Vu la requête enregistrée, au greffe de la Cour le 4 février 2000, complétée par le mémoire enregistré le 2 février 2001, présentée pour la SA AGORA dont le siège est fixé ..., par la SCP Wahl-Kois-Burkard, avocats ;
La SA AGORA demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement en date du 14 décembre 1999 en tant que le Tribunal administratif de Strasbourg n'a retenu à la charge de la commune d'Ensisheim qu'une part de responsabilité de 25 % ;
2°) de condamner la commune d'Ensisheim à lui verser une somme de 80 000 francs majorée des intérêts au taux légal à compter du 31 janvier 1995 ;
3°) de condamner la commune d'Ensisheim à lui verser une somme de 10 000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal a estimé qu'elle avait commis une faute en ne s'assurant pas du caractère régulier de l'engagement du maire dès lors qu'elle n'était pas un partenaire habituel des collectivités publiques ;
- la convention du 11 août ne réglementant que la mainlevée de la condition suspensive, c'est légitimement que la société avait considéré que le conseil municipal avait donné son accord à l'acte de vente ;
- la commune ayant clairement averti que la société qu'elle n'exécuterait pas les travaux , elle s'est trouvée dans l'obligation de les faire exécuter à ses frais ;
- le tribunal a commis une erreur d'appréciation en estimant que la commune n'engageait sa responsabilité qu'à hauteur de 25% ;
- il est constant qu'elle n'a pas obtenu la subvention des bâtiments de France ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 13 décembre 2000, présenté pour la commune d'Ensisheim par Me Y..., avocat ; la commune d'Ensisheim conclut :
- au rejet de la requête ;
- à la condamnation de la SA AGORA à lui verser une somme de 6 000 francs au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, et par la voie de l'appel incident à l'annulation du jugement du 14 décembre 1999, en tant qu'il la condamne à payer à la SA AGORA une somme de 20 000 francs ;
La commune d'Ensisheim soutient que :
- la convention du 11 août 1994 ayant été signée sans consultation préalable du conseil municipal, elle ne pouvait engager contractuellement la collectivité publique ;
- la convention en cause était au demeurant dépourvue d'effet exécutoire, n'ayant pas été transmise au contrôle de légalité ;
- en sa qualité de partenaire habituel des collectivités publiques, la SA AGORA ne pouvait ignorer l'irrégularité commise ;
- la société n'établit pas la réalité de son préjudice, n'ayant à subir qu'un retard de versement ;
- subsidiairement, la SA AGORA avait elle-même renoncé au bénéfice de la convention signée ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 septembre 2004 :
- le rapport de Mme Monchambert, président,
- les observations de Me X..., présent pour la SCP Wachsmann et associés, avocat de la SA AGORA,
- et les conclusions de M. Tréand, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que par un acte de vente du 2 décembre 1993, la SA AGORA a acquis sous condition suspensive un immeuble appartenant à la commune d'Ensisheim ; que l'une des conditions suspensives portait sur l'obtention par l'acheteur d'une subvention de l'Etat au titre des édifices inscrits à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques d'un montant de 10% du coût de rénovation des façades ; que cette subvention n'ayant pas été versée, la SA AGORA a signé le 11 août 1994, avec le maire de la commune, une seconde convention aux termes de laquelle la ville s'engageait pour compenser le financement non obtenu, à réaliser les travaux à hauteur de 80 000 francs, la société s'engageant à signer un acte complémentaire stipulant la levée des conditions suspensives ; que la commune ayant ultérieurement refusé de s'acquitter de son engagement, la SA AGORA a recherché sa responsabilité ; que par jugement en date du 14 décembre 1999, le Tribunal administratif de Strasbourg a condamné la commune d'Ensisheim à lui verser une somme de 20 000 francs en réparation des conséquences dommageables de la faute commise par le maire de la commune qui n'avait pas été autorisé à signer la convention précitée du 11 août 1994 ; que la SA AGORA relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses conclusions indemnitaires, cependant que la commune d'Ensisheim effectue appel incident dudit jugement en tant qu'il a retenu l'existence d'un lien de causalité entre le préjudice allégué et la faute commise ;
Considérant que si le maire de la commune d'Ensisheim a commis, en souscrivant un engagement au nom de celle-ci sans y être autorisé dans les conditions prévues par le code général des collectivités territoriales, une faute de nature à engager la responsabilité de la commune, la SA AGORA qui ne justifie pas de ses diligences à obtenir le versement de la subvention qu'elle prétend avoir perdu, n'établit ni qu'elle était en droit d'obtenir une aide de la collectivité, ni qu'elle disposait d'un droit acquis à la réalisation des travaux ; qu'ainsi, elle ne démontre pas l'existence d'un préjudice qui serait la conséquence directe de la faute commise par la commune ; que par suite, la commune d'Ensisheim est fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Strasbourg l'a condamnée à verser une somme de 20 000 francs à la SA AGORA et à demander l'annulation dudit jugement ; que les conclusions de l'appel principal de la SA AGORA ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions susvisées font obstacle à ce que la SA AGORA, partie perdante, puisse se voir allouer les sommes qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner la SA AGORA à verser à la commune d'Ensisheim, les sommes qu'elle réclame sur ce fondement ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 14 décembre 1999 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par la SA AGORA devant le Tribunal administratif de Strasbourg et le surplus de ses conclusions devant la Cour est rejeté.
Article 3 : Les conclusions de la commune d'Ensisheim tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SA AGORA et à la commune d'Ensisheim.
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N° 00NC00171