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21/03/2005 | FRANCE | N°03NC00111

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 4eme chambre - formation a 3, 21 mars 2005, 03NC00111


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 février 2003, complétée par mémoires enregistrés les 3 et 27 janvier 2005, présentée pour M. et Mme Claude X, élisant domicile ..., par la SCP d'avocats Rappaport-Hocquet ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement en date du 10 décembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a limité à 50 000 F (7 622,45 euros), assortis des intérêts à compter du 23 juillet 1997, le montant de l'indemnisation due par l'Etat du fait du décès de leur fils dans un accident d'aviation surve

nu le 22 octobre 1993 ;

2°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 150 ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 février 2003, complétée par mémoires enregistrés les 3 et 27 janvier 2005, présentée pour M. et Mme Claude X, élisant domicile ..., par la SCP d'avocats Rappaport-Hocquet ;

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement en date du 10 décembre 2002 par lequel le Tribunal administratif de Strasbourg a limité à 50 000 F (7 622,45 euros), assortis des intérêts à compter du 23 juillet 1997, le montant de l'indemnisation due par l'Etat du fait du décès de leur fils dans un accident d'aviation survenu le 22 octobre 1993 ;

2°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 150 000 euros avec intérêts à compter du 23 juillet 1997 ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- c'est à tort que le Tribunal a estimé que le pilote de l'avion avait commis des fautes de nature à atténuer la responsabilité de l'Etat ;

- le facteur causal suffisant de l'accident trouve son origine dans la défaillance de la tour de contrôle ; le tribunal de grande instance de Saverne, par jugement du 16 octobre 2003, a condamné le contrôleur titulaire à une peine d'emprisonnement de dix mois avec sursis ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés les 27 juin 2003 et 24 janvier 2005, présentés par le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer ; le ministre conclut au rejet de la requête ainsi que de la demande initiale formée devant le Tribunal administratif de Strasbourg ;

Il soutient que :

- la requête n'est pas recevable faute pour les requérants d'avoir acquitté le droit de timbre ; l'action dirigée contre l'Etat, ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, est mal dirigée ;

- la responsabilité de l'Etat ne saurait être engagée, l'accident étant imputable aux fautes commises par le pilote ;

- si les requérants se prévalent du jugement du juge pénal, les faits retenus par ce dernier ont été appréciés de manière identique par la juridiction administrative ;

Vu les mémoires en défense, enregistrés le 29 décembre 2004 et le 26 janvier 2005, présentés par le ministre de la défense ; le ministre conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- les requérants se bornent à reprendre les moyens exposés en 1ère instance sans apporter d'élément de nature à établir que le tribunal aurait apprécié de manière inexacte les circonstances de l'espèce ;

- la condamnation pénale du contrôleur aérien ne peut avoir pour effet, compte tenu du protocole du 14 décembre 1992 signé entre la direction générale de l'aviation civile et le ministère de la défense, de mettre à la charge de ce dernier l'indemnisation des conséquences dommageables de l'accident ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre fixant au 14 janvier 2005 la clôture de l'instruction ;

Vu, en date du 14 janvier 2005, l'ordonnance rouvrant l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 janvier 2005 :

- le rapport de Mme Guichaoua, premier conseiller,

- les observations de Me Schor de la SCP Rappaport-Hocquet, avocat de M. et Mme X,

- et les conclusions de M. Wallerich, commissaire du gouvernement ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer :

Considérant, d'une part, que M. et Mme X ont acquitté le droit de timbre auquel la recevabilité des requêtes se trouvait soumise en vertu de l'article L. 411-1 du code de justice administrative, alors applicable ;

Considérant, d'autre part, qu'en dirigeant leur action contre le ministre de l'équipement et des transports, M. et Mme X ont entendu rechercher la responsabilité de l'Etat ; qu'ainsi et quel qu'ait pu être le ministre compétent, l'action doit être regardée comme correctement dirigée ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le 22 octobre 1993, à 18 h 20, le pilote d'un avion de type CESSNA qui transportait deux passagers en provenance de Stuttgart, dont M. Yves X, a signalé, lors du survol du département du Bas-Rhin, au service de contrôle aérien de l'aéroport de Strasbourg-Entzheim, que son appareil connaissait des problèmes de givrage sévère ; que, la répétition de cette information, même formulée dans le calme, aurait dû conduire le contrôle aérien à s'enquérir, compte-tenu des caractéristiques de l'aéronef et de son positionnement au-dessus de zones boisées, de ses conditions réelles de navigation ; qu'en s'abstenant de procéder à ces investigations supplémentaires qui lui auraient permis de déclencher la procédure d'urgence au lieu d'attribuer à l'avion la position n° 3 dans le circuit d'approche, le service du contrôle aérien de l'aéroport a commis, ainsi que l'ont jugé les premiers juges, une faute lourde de nature à engager la responsabilité de l'Etat ;

Considérant que l'enquête judiciaire effectuée à la suite de l'accident a révélé que le pilote de l'avion a entrepris le vol alors qu'il était informé des conditions météorologiques défavorables et notamment des prévisions de givre, qu'il connaissait l'absence de dispositif anti-givrage de l'appareil et qu'il a passé outre aux prescriptions du manuel de vol de l'aéronef interdisant la navigation en conditions givrantes ; que lorsqu'il s'est trouvé en contact avec le contrôle aérien de Strasbourg-Entzheim, il n'a pas suffisamment appelé l'attention de ce service sur la situation de détresse de l'avion de façon à permettre un atterrissage d'urgence sur les pistes de l'aéroport ; que la gravité de ces fautes constitue une cause d'exonération partielle de la responsabilité de l'Etat à hauteur de 50 % des conséquences dommageables de l'accident ;

Sur le préjudice :

Considérant qu'il a été fait une juste appréciation du préjudice moral invoqué par M et Mme X en fixant à la somme de 22 867,35 euros (150 000 F) le montant de l'indemnisation due à ce titre ; que, compte tenu de la répartition opérée au titre des responsabilités, ce montant doit être fixé à 11 433,68 euros (75 000 F) ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme X sont fondés à demander la réformation du jugement attaqué, dans la limite de la condamnation fixée ci-dessus ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M et Mme X une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La somme de 7 622,45 euros (sept mille six cent vingt-deux euros quarante-cinq centimes) que l'Etat a été condamné à verser à M et Mme X par le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg du 10 décembre 2002 est portée à 11 433,68 euros (onze mille quatre cent trente-trois euros soixante-huit centimes). Cette somme portera intérêts à compter du 23 juillet 1997.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg du 10 décembre 2002 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme X la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M et Mme Claude X, au ministre de l'équipement, des transports, de l'aménagement du territoire, du tourisme et de la mer et au ministre de la défense.

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N° 03NC00111


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 4eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 03NC00111
Date de la décision : 21/03/2005
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme FELMY
Rapporteur ?: Mme Marie GUICHAOUA
Rapporteur public ?: M. WALLERICH
Avocat(s) : RAPPAPORT - HOCQUET - SCP

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2005-03-21;03nc00111 ?
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