des matériels anciens et même jusqu'à 40 % pour des matériels vétustes, ainsi que cela ressort des monographies professionnelles existantes auxquelles se réfère le vérificateur ; qu'en l'espèce, ce dernier a entendu tenir compte des caractéristiques propres des matériels utilisés par l'entreprise de M. X, dont il n'est pas contesté qu'ils avaient une ancienneté de 14 à 15 ans, en retenant des coefficients de respectivement 11 et 12 % pour les années 1990 et 1991, que l'administration a ensuite accepté de porter à 12 et 13 % ; que cependant, il résulte de l'instruction que le vérificateur a par erreur retenu des quantités de solvant évaluées en litres alors que les documents de référence d'où il avait tiré ses informations étaient libellés en kilogrammes ; que, pour contester ces coefficients, M. X produit une expertise réalisée à sa demande par le Centre Technique de la Teinturerie et du Nettoyage (C.T.T.N.) qui a procédé en 1993 à des simulations en grandeur réelle sur les matériels de l'entreprise, ayant mis en évidence des coefficients de plus de 27 %, que l'expert a finalement ramenés à 20 % pour les deux années afin de tenir compte du temps écoulé ; que, s'appropriant ce taux de 20 %, l'administration propose en dernier lieu de convertir les volumes de solvant exprimés en litres, tels que retenus par erreur par le vérificateur, en poids du même solvant en kilogrammes, par application d'un coefficient pondéral de 1,6, et soutient que les résultats sont alors sensiblement équivalents à ceux auxquels a abouti le vérificateur ; que, toutefois, cette conversion en kilogrammes proposée par l'administration n'a pas lieu d'être dans la mesure où il résulte de l'examen des factures d'achat de solvant utilisées par le vérificateur que celui-ci, retenant tels quels les chiffres figurant sur ces factures, les a seulement comptabilisés par erreur en litres au lieu de kilogrammes ; que, dans ces conditions, l'administration n'établit pas la pertinence des taux de 12 et 13 % qui ont été appliqués et sa méthode de reconstitution doit être regardée comme viciée dans son principe ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 25 septembre 2001, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté ses demandes tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a ainsi été assujetti au titre des deux années 1990 et 1991 ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à payer à M. X une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement du 25 septembre 2001 du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne est annulé.

Article 2 : Il est accordé décharge à M. X des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des deux années 1990 et 1991 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge pour la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1991.

Article 3 : L'Etat versera à M. X une somme de mille euros (1 000 euros) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. André X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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N°01NC01290


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01NC01290
Date de la décision : 04/08/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE
Avocat(s) : MARAH

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-08-04;01nc01290 ?
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