Vu la requête enregistrée au greffe le 13 mai 2003, complétée par mémoire enregistré le 6 avril 2004, présentée pour Mme Claudette X, élisant domicile ..., par Me Souchal, avocat ; Mme X demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement en date du 4 mars 2003 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a condamné l'Etat à lui verser la somme de 15 092,45 euros qu'elle estime insuffisante en réparation des préjudices qu'elle a subis du fait de renseignements erronés donnés par l'administration concernant son adhésion à une convention de pré-retraite ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 152 658 euros en réparation desdits préjudices ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a limité à 25 % la responsabilité de l'Etat ; aucune négligence ne peut lui être reprochée ;
- le tribunal n'a pas apprécié correctement les éléments du préjudice ; la perte des droits à retraite constitue un préjudice direct et certain ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 juillet 2003, présenté par le ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité ; le ministre conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que Mme X ne peut se prévaloir d'aucun préjudice ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2005 :
- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,
- les observations de Me Souchal, de la SCP Bleuzet-Julbin-Thibaut-Souchal-Lyon, avocat de Mme X,
- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à la suite de son licenciement économique survenu le 4 février 2000, Mme X, alors âgée de 57 ans, a adhéré à la convention de pré-retraite prévue par l'article R. 322-7 du code du travail, sur la base d'informations indiquant que le calcul de l'allocation s'effectuerait en fonction des rémunérations perçues dans la limite de 4 fois le plafond mensuel de la sécurité sociale ; qu'il n'est pas contesté que ces informations qui n'avaient pas fait l'objet d'actualisation à l'issue de la publication du décret n° 98-1023 du 12 novembre 1998, étaient erronées ; que cette carence, imputable à l'administration, constitue une faute de nature à engager sa responsabilité ; que, toutefois, les mentions figurant sur le document d'adhésion invitaient le demandeur avant signature à se renseigner sur le montant exact de ses droits auprès de l'ASSEDIC ; qu'en ne suivant pas cette recommandation, alors que, de par son statut de cadre, il lui était aisé d'entreprendre la démarche, Mme X, s'est rendue responsable d'une réelle négligence ; qu'il en résulte que la responsabilité de l'Etat doit se trouver atténuée à hauteur de 50 % des conséquences dommageables résultant de la faute commise par ses services ;
Sur le préjudice :
Considérant, que le préjudice dont Mme X peut prétendre obtenir réparation correspond à la différence entre le montant des allocations chômage qu'elle aurait perçues si elle n'avait pas adhéré à la convention de pré-retraite, et le montant des versements réellement effectués en application de la convention ; qu'il résulte de l'instruction que ledit préjudice s'élève, sur la période non contestée d'affiliation à la convention, à la somme de 70 512 euros ; que, Mme X a, par ailleurs, pendant toute la période considérée, cotisé à sa caisse de retraite pour un montant inférieur à celui auquel elle aurait cotisé si elle avait perçu des allocations versées par l'UNEDIC ; qu'il en résulte un préjudice, constitué de la perte de points de retraite, qui est directement en lien avec l'erreur commise par l'administration ; que, compte-tenu des éléments de calcul fournis par la caisse de retraite de Mme X qui ne sont discutés ni dans leur principe ni dans leur montant, il sera fait une juste appréciation du préjudice subi à ce titre en le fixant à la somme de 40 000 euros ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, compte tenu du partage de responsabilité rappelé ci-dessus, il y a lieu de condamner l'Etat à verser à Mme X la somme de 55 256 euros en réparation de son préjudice ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme X, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à l'Etat la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à Mme X la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : La somme de 15 092,45 euros que l'Etat a été condamné à verser à Mme X par jugement du Tribunal administratif de Strasbourg du 4 mars 2003 est portée à 55 256 euros.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Mme X la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X est rejeté.
Article 5 : Les conclusions de l'Etat tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Claudette X et au ministre de l'emploi, du travail et de la cohésion sociale.
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N° 03NC00466