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09/06/2005 | FRANCE | N°01NC01224

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 09 juin 2005, 01NC01224


Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2001, complétée par les mémoires enregistrés le 8 juillet 2002, le 22 octobre 2002 et le 7 janvier 2003, présentée pour la SARL HELLER, dont le siège social est 9 rue du Capitaine Deullin à Epernay (51200), représentée par son dirigeant en exercice, par la SELARL Denoual-Schmidt, avocats ; la SARL HELLER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 97-139, en date du 25 septembre 2001, par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires

l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des ex...

Vu la requête, enregistrée le 10 décembre 2001, complétée par les mémoires enregistrés le 8 juillet 2002, le 22 octobre 2002 et le 7 janvier 2003, présentée pour la SARL HELLER, dont le siège social est 9 rue du Capitaine Deullin à Epernay (51200), représentée par son dirigeant en exercice, par la SELARL Denoual-Schmidt, avocats ; la SARL HELLER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 97-139, en date du 25 septembre 2001, par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1992, 1993 et 1994 et à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 15 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de prononcer la réduction demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui payer les dépenses qu'elle a exposées, sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que le jugement est irrégulier pour insuffisance de motivation ;

- que la procédure d'imposition est irrégulière du fait de l'absence de motivation des redressements opérés ;

- qu'elle remplissait les conditions pour bénéficier des dispositions de l'article 44 sexies du code général des impôts en faveur des entreprises nouvelles ;

- qu'elle justifie de ce que les frais de déplacement remboursés à son gérant étaient exposés dans l'intérêt de l'entreprise ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés le 4 juin 2002 et le 7 octobre 2002, présentés par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, tendant au rejet de la requête par les motifs qu'aucun des moyens présentés par la SARL HELLER n'est fondé ;

Vu la lettre en date du 29 avril 2005 par laquelle le président de la deuxième chambre de la Cour a informé les parties, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de fonder sa décision sur un moyen d'ordre public tiré de l'irrecevabilité des conclusions relatives à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à défaut de chiffrage en appel ;

Vu, enregistré le 6 mai 2005, le mémoire présenté comme ci-dessus pour la SARL HELLER, en réponse au moyen d'ordre public susmentionné, tendant à la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 900 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mai 2005 :

- le rapport de M. Montsec, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Rousselle, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant que les premiers juges, qui n'avaient pas à répondre à l'ensemble des arguments présentés devant le tribunal administratif par la SARL HELLER, ont répondu d'une manière suffisante, en droit et en faits, à tous les moyens invoqués ; que la SARL HELLER n'est ainsi pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier pour insuffisance de motivation ;

Sur la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales : Sous réserve des dispositions de l'article L. 56, lorsque l'administration des impôts constate une insuffisance, une inexactitude, une omission ou une dissimulation dans les éléments servant de base au calcul des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes quelconques dus en vertu du code général des impôts, les redressements correspondants sont effectués suivant la procédure de redressement contradictoire définie aux articles L. 57 à L. 61 A (...) ; qu'aux termes de l'article L. 57 du même livre : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ;

Considérant, en premier lieu, que la notification de redressements adressée le 17 août 1995 à la SARL HELLER énonçait la nature et les montants des différents redressements que l'administration envisageait d'apporter aux bénéfices déclarés par la SARL HELLER pour les exercices clos en 1992, 1993 et 1994, ainsi que les motifs de droit et de fait sur lesquels elle entendait se fonder pour justifier ces redressements ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette notification doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, que cette notification de redressements faisait clairement état de renseignements obtenus par le service au moyen de l'exercice de son droit de communication auprès du responsable de la perception des droits de place sur le marché de la commune d'Epernay ; que, dans ces conditions, la société requérante, qui n'a pas demandé à l'administration, comme cela lui était possible, de lui communiquer les pièces et courriers correspondants, n'est pas fondée à invoquer une violation de la procédure contradictoire de redressement au seul motif que ladite administration n'a produit qu'en cours d'instance les courriers échangés sur ce sujet avec la mairie d'Epernay ;

Sur le bien-fondé des redressements :

En ce qui concerne la remise en cause de l'exonération prévue à l'article 44 sexies du code général des impôts :

Considérant qu'aux termes de l'article 44 sexies du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable : I. Les entreprises créées à compter du 1er octobre 1988 soumises de plein droit ou sur option à un régime réel d'imposition de leurs résultats et qui exercent une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 34 sont exonérées d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices réalisés jusqu'au terme du vingt-troisième mois suivant celui de leur création et déclarés selon les modalités prévues à l'article 53 A. Les bénéfices ne sont soumis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés que pour le quart, la moitié et les trois-quarts de leur montant selon qu'ils sont réalisés respectivement au cours de la première, de la seconde ou de la troisième période de douze mois suivant cette période d'exonération. (...) III. Les entreprises créées dans le cadre d'une concentration, d'une restructuration, d'une extension d'activités préexistantes ou qui reprennent de telles activités ne peuvent pas bénéficier du régime défini au paragraphe I. ;

Considérant qu'en excluant du champ d'application de l'exonération instituée par ces dispositions les entreprises créées dans le cadre... d'une extension d'activités préexistantes, le législateur n'a entendu refuser le bénéfice de cet avantage fiscal qu'aux entreprises qui, eu égard à la similarité ou à la complémentarité de leur objet par rapport à celui d'entreprises antérieurement créées et aux liens de dépendance qui les unissent à ces dernières, sont privées de toute autonomie réelle et constituent de simples émanations de ces entreprises ;

Considérant que la SARL HELLER a été créée par M. Charles X et M. Abdelouaheb Y, le 4 décembre 1990, pour exploiter un fonds de commerce de prêt-à-porter masculin, dans un magasin sis à Epernay (Marne) ; qu'il résulte de l'instruction que cette activité concerne essentiellement la vente de produits de marques, avec possibilités de retouches et de reprise des achats, dans un magasin spécialement aménagé à cet effet, sous l'enseigne LEGEND ; qu'en revanche, les entreprises individuelles de M. X et M. Y se limitaient, à la date de la création de la SARL HELLER, à la vente foraine, sur divers marchés de la région et en particulier celui d'Epernay, de produits bon marché, proposés essentiellement à une clientèle féminine, sans possibilité de retouches ou de reprise des achats ; qu'ainsi, bien qu'intervenant dans le même secteur d'activité de la commercialisation de prêt-à-porter que les entreprises individuelles de M. X et M. Y, la SARL HELLER n'exerce pas une activité similaire ou complémentaire ; que, par ailleurs, il résulte de l'instruction que les entreprises individuelles de M. X et M. Y, dont le chiffre d'affaires était sensiblement moindre que celui de la SARL HELLER, ont maintenu leur activité pendant les années suivant la création de celle-ci et ont même vu croître leur chiffre d'affaires ; que, dans ces conditions, à supposer même que M. Y ait créé, ainsi que l'affirme sans le démontrer l'administration, un nouveau magasin en 1992 à proximité immédiate de celui de la SARL HELLER, cette circonstance, même ajoutée à celles que M. X et M. Y détenaient à eux deux la totalité du capital de la SARL HELLER et que le magasin exploité par celle-ci soit géré en fait par le frère du second, ne font pas ressortir qu'il existerait des liens de dépendance personnels, financiers ou commerciaux tels, entre d'une part la SARL HELLER et d'autre part les entreprises individuelles de M. X et M. Y, qu'ils priveraient la première de toute autonomie réelle et en feraient une simple émanation des deux autres ; que, dès lors, la SARL HELLER, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'elle ne remplissait pas les autres conditions pour bénéficier de l'exonération d'impôt prévue à l'article 44 sexies du code général des impôts, était, contrairement à ce qu'a considéré l'administration fiscale, éligible au régime dérogatoire prévu par cet article ;

En ce qui concerne la déductibilité des frais de déplacement du gérant :

Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main d'oeuvre (...) ;

Considérant que la société requérante n'établit pas, ainsi qu'il lui incombe s'agissant de la justification de charges déductibles, de ce que les frais de déplacement remboursés forfaitairement à son gérant correspondent à des déplacements réellement effectués pour le compte de l'entreprise ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL HELLER est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué en date du 25 septembre 2001, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande en décharge des impositions en litige résultant de la remise en cause de l'exonération, prévue à l'article 44 sexies du code général des impôts pour les entreprises nouvelles, pour des montants en base de 182 473 F au titre de l'exercice clos en 1992, de 71 509 F au titre de l'exercice clos en 1993 et de 124 534 F au titre de l'exercice clos en 1994 ;

Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à payer à la SARL HELLER la somme de 900 euros qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La SARL HELLER est déchargée des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés et des pénalités y afférentes, auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1992, 1993 et 1994, à raison de la remise en cause de l'exonération prévue à l'article 44 sexies du code général des impôts pour les entreprises nouvelles, pour des montants en base de 182 473 F au titre de l'exercice clos en 1992, de 71 509 F au titre de l'exercice clos en 1993 et de 124 534 F au titre de l'exercice clos en 1994.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne en date du 25 septembre 2001 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à la SARL HELLER une somme de 900 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL HELLER est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL HELLER et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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N° 01NC01224


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01NC01224
Date de la décision : 09/06/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE
Avocat(s) : DENOUAL

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-06-09;01nc01224 ?
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