La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/08/2004 | FRANCE | N°01NC00813

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 3eme chambre - formation a 3, 05 août 2004, 01NC00813


Vu la requête, enregistrée le 23 juillet 2001 au greffe de la Cour, complétée par mémoire enregistré le 9 juin 2004, présentée pour M. Patrick X, Mlle Sophie Y et Mlle Stella X, demeurant tous trois ..., par Me Sarah El Atmani, avocat ;

M. X, Mlles Y et X demandent à la Cour :

1°) - de réformer le jugement n°0000213 du 24 avril 2001 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a condamné l'établissement français du sang à verser une somme de 100 000 francs au profit de M. X, 100 000 francs à M. X pour sa fille Stella et 30 000 francs pour Mlle Y, en réparation

des préjudices subis suite à une transfusion sanguine pratiquée en 1983 au c...

Vu la requête, enregistrée le 23 juillet 2001 au greffe de la Cour, complétée par mémoire enregistré le 9 juin 2004, présentée pour M. Patrick X, Mlle Sophie Y et Mlle Stella X, demeurant tous trois ..., par Me Sarah El Atmani, avocat ;

M. X, Mlles Y et X demandent à la Cour :

1°) - de réformer le jugement n°0000213 du 24 avril 2001 par lequel le Tribunal administratif de Nancy a condamné l'établissement français du sang à verser une somme de 100 000 francs au profit de M. X, 100 000 francs à M. X pour sa fille Stella et 30 000 francs pour Mlle Y, en réparation des préjudices subis suite à une transfusion sanguine pratiquée en 1983 au centre hospitalier universitaire de Nancy ;

2°) - de condamner l'établissement français du sang à payer à M. X la somme totale de 4 500 000 francs tous préjudices confondus, assortie des intérêts au taux légal à compter de la notification de la décision à venir ;

3°) - de condamner l'établissement français du sang à payer à Mlle Y la somme de 200 000 francs, ainsi que la somme de 300 000 francs à Mlle X, en réparation de leur préjudice moral ;

4°) - de voir intervenir la caisse primaire d'assurance maladie pour prendre toutes écritures qu'elle jugera utile ;

5°) - de condamner l'établissement français du sang à lui verser une somme de 10 000 francs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- l'origine transfusionnelle de l'hépatite dont est atteint M. X est certaine ;

- M. X souffre de façon importante des conséquences de sa maladie ; il subit une importante prise de poids, il a des troubles de mémoire ainsi qu'une grande fatigue permanente, il souffre de problèmes dermatologiques liés au traitement par l'interféron, il doit se plier à des examens médicaux fréquents, le tout justifiant un préjudice de 350 000 francs ;

- M. X dépend depuis la fin des années 1980 et le début des années 1990 financièrement et matériellement de sa compagne Mlle Y, ne pouvant reprendre un emploi, et à ce titre son préjudice est de 2 000 000 francs dès lors qu'il n'a pu travailler sur une période de trente ans jusqu'à sa retraite ;

- il subit d'un important préjudice moral lié à la précarité de sa vie, la dépression nerveuse dont il souffre et le fait qu'il ne supporte son obésité, le tout l'entraînant vers un comportement violent ainsi que sur un repli sur lui-même, l'ensemble de ces préjudices étant évalué à 2 000 000 francs ;

- il subit un préjudice d'agrément dès lors qu'il ne peut plus pratiquer ses sports préférés, soit un préjudice de 150 000 francs ;

- sa fille est très perturbée par la maladie de son père au point d'être suivie par un pédopsychiatre ;

- sa compagne Mlle Y subit un lourd préjudice moral dès lors qu'elle doit subvenir seule aux besoins du ménage et qu'elle vit dans la peur constante de la mort de son compagnon ;

Vu la mise en demeure adressée le 24 janvier 2002 à Me Cauvin, avocat, représentant la caisse primaire d'assurance maladie de Montpellier, en application de l'article R. 612-2 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 février 2002, présenté par Me Cauvin, avocat, pour la caisse primaire d'assurance maladie de Montpellier ;

La caisse demande la condamnation de l'établissement français du sang à lui verser les sommes de :

- 9 417,50 euros au titre des prestations avancées par elle ;

- 760 euros en application des dispositions de l'article 316 du code de la santé ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 février 2002, présenté par la société d'avocats Michel-Frey-Michel-Bauer pour l'établissement français du sang ;

L'établissement français du sang demande le rejet de la requête et la réformation du jugement attaqué en ce qu'il l'a condamné à verser la somme de 12 827,83 francs à la caisse primaire d'assurance maladie de Montpellier correspondant à des frais futurs non exposés par elle ;

L'établissement français du sang soutient que :

- M. X n'établit pas qu'il est en situation de rechute de son hépatite ;

- un traitement permettrait à M. X de bénéficier sinon d'une régression du moins d'une stabilisation de son état ;

- les troubles dans les conditions d'existence dont se plaint M. X ne sont pas uniquement dus au traitement qu'il a suivi ; en tout état de cause, sa demande indemnitaire à ce titre est nettement surévaluée ;

- M. X n'apporte pas la preuve d'un lien direct entre son atteinte par l'hépatite C et ses pertes de revenus professionnels ;

- les premiers juges ont fait une exacte appréciation des préjudices moraux de Mlles X et Y ;

- le jugement sera réformé en ce qu'il a condamné l'établissement français du sang à rembourser des frais futurs à la caisse primaire d'assurance maladie ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 20 décembre 2001, admettant M. X au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 juin 2004 :

- le rapport de M. DEWULF, Premier conseiller,

- et les conclusions de M. TREAND, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, Mlles Y et X ont recherché la responsabilité de l'établissement français du sang à raison de la contamination de M. X par le virus de l'hépatite lors de son hospitalisation au centre hospitalier universitaire de Nancy du 23 novembre au 22 décembre 1982 ; que par jugement en date du 24 avril 2001, le Tribunal administratif de Nancy a condamné l'établissement français du sang à verser une somme de 100 000 francs au profit de M. X, 100 000 francs à M. X pour sa fille Stella et 30 000 francs pour Mlle Y ; que ces derniers relèvent appel de ce jugement en tant que les montants alloués seraient insuffisants ;

Sur les préjudices :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, que l'hépatite chronique C est clairement établie chez M. X ; qu'elle est d'intensité modérée avec une fibrose minime sans qu'il y ait d'arguments pour une cirrhose ou pour un cancer ; que M. X a subi un traitement par interféron avec une bonne réponse biochimique et virologique ; que si M. X a souffert de son affection virale, la souffrance endurée a été physique en relation avec les effets secondaires du traitement par interféron ; que, cependant, il ne peut être garanti qu'il n'y aura aucune séquelle évolutive de l'hépatite C à long terme ; que, par suite, il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence, ainsi que du préjudice moral, en allouant à M. X à ce titre une somme de 25 000 euros ; que le jugement attaqué doit être réformé en ce sens ;

Considérant, en deuxième lieu, que M. X n'établit pas que son inactivité soit directement liée à son atteinte par l'hépatite C ;

Considérant, en troisième lieu, que les premiers juges ont fait une juste évaluation des préjudices moraux subis par Mlles X et Y en leur allouant respectivement 10 000 francs et 30 000 francs soient 1 524 euros et 4 572 euros ;

Sur l'appel incident de l'établissement français du sang :

Considérant que l'établissement français du sang est fondé à demander que la somme s'élevant à 9 417,51 euros, soit 61 774,80 francs versée à la caisse primaire d'assurance maladie de Montpellier soient ramenées à 7 461,91 euros dès lors que le surplus accordé par le tribunal concerne des débours simplement éventuels ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner l'établissement français du sang à payer à M. X une somme de 500 euros au titre des frais exposés par celui-ci en appel et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La somme de quinze mille deux cent quarante-quatre euros quatre-vingt-dix (15 244,90 € soit 100 000 francs) que l'établissement français du sang a été condamné à verser à M. X est portée à vingt cinq mille euros (25 000 €).

Article 2 : La somme de neuf mille quatre cent dix-sept euros cinquante-et-un (9 417,51 €) que l'établissement français du sang a été condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de Montpellier est ramenée à la somme de sept mille quatre cent soixante-et-un euros quatre-vingt-onze (7 461,91 €).

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. X, Mlles X et Y et de la caisse primaire d'assurance maladie est rejeté.

Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Nancy en date du 24 avril 2001 est réformé en ce qu'il de contraire au présent arrêt.

Article 5 : L'établissement français du sang versera à M. Patrick X une somme de cinq cents euros (500 €) au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Patrick X, à Mlles Sophie Y et Stella X, à l'établissement français du sang, au centre hospitalier universitaire de Nancy et à la caisse primaire d'assurance maladie de Montpellier.

Code : C

Plan de classement : 60 01 02 01

5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 01NC00813
Date de la décision : 05/08/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. KINTZ
Rapporteur ?: M. Robert DEWULF
Rapporteur public ?: M. TREAND
Avocat(s) : EL ATMANI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2004-08-05;01nc00813 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award