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10/06/2004 | FRANCE | N°02NC00020

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 2eme chambre - formation a 3, 10 juin 2004, 02NC00020


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 janvier 2002, sous le n° 02NC00020 complétée par le mémoire enregistré le 10 décembre 2002 présentés pour Mme Colette X, agissant au nom de la succession Alain Y, demeurant ..., par Me Z-Pierre Madignier, avocat au barreau de Paris ;

Mme X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 96-298 du 30 octobre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à obtenir la décharge du supplément d'impôt sur le revenu mis à la charge de la succession Alain Y au titre d

e l'exercice clos le 24 avril 1990 ;

2°/ de lui accorder la décharge de cette ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 janvier 2002, sous le n° 02NC00020 complétée par le mémoire enregistré le 10 décembre 2002 présentés pour Mme Colette X, agissant au nom de la succession Alain Y, demeurant ..., par Me Z-Pierre Madignier, avocat au barreau de Paris ;

Mme X demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 96-298 du 30 octobre 2001 par lequel le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à obtenir la décharge du supplément d'impôt sur le revenu mis à la charge de la succession Alain Y au titre de l'exercice clos le 24 avril 1990 ;

2°/ de lui accorder la décharge de cette imposition avec intérêts moratoires ;

3°/ de condamner l'Etat à lui rembourser les frais qu'elle a exposés ;

Code : C

Plan de classement : 19-01-03-01-02-03

19-04-02-04-03

Mme X soutient que :

- le stock de vins existant à la date du décès de M. Alain Y, le 24 avril 1990 doit être estimé selon le prix de revient, conformément à l'article 38-3 du code général des impôts, et aux articles 38 nonies et 38 sexdecies H de l'annexe III et non pas selon la valeur vénale comme l'affirme le tribunal administratif qui fait une confusion avec le prix de revient des stocks des héritiers ;

- les premiers juges méconnaissent l'instruction 5 E-4-77 du 14 juin 1977, opposable au service en vertu de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales, toujours en vigueur à la date de clôture du dernier exercice de l'exploitation, et qui confirme cette évaluation selon le prix de revient en l'assimilant à la valeur vénale des stocks ; il en va de même d'une correspondance du ministère des finances au conseil des contribuables, également opposable au service ;

- les héritiers peuvent opposer à l'administration, en vertu de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, sa prise de position initiale sur les résultats déclarés pour cet exercice, même si ce redressement a été ensuite réitéré avec une nouvelle motivation ;

- Si la Cour devait se fonder sur la valeur vénale du stock, celle-ci s'apprécie au décès de l'exploitant et devrait donc être révisée en baisse par rapport à celle mentionnée dans l'acte de partage ultérieur ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré au greffe le 20 juin 2002, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; il conclut au rejet de la requête de Mme X ;

Il soutient que :

- en cas de reprise par un nouvel exploitant, l'actif successoral doit être évalué à sa valeur vénale par application combinée des articles 38-3, 41 et 666 du code général des impôts ;

- l'instruction 5 E 4-77 ne comporte pas une interprétation différente de la loi fiscale ;

- l'article L 80 B du livre des procédures fiscales ne joue pas pour une prise de position qui a été rapportée par la suite ;

- en l'absence de litige, les conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires sont irrecevables ;

Vu, enregistré au greffe le 5 mai 2004, le nouveau mémoire par lequel Me Madignier informe la Cour du décès de Mme Colette X, survenu le 28 septembre 2002, et précise que l'instance d'appel est reprise par ses héritiers : MM. MichelZ, Olivier et Frédéric X ; ces derniers confirment les conclusions et moyens de l'appelante, et sollicitent, au titre des frais exposés, le versement, par l'Etat, d'une somme de 3 746 euros ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 mai 2004 :

- le rapport de M. BATHIE, Premier conseiller,

- et les conclusions de Mme ROUSSELLE, Commissaire du Gouvernement ;

Sur l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 201-1 du code général des impôts : Dans le cas de cession ou de cessation ... d'une exploitation agricole dont les résultats sont imposés d'après le régime du bénéfice réel, l'impôt sur le revenu dû à raison des bénéfices réalisés dans cette ... exploitation et qui n'ont pas encore été imposés est immédiatement établi ... ; qu'en vertu de l'article 38-3 du même code, pour le calcul du bénéfice imposable, les stocks sont, en principe, évalués au prix de revient, selon les méthodes précisées par l'article 38 nonies de l'annexe III audit code ; que ces dispositions sont notamment applicables en cas de décès d'un exploitant agricole ; que l'article 41 du code général des impôts permet cependant aux héritiers en ligne directe, qui reprennent l'exploitation, d'exercer une option consistant, soit à reprendre les stocks à leur prix de revient, soit à estimer à leur propre bilan d'ouverture ces mêmes biens, acquis à titre gratuit, selon leur valeur vénale, auquel cas la plus-value ainsi décelée au niveau du stock de sortie devient immédiatement imposable au nom de la succession de l'exploitant décédé ; que cette option, qui n'est soumise à aucune formalité, peut notamment être déduite des initiatives ou actes des héritiers ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction de M. Alain Y, viticulteur à ..., soumis au régime réel pour ses bénéfices agricoles, est décédé le 24 avril 1990 ; que le bénéfice de l'exercice clos à cette date, était immédiatement imposable, conformément à l'article 201-1 précité, au nom de ses deux enfants, héritiers en ligne directe ; qu'au bilan de clôture de l'exploitant décédé, le stock de vins était estimé, selon son prix de revient, au montant non contesté de 1 681 937 francs ; qu'il est constant que les héritiers ont conclu un acte de partage le 9 septembre 1990, ayant effet rétroactif au jour du décès, estimant la valeur vénale de ce même stock, au montant de 4 109 500 francs ; qu'ils doivent ainsi être regardés comme ayant exercé l'option prenant cette valeur vénale pour base, et prévue par l'article 41 sus-analysé ; que, par suite, la plus-value déterminée par différence entre les deux montants sus-indiqués était imposable, au nom de la succession, en application des dispositions combinées et sus-rappelées du code général des impôts ; que le moyen tiré de ce que le supplément d'impôt sur le revenu consécutif à ce redressement résulterait d'une application erronée de la loi fiscale, doit être écarté ;

Sur le bénéfice de l'interprétation de la loi fiscale donnée par l'administration :

En ce qui concerne la garantie de l'article L 80 A du livre des procédures fiscales :

Considérant qu'aux termes de cet article : Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondé la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration ;

Considérant que la requérante invoque, sur le fondement de ces dispositions, une instruction 5 E-4-77 du 14 juin 1977, publiée, et toujours en vigueur à la date de l'imposition en litige ; que toutefois ce texte se borne à rappeler la règle posée par l'article 38-3 précité, selon lequel les stocks à la clôture de l'exercice, ...doivent en principe être évalués à leur prix de revient... ; qu'il ne comporte aucune indication expresse sur les modalités et conséquences de l'option offerte par l'article 41 du code général des impôts, et qui conditionnent la solution du présent litige ; qu'en revanche, cette option fait l'objet de la lettre également invoquée, adressée le 29 novembre 1993 par le ministère des finances au conseil de la requérante ; que ce document confirme expressément l'analyse ci-dessus ; que, par suite les deux textes invoqués par la requérante ne donnent pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle précédemment indiquée ;

En ce qui concerne la garantie de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales :

Considérant qu'aux termes de cet article : La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ;

Considérant que l'administration, qui avait adressé une première notification de redressement concernant les héritiers de M. Y le 20 novembre 1992 comportant une évaluation d'office du bénéfice agricole, a, comme elle pouvait légalement y procéder dans le délai de reprise, dégrevé l'imposition correspondante entachée d'un vice de procédure, puis envoyé une nouvelle notification dans le cadre d'un débat contradictoire le 6 décembre 1993 ; que la motivation de la seconde notification de redressement s'est nécessairement substituée à la précédente ; qu'il suit de là que la requérante ne peut utilement opposer au service, en application de l'article L. 80 B précité, une prise de position émise dans cette première notification de redressement devenue caduque ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les héritiers de Mme Colette X qui ont repris l'instance engagée par cette dernière, ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement susvisé, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions subsidiaires de la requérante :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la valeur vénale du stock de vins sus-évoqué a été fixée par les héritiers eux-mêmes dans un acte de partage dont il n'est pas contesté qu'il avait un effet rétroactif au 24 avril 1990, jour du décès de M. Alain Y ; que cette dernière date correspond à la fois à celle du bilan de clôture de l'ancien exploitant, et à celle du bilan d'ouverture de chacun de ses successeurs, dont les écritures comptables devaient nécessairement être concordantes ; qu'il suit de là que la requérante ne peut solliciter une révision du montant sus-indiqué, ni pour une décote alléguée en raison de l'état initial d'indivision des biens repris, ni pour une éventuelle prise en compte de l'évolution du cours des vins dont d'ailleurs, les héritiers sont réputés avoir tenu compte dans leur propre estimation ; que les conclusions accessoires de la requérante tendant, pour les motifs sus-indiqués, à réviser en baisse la valeur du stock en litige doivent également être rejetées ;

Sur les conclusions de la requérante tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer aux héritiers de Mme Colette X la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

Sur les conclusions de la requérante tendant au versement d'intérêts moratoires :

Considérant que, comme le relève le ministre défendeur, en l'absence de tout litige né et actuel, les conclusions de l'appelante tendant au paiement d'intérêts moratoires sont irrecevables et doivent être rejetées pour ce motif ;

DECIDE :

ARTICLE 1er : La requête de Mme Colette X, agissant au nom de la succession Alain Y est rejetée.

ARTICLE 2 : Le présent arrêt sera notifié aux héritiers de Mme Colette X et au ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02NC00020
Date de la décision : 10/06/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. LUZI
Rapporteur ?: M. Henri BATHIE
Rapporteur public ?: Mme ROUSSELLE
Avocat(s) : MADIGNIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2004-06-10;02nc00020 ?
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