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21/03/2005 | FRANCE | N°03NC01131

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4ème chambre - formation à 3, 21 mars 2005, 03NC01131


Vu la requête enregistrée au greffe le 12 novembre 2003, présentée pour M Pascal Y demeurant ..., par la SCP d'avocats ACG et Associés ; M. Y demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 1er juillet 2003 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 avril 2002 du préfet de la Marne autorisant la reprise de parcelles qu'il exploite sur le territoire des communes de Berzieux et de Courtemont ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme

de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administr...

Vu la requête enregistrée au greffe le 12 novembre 2003, présentée pour M Pascal Y demeurant ..., par la SCP d'avocats ACG et Associés ; M. Y demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement en date du 1er juillet 2003 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 11 avril 2002 du préfet de la Marne autorisant la reprise de parcelles qu'il exploite sur le territoire des communes de Berzieux et de Courtemont ;

2°) d'annuler ladite décision ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal a considéré qu'il avait été régulièrement mis en mesure de présenter ses observations devant la commission départementale d'orientation de l'agriculture ;

- l'autorisation donnée par le préfet méconnaît les dispositions de l'article L. 331-3 du code rural et du schéma départemental des structures du département de la Marne ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 23 janvier 2004, présenté pour M. X, par le cabinet d'avocats Devarenne associés ; M. X conclut :

- au rejet de la requête ;

- à la condamnation de M. Y à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- M. Y a été régulièrement informé de la possibilité de présenter des observations devant la commission départementale d'orientation de l'agriculture ;

- le préfet a correctement pris en compte la situation personnelle du demandeur ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 février 2005, présenté par le ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et de la ruralité ; le ministre conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- le préfet n'a méconnu ni les dispositions de l'article R. 331-4 du code rural ni celles de l'article L. 331-3 du même code n'ont été méconnues ;

- les priorités du schéma départemental des structures ne sont pas applicables en l'absence de demandes concurrentes ;

Vu, en date du 30 décembre 2004, l'ordonnance fixant au 10 février 2005 la clôture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2005 :

- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,

- les observations de Me Devarenne, avocat de M. X,

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;

Sur le moyen tiré du non-respect du principe du contradictoire :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 331-4 du code rural : «La demande de l'autorisation mentionnée à l'article L. 331-2 est établie selon le modèle défini par le ministre de l'agriculture et accompagnée des éléments justificatifs dont la liste est annexée à ce modèle. Si la demande porte sur des biens n'appartenant pas au demandeur, celui-ci doit justifier avoir informé par écrit de sa candidature le propriétaire. (…) Après avoir vérifié que le dossier comporte les pièces requises en application du premier alinéa, le service chargé de l'instruction l'enregistre et délivre au demandeur un récépissé. Il informe le demandeur, le propriétaire et le preneur en place qu'ils peuvent présenter des observations écrites et, à leur demande, être entendus par la commission départementale d'orientation de l'agriculture, devant laquelle ils peuvent se faire assister ou représenter par toute personne de leur choix (…)» ; que ces dispositions impliquent, dans l'hypothèse où, comme en l'espèce, le demandeur est le propriétaire du fonds, que l'autorité administrative informe, en temps utile, le preneur de l'existence de la procédure pour qu'il soit mis à même, à l'instar du demandeur, d'exercer la faculté de prendre connaissance du dossier et, s'il en exprime le souhait, le droit d'être entendu par la commission départementale des structures agricoles ; qu'en revanche, si après avoir été averti le preneur ne s'est pas manifesté, l'autorité administrative n'est pas tenue de l'aviser de la date de la séance de la commission ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, préalablement à la réunion de la commission départementale d'orientation de l'agriculture au cours de laquelle a été examinée la demande de cumul présentée par M X, l'administration a adressé à M. Y, en sa qualité d'exploitant des terres données à bail par le demandeur, un formulaire mentionnant la faculté dont il disposait de présenter des observations qui seraient communiquées à la commission ou de demander à être entendu par celle-ci ; que M. Y a formulé, par écrit, les raisons pour lesquelles il était opposé à la demande de M. X et a retourné le document à l'administration sans avoir exprimé le souhait d'être entendu par la commission ; qu'en l'absence d'une telle demande, l'autorité administrative qui a respecté le principe du contradictoire défini par l'article R. 331-4 du code rural, n'était pas tenue d'informer M. Y de la date de la réunion ;

Sur le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 331-3 du code rural et du schéma départemental des structures agricoles :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-3 du code rural : «L'autorité administrative, après avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture, se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : 1° Observer l'ordre des priorités établi par le schéma départemental entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations agricoles, en tenant compte de l'intérêt économique et social du maintien de l'autonomie de l'exploitation faisant l'objet de la demande ; 2° S'assurer, en cas d'agrandissement ou de réunion d'exploitations, que toutes les possibilités d'installation sur une exploitation viable ont été considérées ; 3° Prendre en compte les références de production ou droits à aide dont disposent déjà le ou les demandeurs ainsi que ceux attachés aux biens objets de la demande en appréciant les conséquences économiques de la reprise envisagée ; 4° Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ; 5° Prendre en compte la participation du demandeur ou, lorsque le demandeur est une personne morale, de ses associés à l'exploitation directe des biens objets de la demande dans les conditions prévues à l'article L. 411-59 ; 6° Tenir compte du nombre d'emplois non salariés et salariés permanents ou saisonniers sur les exploitations concernées ; 7° Prendre en compte la structure parcellaire des exploitations concernées, soit par rapport au siège de l'exploitation, soit pour éviter que des mutations en jouissance ne remettent en cause des aménagements réalisés à l'aide de fonds publics (…)» ; qu'il résulte de l'arrêté du 29 janvier 2001 du préfet de la Marne établissant le schéma directeur départemental des structures agricoles que les orientations ont pour objectifs, pour le secteur de la polyculture et de l'élevage de «1-1 promouvoir l'installation des jeunes agriculteurs (…) ; 1-2 conforter par des agrandissements l'exploitation familiale à responsabilité personnelle (… )» ;

Considérant, d'une part, qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de la reprise de 29 ha 79 a 60 ca de terres, au profit de M. X, autorisée par arrêté du 11 avril 2002 du préfet de la Marne, l'exploitation de M. Y conservera une superficie de plus de 179 ha, encore nettement supérieure aux 134 ha 19 ares que M. X exploite avec son épouse au sein du GAEC des Suzons, dont ils sont, avec deux autres associés exploitants, co-gérants ; que, l'argumentation, reprise en appel, selon laquelle M. Y a souscrit des emprunts qu'il doit honorer, n'est pas davantage assortie de précisions permettant d'établir que l'autonomie de son exploitation serait compromise par la reprise autorisée ; que, si l'arrêté attaqué mentionne que la reprise de biens de famille favorisera l'installation ultérieure des enfants des associés dont l'un est titulaire d'un brevet de technicien supérieur de productions végétales, cette circonstance est sans effet sur la légalité de la décision qui, conformément aux critères prévus par l'article L. 331-3-4° du code rural, s'est bornée à prendre en compte la situation familiale de M. X ; qu'il résulte de ce qui précède que le préfet qui a procédé à une appréciation de la situation respective des parties en présence, n'a méconnu ni les dispositions précitées de l'article L. 331-3, ni les orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles de la Marne ;

Considérant, d'autre part, que si M. Y soutient que l'arrêté attaqué méconnaîtrait l'ordre des priorités retenu par le schéma directeur départemental des structures agricoles au premier rang desquelles figure l'installation d'agriculteurs pouvant prétendre à l'octroi des aides à l'installation, ces dispositions ne sont applicables que lorsque le bien, dont la reprise a été sollicitée, fait l'objet de plusieurs demandes concurrentes d'autorisation d'exploiter, ce qui n'est pas le cas en l'espèce ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Y n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Marne du 11 avril 2002 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à M. Y la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. Y à payer à M. X la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. Y est rejetée.

Article 2 : M. Y versera à M. X la somme de1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Pascal Y, à M. X et au ministre de l'agriculture, de l'alimentation, de la pêche et des affaires rurales.

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N° 03NC01131


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 03NC01131
Date de la décision : 21/03/2005
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: Mme Marie GUICHAOUA
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : SOCIÉTÉ D'AVOCATS ACG CHALONS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-03-21;03nc01131 ?
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