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18/12/2003 | FRANCE | N°98NC01928

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, 1ere chambre - formation a 3, 18 décembre 2003, 98NC01928


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 1er septembre 1998 sous le n°98NC01928, présenté par le MINISTRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION ;

Le ministre demande à la Cour :

1°) - d'annuler le jugement en date du 2 juillet 1998 par lequel le Tribunal administratif de Besançon annulé, à la demande de M. X et de l'Association les Amis de Baume, l'arrêté du préfet de la région Franche-Comté en date du 31 mai 1994 créant une zone de protection du patrimoine architectural et urbain à Baume-les-Messieurs, et l'a condamné à verser à chacun des requérants

la somme de 4000 F au titre des frais irrépétibles ;

2°) - de rejeter la deman...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 1er septembre 1998 sous le n°98NC01928, présenté par le MINISTRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION ;

Le ministre demande à la Cour :

1°) - d'annuler le jugement en date du 2 juillet 1998 par lequel le Tribunal administratif de Besançon annulé, à la demande de M. X et de l'Association les Amis de Baume, l'arrêté du préfet de la région Franche-Comté en date du 31 mai 1994 créant une zone de protection du patrimoine architectural et urbain à Baume-les-Messieurs, et l'a condamné à verser à chacun des requérants la somme de 4000 F au titre des frais irrépétibles ;

2°) - de rejeter la demande présentée devant le Tribunal administratif de Besançon par M. X et l'Association les Amis de Baume ;

Code : B

Plan de classement : 68-04-02-01

Il soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que dans une ZPPAUP ne peuvent pas être créés des secteurs dans lesquels toute construction est interdite à priori ; la ZPPAUP est une servitude d'utilité publique d'occupation des sols, plus complète en l'espèce à raison de l'absence de plan d'urbanisme ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 mai 2000 , présenté pour l'association les Amis de Baume, dont le siège social est Abbaye de Baume, Baume-les-Messieurs (39000), représentée par son président en exercice, ayant pour mandataire Me Remond, avocat à la SCP Converset Letondor, Goy Letondor ;

L'association conclut :

- au rejet de la requête ;

- à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 8000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable, celle-ci n'ayant pas été notifiée ;

- l'arrêté en date du 31 mai 1994 a été pris par une autorité incompétente ;

- le document graphique comporte des erreurs matérielles et des insuffisances ;

- les annexes sont insuffisantes ;

- l'arrêté qui édicte des interdictions générales de construction dans certaines zones de la commune méconnaît les articles 70 et 71 de la loi du 7 janvier 1983, ainsi que l'article L.111-1-2 du code de l'urbanisme ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 mai 2000, présenté pour M. Jean-Luc X, demeurant ...), par Me Remond, avocat à la SCP Converset Letondor, Goy Letondor ;

M. X conclut :

- au rejet de la requête ;

- à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 8000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Il soutient que :

- la requête est irrecevable, celle-ci n'ayant pas été notifiée ;

- l'arrêté en date du 31 mai 1994 a été pris par une autorité incompétente ;

- le document graphique comporte des erreurs matérielles ;

- l'arrêté qui édicte des interdictions générales de construction dans certaines zones de la commune méconnaît les articles 70 et 71 de la loi du 7 janvier 1983, ainsi que l'article L.111-1-2 du code de l'urbanisme ;

- l'inégalité de traitement réservé à sa propriété par rapport à celle de M. ... constitue une rupture d'égalité ;

Vu l'ordonnance portant clôture de l'instruction au 17 octobre 2003 et en vertu de laquelle, en application de l'article R.613-3 du code de justice administrative, les mémoires produits après cette date n'ont pas été examinés par la Cour ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n°83-8 du 7 janvier 1983 ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 novembre 2003 :

- le rapport de Mme STEINMETZ-SCHIES, Premier Conseiller,

- et les conclusions de M. ADRIEN, Commissaire du gouvernement ;

Sur la recevabilité du recours du Ministre de la Culture :

Considérant qu'aux termes de l'article R.600-1 du code de l'urbanisme, issu du décret n°2000-389 du 4 mai 2000 : En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un document d'urbanisme ou d'une décision relative à l'utilisation du sol régie par le présent code, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un document d'urbanisme ou une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol...La notification ...doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du déféré ou du recours... ; que l'article R.600-1 précité du code de l'urbanisme n'impose pas à l'auteur de la décision litigieuse de notifier l'appel dirigé contre un jugement : qu'ainsi, le ministre n'avait pas à notifier à M. X et à l'Association les Amis de Baume son recours dirigé contre le jugement du Tribunal administratif de Besançon en date du 2 juillet 1998, lequel a annulé l'arrêté préfectoral du 31 mai 1994 créant une zone de protection du patrimoine architectural et urbain (Z.P.P.A.U.P.) à Baume-les-Messieurs ;

Sur les conclusions relatives à l'arrêté du 31 mai 1994 créant une zone de protection du patrimoine architectural et urbain à Baume-les-Messieurs :

Considérant qu'aux termes de l'article 70 de la loi n°83-8 du 7 janvier 1983 : Sur proposition ou après accord du conseil municipal des communes intéressées, des zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager peuvent être instituées autour des monuments historiques et dans les quartiers, sites et espaces à protéger ou à mettre en valeur pour des motifs d'ordre esthétique, historique ou culturel . Des prescriptions particulières en matière d'architecture et de paysages sont instituées à l'intérieur de ces zones ou parties de zones pour les travaux mentionnés à l'article 71 ; que les travaux mentionnés à l'article 71 sont les travaux de construction, de démolition, de déboisement, de transformation et de modification de l'aspect des immeubles compris dans le périmètre de la zone de protection ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'interdiction de construire dans certains secteurs est au nombre des prescriptions pouvant légalement être instituées dans une ZPPAUP ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler l'arrêté du 31 mai 1994 créant une ZPPAUP sur le territoire de la commune de Baume-les-Messieurs, le Tribunal administratif de Besançon s'est fondé sur l'impossibilité de définir des secteurs dans lesquels toute construction est interdite ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés à l'encontre de l'arrêté attaqué par M. X et l'Association Les Amis de Baume devant le Tribunal administratif de Besançon ;

Sur le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte :

Considérant que l'arrêté du 31 mai 1994 créant une ZPPAUP sur la commune de Baume-les-Messieurs a été signé par M. Jean-Louis Y, préfet, et que les ampliations ont été signées par le directeur de service qui a reçu régulièrement délégation de signature par arrêté en date du 18 juillet 1992 ; que, par suite , le moyen tiré de ce que l'arrêté aurait été signé par une autorité incompétente manque en fait ;

Sur le moyen tiré de l'irrégularité du document graphique :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 du décret n°84-304 du 25 avril 1984 relatif aux ZPPAUP : Le document graphique, faisant partie du dossier de zone, fait apparaître les limites de la zone et le cas échéant, des parties de zone soumises à des règles spécifiques ; qu'il ressort des pièces du dossier, que ledit document retrace les limites des zones telles que définies par l'article précité ; que, dès lors, la circonstance que figurent sur les documents graphiques les caves vinicoles sous le signe paysage à conserver pour les murs extérieurs, et zone archéologique pour l'intérieur, que ne soient pas mentionnées trois chapelles, dès lors qu'elles sont en dehors de la zone bâtie et de ses abords immédiats, seuls concernés par la ZPPAUP, ainsi que des places de fumier, et enfin trois portes de garages situées dans les bâtiments abbatiaux, faisant l'objet d'une protection au titre des monuments historiques, est sans influence sur la régularité des documents graphiques ; que les corrections, relatives à la numérotation des parcelles, souhaitées par le Collège régional du patrimoine, qui en tout état de cause , a émis un avis favorable, et qui n'ont pas été retranscrites lors de la rédaction finale du document, ne portaient sur aucun point substantiel, tel que leur omission serait de nature à entacher la régularité du document graphique ;

Sur le moyen tiré de l'insuffisance des annexes :

Considérant que la circonstance que manque au dossier de ZPPAUP l'annexe contenant la liste des plantations autorisées n'est pas, à elle seule, de nature à entacher d'illégalité l'arrêté attaqué ;

Sur les moyens tirés de l'erreur d'appréciation et de l'erreur de droit commise dans la délimitation de zones non constructibles :

Considérant d'une part que les prescriptions d'une ZPPAU, notamment celles relatives à l'interdiction ou à la limitation au droit de construire et d'utiliser le sol, doivent être liées et proportionnées à la nature, aux caractéristiques, à l'intérêt des différents lieux à protéger et aux objectifs recherchés par cette protection ; que si les requérants soutiennent que les prescriptions du cahier des charges de la ZPPAUP interdisant les constructions dans certaines zones portent une atteinte disproportionnée au droit de propriété, il ressort des pièces du dossier qu'eu égard à l'intérêt que présente le patrimoine à protéger, l'interdiction de construire dans les zones situées en dehors des hameaux agglomérés de la commune et de certaines zones d'extension des constructions n'apparaît pas disproportionnée au but poursuivi ;

Considérant, d'autre part, que la servitude d'utilité publique ainsi instituée ne méconnaît pas la règle de constructibilité limitée édictée à l'article L.111-1-2 du code de l'urbanisme, laquelle prévoit la possibilité d'adaptation, de réfection ou d'extension des constructions existantes en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune, dès lors qu'elle procède d'une législation différente ;

Sur le moyen tiré de l'insuffisance de certaines prescriptions :

Considérant que si le cahier des charges ne contient aucune prescription pour certaines parcelles, les requérants n'établissent pas en quoi il serait entaché d'erreur d'appréciation ; qu'ils n'établissent pas non plus que l'absence de prescriptions relatives aux places à fumier constituerait une erreur d'appréciation de nature à entacher d'illégalité l'arrêté du préfet en date du 31 mai 1994, créant la ZPPAUP litigieuse ; qu'enfin, c'est à bon droit que trois chapelles et trois portes de garages, situées en dehors de la zone bâtie et de ses abords, ont été placées hors du champ d'application de la ZPPAUP ;

Sur le moyen tiré de la rupture d'égalité :

Considérant que les prescriptions contestées, qui limitent dans certains cas les possibilités d'extension des bâtiments existants ont pour but de tenir compte de l'orientation du faîtage des toitures ; que M. X ne démontre pas en quoi un tel parti serait de nature à entraîner une rupture d'égalité ;

Sur les conclusions tendant à l'allocation des sommes non comprises dans les dépens :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 du code de justice administrative, qui s'est substitué à l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que M. X et l'Association les Amis de Baume sont parties perdantes dans la présente instance ; que leur demande tendant à l'application des dispositions précitées doit être rejetée ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Besançon en date du 2 juillet 1998 est annulé.

Article 2 : Les conclusions présentées devant le Tribunal administratif de Besançon par M. X et l'Association Les Amis de Baume, tendant à l'annulation de l'arrêté préfectoral du 31 mai 1994 créant une zone de protection du patrimoine architectural et urbain et à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative, sont rejetées.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE LA CULTURE ET DE LA COMMUNICATION, à M. X et à l'Association Les Amis de Baume.

5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : 1ere chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 98NC01928
Date de la décision : 18/12/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MAZZEGA
Rapporteur ?: Mme STEINMETZ-SCHIES
Rapporteur public ?: M. ADRIEN
Avocat(s) : CONVERSET LETONDOR GOY-LETONDOR REMOND

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;2003-12-18;98nc01928 ?
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